Formation · Vol. 21 Mars 2017

Fellowship à l’étranger en chirurgie cardiothoracique : l’exemple du Royaume-Uni

Amandine Martin1*, Marie Aymami1, Simon Rouzé1, Carine Pavy2, Caroline Chenu3, Bernard Kreitmann4, Jean-Philippe Verhoye1, Erwan Flécher1   Service de chirurgie thoracique et cardiovasculaire, CHU Pontchaillou, Rennes, France. Service de chirurgie thoracique et cardiovasculaire, CHU Laennec Nord, Nantes, France. Service de chirurgie cardiaque pédiatrique, AP-HM La Timone enfants, Marseille, France. Service de chirurgie cardiovasculaire, CHU Haut-Lévêque, Pessac, France. * Correspondance : amandine.martin@chu-rennes.fr DOI : 10.24399/JCTCV21-1-MAR Citation : Martin A., Aymami M., Rouzé S., Pavy C., Chenu C., Kreitmann B., Verhoye J.P., Flécher E. Fellowship à l’étranger en chirurgie cardiothoracique : l’exemple du Royaume-Uni. Journal de chirurgie thoracique et cardio-vasculaire 2017;21(1). doi: 10.24399/JCTCV21-1-MAR Résumé Le Royaume-Uni est depuis longtemps une destination intéressante pour un fellowship ou un semestre d’internat à l’étranger par sa proximité, la langue anglaise et son appartenance à l’Union européenne [à l’heure de la rédaction de cet article, NDLR]. Dans cette optique, un programme d’échange est en place depuis 2012 entre les services de chirurgie cardiothoracique de Rennes et de Southampton. Cependant, si les démarches administratives ont toujours été longues dans les pays anglo-saxons, il est devenu plus difficile pour les Européens de pouvoir exercer une activité clinique en Grande-Bretagne. Depuis juin 2014, le Conseil de l’Ordre britannique (General Medical Council) ne donne aux médecins européens l’autorisation de pratiquer la médecine qu’après avoir prouvé leur niveau d’anglais par l’intermédiaire d’un test officiel, l’IELTS (International English Language Testing System). Le niveau requis étant élevé, la majorité des candidats doivent passer ce test plusieurs fois avant de le réussir. Les opportunités de fellowship restent présentes au Royaume-Uni avec des démarches restant moins importantes et moins coûteuses que pour les autres pays anglo-saxons. Une fois l’administratif bouclé, l’exercice médical dans le système hospitalier britannique permet d’appréhender globalement un système de santé différent. Abstract Among European countries, the United Kingdom has always been an appealing country for a medical fellowship or internship training. Besides helping physicians to improve their English communication skills, it provides the opportunity to consider another healthcare system and different medical practices. Since 2012, an exchange program has been set up between cardiac surgery departments of Rennes and Southampton. However, it has become increasingly more difficult for European doctors to practice in Great Britain from an administrative point of view. Since June 2014, the General Medical Council (GMC) has only accepted candidates with a sufficient English level assessed through IELTS (International English Language Testing System). The required level is pretty high; therefore, several attempts are often necessary for the majority of trainees to pass the test. However, opportunities for a UK fellowship remain, since formalities are still cheaper and less demanding than other English-speaking countries. Once you have been successful with the administrative process, you have the opportunity to observe different practices and a different healthcare system. 1. Introduction Dans le cadre d’une médaille d’or, nombreux sont les chirurgiens français à avoir réalisé une année à l’étranger. Le Royaume-Uni est une destination privilégiée en raison de sa proximité géographique, de la langue anglaise et de son appartenance à l’Union européenne [à l’heure de la rédaction de cet article, NDLR]. Pour ces différentes raisons, un programme d’échange a été mis en place en 2012 entre les services de chirurgie cardiothoracique du CHU de Rennes et de l’hôpital de Southampton, permettant d’envoyer trois internes français en Grande-Bretagne et de recevoir deux internes britanniques en France. Le Royal Brompton à Londres a également l’habitude de recevoir des fellows français en chirurgie cardiaque. S’il se réalise, le Brexit va incontestablement modifier les relations entre nos deux pays, mais il entre plus globalement dans le cadre d’une modification des règles de travail britanniques depuis quelques années, touchant également le monde médical. En effet, les ressortissants européens doivent justifier depuis juin 2014 d’un niveau d’anglais suffisant pour obtenir leur inscription au General Medical Council (GMC), le Conseil de l’Ordre britannique, et ainsi pouvoir pratiquer la médecine au Royaume-Uni. 2. L’inscription au GMC Toute implication dans la prise en charge des patients au Royaume-Uni nécessite une attestation de la part du GMC, de l’étudiant en médecine au PU-PH. Il faut obtenir une inscription complète avec une autorisation de pratiquer la médecine (full registration with licence to practise). Sans cette autorisation administrative, aucun contact avec le patient n’est possible, de la simple information du malade à la présence sur le champ opératoire. La première partie de l’inscription se réalise par internet [1] : les années d’études médicales, les différents établissements fréquentés, et l’expérience professionnelle médicale et hors médicale lors des cinq dernières années doivent être précisées. Le GMC demande ensuite l’envoi par courrier de justificatifs de l’ensemble des informations fournies via le site internet. Les maîtres de stage (ou doyens de l’université pour l’externat) doivent remplir un formulaire attestant du rôle tenu par l’étudiant au cours des différents stages. Pour les documents officiels, une traduction assermentée doit accompagner les diplômes ou extrait de casier judiciaire. Au fil des démarches, de nouveaux documents peuvent être demandés pour compléter le dossier. La dernière étape est la présentation en personne, avec vérification de l’identité et prise d’une photo, des originaux des différentes pièces justificatives demandées au siège du GMC à Londres, permettant l’enregistrement et la validation finale des démarches pour être autorisé à pratiquer la médecine au Royaume-Uni. 3. Depuis juin 2014 : la justification du niveau d’anglais Depuis juin 2014, le GMC demande à l’ensemble des citoyens européens voulant pratiquer la médecine au Royaume-Uni de justifier d’un certain niveau d’anglais. L’examen requis est l’IELTS académique (International English Language Testing System), qui évalue la compréhension et l’expression orales et écrites sur quatre épreuves. Le score global requis par le GMC est 7,5/9 avec une note minimum de 7 dans chaque partie du test. Si l’objectif pour la compréhension orale et écrite peut être facilement atteint avec de l’entraînement, cela reste plus compliqué pour l’expression orale et surtout écrite. Cette dernière épreuve nécessite la rédaction de deux essais en une heure, l’un sur la description d’un graphique ou tableau et l’autre correspondant à une réflexion argumentée sur un sujet donné (écologie, tourisme, famille). Les candidats n’obtenant pas le score requis échouent souvent sur cette unique épreuve, y compris des personnes dont l’anglais est la langue maternelle car obtenir le fameux 7 pour cette partie du test nécessite un anglais plus académique. Autre élément à considérer pour un interne candidat à cette expérience étrangère : l’inscription à ce test est de 219 €. Si cette méthode reste la plus utilisée et la plus simple, d’autres justificatifs peuvent prouver le niveau d’anglais [2]. Les candidats ayant effectué leurs études en langue anglaise hors Royaume-Uni peuvent parfois valider leurs connaissances, mais certaines universités pour le GMC n’apportent pas un niveau de langue suffisant à leurs élèves. Une précédente expérience dans un pays anglophone peut également servir de justificatif avec une lettre de référence des précédents employeurs. Un autre moyen, très utilisé mais avec peu de résultats, est l’évaluation du niveau d’anglais par les nouveaux employeurs. Le GMC étant une institution respectée et crainte, c’est un véritable test d’anglais que peuvent vous faire passer les consultants anglais avant d’apposer leur nom et leur numéro de licence sur ce papier, leur responsabilité étant mise en jeu. 4. Et pour les ressortissants hors Europe ? Pour les médecins n’étant pas citoyens européens ou n’ayant pas réalisé leurs études médicales sur le vieux continent, le parcours est encore plus compliqué. L’IELTS est obligatoire depuis de nombreuses années, de la même manière que le PLAB (Professional and Linguistic Assessments Board). Ce dernier examen teste les compétences médicales des candidats par des questions à choix multiples sur une durée de 3 heures, et l’évaluation des compétences cliniques en situation pratique (18 cas en 3h30 environ). Là encore, l’inscription est payante et coûte 490 €. Cependant, les objectifs finaux sont différents entre les citoyens européens et ceux du reste du monde. En effet, le plus souvent, aller au Royaume-Uni reste une expérience transitoire de 6 à 12 mois pour les Français par exemple, les médecins venant d’Asie et du monde arabe ont généralement pour projet de s’installer dans le pays pour y exercer. 5. Les autres professions au Royaume-Uni Les infirmiers doivent eux aussi justifier de leur niveau d’anglais pour postuler en Grande-Bretagne depuis janvier 2016 [3]. Le score requis est légèrement plus faible (7 de moyenne). Cependant, l’emploi de nombreux infirmiers étrangers a longtemps été la règle et ce sans qu’il y ait d’évaluation interne des capacités de communication en anglais. Environ un tiers du personnel paramédical est composé de non-Britanniques venant d’Europe de l’Est et d’Inde, avec plus récemment l’arrivée importante d’infirmiers espagnols et portugais. Pour étudier au Royaume-Uni, quel que soit le domaine, les universités ont également commencé à demander aux candidats étrangers de prouver leurs connaissances en anglais académique. Si certaines universités utilisent l’IELTS, d’autres préfèrent avoir leur propre méthode d’évaluation interne et ajoutent une année de formation au cursus choisi en cas de niveau de langue insuffisant. Les entreprises privées restent maîtresses de leur recrutement, mais le visa de travail nécessaire pour les non-Européens passe par la case IELTS. Si le visa général demande le même niveau qu’aux médecins et infirmiers, l’arrivée des entrepreneurs et des « Exceptional Talent » est facilitée avec un score minimum requis de 4. 6. L’accès à la pratique médicale en dehors du Royaume-Uni Pour les pays membres de l’Union européenne, les démarches sont exemptes de visa et les diplômes français sont reconnus dans tous les pays. Les postes de fellowship restent généralement accessibles malgré la barrière de la langue, mais la capacité à communiquer avec les patients reste un élément indispensable en cas d’installation sur place. Pour le Canada anglophone, les règles varient en fonction des provinces. L’évaluation du niveau d’anglais se fait par le TOEFL (Test of English as a Foreign Langage) ou l’IELTS, et les diplômes français suffisent pour réaliser un fellowship canadien aussi bien côté québecois qu’anglophone. À noter que du côté québécois, l’évaluation du niveau de langue française pour les non-Francophones se réalise directement au Collège des médecins québécois. Les démarches les plus difficiles et les plus coûteuses sont pour exercer aux États-Unis. Les médecins étrangers doivent avoir l’ECFMG Certification (Educational Comission for Foreign Medical Graduates) [4] : il s’agit d’une institution s’occupant essentiellement de l’évaluation des connaissances des candidats étrangers pour leur entrée dans le système médical américain. Cette institution note vos connaissances médicales et vos facultés de communication à travers les étapes 1 et 2 de l’USMLE (United States Medical Licensing Examination). Selon les États, ceci suffit à l’obtention du statut de Resident Training, mais certains peuvent demander la validation de l’étape 3 de l’UMSLE. À noter que ces examens sont obligatoires pour obtenir le visa de travail, en plus d’une évaluation du niveau d’anglais par le TOEFL. L’inscription pour chaque part du UMSLE coûte entre 600 et 1800 $. 7. La médecine au Royaume-Uni L’organisation de la médecine au Royaume-Uni est bien différente de la nôtre. La NHS (National Health Trust) est un mélange entre notre ministère de la Santé et nos agences régionales de santé. Son objectif est de s’assurer de la bonne répartition des soins sur le territoire, mais également de leur efficacité. En effet, elle oblige à rendre public les chiffres d’activité et la mortalité hospitalière postopératoire sur les sites des sociétés savantes. Cependant, si ces données sont présentées par service pour la chirurgie cardiaque congénitale et pédiatrique [5], les résultats sont présentés de manière individuelle pour chaque chirurgien cardiaque et thoracique adulte [6]. La NHS cherche également à former des pôles d’excellence pour certaines spécialités. Ainsi en juillet 2016, elle a préconisé l’arrêt à partir d’avril 2017 de l’activité de chirurgie congénitale (adulte ou enfant) pour trois services de chirurgie cardiaque [7] au Royaume-Uni. Un autre exemple est celui des ECMO : la prise en charge des défaillances respiratoires sévères nécessitant une assistance est réalisée par quatre centres adultes et enfants validés par la NHS et répartis de manière équilibré sur le territoire britannique. Soucieux de la sécurité du patient, les Britanniques ont adopté depuis longtemps la limitation du temps de travail médical : la signature du contrat de travail s’accompagne d’une déclaration visant à ne pas dépasser 48 heures de travail par semaine, et le repos de garde est obligatoire. 8. La journée d’un registrar/fellow au Royaume-Uni La matinée commence en réanimation par une visite commune avec les cardiologues, réanimateurs et chirurgiens pour discuter de l’évolution des patients et des stratégies thérapeutiques nécessaires. Ensuite, direction le bloc opératoire pour le Team Brief : il s’agit d’une réunion avec l’ensemble du personnel de la salle opératoire pour présenter les cas du jour, les techniques chirurgicales et de circulation extracorporelle envisagées, le matériel nécessaire et les complications possibles. On y retrouve l’anesthésiste, son infirmier, un ou deux perfusionnistes, une infirmière instrumentiste et entre deux et quatre infirmiers circulants. Le temps de préparation du premier patient permet de réaliser la visite dans le service tout comme aux soins intensifs, où l’interne ne prend en charge que les patients de son Consultant, sauf urgence. Il délègue à un infirmier spécialisé (Nurse Practitioner) ou un externe (Senior House Officer) l’examen clinique du patient et les tâches administratives (prescription, demande d’examens complémentaires et d’avis, courrier de sortie). À titre d’exemple de prise en charge, les coronariens sortent à J5 sans contrôle échographique et sans réadaptation cardiologique. À noter qu’il n’existe pas de centre de rééducation cardiaque ni de convalescence au Royaume-Uni : les patients fragiles sont alors transférés dans les hôpitaux périphériques avant leur retour au domicile. Dans les services, les infirmiers non spécialisés gardent un rôle de surveillance de leurs patients, dans leur chambre à six lits, mais leurs gestes techniques sont peu fréquents : beaucoup de gestes réalisés par des infirmiers usuels en France comme les prélèvements sanguins nécessitent une formation spécifique au Royaume-Uni. L’avant-bloc permet également la réalisation des staffs médicochirurgicaux en vue de la présentation de nouveaux dossiers ou des revues de morbimortalité. Au bloc opératoire, les conceptions restent assez différentes des nôtres. À titre indicatif, certains éléments sont à l’inverse de ce que l’on peut avoir dans la majorité des blocs opératoires français : l’instrumentiste est à côté du chirurgien et le perfusionniste en face de lui. Concernant les gestes chirurgicaux, l’usage de l’artère thoracique interne pour les pontages aortocoronariens est exclusivement réservé pour l’IVA, quand les autres pontages sont réalisés en veine saphène. L’ECMO veinoartérielle chez l’adulte est peu utilisée dans les services de chirurgie cardiaque britanniques, y compris en post-cardiotomie, et les reprises pour hémostase sont régulièrement réalisées en réanimation. Par ailleurs, la dobutamine n’est pas utilisée au bloc opératoire comme en réanimation et la noradrénaline n’est jamais utilisée en première intention, alors que la dopamine reste l’inotrope de référence. Côté anesthésie, l’infirmier anglais n’est pas franchement équivalent à l’IADE français : son rôle se limite le plus souvent à la préparation du matériel et des seringues d’inotropes. Il n’a aucun rôle dans la surveillance du patient mais peut parfois poser une perfusion s’il a validé la formation spécifique. Une fois le bloc opératoire terminé, un nouveau passage dans le service est nécessaire pour faire signer aux patients du lendemain le consentement pour la prochaine procédure. L’objectif est de leur exposer une dernière fois la chirurgie, les complications possibles et de leur faire apposer sur papier leur signature confirmant leur accord. Aucun geste invasif ne peut être réalisé sans ce formulaire rempli, l’anesthésiste refusant l’entrée du patient au bloc opératoire en cas de papier absent ou incomplet. Concernant les consultations, elles sont rassemblées sur une journée toutes les deux à quatre semaines et réparties entre le Consultant et son Registrar. Un infirmier spécialisé, le Case Manager, réalise une partie de la consultation médicale avec recueil des antécédents, interrogatoire et examen clinique, puis donne les informations pratiques concernant l’hospitalisation. En plus de cette part clinique, le Case Manager a un rôle se rapprochant des infirmiers de programmation sur le plan administratif : il gère la Waiting List des chirurgiens et contacte les patients pour les informer de leur date opératoire, le plus souvent deux semaines avant celle-ci. Concernant l’hôpital de Southampton, les gardes requièrent des compétences dépassant le cadre de la chirurgie. En effet, l’interne doit gérer les unités conventionnelles comme l’unité de soins intensifs, la réanimation étant prise en charge par un anesthésiste. Les poses de perfusion ou cathéter sont réalisées par l’externe dans un premier temps, puis l’interne en cas de besoin. Le planning pour les gardes s’organise par semaine et, pour respecter la loi sur le temps de travail, une semaine de garde de nuit est suivie par une semaine de récupération. 9. Conclusion Les démarches administratives pour réaliser un stage médical au Royaume-Uni se sont compliquées mais restent toutefois réalisables. La prochaine sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne pourrait accroître les démarches à réaliser, avec l’ajout d’un visa de travail pour pouvoir bénéficier de cette expérience britannique. Au-delà des obstacles administratifs, cet échange avec le Royaume-Uni permet aux internes français la découverte d’autres méthodes de travail, d’une autre organisation hospitalière, d’un autre système national de santé. Il s’agit d’une expérience enrichissante qui leur permet également d’améliorer leur anglais et de tester leurs capacités globales d’adaptation.   Références Applying for registration with a licence to practise – for nationals from the EEA, Switzerland and other doctors with EC rights, who graduated at EEA or Swiss medical schools and have not completed an internship [Internet]. [cited 2016 Sep 25]. Lien Knowledge of English – European doctors [Internet]. [cited 2016 Sep 29]. Lien English language requirements - EU/EEA [Internet]. [cited 2016 Sep 29]. Lien Fellowship Council - International Medical Graduates [Internet]. [cited 2016 Oct 1]. Lien CCAD - Congenital Analysis - Summary Data - By Year [Internet]. [cited 2016 Oct 10]. Lien Surgeons | Society for Cardiothoracic Surgery [Internet]. [cited 2016 Oct 10]. Lien NHS England » Congenital Heart Disease: NHS England takes action to deliver consistent and high quality services now and for the future [Internet]. [cited 2016 Oct 10]. Lien Date de soumission : 11/12/2016. Acceptation : 15/12/2016.   
mars 1, 2017
Formation · Vol. 20 Juin 2016

État des lieux de la formation théorique en chirurgie thoracique et cardiovasculaire en France

Charles-Henri David, Pierre-Emmanuel Noly, Stéphane Renaud, Hassan Debbagh, Hicham Masmoudi, Margaux Pontailler Extrait du rapport rédigé par l’Association des Jeunes Chirurgiens Thoraciques et Cardio-Vasculaires à la demande du Pr Pascal Thomas et remis le 16 février 2016 au Pr Pascal Thomas, président de la SFCTCV, au Pr Pascal Dumont, directeur du Collège et au Pr Françoise Le Pimpec-Barthes, présidente du comité pédagogique de la SFCTCV. Correspondance : charleshenridavid@icloud.com Télécharger le rapport complet (36 pages – 2,5 Mo)   1. INTRODUCTION L’apprentissage de la chirurgie, comme pour tout métier de l’artisanat, se fait par compagnonnage d’un ou plusieurs maîtres à leurs élèves. Les évolutions des savoirs et de leurs modes de transmission semblent mettre en avant certaines limites de notre système de formation de la chirurgie thoracique, cardiaque et vasculaire. Nous avons souhaité faire un état des lieux de l’offre de formation actuelle en France, mais aussi à l’étranger. Nous avons ensuite analysé les points forts et les faiblesses de ce système au regard des réponses au questionnaire sur l’évaluation de la formation théorique envoyé à l’ensemble des jeunes en formation. Le but de ce travail est de permettre une analyse plus juste de notre système de formation afin de définir les éventuelles modifications à lui apporter. Ce rapport est le premier du genre et devra être renouvelé dans le temps, permettant une analyse des résultats des éventuelles réformes qui seront entreprises. Il demande à être amélioré et poussé encore plus loin pour en affiner l’analyse. Nous vous invitons à nous faire part de toutes remarques et corrections.   2. ÉTAT DES LIEUX DE LA FORMATION EN CTCV EN FRANCE   2.1. Modalités d’entrée dans le cursus Le seul prérequis pour entrer dans la formation est d’avoir effectué un semestre dans un service agréé pour la CTCV avant la fin de son 5e semestre, et d’avoir l’accord du coordinateur local. Il est impossible de connaître en temps réel le nombre d’internes en formation, puisque l’entrée dans le DESC est sous la responsabilité de l’université dont dépend l’interne. Cette absence d’identification précise et régulièrement mise à jour empêche une diffusion homogène de l’information et de la formation. En effet, les responsables de l’organisation de la formation, Collège et université, sont les garants de l’application de ce programme de formation. Lorsque la communication entre le Collège et les universitaires locaux ne se fait pas, les internes peuvent être délaissés et ne pas bénéficier d’une formation de qualité.   2.2. Parcours de formation officiel À l’heure actuelle, le cursus de CTCV est accessible par l’intermédiaire du DES de chirurgie générale choisi aux ECN. Les internes, une fois inscrits en DESC, vont effectuer un certain nombre de stages pratiques puis un post-internat de 3 ans minimum, le plus souvent de 4 ans ou plus avec une année de médaille d’or, et des mises en disponibilité pour effectuer une mobilité. À l’issue de ce parcours, qui peut être effectué sans être membre de la SFCTCV, l’examen du Collège est passé et la validation du DESC obtenue. Les objectifs de validation sont finaux avec un nombre d’interventions à réaliser et un examen devant un jury sans qu’il y ait eu d’évaluation au cours du parcours.   2.3. Formation dispensée par le Collège La formation théorique est dispensée sous l’égide du Collège de CTCV. Le volume annuel de formation est de 8 demi-journées : 6 demi-journées de présentations, le plus souvent réalisées par des jeunes en formation sous le contrôle d’un senior du service ; 2 demi-journées dispensées lors de deux rencontres nationales organisées par la SFCTV. Ces présentations, également sous forme de diaporamas, traitent le plus souvent de sujets d’actualité. Les enseignements inter-régionaux du Collège sont clairement destinés aux jeunes en formation, à la différence des Matinées du Collège qui semblent plus orientées vers les praticiens dans le cadre du DPC. Il n’y a pas à proprement parler de programme de formation, théorique ou pratique. L’étudiant dispose actuellement d’un listing d’objectifs à atteindre sans que soient définis les moyens pour y arriver ni les méthodes d’évaluation des acquis. La formation pratique française sert pourtant de modèle à l’étranger, avec un flux migratoire important d’autres pays européens. Néanmoins, la formation sur le territoire est hétérogène, à tort (volonté d’enseigner et de transmettre variable) ou à raison (disparité de recrutement, spécificités locales), l’absence de parcours de formation entretenant ces disparités. Dans le domaine de la pédagogie, l’apprentissage par compétences a remplacé l’apprentissage par objectifs, qui se concentrait sur la finalité, et non sur le chemin pour l’atteindre. L’enseignement actuel est centré sur les résultats souhaités en termes de compétences de l’enseignement ainsi que sur le chemin nécessaire pour les acquérir. Ce mode d’enseignement impose de réfléchir aux habiletés nécessaires à l’acquisition de compétences, par essence multimodales, mais permet aussi une meilleure implication des étudiants dans leur formation. Avec des repères et des objectifs, il est toujours plus facile d’apprendre que lorsque l’on est noyé devant une liste d’interventions à connaître. Un apprentissage par modules devrait donc être mis en place avec des objectifs théoriques et pratiques progressifs. Chaque module devant être validé afin d’être certifié comme chirurgien. Dans le cadre de la réforme de l’internat, nous avons la possibilité de mettre à plat notre formation afin de la rendre plus en adéquation avec les aspirations de tous. Pour les enseignants comme pour les élèves, il s’agit de donner des repères de formation et d’évaluation.   2.4. Problèmes de la structuration actuelle de la formation   2.4.1. Uniformité La formation actuelle n’est pas uniforme en raison de l’absence d’un référentiel de formation détaillé, théorique et pratique, donnant aux enseignants et aux internes des repères sur les objectifs, les moyens d’y arriver et les outils disponibles pour acquérir et valider les acquis. À ce sujet, on pourra se référer au programme de formation permettant d’accréditer les chirurgiens cardiothoraciques canadiens, disponible sur le site de l’ACGME. En effet, bien que les sujets des présentations en séminaires du Collège soient définis au niveau national, il ne semble pas exister de cohérence par rapport à un programme détaillé garantissant que chaque interne ait validé l’acquisition de ses connaissances. Le second problème est la disparité au sein des enseignements des séminaires du Collège : il est maintenant admis qu’il existe une hétérogénéité dans la qualité de la formation entre les différentes inter-régions. Enfin, le troisième problème ressenti par les internes, et ce de façon plus prégnante dans les grandes agglomérations, est l’absence d’un suivi régulier des acquis. En effet, par le passé, le compagnonnage se faisait entre un chirurgien et « son » élève. À l’heure actuelle, un interne « exerce » avec plusieurs seniors qui n’auront qu’une vision partielle des acquis de l’élève. Il s’agit donc de permettre tant à l’élève qu’aux maîtres d’avoir une vision globale sur ce qui est maîtrisé et ce qui reste à apprendre.   2.4.2. Accessibilité L’accessibilité est un problème résultant de deux causes. La première est une absence de visibilité du Collège, se traduisant par une découverte tardive de son enseignement par les internes. Plusieurs explications peuvent être données. Tout d’abord, le cursus actuel ne permet pas d’identifier les internes aspirant à la chirurgie cardiothoracique et vasculaire. Le passage par le DES de chirurgie générale et l’entrée à des moments variables dans le cursus de CTCV sont les principales raisons de l’opacité du système. Le passage à une filiarisation à l’issue des ECN devrait permettre de pallier ces écueils. La seconde explication est une remontée incomplète de l’information des centres auprès du Collège, comme en témoigne l’incapacité de ce dernier à donner une liste précise des inscrits au DESC de CTCV. Ainsi, certains peuvent ne pas être informés des modalités d’enseignement et du parcours recommandé. Il est intéressant de constater que cet état de fait est retrouvé dans d’autres pays européens où le passage par la chirurgie générale est obligatoire. Le problème touche donc à l’organisation de l’enseignement, mais aussi aux démarches prospectives de démographie médicale. La seconde cause est l’absence d’un enseignement couvrant de façon adaptée l’ensemble des connaissances que doit acquérir un chirurgien cardiothoracique et la nécessité de recourir à des sources d’enseignement telles que les DU et DIU.   2.4.3. Coût Pour l’année universitaire 2015-2016, les frais d’inscription à l’université pour le 3e cycle des études médicales est de 512 €, plus 391 € l’année de la thèse (source : ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche). Si l’on estime que l’offre de formation du Collège ne remplit pas les objectifs annoncés et qu’une formation complémentaire est nécessaire, elle représenterait une moyenne de deux à trois DU par interne pour chaque sous-spécialité. Avec une moyenne des droits pédagogiques de 460 € (600 € en comptant le DU endovasculaire de Nancy) et des droits universitaires de 261 €, le budget global pour la durée de l’internat serait entre 1 442 € (2 DU) et 2 163 € (3 DU). La liste détaillée des DU recommandés par la SFCTCV est présentée dans le rapport complet disponible sur le site Internet du journal. Toutes ces formations génèrent également des frais supplémentaires de déplacement et d’hébergement. On peut estimer un budget supplémentaire par formation, pour des personnes n’étudiant pas dans l’université dispensant la formation, de l’ordre de 1 650 €/an. Avec l’arrivée du DPC, les internes étant en formation initiale ne peuvent plus bénéficier d’une prise en charge par leur hôpital d’origine comme cela pouvait être le cas auparavant. Un interne a donc un budget formation de 2 883 €/an en moyenne. Mais au-delà de la contrainte financière, le problème de fond que soulève la participation à ces DU-DIU (fortement recommandée, si ce n’est obligatoire) est de constater que ces enseignements sont indispensables à tout interne de la spécialité puisque figurant dans les objectifs du Livret du Collège.   2.4.4. Dépendance ? Les autres acteurs de la formation, non officiels mais bien présents, sont les laboratoires. Bon nombre de formations sont dispensées par ces laboratoires avec une sincère volonté de fournir une formation de qualité. Il reste néanmoins regrettable que ces formations ne soient pas accessibles à tous et soient sujettes à l’aléa d’un représentant engagé ou non. Il est d’autant plus dommage de voir que, souvent, ce sont nos enseignants qui dispensent ces formations.   3. RÉSULTATS DU QUESTIONNAIRE D’ÉVALUATION DE LA FORMATION THÉORIQUE   3.1. Présentation du questionnaire Le questionnaire a été réalisé avec le logiciel en ligne Survey Monkey. La population cible était celle des internes et assistants chefs de clinique. Plusieurs campagnes de mailing ont été réalisées par l’intermédiaire du listing des membres de l’AJCTCV et des membres juniors de la SFCTCV. Au total, 51 chirurgiens en formation inscrits au DESC ont répondu au questionnaire. Nous ne sommes pas en mesure de rapporter ce chiffre à un nombre d’inscrits en DESC pour la raison évoquée ci-dessus et ne pouvons donc pas fournir de taux de participation.   3.2. Présentation des résultats   3.3. Synthèse des résultats La formation théorique de CTCV n’est actuellement pas adaptée aux besoins. La place de l’université et de la formation locale est inexistante, alors que l’offre de formation fournit par le Collège ne remplit pas son rôle. La formation devrait pouvoir associer différents formats : – en ligne (à développer fortement) ; – en groupes (s’apparente aux séminaires du Collège) ; – en amphi (pourrait être des formations nationales). Les ressources telles que l’EMC ne remplissent pas leur fonction. Une ressource officielle du Collège est fortement attendue avec un accent mis sur le numérique : - permettant des mises à jour (plus) régulières en rapport avec les recommandations ; – permettant l’association de vidéos explicatives. Un parcours de formation, avec des objectifs détaillés et progressifs ainsi qu’une évaluation régulière, tant sur le plan théorique que pratique, sont demandés.   4. LA FORMATION AILLEURS   4.1. Au Canada Le Canada est réputé pour être à la pointe en matière d’enseignement, particulièrement en chirurgie cardiaque, dont la formation est considérée comme la meilleure au monde. Il existe 10 programmes ou centres de formation universitaire en chirurgie cardiaque répartis sur l’ensemble du territoire. Chaque année, 9 à 10 postes de résident (interne) sont ouverts dans la spécialité. Le CaRMS (service canadien de jumelage des résidents), organisme indépendant à but non lucratif, recueille les candidatures des étudiants sur une plateforme en ligne anonymisée et organise un jumelage équitable, objectif et transparent pour l’enseignement médical. Par le biais des dossiers académiques et des entretiens entre les candidats et les responsables des formations, le CaRMS recherche la meilleure adéquation entre les choix des étudiants et ceux des comités de sélection (directeurs de programme, chirurgiens et résidents seniors).   4.1.1. Organisation de la formation La durée de la « résidence », ou internat, est de 6 ans : 2 ans de tronc commun, appelés « fondements chirurgicaux », afin d’acquérir une base de connaissances importante, fondée sur l’expérience clinique en médecine et en chirurgie générale, ainsi qu’en soins intensifs ; un an souvent dédié à la recherche ; 3 ans de spécialisation où le résident doit réaliser des stages en chirurgie thoracique, vasculaire, en chirurgie cardiaque adulte et en chirurgie cardiaque congénitale. Pendant la 5e année, le résident évolue en chirurgie cardiaque adulte avec pour objectif d’acquérir le maximum de compétences techniques. Les résidents travaillent en binôme au bloc opératoire exclusivement avec leur « patron ». Les résidents sont soumis à deux examens, en fin de tronc commun et en fin de cursus. Ils sont également évalués à intervalles réguliers au sein de leur terrain de stage. Pendant les 6 ans de formation, une demi-journée par semaine est dédiée à l’enseignement théorique sous forme de cours où les étudiants participent de manière active (présentations). Des réunions scientifiques propres à chaque hôpital sont également organisées. Enfin, au cours des 5e et 6e années, les résidents participent à des cours spécifiques pour la préparation de l’examen du Collège royal.   4.1.2. Acteurs de la formation Le Collège royal est l’association professionnelle nationale qui supervise la formation médicale des spécialistes au Canada. Il est responsable de l’agrément des programmes de résidence des universités, du contrôle de la qualité des programmes ainsi que des programmes de développement professionnel continu des médecins. Les programmes de formation de chirurgie sont audités régulièrement afin de s’assurer que les exigences en matières d’enseignement, d’offre de formation et de sécurité des résidents soient respectées. Au Canada, le directeur de programme a un rôle clé. Il fait le lien entre le résident, le Collège royal et l’université. Il personnalise la maquette de la formation des jeunes chirurgiens en se pliant aux exigences du Collège royal et s’assure que le résident pourra acquérir toutes les compétences requises pour l’examen final du Collège. L’ensemble des chirurgiens est impliqué dans la formation des résidents. Il n’existe pas de « hiérarchie universitaire » comme on peut le voir dans le système français. Tous les chirurgiens sont affiliés à l’université, mais seule une petite partie en perçoit un salaire (professeurs ou professeurs adjoints à plein temps).   4.1.3. L’examen du Collège royal de chirurgie cardiaque À la fin des 6 années de formation, tous les résidents en chirurgie cardiaque du Canada doivent passer l’examen du Collège royal, obligatoire pour exercer et reconnu dans certains États des États-Unis. C’est un examen au haut niveau d’exigence, qui se déroule en deux parties. La première, écrite, porte sur les guide­lines et les principales grandes études en chirurgie cardiaque, soins intensifs et cardiologie. La seconde est orale, sous forme de dossiers cliniques commentés. En théorie, les jeunes chirurgiens titulaires du Collège royal peuvent exercer d’emblée. Mais la grande majorité des résidents effectuent 2 à 3 ans de fellow­ship, le plus souvent dans un centre américain.   4.1.4. Avantages et inconvénients du système canadien Les avantages du système canadien sont nombreux : L’entrée directe dans le programme, sans passer par une formation générale complète, permet d’éviter d’allonger inutilement la formation. Ce système assure une formation théorique, pratique et académique solide et complète. Les résidents sont soumis à une évaluation finale objective de haut niveau, ce qui garantit un niveau de compétence élevé. Le Collège royal, indépendant des universités, assure une surveillance et une protection de la formation des résidents. Les résidents sont auditionnés par un comité afin de recueillir leurs impressions et d’optimiser le déroulement de la formation. Un des inconvénients de ce système serait l’exposition tardive à la chirurgie cardiaque, qui commence réellement en 4e, voire 5e année. Par ailleurs, malgré une évaluation commune à l’ensemble du territoire, le niveau de formation et l’exposition en salle d’opération peut varier d’un programme à l’autre. La formation en chirurgie cardiaque est le socle d’une spécialité dynamique, évolutive et innovatrice. Le système de formation aux États-Unis est en mutation, largement inspiré par celui de son voisin canadien.   4.2. Aux États-Unis Aux États-Unis, la formation en chirurgie cardiothoracique n’est pas homogène sur l’ensemble du territoire. En fin de cursus, les étudiants en médecine américains postulent à différents programmes de formation dits « residency », l’équivalent de l’internat français. Chaque faculté dispose d’un certain nombre de postes et sélectionne ses futurs résidents sur dossier et entretien oral. Il existe trois voies d’accès à la chirurgie cardiothoracique : les programmes « indépendants », ou « traditional pathway », qui comprennent 5 ans de chirurgie générale et 2 à 3 années de formation dans des services de chirurgie cardiothoracique ; les programmes « fast-track pathway », qui comprennent 4 années de chirurgie générale et 3 ans de chirurgie cardiothoracique (l’ensemble de la formation devant être réalisée dans la même structure) ; les voies dites intégrées (« integrated pathway ») comportant 6 ans de formation en chirurgie cardiothoracique seule. La formation diffère de façon significative en fonction de la voie choisie. Dans les programmes « indépendants », les résidents doivent dans un premier temps réaliser un internat de chirurgie générale de 5 ans. Un intérêt particulier est porté à la formation à l’endoscopie, à la prise en charge des urgences chirurgicales et à la réanimation. À la fin de la 4e année de formation en chirurgie générale, les résidents postulent à un des programmes de résidanat en chirurgie cardiothoracique. La formation varie alors en fonction des programmes entre 2 et 3 ans. Dans le programme « fast-track », les étudiants en médecine postulent à un des programmes de chirurgie générale intégrant la chirurgie cardiothoracique. Les résidents de chirurgie générale intéressés par cette voie l’intègrent habituellement en fin de 2e année. Seuls 10 centres sur le territoire américain permettent actuellement de bénéficier de ce programme. Enfin, dans les programmes « intégrés », proposés par 9 universités, les résidents intègrent directement un résidanat de chirurgie cardiothoracique. La formation théorico-pratique passe par les spécialités suivantes : radiologie et cardiologie interventionnelles, chirurgie endovasculaire, oncologie et pneumologie. Elle intègre bien évidemment une formation aux nouvelles technologies. Au terme de leur formation, tous les résidents, quelle que soit la voie choisie, sont éligibles à l’American Board of Thoracic Surgery. Les résidents ayant suivi un « traditional pathway » ou un « fast-track pathway » sont également éligibles à l’American Board of Surgery. En plus de la formation pratique, la très grande majorité des services encouragent la formation scientifique, non seulement par la réalisation d’années académiques, mais également par les réu­nions scientifiques au sein des services.   4.3. Au Royaume-Uni Les études médicales durent 6 ans. Ensuite, l’internat débute par 2 ans de spécialités médicales et chirurgicales. Puis, à l’image du système américain, il existe deux parcours d’une durée de 8 ans. Le premier permet l’entrée en chirurgie cardiothoracique à l’issue des 2 ans d’internat généraliste. Le second intègre 2 années de chirurgie générale. Il semble que le programme d’intégration directe dans le cursus offre un suivi plus rapproché avec un superviseur attitré pour chaque stage. Chaque année, les acquis sont évalués en partenariat avec la faculté dont dépend le service du stagiaire.   4.4. En Allemagne Après 6 ans d’études médicales, les 2 premières années d’internat sont un tronc commun regroupant un an de service, 6 mois en soins intensifs et 6 mois aux urgences. Ensuite viennent 4 ans de chirurgie cardiothoracique. L’examen du Board (Collège) impose 100 cas par intervention. Cette période dure entre 5 à 8 ans en fonction du volume opératoire du centre et des opportunités laissées ou non par le chef.   4.5. En Suisse Les études de médecine durent 6 ans. L’entrée en internat se fait sur dossier et entretien individuel avec le chef du service où l’interne souhaite faire son internat. Le futur interne postule pour une formation en chirurgie cardiaque, thoracique ou générale. Un contrat de 6 ans est signé entre le chef de service et l’interne, puis renouvelé annuellement en cas de poursuite du cursus. L’internat dure donc au minimum 6 ans avec un examen de fin de cursus. Durant cette période l’interne doit avoir assisté aux cours et aux congrès référencés sur www.fmh.ch. La plupart du temps le cursus dure plus longtemps.   4.6. Chez les anesthésistes-réanimateurs Le DES d’anesthésie-réanimation dure 5 ans et s’articule entre formation pratique à l’hôpital et enseignement théorique à la faculté. La formation hospitalière dure 8 semestres, dont 4 dans des services d’anesthésie (chirurgies générale, pédiatrique, du segment céphalique, orthopédique, urologique, thoracique et cardiovasculaire) et 4 en réanimation. L’enseignement théorique est constitué de 23 modules en ligne (8 validables chaque année), des séminaires de simulation sur mannequins et des cours filmés et mis à disposition sur le site de l’Institut d’anesthésiologie. Le contrôle des connaissances prend la forme de QCM à compléter sur le site de l’Institut. Chaque module est validé par un taux de 100 % de bonnes réponses. Après six tentatives infructueuses, un oral de rattrapage est prévu. La validation du DES d’anesthésie-réanimation comporte également 3 épreuves d’évaluation orale aux 3e, 5e et 7e semestres. L’épreuve prend la forme de cas cliniques et/ou d’analyses critiques d’articles. Les internes en formation sont activement identifiés par les coordonnateurs régionaux et par l’Associations des jeunes anesthésistes et réanimateurs (AJAR) et le groupe Jeunes SFAR. Ces acteurs travaillent ensemble à l’intégration des internes en formation et au respect des objectifs de la maquette du DES.   5. SYNTHÈSE Notre système devrait connaître de nombreux changements, tant sur le plan des pratiques professionnelles (nouvelles technologies, tarification à l’activité, pressions médiatiques) que de l’enseignement (réforme du 3e cycle, modifications sociétales et générationnelles, nouveaux outils pédagogiques). Au regard des systèmes étrangers et d’autres spécialités de l’Hexagone, différents collèges de spécialités se sont dotés d’outils pédagogiques identifiés et accessibles à tous, sur la base desquels les connaissances théoriques sont dispensées et évaluées. Notre système, dont l’excellence doit être et rester le maître mot, est perfectible. À l’issue de ce travail, nous pouvons dégager plusieurs pistes de réflexion découlant de ses faiblesses : Il manque du contenu afin de remplir le cadre existant (Livret du Collège) sous forme d’objectifs, de contenus et d’outils pédagogiques. Il manque au système actuel une capacité à identifier et à suivre les internes en formation au sein de la spécialité. Il existe de fait une inégalité d’accès à la formation de par l’opacité et l’absence d’organisation centralisée de la formation. Il existe une forte demande de la part des internes de la spécialité qui aspirent à une formation complète et homogène intégrant les pratiques actuelles et anticipant les pratiques futures.
juin 3, 2016
Formation · Vol. 20 Juin 2016

La formation en chirurgie thoracique et cardiovasculaire en France – Éditorial

Françoise Le Pimpec-Barthes, Présidente du Comité pédagogique de la SFCTCV. Service de chirurgie thoracique et transplantation pulmonaire, HEGP, Paris Pascal Dumont, Directeur du Collège de la SFCTCV. Unité de chirurgie thoracique, hôpital Trousseau, Tours   La SFCTCV, par l’intermédiaire de son Collège, a pour mission de veiller à la formation théorique et pratique des jeunes chirurgiens thoraciques et cardiovasculaires, en maintenant le niveau d’excellence de notre discipline afin de garantir des conditions optimales d’installation et d’exercice. Les modalités de cette formation, avec sa validation finale par l’examen du DESC lors des séances du collège, ont très peu évolué depuis une vingtaine d’années. Le constat est qu’actuellement il existe une certaine hétérogénéité du niveau de formation sur le territoire français. Cela a motivé une réflexion interne au sein de la SFCTCV, puis la réalisation d’un état des lieux des pratiques en France, en Europe et dans d’autres pays anglo-saxons. Celui-ci a été réalisé par le groupe des jeunes chirurgiens thoraciques et cardiovasculaires (AJCTCV) sous la direction de leur président, Charles-Henri David. Par cet éditorial, la SFCTCV remercie ce groupe de jeunes chirurgiens qui a fait un travail très précis, qui contribuera à l’amélioration à venir de notre système de formation. D’autre part ce travail est particulièrement important et bienvenu dans le contexte actuel car nous sommes en pleine réforme de l’internat. Cet état des lieux a été associé à une enquête de satisfaction auprès de nos jeunes afin d’évaluer leur ressenti concernant la formation telle qu’elle leur est proposée durant l’internat et le clinicat. Ces deux enquêtes relèvent d’importantes lacunes : manque d’information sur les enseignements disponibles ou informations données trop tardivement dans le cursus de l’interne, difficultés pour assister aux séances de formations théoriques du Collège dans certaines régions, hétérogénéité d’investissement des PU-PH dans la formation théorique et pratique, et bien d’autres points signalés dans l’article publié dans les pages qui suivent. Le manque d’information précoce délivrée aux jeunes est en grande partie dû à l’absence de lien entre le Collège et les universités des régions fournissant les autorisations d’inscription dans les spécialités. Cela se traduit par une incapacité pour le Collège d’identifier de façon exhaustive le nombre et l’identité des internes en cours de formation. Il est alors difficile de les informer des formations recommandées et disponibles à débuter le plus tôt possible dans leur cursus. Ce retard dans l’accès aux outils de formation peut pour certains internes déboucher sur un sentiment d’isolement et d’absence de réelle appartenance à un groupe de futurs spécialistes. En ce qui concerne les cours du Collège, il s’agit d’une formation théorique mise au point il y a plus de vingt ans, privilégiant un enseignement commun aux trois spécialités, cardiaque, thoracique et vasculaire. Les avantages de cette formule sont l’acquisition par les internes d’une culture générale dans les trois disciplines, mais avec comme inconvénient une réduction du volume d’enseignement par spécialité. La présence aux séances du Collège n’étant pas obligatoire et l’enseignement non validé par une évaluation des connaissances, il s’avère aujourd’hui impossible de garantir que chaque jeune ait acquis le socle de base nécessaire dans l’ensemble des domaines de la spécialité. En fait, il suffit d’une simple présence et de quelques présentations lors de quelques séances du Collège pour accéder à l’examen final basé sur un travail dans un seul domaine et au titre de chirurgien thoracique et cardiovasculaire. Avec un tel système, il est aisé de comprendre l’hétérogénéité finale de formation qui en résulte. Bien sûr, de nombreux enseignements parallèles existent, mais ceux-ci ont un coût important pour certains et parfois ne peuvent être suivis dans leur intégralité pour des raisons de disponibilité de l’interne. Tous ces points, et d’autres, qui sont détaillés dans l’article, expliquent probablement la satisfaction très mitigée exprimée par les jeunes concernant la formation théorique délivrée par le Collège (56,8 %), voire même leur insatisfaction (36,4 %). Concernant la formation pratique, elle aussi hétérogène selon les centres, la tenue d’un cahier d’activité de l’interne « Epiform » devrait pouvoir assurer un suivi individuel et continu en cours de formation. Cet outil devrait permettre dans l’avenir de s’assurer d’un apprentissage chirurgical régulier au cours de l’internat. Il reste à définir les modalités pratiques de son utilisation. Les modes de formations en dehors du territoire français sont aussi différents selon les pays. Là encore, l’article de l’AJCTCV fait une revue détaillée des pratiques au Canada, aux États-Unis, au Royaume-Uni, en Allemagne et en Suisse. L’hétérogénéité est de mise entre tous ces pays, allant d’un encadrement extrêmement précis, rigoureux avec entretien individuel et sélection des candidats pour l’entrée dans la spécialité, à l’inscription sur simple dossier et CV. Ces données serviront pour alimenter la réflexion de la SFCTCV sur les changements nécessaires dans la formation initiale impliquant tous les acteurs depuis les enseignants jusqu’aux jeunes eux-mêmes. C’est la raison principale pour laquelle le nouveau président de la SFCTCV, Pascal Thomas, a souhaité créer un Comité pédagogique qui sera le pivot central entre les différentes instances impliquées dans la formation et l’enseignement. Ce comité, composé de 15 membres, aura comme tâches de réformer les modalités d’enseignements lors des séances du Collège, de proposer un contrôle des connaissances, d’obtenir une régulation plus claire d’accès à la spécialité, d’effectuer un suivi plus personnalisé du cursus de chaque interne, et d’autres missions en lien avec les universités, les autres sociétés savantes et les organismes de formation continue. Ce projet doit pouvoir permettre à tous les internes de notre discipline d’avoir un accès à une formation complète théorique et pratique de haut niveau, intégrée dans un programme connu dès l’inscription dans la spécialité et validée individuellement selon des modalités qui seront définies dans un avenir proche.   > Lire le rapport de l'AJCTCV
juin 3, 2016