Chirurgie thoracique · Vol. 20 Septembre 2016
Ilies Bouabdallah, Nathalie Nardone, Anderson Loundou, Henri de Lesquen, Geoffrey Brioude, Lucile Gust, Delphine Trousse, Xavier-Benoît D’Journo, Christophe Doddoli, Christophe Peillon, Jean-Marc Baste, Pascal-Alexandre Thomas
Service de chirurgie thoracique et maladies de l’œsophage, Hôpital Nord, Marseille, France.
Unité de chirurgie générale et thoracique, CHU de Rouen, France.
Correspondance : ilies.bouabdallah@gmail.com
Résumé
Objectif : étudier les causes et conséquences des réadmissions à 3 mois après chirurgie pour cancer pulmonaire primitif.
Méthodes : les dossiers médicaux des patients ayant subi une chirurgie de résection pulmonaire pour cancer pulmonaire primitif entre le 1er janvier 2013 et le 30 juin 2014 dans les services de chirurgie thoracique de Marseille et de Rouen ont été analysés à partir d’une base de données prospective (Epithor).
Résultats : 456 malades ont été opérés et 14 sont décédés lors de l’hospitalisation initiale. Sur les 442 patients vivants et sortis de l’hôpital, 35 patients ont été réadmis dans les 90 jours suivant leur sortie. Les principales causes de réadmission étaient les pneumopathies. Les facteurs de risque de réadmission ont été étudiés mais aucun facteur indépendant n’était retrouvé. En revanche, il existait une surmortalité à 1 an dans le groupe réadmission. Ont été identifiés comme facteur indépendant de mortalité à 1 an : le sexe masculin, le stade T3, le stade N2, la chimiothérapie néo-adjuvante, la durée de séjour hospitalier ainsi que la réadmission dans les 90 premiers jours.
Conclusion : les réadmissions sont fréquentes et principalement d’origines pulmonaires. Il existe une forte association entre réadmission et mortalité à 1 an.
Abstract
Causes and effects of hospital readmissions within 90 days after surgery for primary lung cancer: two-center study
Objective: Early readmissions are common and costly, and therefore represent a public health issue. We wanted to study the causes and effects of readmissions within 3 months after surgery for primary lung cancer.
Methods: Medical records of patients who underwent pulmonary resection for primary lung cancer between January 1, 2013 and June 30, 2014 in thoracic surgery departments of the University Hospital of Marseille and Rouen were reviewed from a prospective database (EPITHOR). We studied the causes and risk factors for readmission, as well as the impact of early readmissions on mortality at 1 year.
Results: 456 patients were operated and 14 died during the initial hospitalization. Of the 442 patients alive and discharged from hospital, 35 patients were readmitted within 90 days of discharge. The main cause of readmissions was pneumonia. Risk factors of readmission were studied but no independent factors were found. However, there was a higher 1-year mortality in the readmission group. The following were identified as independent risk factors for 1-year mortality: male gender, stage T3, stage N2, preoperative chemotherapy, hospital stay and readmission within 90 days.
Conclusion: Readmissions are common and mainly pulmonary in origin. There is a strong association between readmission and mortality at 1 year.
1. INTRODUCTION
Le cancer bronchopulmonaire primitif (CBP) représente la première cause de mortalité par cancer en France avec 30 000 décès chaque année, ainsi que dans le monde avec 1.5 millions de décès [1]. Son pronostic est sombre puisqu’il est associé à une survie relative à 5 ans inférieure à 15 %, et seulement moins de 7 % des patients sont en vie 10 ans après le diagnostic [1]. En France, on dénombre 45 000 nouveaux cas par an, ce qui place le CBP au 4e rang derrière le cancer du sein, colorectal et de la prostate. Le type de CBP le plus fréquent est dans 85 % des cas le cancer bronchique non à petites cellules (CBNPC), avec une prédominance de l’adénocarcinome (ADK).
Les facteurs de risque de CBP sont aujourd’hui bien identifiés et la prise en charge des patients est multidisciplinaire [1]. Cependant la chirurgie reste la pierre angulaire du traitement curatif, et historiquement la voie d’abord était la chirurgie ouverte. Ces dernières années ont vu le développement de techniques mini-invasives améliorant les suites opératoires immédiates et diminuant la morbidité [2].
Jusqu’à présent les stratégies visant à améliorer les résultats après chirurgie pour CBP mettaient l’accent sur l’évaluation et la préparation préopératoire, l’amélioration des techniques chirurgicales, la prise en charge multidisciplinaire périopératoire ainsi que la réhabilitation précoce postopératoire. Il est cependant devenu évident que la gestion des complications survenant à plus long terme était un facteur déterminant [3,4]. En effet, la littérature rapporte que la mortalité entre le 30e et le 90e jour semble équivalente à celle des 30 premiers jours, soulignant ainsi l’importance de la poursuite des soins et de la surveillance pendant les 3 mois suivant la chirurgie [5]. Le taux de réadmission à l’hôpital dans les 3 premiers mois semble donc un critère de mesure prépondérant dans la prise en charge du patient, permettant de juger de la capacité des services à gérer les complications tardives. Ce critère est proche de celui que les Anglo-Saxons définissent par le « failure to rescue », élément de mesure de la qualité de la prise en charge.
Ainsi, en dépit des efforts chirurgicaux réalisés pour minimiser l’impact de la chirurgie, le taux de réadmission reste aujourd’hui toujours élevé. En effet, la littérature rapporte un taux de 5 à 15 % de réadmission après chirurgie pour CBP [6]. Il s’agit donc d’un problème médico-économique important.
À partir de ces constatations, nous avons voulu, à travers une étude rétrospective observationnelle bicentrique, analyser les causes et conséquences des réadmissions à 3 mois après chirurgie pour cancer pulmonaire primitif dans deux établissements de notre système de santé.
2. PATIENTS ET MÉTHODES
2.1. Patients
Après avis favorable du comité d’éthique de la Société française de chirurgie thoracique et cardio-vasculaire (CERC), nous avons extraits rétrospectivement du registre Epithor les dossiers médicaux des patients pris en charge pour cancer pulmonaire primitif des services des centres hospitalo-universitaires (CHU) de Marseille et Rouen, entre le 1er janvier 2013 et le 30 juin 2014.
Le registre Epithor collecte de manière prospective les actes de chirurgie thoracique en France, intégrant les données démographiques, les informations oncologiques, les éléments peropératoires ainsi que les suites de la chirurgie. Ce registre représente près de 160 000 patients sur plus de 93 centres. Il est représentatif de près de 90 % des actes de chirurgie thoracique en France.
2.2. Critères d’inclusion et d’exclusion
Ont été inclus en intention de traiter tous les patients ayant bénéficié d’une chirurgie d’exérèse, anatomique ou non anatomique, à visée thérapeutique pour un cancer pulmonaire primitif.
Les critères d’exclusion étaient représentés par les exérèses pulmonaires à visée diagnostique ainsi que les patients opérés pour une tumeur d’origine secondaire ou pour une tumeur carcinoïde.
2.3. Critères de jugement
2.3.1. Critère de jugement principal
Le critère de jugement principal était la réadmission dans les 90 jours suivant l’hospitalisation initiale pour chirurgie d’exérèse.
On définissait une réadmission comme :
le fait d’être réhospitalisé, que ce soit dans le service d’origine ou un autre ;
se présenter dans un service d’accueil des urgences, quelle que soit la raison.
N’étaient pas considérés comme réadmission :
les rendez-vous programmés : pose de site implantable, consultation avec l’oncologue ou le radiothérapeute, consultation de suivi…
les hospitalisations en lien avec des traitements adjuvants (radiothérapie, chimiothérapie…).
2.3.2. Critères de jugement secondaires
Les critères de jugement secondaires étaient :
l’analyse des causes des réadmissions ;
la recherche des facteurs de risque de réadmissions ;
les conséquences des réadmissions sur la mortalité à 1 an.
Les patients décédés lors du séjour initial au décours de la chirurgie d’exérèse ont été exclus des calculs concernant les taux de réadmission et de mortalité à 1 an.
2.4. Variables
2.4.1. Facteurs liés aux patients
Pour chaque patient, ont été relevés le sexe, l’âge, le poids, la taille, la date de la chirurgie, ainsi que les comorbidités et variables préopératoires telles que:
le statut tabagique : actif, sevré, jamais fumé ;
la fonction respiratoire : le volume expiré maximal seconde (VEMS), le rapport Tiffeneau, la diffusion libre du monoxyde de carbone (DLCO) ;
les antécédents : diabète, hypertension, coronaropathie, valvulopathie, notion d’accident vasculaire cérébral (AVC) ou d’accident ischémique transitoire (AIT), l’artériopathie obstructive des membres inférieurs (AOMI).
Chez les patients marseillais, nous avons recherché le statut « en couple » ou « vivant seul », la possession ou non d’un téléphone portable ainsi que la « distance CHU-domicile ».
2.4.2. Facteurs liés à la maladie
Les facteurs étudiés étaient :
le stade TNM de la maladie : le stade T, N et M de la classification TNM de 2009 ;
l’histologie du cancer : principalement représentée par les ADK, les carcinomes épidermoïdes et les carcinomes bronchiolo-alvéolaires (BAC).
2.4.3. Facteurs liés au traitement
En préopératoire, nous recherchions :
l’existence d’un traitement néo-adjuvant : chimio- ou radiothérapie ;
le recours éventuel à une médiastinoscopie préopératoire.
Concernant la chirurgie, nous regardions :
la voie d’abord : par chirurgie ouverte, par vidéothoracoscopie (VATS), par chirurgie robotique vidéo-assistée (RATS) ;
la notion de conversion en cas de chirurgie mini-invasive ;
le type de résection pulmonaire : résection atypique (wedge), segmentectomie, lobectomie, bilobectomie, pneumonectomie ;
l’extension éventuelle de cette résection : intrapéricardique, bronchoplastique, angioplastique, à la paroi thoracique.
L’analyse des suites opératoires reposait sur :
la durée de séjour hospitalier ;
l’apparition de complications : une détresse respiratoire, un syndrome de détresse respiratoire aiguë (SDRA), une atélectasie nécessitant une fibro-aspiration bronchique, une pneumopathie, un empyème, une reprise chirurgicale pour saignement, une embolie pulmonaire (EP), un œdème aigu du poumon (OAP), une fibrillation auriculaire (FA), un syndrome coronarien aigu (SCA), un AVC, une insuffisance rénale aiguë, une durée de drainage thoracique prolongée (> 5jours) ;
la nécessité d’un traitement adjuvant : chimio ou radiothérapie ;
la survie à 24 mois.
2.5. Analyses statistiques
L'analyse statistique a été effectuée à l'aide de PASW Statistics Version 17.02 (IBM SPSS Inc., Chicago, Ilinois, États-unis). Les variables continues sont exprimées en moyenne ± l’écart type ou en médiane avec la plage (min, max), et les variables qualitatives sont rapportées en taux et pourcentages. Les groupes ont été comparés en utilisant le Chi2 ou le test exact de Fisher pour les variables qualitatives, et en utilisant le test t de Student ou test de Mann-Whitney pour les variables continues. Les courbes de survie ont été estimées par la méthode de Kaplan-Meier et comparées en utilisant le test de log-rank. Les analyses univariée et multivariée ont été effectuées en utilisant le modèle de Cox à risques proportionnels. Les hazard ratios sont signalés avec des intervalles de confiance à 95 % (IC à 95 %). Pour tous les tests, un p < 0,05 a été considérée comme statistiquement significatif.
3. RÉSULTATS
3.1. Patients et traitement
3.1.1. Caractéristiques préopératoires
Quatre cent cinquante-six patients ont été inclus sur une période de 18 mois (312 au CHU de Marseille et 144 au CHU de Rouen).
Le sexe ratio était de 1,9 et l’âge médian était de 63,6 ± 9,7 ans. Environ la moitié des patients avaient un indice de masse corporel (IMC) normal et un peu plus d’un tiers était en surpoids. Concernant le statut tabagique, 7,6 % des patients étaient non-fumeurs, 62,9 % était repentis et presque un tiers était constitué de fumeurs actifs. Pour les autres antécédents cardio-vasculaires, on retrouvait une grande proportion de patients hypertendus (39,1 %), avec une AOMI (19,9 %), coronariens (17,4 %) ou diabétiques (13,2 %). L’exploration fonctionnelle respiratoire préopératoire de notre population montrait uniquement une diffusion libre du monoxyde de carbone légèrement altérée (67,25 % ± 17,87). Une évaluation ganglionnaire préopératoire par médiastinoscopie a été pratiquée dans 12,2 % des cas. Un traitement néo-adjuvant était administré dans respectivement 14 % et 3,8 % pour la chimiothérapie et la radiothérapie préopératoire.
3.1.2. Type de chirurgie
La majorité des interventions a été faite par voie mini-invasive (VATS 47,8 % ; RATS 9,4 %) par rapport à la chirurgie ouverte (42,8 %). Dans 13,8 % des cas, la voie mini-invasive a nécessité une conversion.
Comme attendu, l’intervention la plus réalisée a été la lobectomie dans 76,5 % des cas. Les autres exérèses parenchymateuses se répartissaient de la sorte : 5,7 % de wedges; 5 % de segmentectomies, 4,6 % de bilobectomies et enfin 8,1 % de pneumonectomies. De plus, les chirurgies d’exérèse ont rarement nécessité une résection étendue.
La principale histologie retrouvée était l’adénocarcinome chez 2 tiers des patients (66,4 %) suivi par l’épidermoïde dans un quart des cas (26,8 %). Le cancer broncho-pulmonaire était majoritairement représenté par des stades précoces (55,9 % de stade I, 17,3 % de stade II, 19,8 % de stade III et 7 % de stade IV).
3.1.3. Suites opératoires
Les différents types de mortalité (hospitalière, à 30 jours, 90 jours et à 1 an) de la totalité de notre population sont rapportés dans le tableau 1. Parmi les 456 patients inclus, 14 patients sont décédés au cours de leur hospitalisation initiale, ce qui représente une mortalité hospitalière de 3 %. Les causes de mortalité hospitalière sont détaillées figure 1. Ainsi, les 442 patients vivants et sortis de l’hôpital constituaient le matériel de notre étude pour les réadmissions et la mortalité [figure 2].
Mortalité
n = 456 (%)
Mortalité hospitalière
14 (3)
Mortalité à 30 jours
9 (2)
Mortalité à 90 jours
24 (5,3)
Mortalité à 1 an
42 (9,2)
Tableau 1 : Mortalité après chirurgie d’exérèse pour cancer pulmonaire primitif.
[caption id="attachment_2548" align="aligncenter" width="300"] Figure 1. Causes de décès lors du séjour initial de chirurgie d’exérèse.[/caption]
[caption id="attachment_2549" align="aligncenter" width="275"] Figure 2. Flow chart.[/caption]
Le plus souvent, les suites opératoires ont été simples. Les principales complications observées étaient représentées par la pneumopathie (17,4 %), la durée de drainage prolongée (13,8 %), la détresse respiratoire (10,3 %), la fibrillation auriculaire (7,9 %) et l’atélectasie nécessitant une fibro-aspiration (7,5 %). La durée médiane du séjour hospitalier était de 8 jours (1-132), et apparaissait plus courte chez les patients opérés par voie mini-invasive [figures 3 et 4]. Enfin, 35,7 % des patients ont bénéficié d’une chimiothérapie adjuvante et 8,3 % d’une radiothérapie adjuvante.
[caption id="attachment_2550" align="aligncenter" width="300"] Figure 3. Durée de séjour de l’hospitalisation initiale.[/caption]
[caption id="attachment_2551" align="aligncenter" width="300"] Figure 4. Durée du séjour initial en fonction de la voie d’abord.[/caption]
3.2. Réadmissions
3.2.1. Taux de réadmission
Sur les 442 patients sortis de l’hôpital après la chirurgie d’exérèse, 35 (7,9 %) ont été réadmis dans les 90 premiers jours [figure 2]. Le taux de réadmission était significativement différent entre Marseille et Rouen (respectivement 5,6 % vs 12,8 % ; p = 0,009). La majorité (51 %) des réadmissions a eu lieu dans le premier mois après la sortie de l’hôpital [figure 5]. La plus grande proportion des réadmissions concernait les patients qui avaient été hospitalisés durant 5 à 7 jours lors du séjour initial [figures 6 et 7].
[caption id="attachment_2552" align="aligncenter" width="300"] Figure 5. Répartition des réadmissions.[/caption]
[caption id="attachment_2553" align="aligncenter" width="300"] Figure 6. Nombre de réadmission en fonction de la durée du séjour initial.[/caption]
[caption id="attachment_2554" align="aligncenter" width="300"] Figure 7. Nombre de réadmission en fonction de la durée du séjour initial et de la voie d’abord.[/caption]
3.2.2. Causes de réadmission
Les complications pulmonaires apparaissaient comme la première cause de réadmission (57 %). On retrouvait principalement :
les pneumopathies : 20 % ;
les fistules bronchiques : 11 % ;
l’empyème pulmonaire : 8 %.
Les autres causes sont décrites dans la figure 8 ainsi que dans le tableau 2.
On ne retrouvait pas de différence significative entre les causes de réadmission à Rouen et à Marseille [tableau 3].
[caption id="attachment_2555" align="aligncenter" width="300"] Figure 8. Causes de réadmission.[/caption]
Réadmissions dans les 30 premiers jours
n = 18 (51 %)
Réadmissions entre J30-J60
n = 11 (31 %)
Réadmissions entre J60-J90
n = 6 (18 %)
Toutes les réadmissions à 90 jours
n = 35 (100 %)
COMPLICATIONS PULMONAIRES
20 (57 %)
– Pneumopathie
3
1
3
7 (20 %)
– Fistule bronchique
3
1
4 (11 %)
– Empyème
2
1
3 (8 %)
– Pleurésie
2
2 (5,7 %)
– Pneumothorax
1
1 (2,8 %)
– Atélectasie
1
1 (2,8 %)
– Embolie pulmonaire
1
1
2 (5,7 %)
COMPLICATIONS CARDIAQUES
3 (8,5 %)
– Tamponnade
1
1 (2,8 %)
– SCA
1
1 (2,8 %)
– Péricardite
1
1 (2,8 %)
AUTRES
9 (26 %)
– Douleur pariétale
1
1 (2,8 %)
– Sd de Guillain-Barré
1
1 (2,8 %)
– Surdosage morphinique
1
1 (2,8 %)
– Incarcération de l’omoplate
1
1 (2,8 %)
– AVC
1
1 (2,8 %)
– Hématome
1
1 (2,8 %)
– Sd occlusif
2
2 (5,7 %)
– Anémie
1
1 (2,8 %)
SANS LIEN AVEC LA CHIRURGIE
3 (8,5 %)
– Sd cave supérieur
1
1 (2,8 %)
– Trouble phasique
1
1 (2,8 %)
– Altération état général
1
1 (2,8 %)
Tableau 2. Causes de réadmission en fonction du délai par rapport à la chirurgie.
Marseille (n = 17)
Rouen (n = 18)
Pneumopathie
4
3
Fistule bronchique
2
2
Empyème
2
1
Pleurésie
1
1
Pneumothorax
0
1
Atélectasie
0
1
Embolie pulmonaire
0
2
Tamponnade
0
1
SCA
0
1
Péricardite
1
0
Douleur pariétale
1
0
Sd de Guillain-Barré
1
0
Surdosage morphinique
1
0
Incarcération de l’omoplate
0
1
AVC
1
0
Hématome
0
1
Sd occlusif
1
1
Anémie
1
0
Sd cave supérieur
1
0
Trouble phasique
0
1
Altération état général
0
1
Tableau 3. Causes de réadmission dans les 90 jours en fonction du CHU.
3.2.3. Différences entre patients réadmis et non réadmis
Nous avons comparé les 35 patients réadmis dans les 90 premiers jours aux 407 patients non réadmis.
L’analyse univariée n’a pas montré de différence significative concernant les principales caractéristiques des 2 groupes. Seuls la DLCO et le stade T de la tumeur semblaient influencer de façon significative le taux de réadmission (p = 0,05). L’analyse univariée est détaillée dans les tableaux 4, 5 et 6. Nous n’avons pas réalisé d’analyse multivariée devant l’absence de résultat suffisamment significatif.
Chez les patients marseillais, nous avons essayé d’évaluer l’isolement social en recherchant le statut « en couple » ou « vivant seul », la possession ou non d’un téléphone portable ainsi que la « distance CHU-domicile ». Pour ce sous-groupe, aucun résultat significatif n’a été mis en évidence.
Groupe
« pas de réadmission » n = 407 (92,1 %)
Groupe « réadmissions à 90 jours »
n = 35 (7,9 %)
p
Âge
63,7 ± 9,5
62,5 ± 12,2
0,555
Homme
66 %
71,4 %
0,516
Statut tabagique
0,435
– actif
28,8 %
37,1 %
– sevré
63,2 %
60 %
– jamais fumé
8 %
2,9
IMC
0,409
– dénutrition
4 %
5,7 %
– normal
47 %
45,7 %
– surpoids
34,9 %
42,9 %
– obèse
14 %
5,7 %
Diabète
13,1 %
14,3 %
0,796
Coronaropathie
17,6 %
14,3 %
0,657
Hypertension
39 %
40 %
0,912
Valvulopathie
4,5 %
2,9 %
1
AVC ou AIT
4,5 %
8,6 %
0,235
AOMI
20,8 %
8,6 %
0,081
VEMS
84,23 % ± 18,75
81,09 % ± 20,19
0,360
VEMS/CV
79,95 % ±16,07
77,27 % ± 20,27
0,424
DLCO
67,8 % ± 17,78
60,96 % ± 18,12
0,05
T
0,05
– T1
45,9 %
22,9 %
– T2
30,6 %
48,6 %
– T3
18 %
20 %
– T4
5,6 %
8,6 %
N
0,317
– N0
72,2 %
60,6 %
– N1
14,5 %
24,2 %
– N2
13,1 %
15,2 %
M
0,280
– M0
93,5 %
88,2 %
– M1
6,5 %
11,8 %
Stade TNM
0,244
– I
56,8 %
44,1 %
– II
16,6 %
26,5 %
– III
20 %
17,6 %
– IV
6,6 %
11,8 %
Histologie
0,416
– ADK
65,2 %
80 %
– épidermoïde
27,6 %
17,1 %
– BAC
0,7 %
0
– autres
6,4 %
2,9 %
Chimio préop.
13,5 %
20 %
0,308
Radio préop.
3,4 %
8,6 %
0,139
Tableau 4. Caractéristiques préopératoires dans l’analyse univariée sur les réadmissions à 3 mois.
Groupe
« pas de réadmission »n = 407 (92,1 %)
Groupe « réadmissions
à 90 jours »n = 35 (7,9 %)
p
Voie d’abord
0,655
– ouvert
43,2 %
37,1 %
– VATS
47,5 %
51,4 %
– RATS
9,3 %
11,4 %
Chirurgie mini-invasive
56,8 %
62,9 %
0,484
Conversion chirurgicale
14,6 %
4,5 %
0,329
Médiastinoscopie préop.
12,2 %
11,4 %
1
Type de résection
0,481
– wedge
5,2 %
11,4 %
– lobectomie
77 %
71,4 %
– segmentectomie
5,2 %
2,9 %
– bilobectomie
4,8 %
2,9 %
– pneumonectomie
7,8 %
11,4 %
Résection étendue
0,301
– bronchoplastique
2,6 %
5,7 %
– paroi thoracique
3,6 %
5,7 %
– intrapéricardique
4,5 %
8,6 %
Tableau 5. Variables liées à la chirurgie dans l’analyse univariée sur les réadmissions à 3 mois.
Groupe « pas de réadmission »
n = 407 (92,1 %)
Groupe « réadmissions à 90 jours »
n = 35 (7,9 %)
p
Détresse respiratoire
10,5 %
8,6 %
1
SDRA
3,6 %
8,6 %
0,153
Atélectasie fibroaspirée
7,6 %
5,7 %
1
Pneumopathie
17,6 %
14,3 %
0,617
Embolie pulmonaire
0,5 %
0
1
OAP
1,7 %
0
1
FA
7,6 %
11,4 %
0,508
SCA
1,2 %
0
1
AVC
0,2 %
0
1
Insuffisance rénale aigue
3,3 %
5,7 %
0,353
Reprise chirurgicale pour saignement
1,4 %
2,9 %
0,432
Empyème
0,7 %
0
1
Durée de drainage > 5 jours
13,3 %
20 %
0,305
Autres complications
23 %
28,6 %
0,458
Durée de séjour (jours)
8 (1-132)
7 (3-57)
0,847
Chimio postop.
35,6 %
37,1 %
0,852
Radio postop.
8,3 %
8,8 %
0,754
Tableau 6. Variables postopératoires dans l’analyse univariée sur les réadmissions à 3 mois.
3.3. Association réadmission et mortalité
De façon flagrante, nous avons mis en évidence une relation entre la réadmission dans les 90 premiers jours et la mortalité à 1 an [tableau 7]. En effet, le taux de mortalité était plus de 5 fois supérieur chez les patients réadmis (25,7 % vs 4,7 % ; p < 0,001).
Groupe « réadmissions à 90 jours »
n = 35 (7,9 %)
Groupe « pas de réadmission »
n = 407 (92,1 %)
p
Mortalité à 30 jours
5 (14,2 %)
6 (1,5 %)
< 0.001
Mortalité à 60 jours
7 (20 %)
9 (2,2 %)
< 0,001
Mortalité à 90 jours
7 (20 %)
10 (2,4 %)
< 0,001
Mortalité à 1 an
9 (25,7 %)
19 (4,7 %)
< 0,001
Tableau 7. Mortalités des réadmissions à 3 mois.
Au vu de cette observation, nous avons cherché à savoir si la réadmission précoce pouvait constituer un facteur de risque de mortalité à 1 an. L’analyse univariée a ainsi confirmé que chez les patients décédés au cours de la première année, environ 5 fois plus avaient été réadmis dans les 90 premiers jours (32 % vs 6,3 % ; p = 0,003) [tableau 8].
Après correction des potentiels facteurs confondants grâce à un modèle de Cox, les réadmissions à 3 mois étaient encore significativement associées à un risque relatif de mortalité à 1 an de 4,51 (p = 0,028).
L’analyse de la survie en utilisant des courbes de Kaplan-Meier ne montrait pas de différence significative, mais malgré tout une nette tendance à une survie diminuée chez les patients réadmis précocement [figure 9]. La survie relative à 1 an, calculée par la technique de Kaplan-Meier, était de 75% chez les patients réadmis versus 90 % chez les non réadmis (p = 0,146). Ce pourcentage était proche de la survie réelle observée dans notre échantillon, calculée à partir des taux de mortalité bruts à 1 an [tableau 7].
Groupe « décédé à 1 an »
n = 28 (6,3 %)
Groupe « vivant à 1 an »
n = 414 (93,7 %)
p
Réadmission dans les 30 jours
6 (54,5 %)
12 (11,2 %)
0,002
Réadmission entre J30 et J60
2 (25 %)
9 (9,3 %)
0,196
Réadmission entre J60 et J90
1 (20 %)
5 (4,9 %)
0,255
Toutes les réadmissions à J90
9 (32 %)
26 (6,3 %)
0,003
Tableau 8. Réadmissions des patients décédés à 1 an.
[caption id="attachment_2556" align="aligncenter" width="300"] Figure 9. Courbes de Kaplan-Meier, survie chez les patients réadmis et non réadmis.[/caption]
3.4. Mortalité à 1 an
Le taux de mortalité à 1 an était de 9,2 % (soit 42 patients), avec respectivement 28 patients décédés à Marseille (soit 9 %) et 14 à Rouen (soit 9,7 %).
Les causes de mortalité à 1 an étaient liées à l’évolution du cancer (n = 11), c’est-à-dire sans rapport avec la chirurgie, ou bien liées aux complications de l’intervention (n = 27). Toutes causes confondues, la pneumopathie était le diagnostic le plus fréquent, à l’origine de plus d’un décès sur quatre (28 %). Pour 4 patients, ces données n’étaient pas disponibles. Les autres causes de mortalité à 1 an sont résumées dans le tableau 9.
Causes liées au cancer
n : 11 (26 %)
Causes liées à la chirurgie
n = 27 (64 %)
Évolution métastatique
6
Pneumopathie
11
Détresse respiratoire
2
Fistule
5
Pneumopathie
1
Embolie pulmonaire
3
Hémoptysie
1
Hémoptysie
2
Syndrome cave supérieur
1
SDRA
2
Détresse respiratoire
1
Choc hémorragique postopératoire
1
Syndrome de glissement postopératoire
1
Trouble du rythme
1
(Causes non retrouvées : 4)
Tableau 9. Causes de mortalité à 1 an après chirurgie pour cancer pulmonaire primitif.
Par ailleurs, en regardant de plus près les causes de décès chez les patients réadmis ou non, nous ne retrouvions pas de différence dans la proportion de décès liés ou non à l’évolution du cancer [tableau 10].
Groupe « réadmissions à 90 jours »
n = 9
Groupe « pas de réadmission »
n = 19
p
Décès liés à l’évolution du cancer
3 (33 %)
8 (42 %)
0,847
Décès liés à la chirurgie
4 (44 %)
9 (47 %)
0,652
(Causes non retrouvées : 4)
Tableau 10. Répartition des causes de mortalité à 1 an chez les patients sortis vivants de l’hospitalisation initiale.
L’analyse univariée des facteurs de risque de mortalité à 1 an s’intéressait aux mêmes variables que pour l’analyse sur les réadmissions. Les critères les plus significatifs ont été analysés en multivariée. En résumé, le sexe masculin (HR 9,93 ; CI 2,76-35,72), le stade T3 (HR 5,56 ; CI 1,83-16,82), le stade N2 (HR 6,51 ; CI 2,41-17,56), la chimiothérapie néo-adjuvante (HR 3,79 ; CI 1,36-10,58), la durée d’hospitalisation (HR 1,03 ; CI 1,03-1,05) ainsi que la réadmission dans les 90 premiers jours (HR 3,63 ; CI 1-13,2), étaient significativement des facteurs de risque indépendants de mortalité à 1 an. Les résultats de l’analyse multivariée sont présentés dans le tableau 11.
4. DISCUSSION
Le problème des réadmissions postopératoires est depuis quelques années un véritable enjeu de santé publique dépendant étroitement du système de santé concerné. Aux États-Unis, le coût annuel des réadmissions dans les 30 jours est estimé à 26 milliards de dollars [7]. De ce fait, il a été mis en place un programme de réduction du taux de réadmission avec des pénalités financières pour les établissements présentant un taux élevé. Il apparaît donc nécessaire de comprendre et d’identifier les causes de ces réadmissions, car il serait en effet désastreux pour les patients de ne s’intéresser qu’à leur aspect purement comptable plutôt qu’à leurs causes réelles et leurs éventuelles conséquences.
Dans notre étude, le taux de réadmission était de 7,9 %. Ce chiffre est cohérent avec la littérature qui retrouve un taux variable de 5 % à 15 % [4,6,8-11]. Varela et al. retrouvaient eux aussi un chiffre autour de 7 % [10], alors que Hu et al. observaient un taux de réadmission de 12,8 % [4]. Cependant le travail de Hu et al. ne portait que sur des patients de plus de 65 ans, et plus de 45 % des réadmissions de leur étude étaient sans rapport avec la chirurgie [4].
Dans notre série, la moitié des réadmissions apparaissait durant le premier mois. De façon comparable, Hu et al. rapportaient que les réadmissions les plus fréquentes avaient lieu dans les deux premières semaines [4]. Les études portant sur le sujet des réadmissions prennent donc souvent pour délai les 30 premiers jours. Cependant dans le cas de la chirurgie pour cancer, il est intéressant de considérer une fenêtre plus grande car une large proportion de réadmission a lieu après le 1er mois [12]. D’ailleurs dans notre série, 17 réadmissions (49 %) ont eu lieu après le 1er mois.
Concernant les causes des réadmissions, les pneumopathies représentaient dans notre étude 20 % des diagnostics. Les autres études retrouvent aussi les complications pulmonaires comme principale cause de réadmission [9,11,13]. Plusieurs critères ont déjà été rapportés comme facteurs de risque de réadmission. Dans une des premières études sur le sujet, Handy et al. retrouvaient la pneumonectomie comme facteur de risque indépendant de réadmission [11]. Par la suite, Varela et al. ont confirmé que la pneumonectomie et les complications postopératoires étaient indépendamment associées aux réadmissions [10]. En effet, les complications postopératoires sont fréquentes et peuvent être responsables d’une durée de séjour prolongée et de réadmissions précoces [10-12]. Malheureusement, dans notre étude nous avons échoué à mettre en exergue une relation forte entre complications et réadmission, probablement à cause d’un manque de puissance. McDevitt et al. notaient que les réadmissions étaient associées à un faible niveau socio-économique, un index de comorbidité élevé et un stade avancé (stade III ou plus) du cancer [9]. Pour leur part, Freeman et al. rapportaient une durée de séjour initiale très courte ou prolongée comme associée à un risque de réadmission [14]. Enfin, Puri and al. montraient que la prise en charge en dehors d’un centre universitaire était également un facteur de risque indépendant de réadmission [15].
Concernant la prévention, Dawes et al. estiment que seulement 21 % des réadmissions sont évitables [16]. Récemment, Hu et al. ont décrit un modèle hiérarchique pour les réadmissions précoces [4]. D’ailleurs, une cinquantaine d’essais cliniques sur des pathologies diverses ont étudié comment prévenir les réadmissions, mais le résultat global a été modeste.
De plus, il est rapporté dans la littérature qu’environ 25 % de réadmission sont sous-estimées [4]. Plusieurs travaux mettent en avant le fait que les études monocentriques peuvent sous-estimer le taux réel de réadmission, car une grande proportion de réadmission a lieu dans des services différents de celui de la chirurgie initiale [4,13]. Ceci est particulièrement vrai pour les grands centres universitaires ou de référence, où les patients parcourent de longues distances pour être pris en charge [12]. Pour beaucoup de malades habitant loin, la répétition des trajets peut devenir un problème [12].
Un aspect intéressant de notre travail consiste dans le fait que nous ayons pris en compte tous les types d’interventions pour chirurgie d’exérèse à la différence d’autres études qui par exemple excluent la technique mini-invasive [14] ou ne s’intéressent qu’aux lobectomies [13]. Dans notre étude, la technique chirurgicale n’était pas retrouvée comme facteur de risque de réadmission. Ce manque d’association a aussi été retrouvé récemment dans une large série [17].
Concernant les suites opératoires, de plus en plus d’équipes mettent en place le « fast-tracking » avec des parcours de soins standardisés qui incluent une durée de drainage thoracique raccourcie, la réhabilitation précoce, mais surtout une gestion par une équipe formée à ces protocoles. Ces méthodes ont montré une diminution de la durée de séjour mais les taux de réadmission restent inchangés [18].
Les conséquences exactes des réadmissions sont difficiles à mesurer car il n’y a pas de définition précise des réadmissions après chirurgie pour cancer. En effet, il est important de différencier les causes programmées de réadmission de celles qui sont imprévues. Un patient avec un cancer pulmonaire de stade III va bénéficier d’une chimiothérapie adjuvante et nécessitera la pose d’un accès veineux, ce qui peut être considéré comme une réadmission dans de larges bases de données. De la même façon, certains patients avec un cancer du poumon présentent aussi plusieurs comorbidités, responsables parfois de réadmissions précoces après la chirurgie sans réel lien avec celle-ci.
Toutefois, nous avons mis en évidence dans notre étude un véritable impact de la réadmission à 90 jours sur la mortalité à 1 an après chirurgie pour cancer pulmonaire primitif. L’association entre réadmission est mortalité a été introduite dès le début des années 2000 par Handy et al avec un taux de mortalité à 5 ans de 11,6 % dans le groupe réadmis versus 4 % chez les non réadmis [11]. Ces taux de mortalité apparaissent plus faibles que dans notre étude mais leur travail ne concernait pas uniquement la chirurgie pour cancer mais également des pathologies bénignes. Depuis Handy et al., cette association a été rapportée dans plusieurs travaux [4,12]. Les réadmissions après chirurgie pour cancer pulmonaire sont généralement associées à une augmentation du risque de mortalité à court terme [4,7,11]. En effet, Hu et al. ont montré que les réadmissions précoces étaient associées à une augmentation de 6 fois de la mortalité à 90 jours [4]. Dernièrement, Puri et al. ont montré qu’elles étaient également associées à une diminution de la survie [15]. Stitzenberg et al. retrouvaient eux aussi une différence significative du taux de mortalité à 1 an (33 % vs 15 % ; p < 0,001), ainsi qu’une différence significative de survie à 5 ans (p < 0,001) [12]. Dans notre série, nous n’avons pas retrouvé ce résultat significatif pour la survie, mais une nette tendance qui laisse penser qu’avec plus de patients inclus c’eût été différent.
Une caractéristique de la prise en charge chirurgicale du cancer du poumon consiste dans la tendance actuelle à la centralisation régionale des établissements pratiquant ces actes chirurgicaux de « haute qualité ». Ces hôpitaux de référence à gros volume d’activité sont considérés plus adaptés pour gérer les complications de ce genre de chirurgie, et ainsi diminuer les taux de mortalité et de réadmission. Il s’agit de la notion de « failure to rescue » qui explique que la mortalité hospitalière dépend plus de la gestion des complications postopératoires qu’uniquement de la survenue de ces dernières [19]. Cependant, une grande partie des complications a lieu dans les 90 premiers jours alors que le patient n’est généralement plus hospitalisé. La réadmission étant associée à une augmentation de la mortalité, des indicateurs de qualité pour les réadmissions ont dû être définis. Ainsi récemment, une étude américaine parue dans Lancet et incluant 9 440 503 patients a montré que les patients réadmis après une intervention chirurgicale majeure avaient une meilleure survie s’ils retournaient dans le service où avait été pratiquée la chirurgie [20].
La principale limite de notre étude est son manque de puissance. En effet, nous observions plusieurs tendances qui n’arrivaient pas au seuil de la signification statistique. Il y a donc fort à attendre des résultats de l’étude européenne en cours sur le même thème qui corrigera cette limite grâce à une large série de patients. Une critique pourrait également être soulevée par un possible effet centre dans notre étude. En effet, ce dernier n’a pas été évalué dans les analyses statistiques. Cependant les populations de Rouen et Marseille étaient comparables, seul le taux de réadmission étant différent mais leurs causes étaient toutefois similaires. Un autre biais évident réside dans le caractère rétrospectif de notre analyse. Enfin, il aurait été intéressant d’avoir plus d’informations sur les données socio-économiques des patients et rechercher ainsi d’éventuels nouveaux facteurs de risque de réadmission.
En contrepartie, un intérêt particulier de notre travail est l’importance du recueil des données cliniques, des variables préopératoires (la fonction respiratoire précise, le détail des comorbidités…), de la technique chirurgicale ainsi que des complications survenues pendant l’hospitalisation initiale. En effet, ces données sont souvent des éléments manquants des larges séries sur le sujet.
5. CONCLUSION
Les réadmissions après chirurgie d’exérèse pour cancer pulmonaire primitif sont fréquentes et principalement d’origine pulmonaire. Il est important d’évaluer le taux jusqu’à 90 jours. En effet, elles surviennent autant dans les 30 premiers jours qu’entre le 30e et je 90e jour, sans que l’on puisse déterminer les facteurs de risque de ces réadmissions. En revanche, elles sont considérées comme des facteurs de risque indépendants de mortalité à 1 an. Leur impact sur la survie semble également important. La compréhension, la prévention et la gestion de ces réadmissions sont des notions importantes en chirurgie oncologique thoracique. Elles témoignent de la qualité globale de la prise en charge et reste un marqueur important de la réactivité et du niveau de spécialisation des centres chirurgicaux.
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Conflit d’intérêt : aucun. / Conflict of interest statement: none declared.
Date de soumission : 17/03/2016. Acceptation : 19/05/2016.
septembre 15, 2016