Chirurgie cardiaque · Vol. 23 Septembre 2019

Les premiers cas de chirurgie à cœur ouvert au Mali : résultats et perspectives

Allaye Ombotimbé1*, Issa Boubacar Maïga1, Jacques Saye1, Moussa Bazongo1 Cheick Ahmed Sékou Touré1, Abdoul Aziz Maïga1, Seydou Togo1, Moussa Abdoulaye Ouattara1, Nouhoum Ouologuèm2, Massama Konaté2, Nouhoum Diani3, Boumzebra Drissi4, Sadio Yéna1   Service de chirurgie thoracique, hôpital du Mali, Bamako. Service de cardiologie, hôpital du Mali, Bamako. Service de réanimation, hôpital du Mali, Bamako. Service cardiovasculaire, CHU Mohammed VI, Marrakech, Maroc. * Correspondance : ombotimbe.allaye@yahoo.fr   DOI : 10.24399/JCTCV23-3-OMB Citation : Ombotimbé A, Maïga IB, Saye J, Bazongo M, Sékou Touré CA, Maïga AA, Togo S, Ouattara MA, Ouologuèm N, Konaté M, Diani N, Drissi B, Yéna S. Les premiers cas de chirurgie à cœur ouvert au Mali : résultats et perspectives.  Journal de chirurgie thoracique et cardio-vasculaire 2019;23(3). doi: 10.24399/JCTCV23-3-OMB RÉSUMÉ Objectif : décrire les résultats de la première mission de la chirurgie à cœur ouvert dans le pays et proposer les perspectives de son développement au Mali. Patients et méthodes : il s’agit d’une étude rétrospective et descriptive portant sur les premières interventions à cœur ouvert au cours d’une mission de partenariat avec le Maroc à l’hôpital du Mali, allant du 17 au 23 septembre 2016. Les paramètres étudiés ont été les données cliniques, thérapeutiques et évolutives. Résultats : six patients ont été colligés. L’âge moyen des patients était de 22,5 ans. Une dyspnée d’effort cotée au moins 2 sur l’échelle de NYHA a été retrouvée dans tous les cas. On notait deux cas de maladie mitrale, deux cas de rétrécissement mitral, un cas d’insuffisance mitrale et un cas de communication interauriculaire. Il a été effectué 4 remplacements valvulaires mitraux, une plastie mitrale et une fermeture de CIA. La durée moyenne l’hospitalisation a été de 13 jours. L’évolution a été simple dans tous les cas.  Conclusion : la chirurgie à cœur ouvert est faisable dans notre contexte actuel. Le partenariat sud-sud à travers des missions de formation et de compagnonnage est nécessaire.   ABSTRACT The first cases of open heart surgery in Mali: results and perspectives Objective: To describe the results of the first mission of open heart surgery in the country and to propose the prospects for its development in Mali. Patients and methods: this is a retrospective and descriptive study on the first open heart interventions during a partnership mission with Morocco to the Mali hospital from September 17 to 23, 2016. The studied parameters were the clinical, therapeutic and evolutionary data. Results: Six patients have been collected. The average age of patients was 22.5 years. A dyspnea on exertion of at least 2 on the NYHA scale was found in all cases. There were two cases of mitral disease, two cases of mitral stenosis, one case of mitral insufficiency, and one case of atrial septal defect (ASD). Four mitral valve replacements, one mitral valve repair and one ASD closure were performed. The average duration of hospitalization was 13 days. The evolution was simple in all cases. Conclusion: Open heart surgery is feasible in our current context . The South-South partnership through training and companionship missions is necessary.   1. Introduction Dans les pays en développement, la chirurgie cardiaque n’est pas suffisamment pratiquée ou bien elle est absente [1]. Les cardiopathies chirurgicales sont dépistées et beaucoup d’entre elles ne bénéficient pas de l’apport de la chirurgie [1]. Leur prise en charge pose dans bien des cas des problèmes diagnostiques et/ou thérapeutiques [2]. Chez l’enfant, on estime par exemple qu’il y a 800 000 nouveau-nés chaque année dans le monde avec une cardiopathie congénitale [3]. Aussi, il y a une prévalence élevée du rhumatisme articulaire aigu responsable de valvulopathies rhumatismales chez les enfants, soit 37,6% des pathologies cardiovasculaires [4]. Chez les adultes, les cardiopathies ischémiques sont de plus en plus fréquentes et elles sont liées principalement à la pandémie de l’hypertension artérielle, à l’intoxication alcoolotabagique chronique, au diabète, à la sédentarité et aux dyslipidémies [5]. La chirurgie cardiovasculaire est indispensable pour la prise en charge adéquate de ces nombreuses maladies en Afrique. Le problème est criant au Mali. Par exemple en 2006, la prévalence hospitalière des cardiopathies congénitales était de 1,28% au Mali [6]. Seulement 2% des cas sont traités par les organisations non gouvernementales à l’extérieur, sur plus de 2700 cas de cardiopathies chirurgicales qui attendent actuellement une intervention chirurgicale [3]. Le but de cette étude était de décrire les résultats des premiers cas de chirurgie à cœur ouvert au Mali et de proposer des perspectives pour son développement.   2. Patients et méthodes Il s’agit une étude rétrospective et descriptive qui a porté sur les premières interventions à cœur ouvert réalisées dans le service de chirurgie thoracique de l’hôpital du Mali durant la période du 17 au 23 septembre 2016. Sur une cohorte de 10 patients ayant une indication de chirurgie à cœur ouvert proposés par le service de cardiologie, le programme a exclu 4 patients pour pathologies complexes, un pour l’existence d’hépatite virale évolutive, 2 patients pour un syndrome coronarien associé et un cas d’insuffisance mitrale sévère avec une hypertension artérielle pulmonaire sévère chez une fille de 5 ans, en l’absence de matériels pédiatriques adaptés. Tous les patients ont bénéficié d’une évaluation clinique, d’une radiographie thoracique, d’une échographie cardiaque transthoracique, d’un bilan biologique et d’une consultation anesthésique. Six patients ont finalement été opérés. Les interventions ont été réalisées au cours d’une mission de partenariat sud-sud entre l’équipe de l’hôpital du Mali et celle du CHU Mohammed VI de Marrakech au Maroc. Sur le plan organisationnel, le plateau technique a été renforcé par l’octroi de matériels médicaux par l’équipe marocaine. La voie d’abord était une sternotomie médiane chez tous les patients. Les interventions chirurgicales ont été réalisées sous circulation extracorporelle (CEC) entre deux canules veineuses et une canule aortique. La protection myocardique a été assurée par une solution de cardioplégie au sang total enrichi en potassium toutes les 20 minutes à la racine de l’aorte avec une autre canule. En postopératoire, les patients étaient surveillés au service de réanimation. Les paramètres étudiés ont été les données cliniques, thérapeutiques et évolutives. Le suivi postopératoire des patients était basé sur l’examen clinique, la biologie et l’échographie cardiaque.   3. Résultats L’âge moyen des patients était de 22,5 ans (±10,5) avec un sexe-ratio de 1. Les caractéristiques sociodémographiques, cliniques et échographiques des patients ont été répertoriées dans le tableau 1. L’indice cardiothoracique moyen était de 0,62±0,98. Deux patients étaient en arythmie cardiaque par fibrillation auriculaire. Le diamètre télédiastolique moyen du ventricule gauche était de 57±2 mm, la fraction d’éjection moyenne préopératoire était de 53,83%±10,79. La pression artérielle pulmonaire systolique (PAPS) était supérieure ou égale à 30mmHg±5 chez 4 patients.   Tableau 1. Les caractéristiques sociodémographiques cliniques et échographiques.   Patients Âge/Sexe Fonction Signes cliniques Diagnostic échographique 1 29/F Secrétaire – Dyspnée NYHA 3 – Douleurs thoraciques – Palpitations – Hémoptysie – RM serré 2 23/F Élève – Dyspnée NYHA 3 – Hémoptysie – Toux – Palpitations – Maladie mitrale – Thrombus OG – ACFA – IT 3 24/M Commerçant – Dyspnée NYHA 2 – Asthénie – Toux – CIA ostium secundum 4 15/F Élève – Dyspnée NYHA 3 – Douleurs thoraciques – Palpitations – Maladie mitrale – IT 5 12/M Élève – Dyspnée NYHA 3 – Palpitations – Toux – Asthénie   – IM sévère – IT 6 33/M Cultivateur – Dyspnée NYHA 3 – Douleurs thoraciques – Toux – Asthénie – RM – Thrombus AG – ACFA – IT F : féminin ; M : masculin ; RM : rétrécissement mitral ; OG : oreillette gauche ; ACFA : arythmie complète par fibrillation auriculaire ; IT : insuffisance tricuspidienne ; CIA : communication interauriculaire ; IM : insuffisance mitrale ; AG : auricule gauche.   Les valvulopathies mitrales étaient d’origine rhumatismale dans 5 cas, et dans un cas il s’agissait de cardiopathie congénitale. Les gestes chirurgicaux ainsi que les différentes durées du monitoring ont été répertoriés dans le tableau 2. Une transfusion sanguine en peropératoire a été réalisée chez 5 patients qui avaient un taux d’hémoglobine peropératoire de 8g/dl en moyenne avec un nombre moyen de trois poches de culot globulaire. Un traitement anticoagulant à base d’acénocoumarol à vie a été instauré chez 4 patients. Ce traitement était ajusté en fonction des résultats du taux de l’International Normalised Ratio (INR) qui doit être compris entre 2 et 3 et surveillé par les cardiologues. En réanimation, ils étaient extubés après une durée moyenne de 7±2,09 heures et avec un séjour de 3,5±0,55 jours.   Tableau 2. Répartition des gestes chirurgicaux et de la durée du monitoring. Patient            Traitement Durée en minute CEC Clampage aortique Assistance 1 – RVM par valve mécanique 50 33 10 2 – RVM par valve mécanique – Plastie tricuspide De Vega – Thrombectomie 109 75 20 3 – Fermeture de la CIA par patch péricardique 38 25 10 4 – RVM par valve mécanique – Plastie tricuspide De Vega 100 75 15 5 – Plastie mitrale – Plastie tricuspide De Vega 132 100 20 6 – RVM par valve mécanique – Plastie tricuspide De Vega  – Thrombectomie – Aveuglement AG 105       75 20 Durée moyenne 95 69 16 CEC : circulation extracorporelle ; RVM : remplacement valvulaire mitral ; CIA : communication interauriculaire ; AG : auricule gauche.   Les suites opératoires immédiates étaient simples chez 5 patients. Nous avons noté un cas d’épanchement péricardique qui a bénéficié d’une ponction évacuatrice échoguidée. La durée moyenne d’hospitalisation était de 13,17±2,14 jours. L’évolution était favorable dans tous les cas à 3 mois. Après un recul de 30 mois, tous les patients étaient asymptomatiques avec un indice cardiothoracique à 0,52±0,09 et une fraction d’éjection à 59,33±6,28 %.   4. Discussion Notre étude confirme la faisabilité de la chirurgie à cœur ouvert dans notre contexte au vu des résultats obtenus suite à cette première mission. La réussite actuelle est due à une convergence de tous les acteurs. Pour cette première édition, il était important de rendre accessible financièrement cette chirurgie aux bénéficiaires, grâce à l’obtention d’une gratuité totale. Cela était nécessaire, puisque l’ensemble des patients opérés provenait de famille d’indigents. Le problème des maladies cardiovasculaires au Mali et en Afrique subsaharienne est considérable et le sera de plus en plus si rien n’est fait. En 2006, on a estimé à 15% le taux de la population malienne souffrant de maladies cardiaques, soit environ 1 600 000 patients [7]. Ce qui paraît sous-évalué actuellement. Les difficultés pour la grande majorité des patients à assurer une prise en charge chirurgicale tant localement qu’à l’étranger réduisent considérablement leur espérance de vie. Une majorité de la population est économiquement démunie et pauvre. En effet au Mali, en 2006, le coût moyen d’une évacuation sanitaire a été évalué par patient à 10 698 378,00 CFA (soit 16 300 euros) [8]. Pour les malades évacués sanitaires, ce coût est extrêmement élevé comparé aux ressources de l’État. Le développement de la chirurgie cardiaque à cœur ouvert doit être ressentie et vécue comme une activité à haute valeur qui est aussi une opportunité pour améliorer le contexte général des soins. En effet, sa pratique amène le perfectionnement de nombre de spécialités comme la cardiologie, l’anesthésie-réanimation, la biologie, l’imagerie ou le biomédical. C’est avec cette vision que des initiatives se sont développées respectivement à l’hôpital du Point G, à l’hôpital Mère-Enfant et à l’hôpital du Mali. À l’hôpital du Point G, c’est avec le partenariat hospitalier universitaire le reliant à celui d’Angers. Ce projet en cours depuis novembre 2007 se développe et a enregistré des missions chirurgicales pour l’instant sur la chirurgie à cœur fermé. Il est en train d’être concrétisé par la construction d’un centre de chirurgie cardiovasculaire doté d’une unité d’exploration cardiaque fonctionnelle. La construction par la Chaîne de l’Espoir d’un bloc de chirurgie cardiopédiatrique plus réanimation à l’hôpital Mère-Enfant et la réalisation, depuis son ouverture en septembre 2018, de plus de 100 interventions à cœur ouvert concernent les enfants. Cette réalisation privée permettra de mettre fin à des évacuations sanitaires d’enfants. Quant à celui de l’hôpital du Mali, il vient d’être lancé en 2016 sur la base d’un partenariat sud-sud avec le centre hospitalier universitaire Mohammed VI de Marrakech au Maroc. Cependant, pour être consolidé, ce projet a besoin d’être soutenu pour effectuer plusieurs missions. La pérennisation de la chirurgie à cœur ouvert au Mali passe par l’implication en termes d’équipement, de formations des spécialistes et la subvention du coût des interventions. Il faut développer les capacités humaines et logistiques du service pour répondre à la demande accrue de la population malienne en matière de soins de chirurgie à cœur ouvert, et pour ce faire une politique de santé stable au plus haut niveau est indispensable. Il faut également une réunion de concertation pluridisciplinaire afin d’aboutir à un travail d’équipes des diverses structures et professionnels de santé, afin de mettre en place un centre de chirurgie cardiaque adulte. La coopération avec les équipes à technologie médicale avancée en matière de chirurgie cardiaque permettra une autonomisation de l’équipe malienne à travers un accompagnement.   5. Conclusion Le développement de la chirurgie à cœur ouvert est un challenge au Mali. Notre travail a démontré qu’elle est actuellement faisable. À travers des missions ponctuelles, certaines pathologies cardiochirurgicales pourront être prises en charge. Dans un premier temps, elle a besoin d’un engagement humain et d’un compagnonnage administratif et technique à travers un partenariat.   Références Brousse V, Imbert P, Mbaye P. Évaluation au Sénégal du devenir des enfants transférés pour chirurgie cardiaque. Med Trop 2003;63:506-12. Van Der Linde D, Konings EEM, Slager MA. Birth prevalence of congenital heart disease worldwide. J Am Col Cardiol 2011;58:2241-47.https://doi.org/10.1016/j.jacc.2011.08.025PMid:22078432 Coulibaly B, Diarra M, Dicko M, et al. Coopération Angers-Bamako dans le cadre de la chirurgie cardiovasculaire. État des lieux et perspectives : la chirurgie cardiaque à cœur ouvert au Mali est-elle réalisable ? J Chir thorac et cardiovasc 2014;18(1):55-8. Ba Hamidou O., Noumou Sidibé, Bocary Diarra Mamadou, et al. Aspects diagnostiques et thérapeutiques des cardiopathies rhumatismales de l'enfant au Mali : étude de 85 cas. J Afr thorax et vaisseaux 2010;1,1:5-9. Diarra MB, Diarra A, Sanogo KM, et al. Cardiopathies ischémiques en cardiologie à Bamako (à propos de 162 cas). Mali médical 2007;22(4):36-9. Diakité A, Sidibé N, Diarra MB et al. Aspects épidémiologiques et cliniques des cardiopathies congénitales. Mali médical 2009;24(1)67-8. Ba HO, Maiga AK, Daffé S, Touré M, Diarra MB. Aspects épidémiologiques et cliniques des cardiopathies congénitales infanto-juvéniles. Afr Ann Thorac Cardiovasc Surg 2013;8(2)77-81. Diarra MB, Ba HO, Sanogo KM, Diarra A, Touré KM. Le coût des évacuations cardiovasculaires et les besoins en traitement chirurgical et interventionnel au Mali. Cardiologie tropicale 2006;32:128.   Conflit d’intérêt : aucun. / Conflict of interest statement: none declared.  Date de soumission : 14/04/2019. Acceptation : 19/07/2019.
septembre 20, 2019
Chirurgie cardiaque · Vol. 23 Septembre 2019

À propos de l’article sur “les premiers cas de chirurgie à cœur ouvert au Mali” – Editorial

L’intérêt clinique de la publication d’Allaye Ombotimbé et collaborateurs est somme toute limité, voire désuet. La principale problématique et le principal intérêt de cet article concernent la discussion, et notamment l’analyse des conséquences d’une telle mission. Car la caractéristique concernant la faisabilité sous cette forme de ce type de mission n’est absolument pas le problème. Ainsi, en amenant le matériel spécifique et les personnels compétents, ce type de mission peut être réalisé à n’importe quel point du globe avec un minimum de caractéristiques techniques requises (fluides, stérilisation et alimentation électrique fiable). Ces dernières se trouvant dans beaucoup d’endroits de la planète et notamment en Afrique. On ne démontre rien en faisant cela. La problématique ne se trouve pas dans la faisabilité, mais plutôt dans la perception de la durabilité de l’activité après ce type de mission. Il faut noter par ailleurs que la mission a été réalisée en 2016 et que, depuis, il ne s’est rien passé dans cet hôpital… En effet, le vrai problème est la pérennisation. Celle-ci devrait s’inscrire dans une perspective de long terme qui concerne les autorités sanitaires et la communauté médicale du pays. Elles doivent libérer les énergies et mettre en œuvre les moyens pour avoir un vrai programme d’installation et de pérennisation de cette activité. Cela permettrait de répondre à ce besoin de santé publique, notamment sur le plan économique. Les dépenses en évacuation sanitaires évitées permettraient de réorienter ces budgets vers une activité pratiquée sur place.   La bonne méthode serait : un modèle économique viable et pérenne de prise en charge, pensé en amont du projet ; la formation préalable du personnel spécialisé (chirurgiens, anesthésistes-réanimateurs, cardiologues et personnel paramédical spécifique) avec un vrai programme concerté et non des projets individuels ; puis l’installation, de manière concomitante à la formation des professionnels de santé, de la structure sanitaire dédiée à ces soins, et ceci de façon à répondre aux besoins de la population de façon pérenne.   Il est bon de rappeler que différentes missions ponctuelles sur les pathologies cardiaques chirurgicales de ce type ont été réalisées en Afrique noire francophone, qu’elles soient à visée diagnostique ou thérapeutique. Ces pays ont vu l’arrivée, pendant environ une à deux semaines, de missions sanitaires issues d’ONG, pour effectuer des actes techniques hautement spécialisés (République démocratique du Congo, Cameroun, Mauritanie, Burkina Faso…). Mais depuis, la continuité des soins et de ces programmes est restée lettre morte. On note aussi que quelques rares pays en Afrique noire francophone avaient des activités dans le domaine ; celles-ci ont périclité, faute de moyens économiques et de réelle prise en charge pérenne au niveau étatique. Il existe actuellement en Afrique noire francophone une classe moyenne émergente qui commence à avoir un pouvoir d’achat conséquent et une prévoyance sanitaire salariale. Il faut croire que dans l’avenir, cela créera un «marché», dans la mesure où il s’agit d’une discipline médicale dont l’aspect lucratif n’est pas négligeable. La conséquence logique sera l’avènement et le développement de cette activité sous la forme privée. Ce qui est déjà le cas de la cardiologie interventionnelle, autre activité lucrative, dans de nombreux pays africains. Ainsi, les structures privées prendront malheureusement le pas sur la médecine à vocation sociale qui relève des pouvoirs publics. Dr Patrice Binuani, chirurgien cardiaque, CHU Angers
septembre 20, 2019