A la une · Chirurgie thoracique · Vol. 23 Décembre 2019

Chirurgie des tumeurs neuroendocrines pulmonaires : étude rétrospective de 253 cas

Armand Cluzel, Joséphine Chenesseau, Alex Fourdrain, Iliès Bouabdallah, Delphine Trousse, Geoffrey Brioude, Lucile Gust, Christophe Doddoli, Xavier Benoît D’Journo, Pascal Alexandre Thomas*   Service de chirurgie thoracique et des maladies de l’œsophage, Aix-Marseille université, CNRS, Iiserm, Centre de recherche en cancérologie (CRCM), hôpital Nord, Aix-Marseille université, Marseille.   * Correspondance : pathomas@ap-hm.fr   DOI : 10.24399/JCTCV23-4-CLU Citation : Cluzel A, Chenesseau J, Fourdrain A, Bouabdallah I, Trousse D, Brioude G, Gust L, Doddoli C, D’Journo XB, Thomas PA. Chirurgie des tumeurs neuroendocrines pulmonaires : étude rétrospective de 253 cas. Journal de chirurgie thoracique et cardio-vasculaire 2019;23(4). doi: 10.24399/JCTCV23-4-CLU   RÉSUMÉ Objectif : évaluer la prise en charge chirurgicale à visée curative des tumeurs neuroendocrines pulmonaires (TNEP) et sa qualité. Méthode : étude monocentrique rétrospective des patients opérés de TNEP de 2004 à 2018. Étaient évalués les données démographiques, la présentation clinique, les pratiques préopératoires, les pratiques chirurgicales (respect des recommandations sur le curage médiastinal), les traitements adjuvants et la survie. Résultats : deux cent cinquante-trois patients ont été opérés : 164 pour carcinoïde typique (CT), 39 pour carcinoïde atypique (CA), 17 pour carcinome neuroendocrine à grandes cellules (CNEGC) et 33 pour carcinomes à petites cellules (CPC). Sur cette période, on notait une augmentation des TNEP de 269%. L’exérèse réalisée était anatomique pour 239 patients (94%) avec un curage ganglionnaire respectant les recommandations ESTS (European Society of Thoracic Surgeons) dans 66% des cas avec 14,9±8 ganglions prélevés. La survie à 5 ans était de 85,5% pour les TNEP : 98% pour les CT, 96% pour les CA, 59% pour les CNEGC et 32% pour les CPC. L’atteinte ganglionnaire était un facteur de mauvais pronostic. Conclusion : en forte augmentation ces dernières années, la chirurgie des TNEP doit rester guidée par les principes oncologiques recommandés pour permettre une survie à long terme acceptable.   ABSTRACT Surgery of neuroendocrine pulmonary tumors: study of 253 cases Objective: To evaluate the management of pulmonary neuroendocrine tumors (PNETs) and quality of their surgery. Method: Retrospective single-centre study of patients operated on for a pulmonary neuroendocrine tumor from 2004 to 2018. We looked at demographic and clinical characteristics, preoperative work-up, surgical practices (focusing on lymphadenectomy), adjuvant therapies, and survival. Results: 253 patients were operated on: 164 for a typical carcinoïd (TC), 39 for an atypical carcinoïd (AC), 17 for a large cell neuroendocrine carcinoma (LCNEC) and 33 for a small cell carcinoma (SCC). Along this 14-year period, there was an increase in PNETs prevalence of 269% when comparing the 2 edge years. The resection was anatomical in 239 patients (94%). In 66% of the cases, the ESTS recommendations on intraoperative lymph node evaluation were completed with an average of 14.9±8 nodes removed/examined. The 5-year survival rate was 85.5% for the PNETs: 98% for TCs, 96% for ACs, 59% for LCNECs and 32% for SCCs. A lymph node involvement was a negative pronosticator on the whole cohort with marked differences according to the pathological subtypes. Conclusion: we faced a strong increase in PNET incidence at our center. Our results are concordant with data from the literature. Compliance to oncological principles guiding their surgery led to adequate long-term survival.   1. Introduction Les tumeurs neuroendocrines pulmonaires (TNEP), selon la classification de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), regroupent les carcinomes à petites cellules (CPC), les carcinomes neuroendocrines à grandes cellules (CNEGC), les tumeurs carcinoïdes typiques (CT) et atypiques (CA). Ces 4 tumeurs sont actuellement réparties en 3 grades de prolifération tumorale : bas grade (CT), intermédiaire (CA) et haut grade (CPC, CNEGC) [4]. Leurs caractéristiques anatomopathologiques de distinction reposent sur celles de Travis et al. [11] non modifiées dans la classification de WHO 2015 [11]. Au niveau international, différentes équipes retrouvent une légère augmentation des TNEP, une étude américaine reporte une augmentation de 6% par an depuis 30 ans. Cette augmentation porte principalement sur les tumeurs carcinoïdes. Les TNEP représenteraient entre 1 à 20% de tous les cancers du poumon [1,9]. Leur incidence serait de 0,2 à 2 cas pour 100,000 [2,4] et 25 à 30% de toutes les tumeurs neuroendocrines [4,9]. Le pronostic des TNEP varie en fonction du type histologique. Dans les cancers bronchopulmonaires (CBP), les CNEGC représentent 3% avec une survie à 5 ans de 53% [2] ; les tumeurs carcinoïdes 1 à 2%, dont 80 à 90% sont des CT [3] ; les CPC 15% [4]. Certains cas de CPC sont découverts sous des formes localisées justifiant un traitement local de première intention dans le cadre d’une chirurgie diagnostique et thérapeutique, bien que la chirurgie puisse être discutée au cas par cas dans des formes diagnostiquées précocement. Dans le cadre d’une étude rétrospective monocentrique de 253 cas de 2004 à 2018, nous apporterons notre expérience sur la prise en charge des TNEP en précisant notamment les données démographiques, la présentation clinique, les pratiques préopératoires (endoscopie interventionnelle, place du TEP-scanner), les pratiques chirurgicales (types de chirurgies, respect des recommandations sur le curage ganglionnaire), les traitements adjuvants et la survie.   2. Patients et méthodes Il s’agit d’une étude monocentrique incluant les patients de septembre 2004 à décembre 2018. L’étude inclut tous les patients opérés dans notre service de chirurgie thoracique avec un diagnostic histologique postopératoire de TNEP selon la classification de WHO 2015 [annexe 1]. La base de données a été extraite localement du registre Epithor (numéro CNIL 809839). Hors urgences, tous les patients ont eu un bilan d’opérabilité compatible avec la résection pulmonaire envisagée. Les patients ont été suivi du jour de l’entrée en service, jusqu’à leurs dernières nouvelles incluant le décès. Les patients perdus de vue ont été évalués par rapport à la date des dernières nouvelles. La date de point et de recueil de données est le 31 décembre 2018. Pour chaque patient il a été recueilli : Les données épidémiologiques : date de naissance, sexe, taille, poids, épreuves fonctionnelles respiratoires, date de l’intervention, épreuve d’effort (si présente), antécédents, le suivi. Les données de présentation clinique. Les examens de médecine nucléaire. La réalisation de fibroscopie avec ou sans geste interventionnelle. L’acte chirurgical avec la voie d’abord utilisée, le geste de résection effectué. L’analyse anatomopathologique, le nombre de ganglions, le nombre de sites médiastinaux, le respect des recommandations européennes du curage ganglionnaire (6 ganglions minimum dont 3 ganglions intraparenchymateux et 3 ganglions médiastinaux de trois stations différentes dont au moins la station 7) et reclassé (si besoin) avec la 8e classification TNM des CBP. La prise en charge postopératoire, le traitement adjuvant. Les analyses statistiques ont consisté au calcul des moyennes présentées avec un leur écart type, le calcul des médianes avec leurs intervalles. La comparaison des populations a été faite par une analyse univariée par la méthode du Chi2. La survie a été calculée entre la date de l’intervention et la date des dernières nouvelles (vivant/mort). Les taux de survie ont été exprimés à 5 et 10 ans. La comparaison s’est faite selon la méthode de Kaplan-Meier avec analyse des sous-groupes selon la méthode du log-rank. Les analyses statistiques ont été réalisées par le logiciel SPSS 2019.   3. Résultats   3.1. Données épidémiologiques Nous avons recensé 253 cas de TNEP opérées du 26 septembre 2004 au 31 décembre 2018. On comptait 140 femmes et 113 hommes soit un ratio de 1,23 femme pour un homme. Les TNEP se décomposaient en : 164 CT (64,8%), 39 CA (15,4%), 17 CNEGC (6,7%), 33 CPC (13%). Toutes les caractéristiques épidémiologiques en fonction du sexe sont récapitulées dans le tableau 1 pour les TNEP et par type histologique dans le tableau 2. Nous avons observé dans notre centre une augmentation relative du nombre de TNEP opérées entre 2015 et 2018 de 269%, soit 18,23% par an. L’augmentation est due principalement à l’augmentation des CT représentée dans la figure 1.   Tableau 1. Caractéristique clinique des patients opérés de TNEP. TNEP N=253 Femme N=140 Homme N=113 Âge diagnostic moyen (DS) 56,08 (16,57) 54 (15,62) 58 (15,57) Âge diagnostic médian 60 59 60 Taille (cm) (DS) 168 (8,95) 163 (6,71) 175 (5,3) Poids (kg) (DS) 73 (16,51) 66 (14,1) 82 (11,6) Tabagisme actif (%) 26 (10) 12 (8) 14 (12) Tabagisme sevré (%) 122 (48) 52 (37) 70 (62) Non fumeur (%) 105 (41) 74 (52) 29 (26) Comorbidité 214 (84) 113 (80) 101 (89) Pathologie auto-immune et allergie 23 (9) 15 (10) 8 (7) Addiction (éthylisme, toxicomanie) 6 (2) 1 (0,7) 5 (4) Pathologie cardiovasculaire 109 (43) 50 (35) 59 (52) Thérapeutique (anticoagulant, antécédant de chimiothérapie) 38 (15) 20 (14) 18 (16) Pathologie respiratoire 38 (15) 21 (15) 17 (15) Antécédent de cancer 64 (25) 33 (23) 31 (27) Démence, déficit moteur, pathologie psychiatrique 13 (5) 11 (7) 2 (2) Obésité, dénutrition, diabète 46 (18) 26 (18) 20 (18) Pathologie hormonodépendante 14 (5) 12 (8) 2 (2) Pathologie digestive 41 (16) 29 (20) 12 (11) Pathologie urologique et néphrologique 9 (3) 1 (0,7) 8 (7) Infection virale chronique (VHC, VHB, VIH) 6 (2) 3 (2) 3 (3)   Tableau 2. Âge moyen au diagnostic et statut tabagique des sous-types histologiques des TNEP. CT N=164 CA N=39 CNEGC N=17 CPC N=33 Âge diagnostic moyen (DS) 54,2 (16,4) 54 (21,4) 64,65 (9,7) 62,88 (9,8) Âge diagnostic médian 58 62 64 63 Tabagisme actif (%) 17 (3) 2 (5) 2 (11) 5 (15) Tabagisme sevré (%) 63 (38) 17 (43) 14 (82) 28 (84) Non fumeur (%) 84 (51) 20 (51) 1 (5) 0 (0)   [caption id="attachment_4620" align="aligncenter" width="251"] Figure 1. Représentation des TNEP en fonction du type histologique.Figure 1A : évolution des TNEP et ses sous-types en fonction des années de prise en charge.Figure 1B : représentation des stades TNM en pourcentage des TNEP et des sous-types histologiques.[/caption]   3.2. Présentations cliniques Dans notre étude, la majorité des cas sont des découvertes fortuites (38,7%). Les symptômes évocateurs sont ceux d’une irritation bronchique : pneumopathie 17%, toux 15%, hémoptysie 11,1%. Des manifestations endocrines paranéoplasiques ont été observées chez 5 patients : syndrome de Cushing (n=3) et carcinoïde (n=2). Les signes et symptômes conduisant au diagnostic sont résumés dans le tableau 3.   Tableau 3. Récapitulatif des symptômes/signes d’entrée en diagnostic. TNEP (%) CT (%) CA (%) CNEGC (%) CPC (%) Fortuite 98 (38,7)     66 (40) 9 (23) 6 (35) 17 (51) Pneumopathie 44 (17,3) 32 (19) 11 (28) 0 (0) 1 (3) Hémoptysie 28 (11,1) 12 (7) 11 (28) 3 (17) 2 (6) Dyspnée 14 (5,5) 7 (4) 6 (15) 1 (5) 0 (0) Toux 38 (15) 27 (16) 8 (20) 2 (11) 1 (3) Dysphonie 1 (0,3) 0 (0) 1 (2) 0 (0) 0 (0) AEG 5 (2) 2 (1) 0 (0) 2 (11) 1 (3) Cushing 3 (1,2) 2 (1) 1 (2) 0 (0) 0 (0) Pancréatite 1 (0,4) 1 (0,6) 0 (0) 0 (0) 0 (0) Paranéoplasique 6 (2,3) 6 (3) 0 (0) 0 (0) 0 (0) Surveillance 18 (7,1) 8 (4) 0 (0) 3 (17) 7 (21) Douleur 1 (0,4) 1 (0,6) 0 (0) 0 (0) 0 (0) Neurologique 3 (1,2) 0 (0) 0 (0) 0 (0) 3 (9) Dermatomyosite 1 (0,4) 0 (0) 0 (0) 0 (0) 1 (3) Syndrome carcinoïde 1 (0,4) 0 (0) 1 (2) 0 (0) 0 (0)   3.3. Examens de médecine nucléaire Parmi les 253 patients de l’étude, 226 (89%) ont bénéficié d’un examen d’imagerie nucléaire. Nous avons classé les examens en fonction de leur traceur : TEP-FDG n=197, Octréoscan n=22, TEP-DOPA n=7. Dans le groupe TEP-FDG, 173 examens étaient considérés comme positifs (87%) et 24 étaient considérés comme négatifs (13%). En termes de valeur numérique, seulement 120 comptes rendus indiquaient une valeur de SUV. La moyenne était de 6±4 SUV [intervalle : 0-22,5]. Les Octréoscans n’avaient pas de valeur numérique, en revanche 40% des examens étaient positifs. En ce qui concerne les 7 examens de TEP-DOPA, une seule valeur numérique était répertoriée. Les résultats des examens de médecine nucléaire sont donnés dans le tableau 4.               Tableau 4. Récapitulatif des examens de médecine nucléaire. TNE CT CA CNEGC CPC TEP-FDG N=197 N=122 N=28 N=16 N=31 Positif (%) 173 (87) 103 (84) 24 (85) 15 (93) 31 (100) Négatif (%) 24 (13) 19 (16) 4 (15) 1 (7) 0 (0) Octréoscan N=22 N=18 N=3 N=0 N=1 Positif (%) 9 (41) 6 (33) 2 (66) 0 (0) 1 (100) Négatif (%) 13 (59) 12 (67) 1 (34) 0 (0) 0 (0) TEP-DOPA N=7 N=6 N=1 N=0 N=0 Positif (%) 6 (85) 5 (83) 1 (100) 0 (0) 0 (0) Négatif (%) 1 (15) 11 (17) 0 (0) 0 (0) 0 (0)   3.4. Données de l’endoscopie bronchique Cent soixante-trois fibroscopies préopératoire sont recensées, soit 64,42% des patients. Parmi elles, 93 (57%) étaient jugées comme contributives et ont apporté une analyse histologique préopératoire de certitude maligne ou d’orientation. Le diagnostic de CPC n’a jamais été obtenu en préopératoire par fibroscopie. Une désobstruction bronchique préopératoire avait été réalisée dans 7,11% des cas.   3.5. Chirurgie et suites postopératoires Sur les 253 patients, 2 ont été opérés en urgence en raison d’une hémoptysie active et menaçante. Le motif d’urgence pour 1 cas était une hémoptysie massive avec pneumonectomie d’hémostase sans exploration précédente (le patient n’était pas connu). Le deuxième cas pour l’apparition d’hémoptysies abondantes chez un patient connu et exploré. Dans le premier cas il n’y a pas eu de curage. Les 253 interventions ont consisté en pneumonectomie, lobectomie, segmentectomie, résection atypique (± lobectomie). Une intervention pouvait comprendre plusieurs gestes de résection. Les gestes chirurgicaux sont résumés dans le tableau 5 où les résections atypiques isolées ne sont pas représentées.   Tableau 5. Résection anatomique carcinologique.   TNEP CT CA CNEGC CPC Pneumonectomie 9 0 3 1 5 Bilobectomie 16 13 3 0 0 Lobectomie 190 124 29 15 22 Segmentectomie 24 19 3 0 2 Lobectomie bronchoplastique 37 27 6 2 2   Au cours des interventions, des gestes associés ont dû/pu être réalisés, à type de résection cunéiforme, lambeaux intercostaux, résection anastomose de bronche et/ou artère, pneumolyse. Dans notre série, une résection cunéiforme et cinq lambeaux intercostaux sont retrouvés. Lors de résection anastomose d’artère (3 dans notre cohorte), 2 sont concomitantes d’une résection anastomose de bronche. Dans les 15 premiers jours postopératoires, il y a eu 6 réadmissions, 2 pour épanchements, 4 pour infections sur poumon opéré. Il n’y a pas de réadmission au-delà de J15. Dans les 90 jours postopératoires, 95 patients ont présenté des complications qui sont résumées dans le tableau 6. Sur les 5 décès, 1 n’est pas lié à la prise en charge chirurgicale mais à une évolution rapide d’un CPC.   Tableau 6. Complications postopératoires de 0 à 90 jours.   TNEP % Atélectasie 8 3,16 Bullage >5J 22 8,69 Détresse respiratoire aiguë 7 2,76 Paralysie phrénique 1 0,39 Pneumopathie 18 7,11 Embolie pulmonaire 4 1,58 Fibrillation auriculaire 14 5,533 Infarctus du myocarde 1 0,39 Insuffisance cardiaque 1 0,39 Chylothorax 5 1,97 Hémorragique 3 1,18 Caillotage 5 1,97 Anémie 1 0,39 Luxation aryténoïde 1 0,39 Paralysie récurrentielle 10 3,95 Insuffisance rénale 2 0,79 Rétention aiguë d’urine 4 1,58 Infection urinaire 2 0,79 Ulcère gastroduodénale 1 0,39 Décès 5 1,97   3.6. Critères qualité de la chirurgie et données anatomopathologiques 93% des patients ont eu une évaluation ganglionnaire soit 237/253 interventions : 209 curages ganglionnaires complets et 28 échantillonnages selon les comptes rendus opératoires. Parmi les curages ganglionnaires complets, seulement 162 curages (78%) respectent les recommandations de l’ESTS. Il y a eu en outre 7 cas de curage lobe-orienté qui respectaient les recommandations, soit un total de 169 évaluations ganglionnaires conformes sur 252 patients (1 patient en urgence vitale absolue), et donc 66% des patients de cette cohorte. Dans 59 cas, un envahissement ganglionnaire (N+) était observé. Le ratio ganglionnaire de ces interventions était de 19,5%. Ces données sont résumées dans le tableau 7.   Tableau 7. Évaluation ganglionnaire.   TNEP CT CA CNEGC CPC Nombre de ganglions prélevés (DS) 14,9 (7,9) 14,0 (7) 16,1 (7) 17,3 (9,4) 15,9 (10,9) Nombre de ganglions médiastinaux prélevés (DS) 8,6 (5,9) 8 (5,5) 8,5 (4,5) 11 (6,83) 9,8 (8,1) Nombre de ganglions intraparenchymateux prélevés (DS) 6,3 (3,9) 6 (3,7) 7,5 (4,4) 6,38 (3,7) 6 (4,4) Nombre de ganglions positif (DS) 0,6 (1,5) 0,2 (0,7) 1,05 (1,5) 0,4 (0,7) 1,6 (2,7) Nombre de stations médiastinales explorées (DS) 3,4 (1,4) 3,4 (1,5) 3,5 (1,4) 3,6 (1,3) 3 (1,2) Respect critère de l’ESTS sur le curage ganglionnaire (%) 168 (66) 104 (63%) 30 (76%) 11 (64%) 14 (42%)   Les résultats TNM sont représentés dans la figure 1B en pourcentage et par sous-type histologique. Dans la prise en charge adjuvante, nous notons deux interventions chirurgicales (l’une pour marge non saine dans le cadre d’une CT et l’autre pour résection d’une métastase cérébrale dans le cadre d’un CPC), 32 chimiothérapies et 14 radiothérapies. Il y a eu une chimiothérapie pour une atteinte ganglionnaire de CA en 2004. Dans le groupe CNEGC, les chimiothérapies ont été effectuées en cas d’atteinte ganglionnaire pour 4 d’entre eux et pour une tumeur T4, un seul cas ne présente pas d’atteinte ganglionnaire ni de T4 mais a tout de même eu une chimiothérapie en 2006. Tous les CPC ont eu une indication de chimiothérapie mais seulement 25 cas l’ont reçue.  Toutes les radiothérapies adjuvantes avaient été réalisées dans le cadre de CPC.   3.7. Suivi et étude de survie Le suivi a été assuré en moyenne pendant 49±43 mois avec une médiane de 33 mois (intervalle : 4 jours à 156 mois). Sur les 253 patients, 33 sont décédés, 6 décès de complications chirurgicales (2 fistules bronchiques, 1 hémoptysie massive sur une fistule artériobronchique, 1 hémorragie à domicile sans précision, 1 embolie pulmonaire, 1 syndrome de défaillance multiviscérale sur un point de départ septique) et 27 patients sont décédés d’une récidive de leur TNEP sans précision. Le taux de survie est représenté par des courbes de survie selon la méthode de Kaplan-Meier de manière globale par sous-type et par statut ganglionnaire (N0/N+) sur les figures 2 et 3. Les taux de survie à 5 et 10 ans sont représentés dans le tableau 8 et par statut ganglionnaire, ainsi que par respect des critères ESTS. Sur la figure 4 représentation des courbes de survie des CPC avec et sans respect des critères ESTS.   [caption id="attachment_4621" align="aligncenter" width="300"] Figure 2. Survie des TNEP en fonction du type histologique.[/caption] [caption id="attachment_4622" align="aligncenter" width="300"] Figure 3. Survie des TNEP en fonction des types histologiques et en fonction de l’atteinte ganglionnaire N0/N+ (comparaison par log-rank).A : carcinoïde typique (p=0,496) ; B : carcinoïde atypique (p=0,305) ; C : carcinome à grande cellules (p=0,887) ; D : carcinome à petites cellules (p=0,03).[/caption] Tableau 8. Taux de survie à 5 et 10 des TNEP par sous-type et leur statut N positif ou négatif. Survie TNEP CT CA CNEGC CPC 5 ans 85,5% 98,1% 96,3% 58,7% 32,3% 10 ans 81,8% 98,1% 69,3% 58,7% 24,2% N0 5 ans 89,6% 97% 100% 55,6% 44,8% N0 10 ans 87,9% 97% 66,7% 55,6% 44,8% N+5 ans 71,3% 100% 91,7% 75% 19,2% N+10 ans 58,1% 100% 61,1% 75% 0% N0 vs N+ (log-rank) <0,001 0,496 0,305 0,887 0,03 Curage ESTS respecté à 5 ans 81% 94% 94% 47% 36% Curage ESTS non respecté à 5 ans 91% 100% 100% 87% 16% ESTS respecté vs ESTS non respecté (log rank) 0,06 0,17 0,78 0,21 0,34   [caption id="attachment_4623" align="aligncenter" width="300"] Figure 4. Survie des CPC en fonction du respect des critères ESTS pour le curage, p=0,34.[/caption]   4. Discussion Les TNEP représentent un groupe de 4 types histologiques différents de gravité pronostique croissante selon le grade : les CT dits de bas grade, les CA de grade intermédiaire, les CNEGC et les CPC de haut grade. La distribution par genre a été de 1,23 femme pour un homme. Cette prépondérance du sexe féminin est en contradiction avec certaines données de la littérature sur les TNEP dans lesquelles une prépondérance masculine forte est mentionnée [1,5]. Cette différence est liée à la forte représentation des CT dans notre cohorte et son augmentation, type histologique pour lequel une prépondérance féminine est classique. En revanche, sur les études spécifiques sur les sous-types histologique, nos valeurs sont en corrélation avec la littérature [6,10], respectivement 63% de femmes pour les CT, 51% pour les CA, 29% pour les CNEGC et enfin 33% pour les CPC. L’âge au diagnostic s’étend de 14 à 84 ans, avec une moyenne de 56 ans ±16,6. Pour les hommes l’intervalle est de 16 à 84 ans avec une moyenne de 58 ans ±16,6 ans. Pour les femmes, l’âge au diagnostic est plus précoce avec des bornes de 14 à 81 ans, une moyenne de 54 ans ±15,62 ans. Ces données sont concordantes avec celles de la littérature [1-13]. La répartition des sous-catégories par ordre décroissant est de 64% de CT, 15% de CA, 6% de CPC et 1% de CNEGC, avec 80% de CT dans le groupe des carcinoïdes. Les circonstances du diagnostic, toutes TNEP confondues, ont été à 38,6% fortuites, 17% une pneumopathie obstructive, 15% la toux. Les CA et les CNEGC étaient plus souvent symptomatiques avec 28% de pneumopathie et hémoptysie pour les CA et 17% d’hémoptysie pour les CNEGC. Une fibroscopie interventionnelle avec désobstruction a été effectuée dans 19,4% des patients ayant eu une fibroscopie préopératoire, essentiellement dans le contexte d’une pneumopathie obstructive d’amont (17%). Dans notre étude rétrospective, sur presque 15 ans de chirurgie des TNEP, nous obtenons une cohorte de 253 patients, avec une augmentation de 2005 à 2018 de 269%, soit une augmentation annuelle moyenne de 19%. Cette augmentation a porté principalement sur celle des CT. En effet, les CT ont eu une augmentation de 325%. Cette observation est bien au-delà de l’étude japonaise qui fait état d’une hausse de 6% par an depuis 30 ans [2], et laisse supposer, outre une augmentation d’incidence de ces tumeurs, des réorganisations régionales du recrutement du service. Les TEP-FDG, contrairement aux idées reçues, ont été analysées comme “positives” dans 84% des cas dans notre série. Les résultats collectés sur les TEP-scanner sont cependant très difficiles d’interprétation devant les absences fréquentes dans le compte rendu des valeurs de SUV max et hépatique, l’absence de nomenclature et de directives collégiales sur les interprétations, ainsi que l’évolution des machines et les multitudes des appareils utilisés. Néanmoins, nos résultats suggèrent plutôt que les TNEP sont des tumeurs hypermétaboliques avec un SUV moyen (sur les données disponibles) de 4,28, et 5,10 pour la littérature [12]. Nous avons logiquement observé un hypermétabolisme plus prononcé pour les TNEP de haut grade. L’étude américaine publiée en 2015 [10] annonce des résultats de 100% de fixation pour toutes les TNE excepté les CT, ce qui est donc partiellement en contradiction avec nos résultats. La prise en charge chirurgicale a consisté en une résection anatomique monobloc dans 94,7% des cas, 191 lobectomies, 37 résections infralobaires et 9 pneumonectomies. Dix-huit résections anastomoses bronchiques ont été réalisées dont 2 avec résection anastomose artérielle. Sur les critères du curage ganglionnaire, 67% des interventions ont respecté les recommandations de l’ESTS. Sur l’atteinte ganglionnaire, 74% des patients étaient N0, 15% N1 et 8% N2. Les informations dans la littérature sur le détail du curage en ce qui concerne les CT font état de 17% d’atteinte ganglionnaire contre 13% ici et 45% pour les CA contre 43% [11]. L’étude de la Nouvelle-Orléans reporte 34% d’atteinte ganglionnaire médiastinale sur une cohorte de 121 patients opérés [8] en concordance avec le taux de 36% que nous avons observé. Le taux de récidive était de 13% toutes TNEP confondues, 2% CT, 17% CA, 23% CNEGC et 54% pour les CPC, ce qui est globalement conforme aux données de la littérature : 5% pour les CT et 20% pour les CA [11]. Le pronostic des TNEP est très variable en fonction de son grade, les CPC ont un taux de 32 et 24% de survie à 5 et 10 ans. En ce qui concerne les CT, en fonction des études il est reconnu un bon pronostic de survie à 5 ans variant de 80 à 100% [1,2,6,9]. Les CA ont des valeurs très étalées en fonction des études de 25 à 100% [1,2,6] et 13,4% pour les CNEGC [6]. Dans notre analyse, selon la méthode de Kaplan-Meier, la survie à 5 ans toutes TNEP est de 85,5% et de 81,8% à 10 ans. On note également une différence significative sur la survie sur l’atteinte ganglionnaire dans le groupe TNEP et CPC. En conclusion, cette étude monocentrique rétrospective suggère une augmentation épidémiologique de ces tumeurs. Nous avions souhaité étudier l’ensemble de ces tumeurs en un groupe, en dépit des différences pronostiques majeures observées dans le spectre de ces tumeurs. La raison en était principalement l’impression, confirmée par ce travail, de la grande similitude pronostique “dans la vraie vie” des tumeurs carcinoïdes typiques et atypiques d’une part, et des TNEP à grandes cellules et à petites cellules quand elles sont opérées, d’autre part. Enfin, il nous paraissait important de tester les dernières évolutions de la classification TNM sur ce type de tumeur, ce qui correspond à une zone “grise” de la littérature contemporaine. De même, il n’est plus possible en 2019 de présenter une cohorte chirurgicale sans un minimum d’information concernant la qualité de la chirurgie qui a été réalisée. Le focus sur le curage ganglionnaire montre que, même dans une équipe universitaire à haut volume d’activité et convaincue de l’importance du curage ganglionnaire, ce dernier n’avait été réalisé conformément aux recommandations internationales de pratiques, pourtant minimalistes, que chez 2 patients sur 3. La marge de progression est donc substantielle.   ANNEXE 1   – Tumeur carcinoïde typique : tumeur à morphologie carcinoïde avec moins de 2 mitoses par 2 mm2 (10 HPF), pas de nécrose et mesurant au moins 0,5 cm.   – Tumeur carcinoïde atypique : tumeur à morphologie carcinoïde avec 2 à 10 mitoses par 2 mm2 (10 HPF) et/ou nécrose (souvent punctiforme).   – Carcinome neuroendocrine à grandes cellules : architecture neuroendocrine : nids, travées, rosettes, palissades ; index mitotique élevé : ≥11 mitoses par 2 mm2 (10 HPF), moyenne de 70 par 2 mm2 (10 HPF) ; nécrose (souvent de larges zones) ; cellules tumorales larges avec cytoplasme modéré à abondant ; nucléole fréquent (diag diff CBPC); un ou plusieurs marqueurs neuroendocrines positifs en immunohistochimie chromogranine, synaptophysine et CD56. Un marqueur est suffisant si >50% cellules tumorales ; variant combiné : avec un autre carcinome non CBPC. – Carcinome à petites cellules : petite taille des cellules (en général < au diamètre de trois petits lymphocytes) ; peu de cytoplasme ; chromatine granuleuse, nucléoles absents ; déformation (moulding) nucléaire ; index mitotique élevé : ≥10 mitoses par 2 mm² (10 HPF), moyenne de 80 par 2 mm2 (10 HPF) ; nécrose fréquente, souvent en larges plages ; variant combiné : avec un autre carcinome ; e.n IHC : kératine AE1/AE3 souvent en dots. Marqueurs neuroendocrines (CD56, chromogranine et synaptophysine) souvent + (10% cas négatifs). TTF1 + dans 90% des cas   Il existe donc 3 grades de prolifération tumorale de malignité croissante distinguant les carcinoïdes typiques, les atypiques et les tumeurs de haut grade de malignité regroupant les carcinomes à petites cellules et les carcinomes neuroendocrines à grandes cellules.   Références Ichiki Y, Matsumiya H, Mori M, Kanayama M, Nabe Y, Taira A, Shinohara S, Kuwata T, Takenaka M, Hirai A, Imanishi N, Yoneda K, Noguchi H, Shimajiri S, Fujino Y, Nakayama T, Tanaka F. Predictive factors of postoperative survival among patients with pulmonary neuroendocrine tumor. J Thorac Dis 2018 Dec;10(12):6912-6920. https://doi.org/10.21037/jtd.2018.11.115 PMid:30746237 PMCid:PMC6344740 Gosain R, Mukherjee S, Yendamuri SS, Iyer R. Management of Typical and Atypical Pulmonary Carcinoids Based on Different Established Guidelines. Cancers (Basel) 2018 Dec 12;10(12) pii: E510 https://doi.org/10.3390/cancers10120510 PMid:30545054 PMCid:PMC6315766 Man D, Wu J, Shen Z, Zhu X. 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Référentiel Auvergne Rhône-Alpes en oncologie thoracique 15e édition mise à jour 2019.   Conflit d’intérêt : aucun. / Conflict of interest statement: none declared.  Date de soumission : 28/08/2019. Acceptation : 09/09/2019.    
décembre 13, 2019
Chirurgie thoracique · Vol. 23 Décembre 2019

Prise en charge des fistules aortiques à l’étage thoracique : expérience bicentrique

Antoine Defontaine1,2*, Majid Harmouche2, Jacques Tomasi1, Florent Le Bars1, Abdelhakim Elmraki2, Jean-Philippe Verhoye1, Robert Martinez2   Service de chirurgie thoracique et cardiovasculaire, CHU de Rennes. Service de chirurgie thoracique et cardiovasculaire, CHRU de Tours.   *Correspondance : a.defontaine@laposte.net   DOI : 10.24399/JCTCV23-4-DEF Citation : Defontaine A, Harmouche M, Tomasi J, Le Bars F, Elmraki A, Verhoye JP, Martinez R. Prise en charge des fistules aortiques à l’étage thoracique : expérience bicentrique. Journal de chirurgie thoracique et cardio-vasculaire 2019;23(4). doi: 10.24399/JCTCV23-4-DEF   RÉSUMÉ La survenue d’une fistule aortique à l’étage thoracique (fistule aortobronchique ou aorto-œsophagienne) est un événement rare dont l’évolution naturelle est bien souvent fatale. Leur prise en charge relève de l’urgence et reste peu codifiée. L’objectif de cette étude rétrospective bicentrique est de rapporter l’expérience de nos centres dans le traitement et la prise en charge de malades présentant une fistule aortique thoracique. Sept malades (6 hommes et 1 femme) âgés de 64,1±11,3 ans étaient pris en charge pour une fistule de l’aorte thoracique entre 2001 et 2018 : quatre malades (57%) présentaient une fistule aortobronchique (dont 2 fistules secondaires) et trois malades (43%) présentaient une fistule aorto-œsophagienne. La durée de suivi était de 21 mois. La survie était de 71% à 30 jours et de 43% à 1 an. La survenue d’une fistule aortique thoracique est un événement au pronostic sombre nécessitant une prise en charge pluridisciplinaire dans des centres experts et dont la stratégie globale de traitement doit encore être définie et évaluée.   ABSTRACT Management of fistulas with the thoracic aorta: a bi-centric experience The occurrence of thoracic aortic fistula (aorto-bronchial or aorto-esophageal) is a rare event whose natural course is often fatal. Treatment is urgent but remains poorly codified. The objective of this bicentric retrospective study was to report the experience of our centers in the treatment and management of patients with thoracic aortic fistula. Seven patients (6 men and 1 woman) aged 64.1 ± 11.3 years were treated for a thoracic aortic fistula between 2001 and 2018: four patients (57%) presented aorto-bronchial fistula (2 secondary fistulas) and three patients (43%) had aorto-esophageal fistula. The follow-up time was 21 months. Survival was 71% at 30 days and 43% at 1 year. The occurrence of thoracic aortic fistula is an event with a poor prognosis requiring multidisciplinary management in expert centers and whose global treatment strategy has yet to be defined and evaluated.   1. Introduction La survenue de fistule aortique est un événement rare dont l’évolution naturelle est bien souvent fatale. Au niveau de l’aorte thoracique, les fistules apparaissent avec les organes de voisinage (bronches, œsophage) et sont dans la majorité des cas révélées par une hémoptysie ou une hématémèse. Dans la littérature, une centaine de cas ont été relatés et l’on distingue les fistules primaires (survenant de novo) des fistules secondaires (survenant chez des malades déjà opérés de l’aorte thoracique et/ou du thorax) [1-5]. La prise en charge des malades présentant une fistule aortique relève de l’urgence mais reste peu codifiée. Relevant initialement d’intervention par voie conventionnelle, la prise en charge chirurgicale vasculaire immédiate est de plus en plus fréquemment réalisée par voie endovasculaire. La prise en charge globale des malades est variable et dépend de l’étiologie de la fistule ainsi que de l’expérience, de l’habitude et de la disponibilité d’un dépôt d’endoprothèses de chaque centre. L’objectif de cette étude est de rapporter l’expérience de nos centres dans le traitement et la prise en charge de malades présentant des fistules aortiques à l’étage thoracique (fistules aortobronchiques ou aorto-œsophagiennes).   2. Matériel et méthodes Les malades pris en charge pour une fistule de l’aorte thoracique (fistule aortobronchique ou aorto-œsophagienne) entre octobre 2001 et janvier 2018 dans nos centres étaient analysés. La date d’inclusion correspondait à la date opératoire du traitement de cette fistule. Les malades justifiaient tous d’une prise en charge en urgence adaptée selon l’état clinique, les antécédents et les comorbidités. Le recueil de données était rétrospectif. Le devenir des malades, les complications précoces (au 30e jour postopératoire), ainsi que les complications tardives les plus significatives étaient répertoriés. Ces analyses descriptives étaient réalisées à l’aide du logiciel Microsoft Excel® (Redmond, Washington, États-Unis). Les analyses de survie étaient réalisées avec le logiciel GraphPad Prism® (La Jolla, Californie, États-Unis). Les images scanographiques étaient analysées avec le logiciel Therenva EndoSize® (Rennes, France). Les malades traités et suivis dans nos centres étaient analysés. En cas de suivi ultérieur dans un autre centre, les malades étaient considérés comme perdus de vue à la date de leur dernière consultation.   3. Résultats Sept malades (6 hommes et 1 femme) âgés en moyenne lors de la chirurgie de 64,1±11,3 ans (médiane 68 ans, [51;76]) étaient pris en charge pour une fistule de l’aorte thoracique. Quatre malades (57%) présentaient une fistule aortobronchique (parmi lesquels 2 – 29% – avaient des antécédents de chirurgie aortique thoracique) et trois malades (43%) présentaient une fistule aorto-œsophagienne. La durée moyenne de suivi était de 670,1±1001,7 jours (médiane 163 jours, [4;2410]). Les caractéristiques des malades lors de la prise en charge sont données résumées dans le tableau 1.   Tableau 1. Caractéristiques de la population étudiée. Malades (n=7) Femmes, n (%) 1 (14) Âge lors de la prise en charge (années)   64,1±11,3 [51;76] médiane 68 ans Type de fistule, n (%) aortobronchique aorto-œsophagienne   4 (57) 3 (43) Chirurgie aortique thoracique précédente, n (%) 2 (29) Comorbidités, n (%) tabac HTA cancer   3 (43) 2 (29) 2 (29) Symptômes inauguraux, n (%) hémoptysie hématémèse autre   3 (43) 3 (43) 1 (14) Type de chirurgie, n (%) TEVAR ouvert   6 (86) 1 (14)   Les symptômes inauguraux étaient représentés par une hémoptysie pour 3 malades (43%), une hématémèse pour 3 malades (43%) et une fièvre prolongée sans point d’appel pour 1 malade (14%) déjà opéré d’un faux anévrysme chronique sur une rupture d’isthme aortique méconnue. Le délai moyen entre les premiers symptômes et la prise en charge chirurgicale était de 7,8±10,4 jours (médiane 4 jours, [0;27]). Deux malades (29%) présentaient une fistule aortobronchique primaire [tableau 2] : Un malade de 68 ans, sans antécédent notable et initialement pris en charge pour des crachats hémoptoïques dans un hôpital périphérique, était transféré dans un de nos centres après mise en évidence d’un anévrysme rompu de l’aorte thoracique descendante. Une endoprothèse thoracique était posée 27 jours après l’apparition des premiers symptômes. Les suites opératoires étaient simples avec disparition des crachats hémoptoïques. Le malade était perdu de vue après 204 jours de suivi. Un malade de 51 ans, aux antécédents de toxicomanie sevrée et tabagisme, présentait des douleurs thoraciques et des crachats hémoptoïques révélant un anévrysme de l’aorte thoracique descendante rompu. Une endoprothèse thoracique était implantée 2 jours après les premiers symptômes [figure 1]. Les suites immédiates étaient marquées par l’apparition d’un syndrome infectieux révélant une endocardite aortique et une rupture œsophagienne par saillie du sac anévrysmal. Un traitement antibiotique était instauré puis un remplacement valvulaire aortique à J42 et une chirurgie de Lewis Santy à J62 étaient réalisés avec des suites simples. Le malade décédait au 90e jour après son retour à domicile.   Tableau 2. Fistules aortobronchiques primaires (ND : non disponible). Homme 68 ans Homme 51 ans Prise en charge symptômes délai bloc type chirurgie cause   hémoptysie 27 jours TEVAR ATA rompu   hémoptysie 2 jours TEVAR ATA rompu – 67 mm Antécédents toxicomanie sevrée Suites opératoires sepsis, endocardite, rupture œsophagienne J42 : RVA bio J62 : Lewis Santy Suivi devenir durée cause décès   perdu de vue 6 mois ND   décédé 90 jours ND   [caption id="attachment_4629" align="aligncenter" width="300"] Figure 1. Fistule aortobronchique primaire.[/caption]   Deux malades (29%) ayant des antécédents de chirurgie de l’aorte thoracique descendante présentaient une fistule aortobronchique secondaire [tableau 3] : Un malade de 75 ans, opéré d’une rupture d’isthme aortique secondaire à un accident de la voie publique avec mise en place d’une endoprothèse thoracique 12 ans auparavant, présentait des hémoptysies sur un faux anévrysme nécessitant une prise en charge en urgence avec la pose d’une nouvelle endoprothèse [figure 2]. Dans l’intervalle, il était pris en charge pour un cancer du larynx traité par chirurgie et radiochimiothérapie. Les suites opératoires immédiates étaient simples. Le malade décédait d’un accident vasculaire cérébral ischémique 59 mois après la cure de sa fistule aortique. Un homme de 73 ans, opéré 1 an auparavant avec mise en place d’une prothèse hybride (E-vita OPEN – JotecÒ) pour le traitement d’un faux anévrysme chronique secondaire à une rupture d’isthme aortique ancienne non diagnostiquée, présentait une infection chronique du sac anévrismal [figure 3]. La prise en charge par thoracotomie gauche mettait en évidence une fistule aortobronchique par érosion de la coque anévrysmale nécessitant une mise à plat de l’anévrysme et une lobectomie supérieure gauche. Les suites opératoires étaient marquées par un sepsis persistant avec perforation œsophagienne au cinquième mois nécessitant plusieurs reprises chirurgicales de sauvetage. Le malade décédait de défaillance multiviscérale.   Tableau 3. Fistules aortobronchiques secondaires. Homme 75 ans Homme 73 ans Prise en charge symptômes délai bloc type chirurgie   cause   hémoptysie NA TEVAR   ATA rompu – 43 mm   infection sac anévrysmal 12 jours lavage, mise à plat anévrysme, lobectomie supérieure gauche ATA rompu Antécédents J-12 ans : rupture isthme traumatique TEVAR, transposition sous claviocarotidienne gauche J-2 ans : carcinome épidermoïde larynx, laryngectomie, trachéotomie, métastases pulmonaires (RCT) J-1 an : faux anévrysme chronique sur rupture d’isthme aortique ancienne non diagnostiquée prothèse hybride Suites opératoires M5 : sepsis persistant hémothorax remplacement distalité prothèse fistule œsophagienne Suivi devenir durée cause décès   décédé 59 mois AVC ischémique   décédé 5 mois défaillance multiviscérale   [caption id="attachment_4630" align="aligncenter" width="300"] Figure 2. Fistule aortobronchique secondaire (rupture isthme aortique – TEVAR).[/caption] [caption id="attachment_4631" align="aligncenter" width="300"] Figure 3. Fistule aortobronchique secondaire (faux anévrysme chronique – prothèse hybride).[/caption]   Trois malades (43 %) présentaient une fistule aortoœsophagienne primaire [tableau 4] : Une femme de 76 ans présentait un tableau d’aphagie et d’hématémèse révélant un anévrysme rompu de l’aorte thoracique descendante. Un traitement par endoprothèse était réalisé 6 jours après les premiers symptômes [figure 4]. Les suites opératoires immédiates étaient simples. Durant le suivi, une infection chronique de la prothèse était mise en évidence par une TEP-TDM nécessitant une antibiothérapie au long cours. La malade décédait d’un AVC hémorragique 79 mois après l’implantation de l’endoprothèse. Un homme de 53 ans présentait une hématémèse massive révélant une fistule aorto-œsophagienne immédiatement prise en charge au bloc opératoire avec mise en place d’une endoprothèse thoracique. Une fibroscopie digestive à J1 mettait en évidence une tumeur de l’œsophage non connue. Les suites opératoires immédiates étaient compliquées en réanimation conduisant au décès à J9 de défaillance multiviscérale. Un homme de 53 ans, aux antécédents de cancer de l’œsophage traité par radiochimiothérapie, présentait un choc hémorragique avec arrêt cardiorespiratoire secondaire à une hématémèse massive. Le bilan mettait en évidence une fistule aorto-œsophagienne justifiant d’une prise en charge en urgence au bloc opératoire avec mise en place d’une endoprothèse. Les suites opératoires immédiates étaient marquées par une reprise chirurgicale pour la pose d’une prothèse œsophagienne, la réalisation d’une gastrostomie pour décaillotage associée à une jéjunostomie. Le malade décédait à J4 de défaillance multiviscérale.   Tableau 4. Fistules aortoœsophagiennes.         Femme 76 ans Homme 53 ans Homme 53 ans Prise en charge symptômes délai bloc type chirurgie cause   aphagie, hématémèse 6 jours TEVAR ATA rompu   hématémèse immédiate TEVAR tumeur œsophage non connue   hématémèse, ACR récupéré immédiate TEVAR tumeur œsophage Antécédents HTA HTA tabagisme carcinome épidermoïde œsophage : RCT tabagisme Suites opératoires hémorragie digestive infection chronique de prothèse (TEP positive) antibiothérapie au long cours prothèse œsophagienne gastrostomie décaillotage jéjunostomie Suivi devenir durée cause décès   décédée 79 mois AVC hémorragique   décédé 9 jours défaillance multiviscérale   décédé 4 jours défaillance multiviscérale   [caption id="attachment_4632" align="aligncenter" width="300"] Figure 4. Fistule aorto-œsophagienne.[/caption]   Six malades (86%) décédaient au cours du suivi (1 – 14% – perdu de vue) parmi lesquels quatre (67%) en lien avec la pathologie. La survie de notre population est donnée figure 5. Le taux de mortalité est de 29% à 30 jours, 43% à 90 jours et 57% à 1 an.   [caption id="attachment_4633" align="aligncenter" width="300"] Figure 5. Survie globale.[/caption]   4. Discussion   4.1. Étiologies La survenue d’une fistule aortique à l’étage thoracique (aortobronchique ou aorto-œsophagienne) reste exceptionnelle. Dans notre série bicentrique, sept cas étaient rapportés sur la période d’analyse. Bien que d’effectif faible, elle reflète l’hétérogénéité des malades pris en charge et la gravité des tableaux cliniques. Cinq fistules (71%) étaient primaires (3 – 43% – secondaires à un anévrysme aortique fissuré et 2 – 29% – secondaires à un carcinome de l’œsophage) et deux fistules (29%) étaient secondaires à des chirurgies aortiques antérieures (1 – 14% – endoprothèse pour le traitement d’une rupture d’isthme aortique traumatique et 1 – 14% – prothèse hybride pour le traitement d’un faux anévrysme chronique lié à une rupture antérieure de l’isthme aortique traumatique méconnue). Dans la littérature, plusieurs cas de fistules aortiques ont été reportés [1-9]. Les fistules primaires sont principalement la conséquence de ruptures d’anévrysmes aortiques, d’ulcères aortiques pénétrants, de cancers bronchiques ou œsophagiens à des stades avancés, de pathologies pulmonaires (tuberculose, aspergillose…), œsophagiennes (perforation iatrogène, Barrett…), ou de l’ingestion de corps étrangers (piles, arêtes…). Les fistules secondaires surviennent dans le cas d’aortes préalablement opérées (soit au contact de prothèses ou par érosion des organes de voisinage par la coque anévrysmale calcifiée) ou apparaissent comme des complications de chirurgies antérieures.   4.2. Symptômes Six malades (86%) ont présenté une hémoptysie ou une hématémèse comme signe inaugural de la fistule. Ces signes apparaissent comme maître symptôme d’une fistule aortique et sont retrouvés de manière quasi systématique dans la littérature tout comme d’autres symptômes également retrouvés dans notre série [1-4,6,8] : choc hémorragique/arrêt cardiorespiratoire dans 2 cas (29%), douleur thoracique dans un cas (14%), fièvre dans un cas (14%) et dysphagie dans un cas (14%).   4.3. Délai de prise en charge La prise en charge des fistules aortiques entre dans le cadre nosologique des syndromes aortiques aigus et des anévrysmes rompus ou fissurés [10-14]. Celle-ci doit idéalement avoir lieu dans un centre de référence ; elle inclut le conditionnement du malade et une prise en charge chirurgicale dans des délais compatibles avec la gravité de la situation. La stratégie chirurgicale doit également être adaptée à la situation, quitte à envisager une stratégie en plusieurs temps. Dans notre série, deux malades (29%) ont été traités par endoprothèse dans les 24 heures suivant le diagnostic. Pour les autres, une prise en charge différée était réalisée permettant d’optimiser la prise en charge chirurgicale. Dans la littérature, une revue de cas de fistules aortobronchiques et aorto-œsophagiennes relate une tendance inverse avec une prise en charge plus précoce où plus de 80% des malades sont traités de manière endovasculaire dans les 24 premières heures suivant le diagnostic sans que cela ne semble influer sur la survie [2]. Aujourd'hui, une prise en charge précoce est possible dans les centres à haut volume de chirurgie aortique bénéficiant d’un dépôt permanent d’endoprothèses thoraciques. À défaut d’endoprothèse compatible en dépôt, celle-ci devrait pouvoir être obtenue dans un délai inférieur à 4 heures (6 heures au maximum).   4.4. Type de prise en charge Six malades (86%) étaient opérés par endoprothèse aortique thoracique et un malade (14%) était opéré par thoracotomie postérolatérale gauche (mise à plat de l’anévrysme associée à une lobectomie supérieure gauche) pour une fistule bronchique survenant un an après la mise en place d’une prothèse hybride (E-vita OPEN – Jotec®) pour faux anévrysme chronique. Dans la littérature, et de manière similaire à la prise en charge des anévrysmes rompus, la majorité des cas et parmi les plus récents ont été traités à la phase aiguë par voie endovasculaire [15-17]. Cette tendance, qui suit l’avènement de la chirurgie endovasculaire, semble communément admise en chirurgie de sauvetage avec une amélioration de la survie par rapport à une prise en charge conventionnelle pour les anévrysmes rompus [16,18,19]. Certains auteurs préconisent cette attitude en urgence quitte à discuter un geste par chirurgie ouverte secondairement [1,2,6,7]. Cette approche est préconisée dans les centres à haut volume de chirurgie aortique avec l’expérience de l’équipe chirurgicale aux techniques endovasculaires thoraciques simples et complexes et en étroite collaboration avec l’équipe d’anesthésie et de réanimation pour la gestion des paramètres techniques inhérents à ce type de procédure (utilisation en routine de la stimulation ventriculaire rapide, gestion des risques de paraplégie…). L’abstention chirurgicale avec un traitement médical conservateur ne semble pas être une alternative à la chirurgie, certains auteurs ayant relevé 100% de décès [3].   4.5. Prise en charge en milieu septique ou devenu septique Un sepsis était décrit pour au moins quatre malades (57%) de notre série. Un malade (14%) présentant une fistule aorto-œsophagienne a eu une chirurgie combinée dans le premier temps opératoire associant endoprothèse thoracique, pose de prothèse œsophagienne, gastrostomie pour décaillotage et jéjunostomie. Deux malades (29%) pris en charge pour des fistules aortobronchiques (1 – 14% – primaire et 1 – 14% – secondaire) ont présenté des ruptures oesophagiennes mises en évidence dans les suites opératoires dans le cadre de tableaux de sepsis persistants (dont une endocardite infectieuse avec remplacement valvulaire aortique à 42 jours pour le premier), nécessitant une chirurgie de Lewis Santy à 2 mois de la prise en charge pour le premier et une prothèse œsophagienne en sauvetage 5 mois après la prise en charge initiale. Une malade (14%) opérée d’une fistule aorto-œsophagienne par endoprothèse a présenté dans les suites une infection chronique de prothèse confirmée par une scintigraphie aux leucocytes marqués. Devant les risques d’une réintervention chez une malade fragile, une antibiothérapie au long cours et un suivi régulier ont été privilégiés. Dans la littérature, la complication redoutée reste l’infection dont la prise en charge est multiple [1-7,9] : Prophylactique : plusieurs auteurs s’accordent sur une antibioprophylaxie/antibiothérapie prolongée de plusieurs semaines sans toutefois avoir de durée ou de protocole médicamenteux codifiés [1,2,6]. Dans notre série, toutes les interventions étaient réalisées sous antibioprophylaxie sans toutefois que le protocole ou la durée puissent être précisés a posteriori. En France, les recommandations de la SFAR (Société française d’anesthésie et de réanimation) sont applicables ; cependant elles ne concernent que les chirurgies “propres” ou “propres-contaminées” et ne couvrent pas la prise en charge en milieu septique ou potentiellement septique où une antibiothérapie doit être mise en place. Thérapeutique : la prise en charge idéale du sepsis réside dans l’exclusion de la porte d’entrée à la phase initiale avec une chirurgie combinée au niveau thoracique (œsophagectomie, lobectomie…) selon des délais variables avec une amélioration de la survie [4,6,9,20,21]. En cas d’infection chronique, la prise en charge entre dans le cadre des infections de prothèses vasculaires et doit, après évaluation du terrain et des risques opératoires, consister en un remplacement du matériel prothétique par, le plus souvent, une allogreffe [22-25]. En pratique, un tel remplacement est rarement effectué et ne doit être envisagé qu’après confirmation diagnostique (TEP-scan, scintigraphie aux leucocytes marqués…) [26]. Il n’existe pas de recommandation sur le type d’antibiotique et la durée de traitement (qui est classiquement supérieure à 6 semaines). Palliative : en cas d’infection chronique et de contre-indication chirurgicale, un traitement antibiotique suppressif au long cours et une surveillance active peuvent être envisagés [1-8].   4.6. Survie La survenue d’une fistule aortique est une pathologie grave au pronostic sombre. Dans notre série, six malades (86%) sont décédés (3 – 41% – de défaillance multiviscérale, 2 – 29% – d’AVC et 1 – 14% – de cause inconnue). Bien que peu significatif, le taux de mortalité globale était de 29% à 30 jours et de 57% à 1 an. En dehors de toute interprétation brute de la survie, elle n’en demeure pas moins informative en fonction de l’étiologie de la fistule. Elle est de quelques jours en cas de fistule aorto-œsophagienne sur un terrain débilité de cancer et plus longue en cas de fistule aortobronchique. Cette tendance est retrouvée dans la littérature où les fistules survenues sur perforation œsophagienne (arêtes…) ou sur cancer ont une moins bonne survie que celles survenues sur anévrysmes aortiques rompus [3]. Dans ce dernier cas, la mortalité est similaire à celle des anévrysmes de l’aorte thoracique rompus (19 à 33% à 30 jours) [10,11]. En corrélation, les fistules aorto-œsophagiennes montrent une moins bonne survie [1,3,5,9].   4.7. Limites de l’étude Bien que rétrospectifs, sans collecte des données de manière prospective et portant sur une petite cohorte, les résultats présentés apparaissent similaires à ceux de la littérature. Les fistules aortiques restent une pathologie rare dont la prise en charge relève de l’urgence et doit s’adapter au patient et à la présentation clinique.   4.8. Vers une stratégie de prise en charge Toutefois, certains points permettent d’ébaucher une stratégie de prise en charge de ces fistules aortobronchiques et aorto-œsophagiennes [4,5,20,21,27] : prise en charge pluridisciplinaire en urgence dans un centre expert ; chirurgie endovasculaire de sauvetage ; couverture antibiotique prolongée dont la cible bactérienne et la durée sont à préciser ; ± chirurgie combinée selon le terrain et la présentation clinique. En cas de fistule aorto-œsophagienne, une œsophagectomie associée en periopératoire a montré un bénéfice en terme de survie [2,9] ; ± réparation en chirurgie ouverte à distance [28].   5. Conclusion La survenue d’une fistule aortobronchique ou aorto-œsophagienne est une pathologie rare au pronostic sombre (71% de survie à 30 jours et 43% à 1 an) nécessitant une prise en charge pluridisciplinaire dans des centres experts ; l’exclusion de la fistule étant le plus fréquemment réalisée par voie endovasculaire, la chirurgie conventionnelle garde sa place dans certains cas particuliers. La stratégie globale de prise en charge et la place d’une chirurgie combinée (œsophagectomie, lobectomie…) doit encore être évaluée.   Références Jonker FHW, Schlösser FJV, Moll FL, van Herwaarden JA, Indes JE, Verhagen HJM, et al. Outcomes of thoracic endovascular aortic repair for aortobronchial and aortoesophageal fistulas. J EndovascTher Off J IntSocEndovasc Spec 2009 Aug;16(4):428-40. https://doi.org/10.1583/09-2741R.1 PMid:19702348 Canaud L, Ozdemir BA, Bee WW, Bahia S, Holt P, Thompson M. Thoracic endovascular aortic repair in management of aortoesophageal fistulas. 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décembre 13, 2019
Chirurgie thoracique · Vol. 23 Septembre 2019

Traumatisme thoracique par blast : analyse de cinq cas à l’hôpital du Mali

Moussa Bazongo1*, Seydou Togo1, Issa Boubacar Maïga1, Abdoul Aziz Maïga1, Jacques Saye1, Amadou Sidibé2, Allaye Ombotimbe1, Cheick Ahmed Sekou Touré1, Ibrahim Coulibaly1, Jérôme Dakouo1, Nouhoun Diani2, Moussa Abdoulaye Ouattara1, Sadio Yéna1   Service de chirurgie thoracique, hôpital du Mali, Bamako. Service d’anesthésie réanimation, hôpital du Mali, Bamako. * Correspondance : baz_moussa@yahoo.fr   DOI : 10.24399/JCTCV23-3-BAZ Citation : Bazongo M, Togo S, Maïga IB, Maïga AA, Saye J, Sidibé A,  Ombotimbe A, Sekou Touré CA, Coulibaly I, Dakouo J, Diani N, Ouattara MA, Yéna S. Traumatisme thoracique par blast : analyse de cinq cas à l’hôpital du Mali. Journal de chirurgie thoracique et cardio-vasculaire 2019;23(3). doi: 10.24399/JCTCV23-3-BAZ RÉSUMÉ Objectif : décrire les aspects diagnostiques, thérapeutiques et évolutifs des lésions thoraciques par effet blast. Patients et méthodes : étude prospective et descriptive réalisée dans le service de chirurgie thoracique de l’hôpital du Mali. Il s’agit de cas de traumatisme thoracique suite à un attentat suicide avec explosion. Les données diagnostiques et de prise en charge ont été analysées. Résultats : au total, quatre hommes et une femme d’un âge situé entre 22 et 46 ans ont été colligés. Le traumatisme thoracique était fermé dans tous les cas. Il y avait des lésions pariétales, pleuroparenchymateuses, médiastinales et trachéales. Sur le plan thérapeutique, après les soins d’urgence, une réanimation et un traitement conservateur ont suffi pour stabiliser les lésions. Les suites ont été simples. Conclusion : les traumatismes thoraciques par effet blast sont rares et graves. Ils engendrent des lésions multiples et variées. La tomodensitométrie thoracique permet de faire la cartographie des lésions provoquées et le drainage thoracique constitue l’essentiel du traitement chirurgical.   ABSTRACT Thoracic trauma by blast: analysis of 5 cases at the Hospital of Mali Objective: to describe the diagnostic, therapeutic and evolutive aspects of the thoracic lesions by blast effect. Patients and methods: prospective and descriptive study carried out in the thoracic surgery department of the Mali Hospital. These are cases of chest trauma following a suicide bombing. Diagnostic and management data were analyzed. Results: A total of four men and one woman, ranging in age from 22 to 46 years, were collected. Thoracic trauma was closed in all cases. There were parietal, pleuro-parenchymal, mediastinal and tracheal lesions. Therapeutically, after the emergency care, resuscitation and conservative treatment were sufficient to stabilize the lesions. The suites were simple. Conclusion: Blast-related chest trauma is rare and severe. They cause multiple and varied lesions. Thoracic CT is used to map lesions and thoracic drainage is the essential of surgical treatment.   1. Introduction Les traumatismes thoraciques par effet blast sont des lésions résultantes de l’impact de l’onde de choc sur le thorax suite à une explosion [1]. Au niveau du thorax, le poumon serait l’organe le plus sensible aux explosions [1]. Les lésions pulmonaires qui en résultent sont graves et surviennent le plus souvent dans un contexte de polytraumatisme [2]. Il s’agit d’une urgence diagnostique et thérapeutique nécessitant une collaboration pluridisciplinaire. Actuellement, en raison de son accessibilité et de sa réalisation facile, l’échographie thoracique type fast (focused assessment sonography in trauma) permet en urgence, dans un bref délai, de faire un inventaire des lésions pleuropulmonaires et cardiopéricardiques ainsi que de poser l’indication d’un geste thérapeutique [3]. Depuis 2012, le Mali est plongé dans un conflit armé. L’utilisation par les belligérants d’engins explosifs est devenue de plus en plus fréquente [4]. Nous rapportons ici cinq cas démonstratifs de lésions thoraciques par effet blast afin de décrire les aspects diagnostiques, thérapeutiques et évolutifs.   2. Patients et méthodes  Il s’agit d’une étude prospective et descriptive réalisée dans le service de chirurgie thoracique de l’hôpital du Mali. Elle a concerné les patients admis dans le service pour un traumatisme thoracique suite à un attentat suicide survenu dans un camp militaire à Gao le 18 janvier 2017. Gao est une localité située à 1200 kilomètre au nord-est de Bamako. L’attentat a été commis par l’utilisation d’une voiture piégée qui contenait une charge explosive faite d’engins artisanaux appelés improvised explosive devices. Après une prise en charge initiale sur place, les patients ont été évacués par voie aérienne à Bamako. À l’admission en urgence, une radiographie standard ainsi qu’une tomodensitométrie (TDM) thoracique étaient réalisées chez tous les patients. Leurs données diagnostiques, thérapeutiques et de surveillance ont été analysées. Le suivi des patients était basé sur l’examen clinique et la radiographie thoracique au 1er, 3e et 6e mois.   3. Résultats Au total cinq (5) patients ont été enregistrés. Le sexe-ratio était de 4. Les données sociodémographiques ainsi que la prise en charge initiale des patients avant leur évacuation à Bamako ont été résumées dans le tableau 1. Les données cliniques et radiologiques ont été répertoriées dans le tableau 2.   Tableau 1. Récapitulatif des données sociodémographiques et du traitement initial. Patients Âge/sexe (ans) Fonctions Délai d’admission Traitement initial 1 22/M   Ex-combattant   12 heures – Oxygénothérapie – Drainage thoracique droit – Antibiotique – antalgique – Vaccin et sérum antitétanique   2   23/M   Ex-combattant   48 heures – Oxygénothérapie – Parage des plaies – Vaccin et sérum antitétanique – Antibiotique – antalgique 3 35/M   Militaire 12 heures – Oxygénothérapie – Drainage thoracique gauche – Vaccin et sérum antitétanique – Antibiotique – antalgique   4   46/M   Militaire   12 heures – Parage – Vaccin et sérum antitétanique – Antibiotique – antalgique   5   38/F   Cuisinière   48 heures – Trachéotomie – Oxygénothérapie – Vaccin et sérum antitétanique – Antibiotique – antalgique M : masculin ; F : féminin.   Tableau 2. Répartition des patients en fonction des données cliniques et radiologiques Patients Signes cliniques Signes radiologiques 1 – Dyspnée – Douleurs thoraciques – Emphysème sous-cutané droit – Contusion pulmonaire bilatérale – Pneumothorax droit compressif – Emphysème sous-cutané 2 – Douleurs thoraciques – Délabrement de la paroi thoracique – Présence de débris telluriques pariétaux   3 – Dyspnée – Douleurs thoraciques – Emphysème sous-cutané – Hémothorax gauche – Contusion pulmonaire gauche – Fracture de la scapula – Emphysème sous-cutané   4 – Douleurs thoraciques – Délabrement pariétal thoracique – Plaie de l’avant-bras gauche – Présence de corps étranger dans partie molle de l’avant-bras gauche     5 – Dyspnée – Douleurs thoraciques – Emphysème sous-cutané cervicothoracique – Saturation en oxygène 78% – Plaie trachéale – Pneumomédiastin – Pneumothorax gauche minime – Emphysème sous-cutané cervicothoracique   Chez la seule patiente de l’échantillon, une rupture trachéale était suspectée devant un pneumomédiastin et un emphysème cervical dans un contexte de dyspnée avec désaturation à 78% à l’air ambiant. La rupture était objectivée par une TDM cervicothoracique et elle mesurait 1,5 cm. Ce défect n’était pas visualisé à l’endoscopie bronchique, car masqué par la canule de trachéotomie. Sur le plan thérapeutique, elle était la seule initialement admise en réanimation pour détresse respiratoire aiguë sévère. Tous les patients ont bénéficié d’une prise en charge psychosociale après leur hospitalisation par une équipe nationale composée de psychiatres et de sociologues mise en place pour traiter des blessés de guerre. Les autres données thérapeutiques ainsi que la surveillance des patients ont été rapportées dans le tableau 3.   Tableau 3. Répartition des patients en fonction des données thérapeutiques et évolutives. Patients Traitement complémentaire Évolution 1 – Redrainage thoracique – Kinésithérapie respiratoire – Bonne réexpansion pulmonaire – Durée d’hospitalisation : 6 jours 2 – Parage – Cicatrisation de la plaie – Durée d’hospitalisation : 4 jours 3 – Kinésithérapie respiratoire – Immobilisation épaule gauche – Bonne réexpansion pulmonaire – Consolidation de la scapula – Durée d’hospitalisation : 8 jours 4 Parage   – Cicatrisation – Durée d’hospitalisation : 5 jours   5 – Cicatrisation dirigée de la plaie trachéale – Oxygénothérapie – Corticothérapie – Kinésithérapie respiratoire – Cicatrisation de la plaie trachéale en 15 jours – Fermeture spontanée de la trachéotomie en 38 jours – Durée d’hospitalisation : 40 jours   La durée moyenne d’hospitalisation était de 12,6 jours avec des extrêmes de 4 et 40 jours (J). La médiane de la durée d’hospitalisation était de 6 jours avec un écart type de 15,39 jours. Au cours du suivi à J30, on notait une bonne évolution chez tous les patients. À J90, quatre patients ont été déclarés guéris sans séquelles avec une bonne réinsertion socioprofessionnelle. Dans un cas, on notait un trouble du comportement à type de syndrome dépressif. À 6 mois, tous les patients étaient déclarés guéris.   4. Discussion Les attentats terroristes ont été multipliés par quatre et le nombre de victimes par huit ces dix dernières années [1]. Le Mali est plongé depuis 2012 dans un conflit armé opposant les forces gouvernementales aux sécessionnistes d’une part et d’autre part aux djihadistes. L’utilisation des engins explosifs et les attentats suicides sont de plus en plus fréquents [4]. Le poumon reste l’un des organes le plus sensible à l’onde de choc provoquée par ces explosions [1]. Les lésions pulmonaires sont dues à l’impact de l’onde de choc sur le thorax. Le poumon serait le deuxième organe atteint par l’effet blast après le tympan et suivi du tube digestif. Sa prévalence a été estimée de 3 à 6% en fonction des études [1]. Dans les blessures thoraciques par effet blast, les lésions pulmonaires sont graves, multiples, variées et nécessitent une réanimation dans 2/3 des cas [1]. Ceci a été le cas chez un patient qui a bénéficié d’une prise en charge initiale en réanimation. En outre, dans l’étude d’Aschkenasy-Steuer et al., 47 de ces 51 patients ayant une atteinte pulmonaire ont nécessité une assistance ventilatoire [5]. Ces lésions pulmonaires s’intègrent le plus souvent dans le cadre d’un polytraumatisme. Ainsi, les lésions associées sont par ordre de fréquence abdominale, crânienne ou des membres [1,5]. Les lésions associées étaient la plaie trachéale et la fracture de l’omoplate. Dans la littérature, nous n’avons pas retrouvé de cas de description de lésions aortiques et cardiaques directement liées au traumatisme thoracique par blast [6]. Le dysfonctionnement cardiovasculaire observé dans les suites immédiates de l’onde de choc serait une conséquence de l’atteinte pulmonaire [2,6]. Les atteintes pleuropulmonaires ont habituellement un diagnostic clinique évident devant la dyspnée, les douleurs thoraciques, la toux associées parfois à des lésions pariétales [2]. La radiographie thoracique réalisée en première intention a permis une approche du diagnostic positif et de poser l’indication du geste d’urgence. Cependant la TDM thoracique a une sensibilité de 100% sans critère formel de diagnostic de blast pulmonaire [2]. Elle permet de faire un bilan lésionnel complet ainsi que le diagnostic les lésions intrathoraciques occultes. En outre, elle aide le chirurgien à poser une indication chirurgicale. Elle a été systématique en deuxième intention chez tous nos patients après la radiographie standard. Par ailleurs, l’imagerie thoracique reste encore d’accessibilité limitée voire impossible en situation d’urgence, surtout en cas d’afflux massif de blessés dans notre contexte. Cela explique que De Lesquen et al. sur les champs de guerre en Afghanistan n’ont pu réaliser une radiographie et une TDM thoracique que dans respectivement 30 et 63% des cas [7]. De plus en plus, l’échographie thoracique type fast occupe une place importante en urgence traumatologique. Elle permet dans un bref délai de confirmer un épanchement pleural et ou péricardique en cas d’instabilité hémodynamique et de poser l’indication d’un drainage thoracique en urgence [3]. Le fast échographie, bien qu’étant indisponible dans notre contexte, reste nécessaire aujourd’hui chez les patients polytraumatisés en urgence. Dans notre étude, comme chez Yazgan et Aksu [8], les lésions primaires retrouvées ont été entre autres la contusion pulmonaire, l’hémothorax, le pneumothorax et le pneumomédiastin. Cette imagerie doit s’étendre à l’abdomen en vue de rechercher une atteinte digestive associée [1,8]. La plaie trachéale observée chez la seule patiente serait liée à l’hyper-expression de l’onde de choc dans la trachée à glotte fermée. Bien que nous n’ayons pas suspecté d’atteinte tympanique chez nos patients, l’examen otoscopique devrait être systématique devant des lésions thoraciques par effet blast. Cette attitude se justifierait par le fait que les lésions tympaniques sont plus fréquentes que celles des poumons. Yazgan et Aksu [8] ont diagnostiqué 75% de lésions tympaniques contre 11% de lésions thoraciques chez leurs patients. Sur le plan thérapeutique, la prise en charge est urgente et pluridisciplinaire. Chez nos patients, la prise en charge initiale a été réalisée sur les lieux de l’attentat. L’oxygénothérapie et le drainage thoracique ont été les gestes essentiels qui ont permis une stabilisation de l’état des patients, puis leur évacuation pour une prise en charge en milieu spécialisé. Cette attitude était similaire à celle rapportée par d’autres auteurs [2,6]. L’évacuation d’un épanchement pleural compressif par une ponction ou un drainage constitue avec la ventilation pulmonaire l’essentiel du traitement de la détresse respiratoire [1,6]. Ainsi, le pronostic des blessés thoraciques par blast est fonction de la qualité de sa prise en charge initiale. Elle permet de prévenir ses complications et séquelles anatomofonctionnelles.   5. Conclusion Les traumatismes thoraciques au décours d’un blast sont graves, multiples et variés. Le diagnostic clinique est évident. La TDM thoracique permet de faire la cartographie des lésions provoquées. La prise en charge est urgente et pluridisciplinaire. L’évacuation des épanchements pleuraux constitue l’essentiel du traitement de la détresse respiratoire.   Références Clapson P, Pasquier P, Perez J-P, Debien B. Lésions pulmonaires liées aux explosions. Rev Pneumol Clin 2010;66(4):245-53.https://doi.org/10.1016/j.pneumo.2010.07.008PMid:20933166 Wolf SJ, Bebarta VS, Bonnett CJ, Pons PT, Cantrill SV. 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septembre 20, 2019
Chirurgie thoracique · Vol. 23 Juin 2019

Breast cancer and chest wall surgery: a review

ABSTRACT Background: Chest wall lesions and invasion are a rare occurrence in operable breast cancers, and their care requires multidisciplinary teamwork between thoracic and breast specialists. Other chest wall lesions—radiation-induced sarcomas, Stewart-Treves syndromes, and osteoradionecrosis—are consecutive to breast cancer treatments. This article aims to update readers on chest wall resection and reconstruction techniques which are useful in these cases, as well as their indications and results. Method: A systematic review was conducted to identify chest wall reconstruction techniques and their place in locally advanced breast cancer (LABC), local recurrences, secondary sarcomas and radionecrosis. Results: Chest wall reconstruction must ensure good stability and protection of the intrathoracic organs. Titanium prostheses and protective meshes are widely used for these purposes. They can then be covered, if necessary, by a flap—mostly latissimus dorsi flaps, but also deep inferior epigastric perforator or superficial epigastric artery flaps. Few LABC and local recurrence patients are eligible for surgery, which has few complications, but patient selection must be strict, and outcomes are still debated. Radiation-induced sarcomas and Stewart-Treves syndrome have a poorer prognosis, even when surgery with healthy margins is possible. Osteoradionecrosis surgery relies on bringing a new vascular supply via a flap; the omentum is widely used here for its detersive properties. Conclusion: Novel chest wall reconstructive techniques, and a liberal use of flaps, make surgery technically possible for chest wall damage linked to breast cancers and their treatments. Functional results are reliable, but not all patients can benefit from surgery.   1. BACKGROUND Chest wall lesions and invasion seldom occur in operable cancerous breast disease, and their care requires multidisciplinary teamwork between thoracic surgeons and breast specialists [1]. A finely tuned collaboration between surgical specialties is key to such a major surgery. Indeed, extensive chest wall resections are complex interventions that must reconcile carcinological imperatives and reconstruction possibilities. Thanks to the emergence of reliable prosthetic material since the end of the 20th century, chest wall reconstruction techniques have much improved, and parietectomy indications are growing [2]. Locally advanced breast cancers (LABC) encompass tumors bigger than 5 cm (T3), tumors extended to the chest wall (T4a), or the skin (T4b) (figure 1a), or both (T4c), and inflammatory breast cancers (T4d) (figure 1b), as well as tumors with massive lymph node extension [2-3]. They make up about 20% of breast cancers throughout the world (although less in countries with organized screening) [4], and 5% of thoracic neoplasias [2]. The scope of this article is restricted to those T4a tumors with chest wall invasion.   [caption id="attachment_4345" align="aligncenter" width="300"] Fig. 1a: Locally advanced breast cancer with skin invasion (T4c).[/caption] [caption id="attachment_4346" align="aligncenter" width="300"] Fig. 1b: Inflammatory breast cancer (T4d).[/caption] Chest wall invasion can be the result of direct infiltration as well as lymphatic dissemination, and involves all the neighboring structures: skin, pectoral muscle, ribs and the intercostal space, but also the axillary and subclavian vessels and the brachial plexus [3]. Lymphatic invasions involve homolateral lymph nodes from the axillary, supra and subclavian chains, as well as the internal thoracic lymph nodes [3]. This explains the radical approach of Halsted’s operation, that removed the breast together with the pectoral muscle and required extensive lymph node dissection, even for small tumors. However, such mutilating surgery yielded poor oncological results that came at the price of a still poorer quality of life. Throughout the second half of the 20th century, advances in medical treatments have reduced surgical indications for locally advanced breast cancers. Surgery became less invasive, beginning in 1948 with Patey’s operation, which preserved the pectoral muscle and facilitated reconstruction. A better grasp on the balance between an extensive surgery and postoperative quality of life has made surgery less aggressive, and a combined medical approach of chemo and radiotherapy, as well as the development of hormonal treatments and later still targeted therapy, has become the usual approach. However, as reconstruction techniques improve [5], bringing less morbidity and a better postoperative quality of life, radical surgery has a new place in the care of these patients. Primary oncological treatment isn’t the only reason behind chest wall involvement in breast cancer pathology. However, late complications of the initial treatment are frequent, particularly when radiotherapy has been involved. Ever since the “cobalt bomb”, and until the current state-of-the-art stereotaxic techniques, technical progresses have led to a drastic reduction of healthy tissue irradiation. Therefore, the incidence of chest wall complications after radiotherapy should seemingly decrease in the years to come; but on the other hand, more patients benefit from breast conservation therapies, and that means more irradiated patients, although with lower doses [6]. Whatever trends arise in the future, radiotherapy complications remain a prevalent problem that can appear years after treatment. Double-strand breaks in DNA and oxidative stress induce two major long-term complications: radiation-induced cancer, and radionecrosis. Both can develop on the sternum, the clavicle and cervicothoracic junction, and as such are a surgical challenge. Proximity with the mediastinal structures and the upper limb neurovascular bundle, as well as the reconstruction and stabilization imperative after chest wall resection, requires these patients to be treated in a referral center that has access to modern reconstructive techniques [2]. This article aims to update readers on chest wall resection reconstruction techniques, as applied to breast cancer, as well as their indications and results.   2. METHODS Relevant articles were identified by a systematic search of the MEDLINE database, limited to articles in English and French languages, published after 2000 and before July 2017. A broad search of medical subject headings and their different combinations (“thoracic wall”, “breast neoplasms”, “thoracic surgical procedures”, “reconstructive surgical procedures”, “surgical flaps”, “free tissue flaps”, “myocutaneous flaps”, “sarcoma”, and “osteonecrosis”) was conducted for clinical trials and systematic reviews. Studies that reported surgical techniques and their medical outcomes were included. To broaden the search, the reference list of systematic reviews was screened manually for controlled trials and additional publications were retrieved from the reference list of relevant articles (figure 2).   [caption id="attachment_4347" align="aligncenter" width="300"] Figure 2: PRISMA 2009 Flow diagram of article selection.[/caption]   3. RECONSTRUCTION TECHNIQUES   3.1. Biomechanical basis Because of the position of the breast on the thorax, chest wall resections in breast cancer mostly concern its upper and anterolateral region. This region is biomechanically complex because of its anatomical characteristics [7]. The sternum is, first and foremost, the cornerstone of thoracic stability. Besides protecting the lung and mediastinal organs, the anterior thoracic skeleton also stabilizes the shoulder via the sternoclavicular joint and is the anchor of the accessory respiratory muscles (pectoral and anterior cervical muscles). Intercostal spaces widen as they get closer to the anterior midline, meaning that even small anterior costal resections create large defects that inhibit respiratory mechanics.   3.2. Objectives Reconstructive goals are not specific to breast cancer, and are those of every chest wall reconstruction [8-9]: Chest wall stability, in order to prevent paradoxical respiration, restore respiratory mobility and limit restrictive after-effects; Protection of intrathoracic organs, (particularly avoid pulmonary hernia) and dead space obliteration; Preservation of sternoclavicular stability; Restoration of esthetics. Overall the patient condition is critical and must be evaluated before heavy reconstruction is undertaken. Surgical gain must be balanced to its possible complications and the oncological prognosis [3,10,11]. The quality of resection must not be compromised in order to limit its scope; it is better to do no surgery, but instead a good medical treatment, than an incomplete surgery with severe complications. Comprehensive care is therefore essential and must include thoracic and reconstructive surgeons, but also nutrition specialists. Smoking cessation is imperative, and any underlying osteitis must be treated.   3.3. Reconstruction materials Reconstruction after a full-thickness chest wall resection must be done immediately, as a single-step procedure [9,12,13]. It can be completed later, for example by a split-thickness skin graft, but the chest wall must be stabilized right away. In 2004, Losken et al. published a decision algorithm for reconstruction techniques [12]. When the resection, whatever its size, removes at least part of one rib, a prosthetic mesh must be implanted in order to protect the underlying organs. When two or more ribs are removed, the chest wall must be stabilized by rigid material. Rigid autologous materials, such as bone and cartilage, are not used anymore in chest wall stabilization, because of a lack of both rigidity and temporal stability [2]. Besides, donor site morbidity cannot be ignored [8]. Biomaterials, such as cryopreserved homografts and allografts, are still seldom employed. However, acellular dermal matrices are more often used [14]. In order to ensure a satisfying rigidity, these are combined with rigid prosthetic materials, that are currently dominated by titanium [15]. Titanium has several qualities that make it a staple of thoracic bone reconstruction. Its biocompatibility is excellent, with good tolerance to infection [16], and its flexural rigidity is close to that of the original bone [17]. Titanium plates have, however, been rendered near obsolete due to the use of autologous materials, but also that of methyl methacrylate cements to mold artificial ribs and sternums [15,18]. Although there is a lack of peer-review studies on cement biomechanical properties when used in the thorax [19], it is considered brittle in the long term, because of stress fatigue induced by respiratory movements [20-21]. In contrast, titanium has an excellent tolerance to such long-term stress [22]. Additionally, cement reconstructions are difficult to remove should a septic complication happen. Porous alumina ceramic can also be used for sternal replacement (figure 3) [23]. The material can be loaded with antibiotics, which can prove useful for use in an infectious context [24]. When the chest wall resection is small (< 5cm and removal of only one rib), either a flap (pedicled or rotation flap) or direct closure (if the adipose tissue is thick enough) may be able to stabilize the thorax [12,25]. Titanium plates should be used when two or more ribs are removed, but also when part of the sternum is removed [12,18]. When a sternectomy is performed, standard osteosynthesis material can be used to bridge the parietal defect, but custom-made titanium plates have also shown excellent functional results, and ease mechanical ventilation weaning [15,17]. When the sternoclavicular joint is removed together with the manubrium, it is possible to implant an articulated prosthesis in order to preserve shoulder function (figure 3) [26]. However, some prefer to avoid joint reconstruction, for fear of rupture under stress.   [caption id="attachment_4348" align="aligncenter" width="300"] Figure 3: Ceramil® porous aluminia ceramic sternal prosthesis (ICeram, Limoges, France, photography courtesy of Dr Bertin and Dr Tricard).[/caption] Such rigid material can be placed over a protective mesh, in order to avoid lung herniation. Many different types of mesh are available, and this may be absorbable or not [21], including: polypropylene, PTFE and polyglactin. Whatever material is chosen by the surgeon, it must be both pliable and robust [18]. In septic conditions, absorbable polyglactin meshes must be used, and are therefore favored in radionecrosis cases [8]. After healing, absorbable meshes are replaced by rigid fibrotic tissue [18]. Meshes can be superimposed in order to increase rigidity [3,27]. When there is a phrenic resection too big to be stitched, it must be reconstructed with a thick PTFE mesh [8,10]. Prosthetic materials, whatever their nature, must be covered by the end of the surgery, and this can require a graft. As long as the graft and surrounding tissue remain well vascularized, the infectious risk is low, even in a previously infected site [11]. All these reconstructive techniques allow for good postoperative functional results [27].   3.4. Reconstructive flaps Flaps can be divided into two major categories: pedicled flaps and free flaps [28]. These can also be either myocutaneous or fasciocutaneous. Scientific evidence for flap choice in breast reconstruction is weak [29], and there is an even greater lack of data when the chest wall is involved. No comparative study was found. The choice between flaps is made on a case-by-case basis [30], according to the surface area that needs covering, patient morphology, surgical scarring and irradiation history on donor sites, esthetical and functional consequences and, of course, the technical challenge of some grafts that heighten post-operative complications. While regional pedicled flaps are usually the first choice, free flaps may be the only options, particularly when pedicled flaps have already been used or damaged by previous surgery or radiotherapy [31]. Free flaps require microsurgery vascular anastomosis techniques in order to graft the flap far from the donor site. The recipient vessels are usually the internal mammary pedicle, thanks to their high blood flow, easy access, constant position and the freedom to position the flap wherever needed on the chest wall [32]. While previous irradiation doesn’t forbid the use of the internal mammary artery, it can sometimes be too small or fragile to provide a correct vascularization, or may have already been used for a coronary artery bypass. In these rare cases, the thoracodorsal vessels are used instead for anastomosis [32]. The most commonly used free flaps [30,33,34] are, as of 2017, the fasciocutaneous deep inferior epigastric perforator flap (DIEP) (figures 4a and 4b) and the superficial inferior epigastric artery flap (SIEA), followed by musculocutaneous flaps such as the gracilis or gluteal flaps. The major benefit in using a free flap is the ability to choose a donor site far from the irradiation fields. Besides, fasciocutaneous flaps do not result in a muscular defect. However, they require challenging microsurgical vascular anastomoses that are prone to thrombosis.   [caption id="attachment_4349" align="aligncenter" width="220"] Fig. 4a: Donor site for abdominal flaps. The skin paddle is the same for both DIEP and TRAM flaps.[/caption]   [caption id="attachment_4350" align="aligncenter" width="238"] Fig. 4b: The DIEP flap harvests only the fasciocutaneous tissue and the pedicle, leaving the abdominal wall structurally untouched.[/caption]   [caption id="attachment_4351" align="aligncenter" width="238"] Fig. 4c: The TRAM flap harvests the transverse rectus abdominis muscle; the abdominal wall defect must be reinforced by a prosthetic mesh in order to avoid eventration.[/caption]   Pedicled flaps, on the other hand, keep their original vascular supply. Instead of being relocated to another anatomical region, a simple rotation brings them where they are needed. The best known myocutaneous pedicled flaps are the latissimus dorsi flap (figures 4a, 4b and 4c) (it is usually possible to preserve part of the muscle in these indications) [25] and the pedicled transverse rectus abdominis flap (TRAM) (figure 4c) [35]. The latissimus dorsi flap (figures 5a and 5b) is often the first choice, provided it hasn’t been used in a previous breast reconstruction. It is an easy flap to perform and can cover a large area with few functional and esthetical consequences. In case of past extensive lymph node dissection, the integrity of the thoracodorsal pedicle and the latissimus dorsi nerve must be assessed preoperatively. The major drawbacks of the latissimus dorsi flap are postoperative pain and recurrent seromas on the donor site. Loss of shoulder function is usually transitory, getting back to baseline in 6 to 12 months, but activity can still be limited in the meantime [35]. Pedicled TRAM flaps are seldom performed anymore, because of the major abdominal wall defect they cause [36]. They are now usually replaced by the free fasciocutaneous DIEP flap that uses the same donor site (figure 4a) with much less morbidity [34,36]. Over pedicled flaps have been described for chest wall reconstruction after breast cancer, most notably ipsilateral thoracoabdominal horizontal dermofat flaps [37].   [caption id="attachment_4352" align="aligncenter" width="202"] Fig. 5a: Donor site of a latissimus dorsi flap.[/caption]   [caption id="attachment_4353" align="aligncenter" width="238"] Fig. 5b: Latissimus dorsi flap used for breast reconstruction.[/caption]   [caption id="attachment_4354" align="aligncenter" width="300"] Fig. 5c: Post-operative results.[/caption]   Last but not least, the pedicled omental flap is a staple of thoracic surgery. It can be harvested by laparoscopy or by a mini laparotomy and is usually rotated on the right gastroepiploic pedicle. Its size enables a wide cover of the anterior and lateral chest wall and, while it has been used in breast reconstruction after mastectomy, its most widespread use is in radionecrosis and infected cases [38]. The omentum’s detersive properties and rich vascularization, together with its size, make it a versatile and reliable flap that can later be covered by a split-thickness skin graft [39].   4. INDICATIONS   4.1. Locally advanced breast cancer The 2017 European Society for Medical Oncology (ESMO) guidelines recommend to consider surgery after neoadjuvant treatment for LABC [40]. Indeed, when there is a good response to neoadjuvant systemic therapies, surgery often does become technically possible with an acceptable morbidity [41]. Mastectomy with axillary dissection is usually advised, but sometimes a chest wall resection is also necessary for a proper en bloc surgery. MRI can be useful to predict chest wall invasion and the necessity of a full-thickness chest wall resection [42]. Margins should obey the “no ink on tumor” rule [43,44]. Survival data for chest wall resections in breast cancer are scarce and mostly available through small retrospective series [45-48]. Additionally, these mostly concern local recurrences and not initial treatment. Still, they are reliable enough to show that survival is correlated with tumor type and, in particular, hormonal status. Santillan et al., in a series of 28 patients, found that 5-year survival was null for triple negative breast cancers, but rose to 39% for the other patients. Overall 5-year survival varies between 18 and 66% [45,48,49]. Operative mortality is null, and morbidity varies between 21 and 36% in referral centers [45,50]. Overall, disease-free survival in operated LABC might not be much more than medical treatment alone. No randomized controlled trial or meta-analysis have tested that hypothesis and such a lack of data advocates for stringent patient selection [48,49]. Once metastatic patients are excluded, as well as those who did not respond to neoadjuvant treatment, few patients are eligible for such surgery. Whenever it is performed, it should be carried out with the utmost care in order to achieve complete resection [40,51]. However, regardless of oncological curative intent, there is also room for surgery in ulcerated lesions, in order to improve the quality of life of patients with bleeding, septic and malodorous tumors.   4.2. Chest wall recurrences Less than 5% of patients who undergo a mastectomy for breast cancer suffer from a local recurrence in the first decade. Such local recurrences are fairly diverse, from an isolated nodule on the former scar to a massive chest wall and lymph node invasion [3]. When a local recurrence is truly isolated, without distant metastasis, a local treatment is recommended, combined with a systemic approach [40]. Surgery has been considered for these patients since the 1990s, provided that complete resection is possible [52]. Patients who have never had radiotherapy should be irradiated first. However, radiotherapy may not be possible, particularly in patients who have already undergone irradiation, and, for these, surgery is the recommended treatment. A single superficial soft tissue exeresis may be enough but, depending on the invasion depth, authentic chest wall resections can also be performed [3,50]. Prognosis, on the whole, is variable, and mostly influenced by the initial nodal status [53]. A 2018 meta-analysis found that quality of life and long-term survival are improved in approximately 40% of patients who undergo full-thickness chest wall resection [54].   4.3. Radiotherapy complications   4.3.1. Radiation-induced sarcomas Radiation-induced sarcomas (figures 6a and 6b) are a rare complication, with an incidence of 0.2% after 10 years and 0.4% after 15 years. However, some patients, who bear a constitutional mutation of the p53 anti-oncogene, have a heightened sensitivity to radiation [6]. This, in turn, worsens their risk of radiation-induced sarcoma [55]. A p53 mutation should be ruled out in patients with a family history of Li-Fraumeni syndrome before any irradiation; when present, radiotherapy should be avoided [56,57].   [caption id="attachment_4355" align="aligncenter" width="300"] Fig. 6a: Axial MRI images of radiation-induced chest wall sarcoma in an 82-year old woman, 17 years after radiotherapy for breast cancer.[/caption]   [caption id="attachment_4356" align="aligncenter" width="280"] Fig. 6b: Sagittal MRI images of the same case.[/caption]   Secondary sarcomas are most frequent on the fringe of the irradiation fields, where DNA damage, while non-lethal, creates many carcinogenic mutations. As such, any peripheral lesion should undergo biopsy before treatment to ensure a correct diagnosis – usually image-guided percutaneous core needle biopsy under local anesthesia [58]. The biopsy site must be marked, so that it can be removed later during surgery and thus avoid dissemination of cancer cells [58]. Diagnostic criteria for radiation-induced sarcomas, established in 1948 by Cahan et al. [11], rely on two items. More than 10 years must have elapsed since irradiation and the secondary tumor histology must be different from the previous one. Later updates of the criteria, by Arlen in 1971 and Cahan in 1998, accept a shorter interval of, respectively, 3 and 5 years; the major criteria remains a history of irradiation on the sarcoma territory [59]. Many histological types of sarcoma can appear after irradiation. In some series, angiosarcomas account for more than 50% of cases, while for others histiocytic fibrosarcomas are the rule [60]. Undifferentiated tumors, osteosarcoma, fibrosarcoma and rhabdomyosarcoma are also frequently described [61]. Whatever the exact histological subtype, these are always high-grade tumors, where diagnosis is often delayed and the prognosis is poor [62]. Indeed, radiation-induced sarcomas of the breast are on average, at diagnosis, more advanced and of a more aggressive histology than primary sarcomas [63]. Whenever there are no metastases and resection is technically feasible with an acceptable operative risk, surgery should be performed [58,62]. Linthorst’s team have described a multimodal therapy that combines surgery, re-irradiation and hyperthermia therapy, with no significant survival improvement compared to the medical treatment group [64]. Surgery with healthy margins is the best prognosis factor for radiation-induced sarcoma. However, local recurrence is frequent, with an incidence of up to 65% [62]. Overall 5-year survival is poor, ranging between 10 and 36% [59,65]. Prognosis is poorer than that of primary sarcomas [63]; Yin et al.’s series found a 5-year overall survival of 22.5% for radiation-induced sarcomas of the breast, much lower than the 44.5% rate for primary breast sarcomas. However, when all the confounding factors (particularly age and staging at presentation) are controlled, survival is comparable.   4.3.2. Osteoradionecrosis Irradiation leads to the formation of scar tissue and fibrosis, and this in turn leads to a thrombotic microangiopathy. The consecutive tissular hypoxemia, together with cytokine modifications, paves the way for osteoradionecrosis [2]. As fibrosis and necrosis progress, a skin defect appears, and healing is hindered by mediocre tissue perfusion (figure 7). The wound is easily contaminated, mostly by the Staphylococcus species, which creates a high risk of osteitis and bacteremia. The edges of the wound should always be biopsied to rule out local recurrence and sarcoma [66].   [caption id="attachment_4357" align="aligncenter" width="300"] Figure 7: Parasternal osteoradionecrosis several years after radiotherapy for breast cancer.[/caption]   Treatment, once again, is surgical, and is based upon the removal of all necrotic tissues; healthy tissue is then covered by a well-vascularized flap [66,67]. Tissue resection must be as conservative as possible, in order to limit chest wall instability, but must still remove all devascularized tissues. Larger chest wall resections must be stabilized by prosthetic titanium material, although this should be avoided whenever possible in septic conditions. When material implantation is inevitable, long-term intravenous antibiotic therapy may be necessary. More than providing an esthetic reconstruction, the flap brings a fresh, healthy, vascular supply that heals hypoxic tissues. Great omentum flaps, gifted with a rich microvascularization as well as great anti-infective properties, are often used in this indication [68]. Latissimus dorsi flaps are also serviceable here. Some advocate for a widespread use of free flaps: healthy tissue, harvested far from the irradiated area, with a pedicle undamaged from previous surgery or irradiation [67]. Cutaneous perforator flaps appear to yield similar results to the gold-standard musculocutaneous flaps, and their reduced morbidity on the donor site make them a new treatment alternative [68]. If no skin cover is possible after reconstruction, negative pressure therapy can reduce the de-epithelized area, either in a controlled wound healing strategy or before a split-thickness skin graft [11,69]. There is, unfortunately, no large-scale or long-term survival data available on osteoradionecrosis. Case series point to few postoperative complications, whatever the operative choices [38,39,67,68]; when any are reported, they are mostly flap necrosis. Yuste et al.’s 4 patient series found no recurrence with up to 6 years follow up [67].   4.4. The special case of Stewart-Treves syndrome Stewart-Treves syndrome is an angiosarcoma developing on a lymphedematous territory; the invasion often reaches the chest wall. Such lymphedema results from an extensive axillary lymph node dissection, as well as adjuvant radio and chemotherapy [70]. The pathogenesis of these peculiar sarcomas is still debated. The disease-free period is longer than that of radiation-induced sarcomas, with a mean of 11 years [71]. Incidence is low, occurring in about 0.5% of patients 5 years after a radical mastectomy [72]. It will probably dwindle thanks to a diminution of extensive lymph node dissection, since the sentinel lymph node technique avoids many extensive dissections. The management of Stewart-Treves sarcoma should, ideally, be a locoregional treatment [73], and indeed surgery is the most commonly performed treatment [74]. However, the previous history of radiotherapy limits both irradiation possibilities and the surgical success rate, since irradiated tissues are at a major risk of healing badly. Besides, surgical treatment can only be proposed for non-metastatic patients and only when complete resection is possible. Some use a multimodal therapy that combines surgery, reirradiation and hyperthermia therapy [64], seemingly with no significant difference in overall survival and local recurrence between the surgical and the non-surgical group. It is a sarcoma surgery, with a large healthy margin that often leads to amputation of the limb. Even in that somewhat best-case scenario, local recurrence is frequent (up to 96%) [75], and prognosis remains poor with a 5-year overall survival of 14% [71].   5. CONCLUSION Management of locally advanced breast cancers has changed; thanks to more efficient neoadjuvant treatments, some tumors have become operable. Local recurrences and radionecrosis require a comprehensive care that is better understood than ever. Novel chest wall reconstructive techniques, dominated by titanium materials, combined with a liberal use of flaps, make it possible to perform a correct oncological surgery, with reliable functional and esthetical results. It nevertheless remains a complex therapeutic process, where strict patient selection and cooperation between surgical teams, both thoracic and plastic, are paramount to successful outcomes.   Références Khalil HH, Malahias MN, Balasubramanian B, Djearaman MG, Naidu B, Grainger MF, et al. Multidisciplinary Oncoplastic Approach Reduces Infection in Chest Wall Resection and Reconstruction for Malignant Chest Wall Tumors. 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juin 7, 2019
Chirurgie thoracique · Vol. 23 Juin 2019

Les adénomes parathyroïdiens ectopiques médiastinaux : quelle voie d’abord ?

Z. Ammor*, I. Issouffou, L. Belliraj, H. Harmouchi, M. Lakranbi, Y. Ouadnouni, M. Smahi    Service de chirurgie thoracique, CHU Hassan II, Fès, Maroc. * Correspondance : dr.a.ammor@gmail.com   DOI : 10.24399/JCTCV23-2-AMM Citation : Ammor Z, Issouffou I, Belliraj L, Harmouchi H, Lakranbi M, Ouadnouni Y, Smahi M. Les adénomes parathyroïdiens ectopiques médiastinaux : quelle voie d’abord ? Journal de chirurgie thoracique et cardio-vasculaire 2019;23(2). doi: 10.24399/JCTCV23-2-AMM RÉSUMÉ Introduction : les adénomes parathyroïdiens peuvent être localisés en situation ectopique dans 11 à 25% des cas. Le diagnostic topographique reste une étape essentielle, qui est responsable parfois de 50% d´échec de la chirurgie. Matériels et méthodes : étude rétrospective à propos de 7 cas, opérés dans notre formation pour un adénome parathyroïdien ectopique médiastinale durant 4 ans. Résultats : tous les cas étaient de sexe féminin, l’âge moyen était de 56,8 ans. Les signes d’appel étaient : urinaires, ostéoarticulaires. Sur le plan biologique, tous les cas présentaient une hypercalcémie corrigée ainsi qu’une hyperparathormonémie. Toutes les patientes avaient bénéficié d’une échographie cervicale qui n’objectivait un nodule parathyroïdien ectopique droit que chez une seule patiente. Une imagerie par résonance magnétique cervicale dans un cas, qui était cause d’une cervicotomie blanche par les viscéralistes. Une tomodensitométrie cervicothoracique dans tous les cas objectivait une localisation précise de l’adénome parathyroïdien ectopique médiastinal (APEM). La scintigraphie au 99mTc-sestamibi réalisée dans 5 cas était concluante. La voie d’abord était cervicale (2 cas), cervicothoracique (2 cas) et thoracique (3 cas). Conclusion : le bilan radiologique lors de la prise en charge des APEM permet au chirurgien de réaliser un acte ciblé “frappe chirurgicale”, grâce à des voies d’abord adaptées, un temps opératoire écourté, évitant les explorations chirurgicales blanches.   ABSTRACT Mediastinal ectopic parathyroid adenomas: Which pathway? Introduction: Parathyroid adenomas can be located in an ectopic situation in 11 to 25% of cases. Topographical diagnosis remains an essential step and is sometimes responsible for 50% failure of the surgery. Materials and methods: Retrospective study on 7 cases, operated in our department for a parathyroid mediastinal ectopic adenoma (APEM) for 4 years. Results: All cases were female; mean age was 56.8 years. Warning symptoms were urinary and osteo articular. Biologically, all cases had corrected hypercalcemia and hyperparathormonemia. Six patients had undergone cervical ultrasonography, and a parathyroid right ectopic nodule was found in a single case. In one case, a cervical MRI was the cause of an inconclusive cervicotomy by the visceralists. In all cases, cervicothoracic CT showed a precise localization of APEM. 99mTc sestamibi scintigraphy was performed in 5 cases and was conclusive. The approach was cervical (2 cases), cervico-thoracic (2 cases) or thoracic (3 cases). Conclusion: Radiological assessment during the management of APEM allows the surgeon to perform a targeted act "Surgical Strike", thanks to adapted approaches, a shortened operating time and avoiding inconclusive surgical explorations.   1. Introduction L’hyperparathyroïdie primaire est le mode révélateur le plus fréquent des adénomes parathyroïdiens. Il peut être localisé en situation ectopique dans 11 à 25% des cas, dont l’emplacement le plus fréquent est le médiastin (70% des cas sont intrathymiques, 30% sont dans la gaine carotidienne, en paraœsophagien, sillon trachéo-œsophagien ou en intrathyroïdien). Le diagnostic topographique reste une étape essentielle dans la prise en charge diagnostique des adénomes parathyroïdiens ectopiques médiastinaux (APEM). Il est responsable parfois de 50% d’échec de la chirurgie. Par de ce travail, en analysant les caractéristiques épidémiologiques, cliniques, thérapeutiques et évolutives de cette pathologie rare, nous allons souligner la place prépondérante de l’imagerie préopératoire permettant un acte chirurgical réussi.   2. Matériels et méthodes Il s’agit d’une étude rétrospective à propos de 7 cas, suivis pour hyperparathyroïdie primaire en service d’endocrinologie, puis opérés dans notre formation (service de chirurgie thoracique du CHU Hassan II à Fès) pour un adénome parathyroïdien ectopique médiastinal pendant une durée de 4 ans, allant de février 2014 jusqu’à février 2018.   3. Résultats Tous les cas de notre étude étaient de sexe féminin, l’âge moyen était de 56,8 ans (44-70 ans). Parmi les antécédents, on trouve une cholécystectomie dans 2 cas et un cas opéré pour un cancer du sein. Les signes d’appel étaient divers : Sur le plan clinique, les manifestations ostéoarticulaires à type de douleurs osseuses et fracture spontanée, ainsi qu’une ostéoporose étaient présentes dans 4 cas ; les manifestations urinaires à type de douleurs lombaires et lithiase rénale récidivante dans 2 cas, et un cas a été suivi pour un syndrome sec [figure 1]. Sur le plan biologique, tous les cas présentaient une hypercalcémie corrigée qui variait entre 110 et 138 mg/l avec une moyenne à 124 mg/l, ainsi qu’un taux de parathormone qui variait entre 3 et 20 fois la normale avec un taux moyen de 9,5 fois la normale.   [caption id="attachment_4392" align="aligncenter" width="300"] Figure 1. Les signes d’appels cliniques et antécédents pathologiques.[/caption]   En termes de moyens d’exploration paraclinique : 6 patientes avaient bénéficié d’une échographie cervicale, objectivant un nodule parathyroïdien ectopique droit dans un cas et des lésions nodulaires thyroïdiennes dans 5 cas. Une cervicotomie blanche a été réalisée dans une autre formation, où le bilan topographique se contentait d’une imagerie par résonance magnétique (IRM) cervicale qui a objectivé la présence d’un nodule parathyroïdien eutopique [figure 2]. En postopératoire, la patiente a bénéficié d’une scintigraphie, objectivant une hyperfixation sur un adénome parathyroïdien ectopique médiastinal antérieur.   [caption id="attachment_4395" align="aligncenter" width="300"] Figure 2. Coupe axiale et coronale d’une IRM cervicale montrant une masse tissulaire du médiastin supérieur.[/caption]   Une tomodensitométrie (TDM) cervicothoracique réalisée dans tous les cas objectivait une localisation précise de l’APEM (médiastin : antérosupérieure 5 cas, moyen 1 cas, postérieure 1 cas) [figure 3]. La scintigraphie au 99mTc-sestamibi réalisée dans 5 cas était concluante (un adénome parathyroïdien médiastinal 3 cas, cervical latérotrachéal 2 cas) [figure 4].   [caption id="attachment_4396" align="aligncenter" width="300"] Figure 3. Coupe scannographique axiale de différents cas montrant une image tissulaire médiastinale antérieure et postérieure.[/caption]   [caption id="attachment_4397" align="aligncenter" width="300"] Figure 4. La tomoscintigraphie montrant une formation nodulaire du médiastin antérieur et latérotrachéal gauche.[/caption]   Après un traitement médical bien conduit fait d’une réhydratation parentérale, 4 patientes étaient mises sous biphosphonates jusqu’à normalisation de la calcémie.  La voie d’abord chirurgicale était : une cervicotomie de Kocher : 2 cas ; une cervicotomie présternocleïdo-mastoïdienne avec manubriotomie : 1 cas ; une cervicotomie de Kocher avec une manubriotomie : 1 cas. une sternotomie : 1 cas ; une manubriotomie : 1cas ; une thoracotomie : 1 cas. Le geste de résection de l’APEM a été associé à une thymectomie chez 3 patientes et une lobectomie-isthmectomie thyroïdienne chez une autre, nécessitant un examen extemporané dans 1 cas. Le siège de l’adénome parathyroïdien était intrathymique dans 3 cas, en latérotrachéal dans 2 cas, en intertrachéo-œsophagien dans 1 cas et dans la gaine carotidienne dans 1 cas. Les suites opératoires étaient simples, toutes les patientes ont normalisé leur calcémie et leur parathormonémie. Deux d’entre elles ont présenté une hypocalcémie jugulée par substitution de calcémie par voie orale avec normalisation ultérieure. Le recul a varié de 1 à 16 mois avec une moyenne de 8 mois qui était sans particularités.   4. Discussion  Jadis, le diagnostic des adénomes parathyroïdiens était révélé à des stades très évolués par des lésions osseuses ou de la lithiase rénale [1]. Aujourd’hui, sa découverte est principalement fortuite chez des patients asymptomatique ou peu symptomatique à la suite d’un dosage systématique [1,2]. Les signes cliniques de l’hypercalcémie sont assez fréquemment révélateurs de cette pathologie [3]. C’est sur la biologie que repose le diagnostic, défini par l’association hypercalcémie-parathormone plasmatique élevée, ou en discordance avec la calcémie [4-6]. L’imagerie avant le geste chirurgical a pour objectif la localisation préopératoire d’un APEM, responsable de 50% d’échec de la chirurgie cervical [7]. Les 4 principaux moyens sont : L’échographie cervicale reste l’examen de première intention qui permet d’explorer les sites habituels des parathyroïdes et dans le cas échéant, la recherche d’adénome ectopique cervical le long de la gaine des carotides et de l’espace paraœsophagien. La TDM cervicothoracique se justifie essentiellement en cas de discordance du couple échographie cervicale-scintigraphie au sestamibi, en particulier dans l’exploration des zones qui restent aveugles à l’échographie comme les aires rétrotrachéales ou rétro-œsophagiennes où l'air gêne le passage du faisceau ultrasonore mais aussi et surtout les zone susceptibles d’ectopie. Ces dernières sont représentées en premier par le médiastin et plus rarement le pharynx. L’IRM cervicothoracique est indiquée pour des adénomes parathyroïdes ectopiques qui échappent à l'échographie cervicale. Elle reste supérieure au scanner qui est relativement peu performant à cause des artéfacts, dus en particulier aux épaules [8]. De plus, elle est non irradiante et permet une imagerie multiplanaire avec des détails anatomiques et un contraste supérieur ; elle ne nécessite pas une injection d’iode. La scintigraphie au 99mTc-sestamibi a été établie comme étant la méthode d’imagerie de choix et ce d’autant plus qu’elle donne des résultats supérieurs à ceux des autres techniques, telles que l’échographie, le scanner et l’IRM [3,4,6-10] permettant la détection, au cours du même examen, de glandes parathyroïdes hyperfonctionnelles quelle que soit leur localisation eutopique ou ectopique. À sensibilité différente [figure 5], l’imagerie préopératoire de l’APEM a une place prépondérante dans son diagnostic et sa localisation. Le couple échographie-scintigraphie reste l’examen clé [figure 6] : il permet d’augmenter le taux de succès chirurgical et diminuer les explorations chirurgicales blanches inutiles, en adaptant la voie d’abord où la voie cervicale reste la plus réalisée, nécessitant un élargissement par une sternotomie partielle ou totale ou une thoracotomie, lors des localisations médiastinales postérieures [11] [figure 7].   [caption id="attachment_4398" align="aligncenter" width="300"] Figure 5. La sensibilité aux différents moyens d’imagerie préopératoire.[/caption]   [caption id="attachment_4399" align="aligncenter" width="300"] Figure 6. La place du couple échographie-scintigraphie dans l’imagerie préopératoire.[/caption]   [caption id="attachment_4400" align="aligncenter" width="300"] Figure 7. La place de l’imagerie préopératoire dans l’adaptation de la voie d’abord.[/caption]   5. Conclusion Le bilan radiologique reste un temps essentiel dans la prise en charge des APEM et offre une cartographie cervicomédiastinale exacte permettant au chirurgien de réaliser un acte ciblé “frappe chirurgicale”, grâce à des voies d’abord adaptées, un temps opératoire écourté évitant les explorations chirurgicales blanches.   Références Lapras V., Billotey C., Peix L., Imagerie normale et pathologique des glandes parathyroïdes. Radiologie et Imagerie médicale cardiovasculaire-thoracique-cervicale, EMC 32-710-A-10 Elsevier Masson 2009.https://doi.org/10.1016/S1879-8535(09)72781-3 Hertlg A., Maruani G., Pallard M., Houillier P., Hyperparathyroïdie primitive, Néphrologie 2000;21(6):283-290. Guevara N., Castillo L., Santini J., Chirurgie des glandes parathyroïdes. EMC Technique chirurgicale. 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Ghfir I., Ben Rais N., Ectopie parathyroïdienne objectivée par la scintigraphie au 99mTc-MIBI, Médecine nucléaire 2007;31:392 394.https://doi.org/10.1016/j.mednuc.2007.06.006 El Khoury M., Neves F., Miquel A., Benadjila Z., Lesavre A., Kone T., Menu Y., Stratégie d'imagerie chez un patient suspect d'hyperparathyroïdie primaire, Feuillets de radiologie 2005;45(3c1):166-173.https://doi.org/10.1016/S0181-9801(05)80584-6 Ernst O., Hyperparathyroïdie : applications du scanner et de l'IRM, Journal de radiologie 2009;90:409-412.https://doi.org/10.1016/S0221-0363(09)72529-6 Berehou F., Ghfir I., Ben Ral N., Ectopie de la parathyroïde objectivée par la scintigraphie au MIBI-Tc 99m. À propos de deux cas. 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juin 7, 2019
Chirurgie thoracique · Vol. 23 Juin 2019

Kyste hydatique du poumon : chirurgie conservatrice ou résection radicale ?

Rachid Marouf*, Ihsan Alloubi Service de chirurgie thoracique et cardiovasculaire, CHU Mohammed VI, Oujda, Maroc. * Correspondance : rachidmarouf@yahoo.fr   DOI : 10.24399/JCTCV23-2-MAR Citation : Marouf R, Alloubi I. Kyste hydatique du poumon : chirurgie conservatrice ou résection radicale ?. Journal de chirurgie thoracique et cardio-vasculaire 2019;23(2). doi: 10.24399/JCTCV23-2-MAR RÉSUMÉ Introduction : l’échinococcose humaine est une zoonose causée par des parasites, les ténias du genre Echinococcus. C’est une maladie endémique dans la région méditerranéenne, en Amérique du Sud, Australie et Nouvelle-Zélande, elle sévit dans les régions rurales où l’élevage des ovins et caprins est répandu, et constitue un véritable problème de santé publique. Objectif : l’objectif de notre travail est d’analyser le rôle du traitement chirurgical dans la prise en charge du kyste hydatique pulmonaire, les différentes techniques chirurgicales conservatrices et radicales, et d’évaluer l’incidence des complications postopératoires. Méthodes : nous rapportons les résultats chirurgicaux d’un travail rétrospectif sur l’atteinte pulmonaire par la maladie hydatique à propos de 200 cas colligés au centre hospitalier universitaire d’Oujda, Maroc, entre janvier 2008 et avril 2018. Résultats : la moyenne d’âge était de 36 ans, on notait une prédominance masculine avec une sexe-ratio de 1,5. Le bilan radiologique avait montré plusieurs aspects de kystes, la forme la plus fréquemment rencontrée étant celle du kyste hydatique simple dans 104 cas (52%). Le kyste hydatique était compliqué, soit rompu ou fissuré dans 96 cas (48%). La localisation droite était la plus fréquente, elle a concerné 58% des cas. Le traitement conservateur représente 95% des cas (190 patients). La ponction évacuation a été réalisée chez 154 cas (77%), une périkystectomie dans 14 cas (7%), une kystectomie dans 18 cas (9%) et un capitonnage de la cavité résiduelle dans 180 cas (90%), les kystes associés à un épaississement pleural ont bénéficié d’une décortication dans 4 cas (2%). Par ailleurs, un traitement radical basé sur une résection réglée n’a été réalisé que dans 10 cas (5%). Le pronostic a changé au cours des dernières années, et les résultats sont maintenant communément satisfaisants. Les complications les plus fréquentes sont l’atélectasie et la pneumopathie postopératoire. La mortalité opératoire n’a pas excédé 1%. Conclusion : le traitement du kyste hydatique pulmonaire est essentiellement chirurgical. La prophylaxie est nécessaire pour l’éradication complète de cette maladie.   ABSTRACT Hydatid cyst of the lung: conservative surgery or radical resection? Introduction: Human echinococcosis is a parasitic disease caused by tapeworms of the genus Echinococcus. It is an endemic disease in the Mediterranean region, South America, Australia and New Zealand. It is also rampant in rural areas where ovine and caprine breeding is widespread and constitutes a real public health problem.  Objective: The objective of our work is to analyze the role of surgical treatment in the management of the pulmonary hydatid cysts, assess the different surgical techniques and evaluate the incidence of postoperative complications. Methods: We retrospectively analyzed 200 patients with lung hydatid cysts collected at the university hospital center of Oujda, Morocco, between January 2008 and April 2018. Results: The average age is 36 years, there is a male predominance with a sex ratio of 1.5. There are a variety of radiographic images. A simple cyst was the most commonly observed lesion, in 104 cases (52%). Complicated forms were noted in 96 patients (48%) and the right lung was more frequently affected than the left (58%). Conservative treatment accounted for 95% of cases; cystotomy was carried out in 154 cases (77%), peri-kystectomy in 14 cases (7%), cyst removal with capitonnage by Ugon's method in 18 cases (9 %), capitonnage in 180 cases (90%) and cysts associated with pleural thickening have undergone decortications in 4 cases (2%). However, radical treatment was carried out in only 5% of our interventions (10 cases). The prognosis has changed during the last few years, and results are now usually satisfactory. The most frequent complications are postoperative atelectasis and pneumonia. Operative mortality does not exceed 1%. Conclusion: The treatment of the pulmonary hydatid cysts is essentially surgical. Prophylaxis is necessary to eradicate the disease completely.   1. Introduction L’hydatidose est une anthropozoonose cosmopolite causée par l’Echinococcus granulosus. Elle sévit en mode endémique au Maroc et constitue un problème majeur de santé publique, surtout en zones rurales où l’élevage et l’agriculture sont les principales sources de vie [1].    2. Objectif Rôle du traitement chirurgical dans le traitement du kyste hydatique pulmonaire. Comparaison entre les différentes techniques chirurgicales : conservatrice versus radicale. Évaluation de l’incidence des complications en fonction de la technique chirurgicale.   3. Matériels et méthodes Nous rapportons les résultats chirurgicaux d’un travail rétrospectif sur l’atteinte pulmonaire par la maladie hydatique à propos de 200 cas colligés au centre hospitalier universitaire d’Oujda, Maroc, entre janvier 2008 et avril 2018.   4. Résultats   4.1. Aspects cliniques et radiologiques Il s’agissait de 120 hommes (60%) et de 80 femmes (40%) avec un sexe-ratio de 1,5. La notion de contact avec les chiens a été retrouvée dans 66% des cas (132 cas). Les symptômes cliniques qui amenaient les patients à consulter étaient principalement : la toux dans 136 cas (68%), les douleurs thoraciques dans 124 cas (62%), l’hémoptysie dans 90 cas (45%), la dyspnée d’effort dans 46 cas (23%), la vomique hydatique dans 30 cas (15%) et les expectorations récurrentes dans 30 cas (15%). L’examen clinique été normal dans 71% des cas, a trouvé un syndrome d’épanchement liquidien dans 21% des cas et un syndrome de condensation dans 8% des cas.   [caption id="attachment_4414" align="aligncenter" width="300"] Figure A. Aspect radiologique d’une opacité intraparenchymateuse gauche, ronde bien limitée.[/caption]   [caption id="attachment_4415" align="aligncenter" width="300"] Figure B. Aspect radiologique d’une opacité excavée avec niveau hydroaérique régulier, basale gauche.[/caption]   [caption id="attachment_4416" align="aligncenter" width="300"] Figure C. Aspect scanographique d’un kyste hydatique pulmonaire sain droit.[/caption]   [caption id="attachment_4417" align="aligncenter" width="300"] Figure D. Aspect scanographique d’un kyste hydatique pulmonaire gauche rompu dans les bronches.[/caption]   Le bilan radiologique fait de radiographie thoracique complétée par une tomodensitométrie (TDM) thoracique avait trouvé [tableau 1] :   Tableau 1. Les différents aspects radiologiques du kyste hydatique pulmonaire. Aspect radiologique % Nombre de patients Opacité ronde bien limitée 52% 104 Opacité hétérogène mal limitée 15% 30 Opacité excavée avec un niveau hydroaérique régulier 10% 20 Aspect de rupture du kyste hydatique parenchymateux avec une membrane d’endocyste retenue et affaissée (rétention membranaire) 10% 20 Hydropneumothorax 5% 10 Opacités multiples 5% 10 Pleurésie 3% 6   Les lésions du poumon droit étaient présentes dans 116 cas (58%), alors que celles du poumon gauche l’étaient dans 70 cas (35%) et des lésions bilatérales étaient visibles dans 14 cas (7%). La bronchoscopie a été réalisée dans 100 cas (50%) et a confirmé le diagnostic dans 40 cas (20%) en visualisant la membrane hydatique. La sérologie hydatique (Elisa et immunoélectrophorèse) a été réalisée chez 164 patients (82%) et a été positive dans 130 cas (65%).   4.2. Traitement chirurgical [tableau 2] L’intubation par une sonde sélective à double courant type Robertshaw a été réalisée chez tous nos patients, elle a permis d’éviter l’inondation de l’arbre bronchique controlatéral en cas de rupture et l’obstruction bronchique par des fragments de membrane. Une analgésie péridurale thoracique, qui est l’élément clé du traitement de la douleur postopératoire, a été positionnée chez 180 de nos patients (90%). La voie d’abord a été une thoracotomie postérolatérale dans 100 cas (50 %), une thoracotomie latérale avec conservation musculaire dans 70 cas (35%). Un abord par vidéothoracoscopie (VATS) a été réalisé dans 30 cas (15 %), qui sont majoritairement des jeunes entre 15 et 25 ans et ayant un kyste hydatique du poumon sain à localisation périphérique et de taille ≤6 cm. Par cette voie, les patients ont été placés en position de décubitus latéral. Le chirurgien et l’assistant se tiennent devant ou derrière le patient, en fonction de la localisation du kyste. Trois trocarts ont été placés sur le côté atteint d’une manière triangulaire en fonction de la localisation de la lésion, l’un de ces trocarts étant situé à l’aplomb du kyste [figure 1]. Le principe de la thoracoscopie est de suivre les mêmes étapes que la chirurgie ouverte qui comprend la stérilisation du kyste avec un agent scolicide, l’ablation complète de la membrane hydatique et la fermeture des fistules bronchiques, si elles sont présentent.   [caption id="attachment_4408" align="aligncenter" width="300"] Figure 1. Ponction évacuation d’un kyste hydatique périphérique sous thoracoscopie.[/caption]   Le premier temps opératoire était l’adhésiolyse des adhérences pleuroparenchymateuses avec exposition du kyste hydatique, puis protection du champ opératoire par injection directe dans la cavité pleurale du sérum salé hypertonique à 10% qu’on utilise comme solution scolicide. Le traitement conservateur a concerné 95% des patients. Une kystectomie ou énucléation [figure 2] selon la technique d’Ugon a été réalisée dans 18 cas (9%). La ponction évacuation a été réalisée dans 154 cas (77%). Après avoir exposé le kyste, une grosse seringue est introduite en son sein pour vider le liquide sous tension. Puis la partie éminente est ouverte, un grand tube d’aspiration est introduit immédiatement à travers la même ouverture pour évacuer le reste matériel kystique. La membrane germinative était alors enlevée avec une pince, la cavité résiduelle irriguée avec une solution saline et les fistules bronchiques suturées [figures 3,4]. Dans les situations où le périkyste est en atélectasie ou fibrose, une résection de ce périkyste est faite.   [caption id="attachment_4409" align="aligncenter" width="300"] Figure 2. Kystectomie ou énucléation.[/caption]   [caption id="attachment_4410" align="aligncenter" width="300"] Figures 3-4. Après évacuation du kyste hydatique du poumon et lavage de la cavité par du sérum salé hypertonique, on ferme les fistules bronchiques par des points en X.[/caption]   La cavité résiduelle est fermée au moyen de sutures à partir du niveau le plus profond (capitonnage). La suture des fistules bronchiques et la fermeture de la cavité résiduelle sont faites avec du fil résorbable. La périkystectomie [figure 5] a été réalisée dans 14 cas (7%).   [caption id="attachment_4411" align="aligncenter" width="300"] Figure 5. Pièce opératoire d’une périkystectomie emportant le parasite et sa gangue inflammatoire.[/caption]   Les patients ayant un épaississement pleural associé, en plus de la kystotomie et du capitonnage, ont bénéficié d’une décortication pour faciliter l’expansion du poumon dans 4 cas (2%). Dans les quatorze cas (7%) de polykystoses bilatérales retrouvés dans notre série, on a préféré opérer les patients en deux temps avec un intervalle d’un à trois mois entre les interventions, tout en commençant d’abord par la localisation symptomatique ou la plus volumineuse ou la plus menaçante ou celle qui contenait le plus de kystes.   Tableau 2. Traitement chirurgical du kyste hydatique pulmonaire.   Traitement conservateur   Kystectomie 18 cas (9%)     190 cas (95%) Ponction évacuation 154 cas (77%) Périkystectomie 14 cas (7%) Décortication pleurale 4 cas (2%) Capitonnage de la cavité résiduelle   180 cas (90%) Traitement radical Lobectomie Bilobectomie 8 cas 2 cas 10 cas (5%)    Par ailleurs, un traitement radical sous forme de résection réglée a été conçu pour 10 patients (5%) pour les raisons suivantes : kyste hydatique détruisant à plus de 50% le lobe dans 6 cas [figure 6] ; kyste avec suppuration pulmonaire sévère persistante dans 2 cas ; kyste hydatique avec fibrose et hépatisation de tout le lobe dans 2 cas [figure 7].   [caption id="attachment_4412" align="aligncenter" width="300"] Figure 6. Lobectomie inférieure droite pour un kyste hydatique détruisant presque tout le lobe.[/caption]   [caption id="attachment_4413" align="aligncenter" width="300"] Figure 7. Lobectomie moyenne pour kyste hydatique avec un lobe fibrosé et hépatisé.[/caption]   4.3. Évolution et surveillance La durée moyenne d’hospitalisation a été de 6 jours. On a recensé aucun décès. Nous avons surveillé régulièrement nos patients après leur sortie du service en consultation. Cette surveillance est fondée essentiellement sur la radiographie thoracique au rythme de 15 jours, 3 mois, 6 mois, 1 an, puis chaque année, demandée essentiellement pour l’étude du parenchyme pulmonaire et l’état de la cavité résiduelle. La surveillance sérologique est demandée chaque fois qu’elle est possible à 6 mois puis 1 an après le geste chirurgical. La TDM est réservée aux cas douteux de récidive ou de complication. Les suites ont été compliquées chez 21 patients (10,5%) [tableau 3].   Tableau 3. Les complications du traitement chirurgical du kyste hydatique pulmonaire. Complication Nombre de cas Prise en charge Atélectasie du poumon sous-jacent 6 cas Kinésithérapie respiratoire Bronchoaspiration Pneumopathie postopératoire 4 cas Antibiothérapie Anémie postopératoire 5 cas Transfusion Pyothorax 2 cas Antibiothérapie à large spectre et lavage avec système d’irrigation Persistance d’une cavité résiduelle par lâchage de sutures après capitonnage (fond de la cavité capitonnée très inflammatoire) 2 cas 1 cas : reprise chirurgicale avec résection réglée après infection de la cavité 1 cas : surveillance Bullage prolongé 2 cas Drainage thoracique prolongé   Dans notre série, seulement un patient a eu une récidive de kyste hydatique rompu dans la plèvre à 3 ans de distance de sa première opération, justifiant une reprise chirurgicale. Le faible taux de récidive démontre et valorise l’excellence de la chirurgie conservatrice dans la prise en charge des kystes hydatiques pulmonaires.   5. Discussion L’hydatidose est une parasitose qui sévit toujours en mode endémique au Maroc. Elle constitue un problème majeur de santé publique. Son incidence est de 12/100000 habitants [1]. Les lésions kystiques évoluent très lentement, de sorte que les symptômes peuvent ne pas apparaître et la maladie ne peut être diagnostiquée qu’après plusieurs années. La chirurgie est le seul traitement radical. Tous les kystes doivent être opérés, qu’ils soient symptomatiques ou pas [2]. Le but de la chirurgie dans le kyste hydatique pulmonaire est de [2,3] : supprimer le parasite et ses annexes ; éviter la dissémination ; conserver autant que possible le maximum de parenchyme pulmonaire fonctionnel ; réséquer les lésions pulmonaires irréversibles ; rétablir l’anatomie et la fonction pulmonaire normale : décortication pour faciliter la réexpansion. De ces impératifs découlent plusieurs techniques chirurgicales qu’on peut schématiser en techniques conservatrices ou radicales [3] [tableau 4]. Le choix de la technique chirurgicale est, le plus souvent, influencé par l’état du malade, l’état du kyste et du parenchyme pulmonaire adjacent et celui de la fonction respiratoire [4]. En règle générale, le parenchyme pulmonaire doit être préservé autant que possible chez les patients atteints de cette pathologie pulmonaire bénigne et d’évolution lente [5]. Le traitement du parasite se fait par la protection du champ opératoire par des compresses imbibées d’une solution scolicide tel le sérum salé hypertonique, par la manipulation douce du kyste en peropératoire et par la stérilisation du kyste par la solution scolicide qui permet d’éviter la dissémination du germe, ainsi que le risque de récidive [5]. Le traitement du périkyste peut se faire selon deux méthodes, conservatrice ou radicale. La chirurgie conservatrice comprend les techniques [3,5-7] : d’énucléation ; de kystectomie après aspiration ; de périkystectomie. La kystectomie ou énucléation selon la technique d’Ugon est réalisée pour les kystes hydatiques pulmonaires périphériques de petite taille, entre 3 et 5 cm, avec un faible risque de rupture. Elle consiste, après incision du périkyste, en l’accouchement du kyste. Cette manœuvre est facilitée par l’application d’une ventilation à pression positive intrabronchique. Les gros kystes ne doivent pas être traités avec cette méthode car il existe un risque de rupture. La ponction évacuation est la plus fréquemment réalisée pour les kystes sains et/ou rompus mais non infectés et/ou en présence d’un périkyste fin. Cette technique consiste d’abord à inonder le champ opératoire par du sérum salé hypertonique afin de protéger la plèvre de toute souillure parasitaire, puis on repère le dôme saillant du kyste et on aspire par ponction le liquide hydatique à l’aide d’une grosse aiguille ou d’un trocart. La partie proéminente du kyste est ensuite ouverte, suivie de l’extraction de la membrane hydatique. Le fond de la cavité kystique est lavé minutieusement par la solution scolicide. La périkystectomie selon la méthode de Perez-Fontana a été proposée en 1953. Elle implique l’excision du kyste hydatique et emporte le tissu pulmonaire réactionnel au kyste en suturant, au fur et à mesure de leur rencontre, les vaisseaux et les bronches érodés, le rapprochement du parenchyme pulmonaire sain au pourtour de la lésion est obligatoire. Cette technique reste réservée pour les kystes hydatiques rompus et infectés et/ou aux périkystes épais. Traitement de la cavité résiduelle : ces procédures conservatrices sont associées à la fermeture élective des fistules bronchiques qui sont suturées par des points en X. La persistance d’une fistule bronchique expose au bullage important et peut conduire à une réintervention. Pour effacer au maximum la cavité résiduelle, le capitonnage est une attitude classique, mais n’est pas systématique. Il existe deux méthodes pour la gestion de la cavité résiduelle du kyste [3,8] : Le capitonnage qui est la fermeture de la cavité, après avoir vidé son contenu et aveuglé les fistules bronchiques. C’est une attitude classique, mais qui n’est pas systématique. La deuxième est la fermeture des orifices bronchiques tout en laissant la cavité ouverte.    Nous partageons l’opinion de nombreux auteurs selon laquelle le capitonnage est utile et efficace. L’utilisation de ce procédé a fait diminuer nettement la morbidité parce qu’il permet d’éviter au maximum la persistance d’une cavité résiduelle et aussi de réduire le risque d’infection de la cavité, des fuites aériques postopératoires et la formation d’un hématome ainsi que d’empyème intracavitaire [3,5,8]. Sonmez et al. [9] concluent que le capitonnage permet de diminuer la durée de drainage, le séjour hospitalier et la morbidité. Pour les kystes hydatiques géants, la gestion de la cavité résiduelle pose un problème par sa taille énorme et par la présence de grosses fistules bronchiques (on admet qu’un kyste est énorme quand sa taille dépasse 10 cm). Dans cette situation, le capitonnage s’avère difficile et risque de ficeler le parenchyme pulmonaire adjacent, d’entraver sa fonction et d’exposer aux risques de complications [2,3].   Tableau 4. Comparaison de la fréquence du traitement conservateur versus chirurgie radicale dans la littérature. Série Nombre de cas Nombre de cas de chirurgie conservatrice Nombre de cas de chirurgie radicale Doğan R et al. [3] 1055 91% 9% Kemal Salih O et al. [5] 405 96,4%   3,6% Dakak M et al. [10] 422 98% (413 cas)  2% (9 cas) Hasdiraz L et al. [11] 107 100% 0% Merini MF [12]     313 97,8% 2,2% Marouf et al. 200 95% (195 cas) 5% (10 cas)   En cas de rupture intrapleurale du kyste hydatique, le traitement est d’abord du kyste et de sa cavité, suivi d’une décortication. Pour ces kystes périphériques rompus dans la plèvre, les fistules bronchiques sont souvent de petit calibre et facilement traitées [13]. La voie d’abord par vidéothoracoscopie est destinée à des kystes hydatiques sains, de siège périphérique, et de taille ≤6 cm. Cette technique ne peut pas être adaptée aux kystes volumineux en raison du risque de dissémination pleurale et de la difficulté de la fermeture des fistules souvent localisées au fond de la cavité et dans des replis au contact des vaisseaux sanguins. Il en est de même pour les kystes rompus en rapport avec la symphyse pleurale, le calibre des fistules bronchiques et la friabilité du périkyste et du parenchyme adjacent. La chirurgie thoracique vidéoassistée peut être une alternative intermédiaire entre la thoracoscopie et la chirurgie conventionnelle malgré les risques de complications [13-16]. Le principe de la chirurgie thoracoscopique est de reproduire les mêmes gestes que la chirurgie ouverte qui comprend : la stérilisation du kyste avec un agent scolicide, l’extraction complète de la membrane hydatique et la fermeture des fistules bronchiques, si elles sont présentes. Il est nécessaire d’assurer une bonne aérostase par le contrôle des fistules bronchiques et la gestion de la cavité résiduelle pour éviter les complications opératoires. Quant à la place de la vidéothoracoscopie dans le traitement radical des kystes hydatiques, elle a ses limites et le risque de conversion reste élevé, par la présence fréquente des adhérences pleurales et la symphyse sur le médiastin et le diaphragme, les scissures qui sont souvent fermées, les ganglions inflammatoires, parfois calcifiés, saignotants et adhérents sur les structures vasculaires et bronchiques [12-14]. Le traitement percutané par vidange et stérilisation du kyste sans intervention chirurgicale n’est jamais proposé dans notre pratique de la chirurgie de kyste hydatique pulmonaire, car nous considérons que cette technique est dangereuse et expose au risque de choc anaphylactique et de dissémination, avec impossibilité de l’extraction de la membrane hydatique et de la fermeture des fistules bronchiques [15].   La résection réglée ou traitement radical du kyste hydatique pulmonaire (segmentectomie, lobectomie ou pneumonectomie) est justifiée pour les raisons suivantes [3,5,6,10,16] : Kyste hydatique énorme ou multiples kystes au sein du parenchyme et détruisant à plus de 50% le lobe ou le poumon adjacent. Kyste hydatique avec grande poche de suppuration et inflammation pulmonaire sévère et persistante ou encore kyste hydatique de siège centrolobaire, ou proche du hile. Complications liées au kyste hydatique : bronchiectasie, fibrose pulmonaire ou hémorragie sévère. Cependant, selon certains auteurs [12,13,17], la grande souplesse du tissu pulmonaire chez l’enfant et surtout les possibilités de récupération du parenchyme pulmonaire endommagé après traitement incitent les chirurgiens à être très économes en matière d’hydatidose pulmonaire. Le drainage postérieur et antérieur de la cavité pleurale libre assure une bonne réexpansion du parenchyme pulmonaire sous couverture d’une kinésithérapie postopératoire immédiatement commencée dès les premières heures qui suivent l’intervention chirurgicale. Les complications postopératoires sont rarement graves, dominées par les atélectasies nécessitant une kinésithérapie respiratoire et un traitement antalgique efficace. Les autres complications tels les décollements pulmonaires, les bronchopneumopathies, les empyèmes et les cavités résiduelles source de greffe aspergillaire, de surinfection et d’hémoptysies sont rares et souvent évitées par un effacement progressif de la cavité et un bon capitonnage [15]. Kuzucu et al. [8] ont prouvé dans leur étude que les kystes hydatiques pulmonaires compliqués sont associés avec une morbidité postopératoire plus élevée que les kystes simples, avec une augmentation significative de la fréquence de décortication et de séjour d’hospitalisation (p<0,05). Le taux de récidive après chirurgie conservatrice pour kyste hydatique pulmonaire est faible, témoignant de la fiabilité de ce procédé, cela a été appuyé par plusieurs études [3,5,6,8]. Dans la série de Doğan et al [3], sur 1055 kystes hydatiques pulmonaires traités chirurgicalement, seulement 8 cas ont eu une récidive dont 7 cas avaient un kyste hydatique compliqué avant chirurgie. Le traitement médical repose sur les imidazolés (mébendazole ou albendazole) à la dose de 10 à 15 mg/kg par jour pendant une durée de 3 à 6 mois avec un contrôle régulier de la fonction hépatique. Ce traitement s’intègre dans la stratégie non chirurgicale et représente un complément thérapeutique avant et/ou après chirurgie. Les indications du traitement médical du kyste hydatique pulmonaire inclus [3,5,19,20] : Les cas de contre-indication opératoire avec un taux de morbimortalité élevé ou refus de la chirurgie par le patient. En présence d’hydatidose multiple au sein du même organe ou dans des organes différents anatomiquement inaccessibles à une chirurgie. Pour prévenir une récidive après une intervention chirurgicale et ce d’autant plus impérativement qu’existent des facteurs de risque d’échinococcose secondaire ou de dissémination du liquide hydatique en peropératoire.  Surveillance : un patient opéré pour kystes hydatiques du poumon doit être surveillé régulièrement, dans les suites immédiates ou à long terme [18]. Cette surveillance est fondée essentiellement sur la radiographie thoracique au rythme de 3 mois, 6 mois, 1 an, demandée essentiellement pour l’étude de la nature et l’état de la cavité résiduelle. La surveillance sérologique s’impose chaque fois qu’elle est possible [19]. Cette sérologie est faite 6 mois puis 1 an après le geste chirurgical. La TDM est réservée aux cas douteux de récidive et pour la surveillance des grandes cavités résiduelles.   6. Conclusion La chirurgie reste le seul traitement efficace du kyste hydatique du poumon. La procédure chirurgicale peut être conservatrice ou radicale. La chirurgie conservatrice reste le traitement de choix dans la gestion du kyste hydatique pulmonaire. C’est une procédure simple, sûre, efficace, et qui permet, en plus, de préserver autant que possible le parenchyme pulmonaire fonctionnel. Cependant, la résection chirurgicale radicale reste réservée pour des patients bien sélectionnés avec des indications spécifiques.  La vidéothoracoscopie semble être une méthode fiable et prometteuse.   Références Derfoufi O, Ngoh E, Aissam A, Elmostafa E, Hicham M, Mohamed E, Aouf LS. Profil épidémiologique de l'hydatidose au Maroc de 1980 à 2008. Annales de biologie clinique 2012; 70(4):457-61. Avaro JP, Djourno XB, Kabiri EH, Bonnet PM, Doddoli C, Thomas P. Traitement chirurgical des kystes hydatiques du poumon. Le traité EMC, Techniques chirurgicales-Thorax. Doi: 10.1016/S1241-8226(07)45704-8: 432-42 Doğan R, Yüksel M, Cetin G, Süzer K, Alp M, Kaya S, Unlü M, Moldibi B. Surgical treatment of hydatid cysts of the lung: report on 1055 patients. Thorax 1989;44:192-199.https://doi.org/10.1136/thx.44.3.192PMid:2705149 PMCid:PMC461752 Bisson A, Leroy M. Traitement chirurgical des kystes hydatiques pulmonaires. EMC Techniques chirurgicale-Thorax 1995;42:432. 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juin 7, 2019
Chirurgie thoracique · Vol. 22 Décembre 2018

Atout de la pluridisciplinarité pour une meilleure gestion du drainage thoracique

Clémence Martel-de Kerlivio1, Nicola Santelmo2*, Bénédicte Gourieux1, Sandra Wisniewski1, Gilbert Massard2* Service de pharmacie-stérilisation, hôpitaux universitaires de Strasbourg, France. Service de chirurgie thoracique, hôpitaux universitaires de Strasbourg, France. * Correspondance : nsantelmo@orange.fr ; gilbert.massard@chru-strasbourg.fr DOI : 10.24399/JCTCV22-4-MAR Citation : Martel-de Kerlivio C, Santelmo N, Gourieux B, Wisniewski S, Massarg G. Atout de la pluridisciplinarité pour une meilleure gestion du drainage thoracique. Journal de chirurgie thoracique et cardio-vasculaire 2018;22(4). doi: 10.24399/JCTCV22-4-MAR   Résumé Objectifs : pour sécuriser le drainage thoracique, acte transversal, il est nécessaire que les professionnels standardisent leurs pratiques. L’objectif de l’étude est 1) de réaliser un état des lieux des connaissances et des pratiques, 2) de rappeler les clés d’un drainage bien conduit et de présenter les dispositifs médicaux disponibles, et 3) de définir un protocole institutionnel pour harmoniser la gestion et le choix d’un système de drainage. Méthodes : le programme de formation a été construit par un binôme pharmacien/chirurgien thoracique, et son impact a été mesuré en comparant les connaissances avant/après l’intervention. Nous avons audité les services impliqués sur leurs pratiques, et proposé des algorithmes décisionnels. Résultats : l’intervention et l’enquête de pratique ont été menées dans les services de réanimation, de pneumologie et de chirurgie thoracique. La participation de 129 infirmiers et médecins à l’atelier de formation a confirmé l’intérêt de la thématique ; leurs connaissances ont significativement progressé après l’intervention (p<0,05). Des protocoles décrivant la conduite à tenir en fonction du type d’épanchement, pour le transport, le retrait et la surveillance du drainage thoracique ont été réalisés, validés par les experts et la Commission du médicament et des dispositifs médicaux stériles (COMEDIMS). Enfin, le système de drainage est désormais identique dans tous les services. Discussion : l’accueil enthousiaste que nous avons reçu témoigne de la complémentarité clinique et technique des intervenants et encourage le développement de futurs projets pluridisciplinaires.   Abstract Multidisciplinary approach to improve pleural drainage management Aim: Healthcare providers are committed to standardizing their practice for chest drainage management. The main objective of this study was to review the current knowledge of providers and to propose an ongoing formation program to remind them of the keys factors for good drainage, as well as to present the available medical devices. An additional aim was to produce an institutional protocol and standardize the drainage system used by the units. Methods: A pharmacist and thoracic surgeon worked together to establish the formation program. To evaluate the impact of the program, we compared the knowledge of participants before and after undergoing the formation program. We performed an audit on practices in the relevant units, then proposed a decision tree. Results: Training workshops and an audit on practices were proposed in the departments of resuscitation, pneumology and thoracic surgery. As the subjects met their expectations, we observed consequent involvement of healthcare providers at the workshop (129 nurses and medical practitioners). The workshop significantly improved participants’ knowledge (p < 0.05). The institutional protocol describing drainage management according to the nature of pleural effusion, transport management, removal of chest drainage and drainage monitoring was ratified by local experts. Finally, we proposed that a unified drainage system be made available in all units. Discussion: By working in a complementary manner, we sent clinical and technical messages and received enthusiastic support from the participants. This encourages the development of future multidisciplinary projects.   1. Introduction L’objectif du drainage thoracique est double, puisqu’il s’agit de maintenir le poumon à la paroi thoracique en rétablissant une pression négative dans l’espace pleural, et d’évacuer un épanchement de nature gazeux (pneumothorax), liquidien (pyothorax, hémothorax, chylothorax) ou mixte (hydropneumothorax). Rappelons que le système doit satisfaire aux conditions de perméabilité et d’irréversibilité pour permettre l’évacuation des sécrétions sans retour possible vers la plèvre. Le système doit également être étanche et mis en place dans des conditions stériles [1]. Si le drainage thoracique est une technique simple et éprouvée, la pratique n’en demeure pas moins délicate. La pose du drain et la surveillance du drainage sont des activités transversales réalisées dans de nombreuses unités, pour lesquelles les personnels médicaux et paramédicaux sont complémentaires et doivent être coordonnés. Le drainage thoracique est un acte non sans risque, aussi les professionnels de santé sont tenus de mettre à jour leurs connaissances et de standardiser leurs pratiques pour offrir au patient une prise en charge optimisée et leur garantir l’efficacité et la sécurité des soins. À ces fins, l’objectif principal de l’étude a été de proposer un programme de formation continue aux acteurs du drainage thoracique pour rappeler les clés d’un drainage bien conduit, et d’élaborer un protocole institutionnel pour standardiser la gestion du drainage thoracique dans l’établissement. Le drainage thoracique est un acte pour lequel les professionnels sont formés à différentes écoles, ce qui explique les multiples références de drains et de systèmes de drainage disponibles. Ainsi, il convient de distinguer les drains thoraciques sans mandrin, destinés à être insérés chirurgicalement dans la plèvre du patient, de ceux montés sur trocart ou sur fil-guide, qui font l’objet d’une insertion percutanée. Le drain thoracique est connecté à un système de drainage composé à minima d’une valve anti-retour (type Heimlich), qui est le plus souvent associée à un bocal de recueil des sécrétions. La réexpansion du poumon est possible si une dépression est appliquée au système de drainage : drainage passif ou par gravité si le système est placé en déclive, ou drainage actif si une source d’aspiration extérieure est utilisée (vide mural ou pompe autonome intégrée au système de drainage). Le pharmacien est impliqué dans le choix et le référencement des dispositifs médicaux, il doit répondre aux besoins des utilisateurs et mettre à disposition des dispositifs fiables et adaptés, et toute l’information nécessaire à leur bon usage. L’objectif secondaire de l’étude a été de présenter et de promouvoir le bon usage des dispositifs médicaux dédiés, et de mener une réflexion d’harmonisation des systèmes de drainage au sein de l’établissement, qui est intrinsèquement liée à la volonté de standardisation des pratiques.   2. Matériel et méthode 2.1. Périmètre de l’étude L’étude a été restreinte aux services amenés à prendre en charge la pose et/ou le suivi du drainage, identifiés par une consommation minimale annuelle de 100 systèmes de drainage (année 2014).   2.2. Construction d’un programme de développement professionnel continu (DPC) Sous l’égide de la Commission des médicaments et des dispositifs médicaux stériles (COMEDIMS) de l’établissement, un binôme pharmacien/chirurgien thoracique a piloté le programme.   2.2.1. Enquête de pratiques L’analyse des pratiques a permis de réaliser une cartographie de la prise en charge du patient drainé dans les services concernés. L’audit a été réalisé par un binôme pharmacien/chirurgien thoracique auprès des chefs de service (ou leur représentant) et des cadres de santé. La grille de recueil a été testée et validée avant réalisation. Ses items déclinent les étapes clés du drainage thoracique, comme les indications principales retenues pour sa mise en œuvre, la répartition des responsabilités, la gestion de la surveillance et du transport des patients, et les dispositifs médicaux (DM) utilisés. Les services audités ont également pu exprimer leur avis (satisfaction ou insatisfaction) sur les DM actuellement référencés, et formuler de nouveaux besoins éventuels. À distance, une analyse des écarts entre la pratique constatée et la pratique souhaitée a été menée par les auditeurs et une restitution a été proposée au service audité lors de l’atelier-formation.   2.2.2. Apport cognitif Une séquence d’atelier-formation a été proposée dans les services ciblés à tous les personnels médicaux et infirmiers. Le support de la formation a été construit par le binôme pharmacien/chirurgien thoracique, après analyse des référentiels et résultats de l’enquête de pratique.   2.2.3. Suivi d’indicateur Le bénéfice de la formation a été évalué en comparant les connaissances des acteurs du drainage thoracique avant et après l’atelier (diffusion d’un questionnaire d’auto-évaluation).   2.2.4. Validation DPC Les personnes ayant participé à l’atelier de formation et répondu aux deux tours des questionnaires ont pu valider un DPC.    2.3. Standardisation des pratiques Sur la base des résultats de l’analyse de pratiques conduite dans les services et de l’avis d’experts locaux, et après revue de la littérature et notamment des recommandations internationales [2-7], nous avons proposé d’élaborer un protocole institutionnel de drainage thoracique, afin de standardiser les pratiques et d’améliorer la qualité des soins dispensés. Cette étape comprend également une harmonisation et une mise à jour des formulaires qui permettent la traçabilité des paramètres relevés lors de la surveillance du drainage en lien avec les logiciels d’aide à la prescription (LAP), et la sélection d’un système de drainage commun à l’ensemble de l’établissement pour faciliter le transfert des patients drainés et optimiser les achats.   2.4. Analyse statistique Les données qualitatives étaient exprimées en effectifs et pourcentages, et les données quantitatives en valeurs moyennes ± écart type et en médianes accompagnées des valeurs extrêmes. La comparaison de la note globale du questionnaire a été réalisée à l’aide du test de Wilcoxon pour série appariée. Le taux de bonnes réponses a également été comparé question par question entre les deux périodes en utilisant le test du Chi2. Une «p-value» <0,05 a été considérée comme significative. La comparaison de la note globale entre les deux périodes, selon la catégorie professionnelle et selon la spécialité, a été réalisée en utilisant un modèle de régression linéaire mixte. Ces analyses statistiques ont été réalisées à l’aide du logiciel R (www.r-project.org).   3. Résultats 3.1. Enquête de pratique L’enquête a été menée auprès de 21 acteurs en santé dans 15 unités fonctionnelles des services cibles du programme : chirurgie thoracique, pneumologie, services de réanimation (médicale, chirurgicale, pédiatrique et néonatale). Nous avons inclus les services d’imagerie qui sont impliqués dans la pose de drain ; les services de chirurgie abdominale et cardiaque ont été exclus. Parmi les observations, nous avons noté que la familiarité du personnel avec la gestion du drainage était très disparate en fonction des services, et que seule la pédiatrie disposait d’un protocole dédié. Le déploiement du dossier patient informatisé (annexé au logiciel d’aide à la prescription) a permis d’intégrer un formulaire de recueil des paramètres de surveillance du drainage. Dans 11 UF sur 15, les paramètres de surveillance sont recueillis informatiquement. Cependant, plusieurs LAP coexistent dans l’établissement (DxCare®, ICCA®), et les services n’utilisent pas tous le même formulaire et n’objectivent pas les données de la même façon. La gestion du transport des patients drainés apparaît peu sécurisée et il apparaît aussi que les risques liés à la manipulation du drain sont méconnus : clampage à mauvais escient, connexions/déconnexions, risque septique, pas d’accompagnement des patients, sauf pour les services de réanimation.   3.2. Programme de formation L’atelier de formation s’est déroulé en 4 étapes : restitution de l’enquête, partie théorique (anatomie, indications, objectifs et caractéristiques du drainage), recommandations pour la pratique, et mise au point sur le bon usage des DM impliqués (démonstration à l’appui). Les 14 ateliers ont enregistré 129 participants [figure 1]. [caption id="attachment_4219" align="aligncenter" width="300"] Figure 1. Répartition des participants par service et par fonction (N=129).[/caption] Selon les services, les formations ont pu toucher jusqu’à 29% des manipulateurs en radiologie, 75% des IDE, 71% des internes et 86% des médecins seniors. Tous les participants ont été destinataires d’un questionnaire d’évaluation avant et après la formation, et 38,8% (N=50) d’entre eux ont répondu aux deux tours. Cette population de 50 participants a été sélectionnée pour mesurer l’impact du programme, en mettant en évidence la progression de leurs connaissances avant/après les ateliers de formation. Au premier tour, la note moyenne des réponses au questionnaire est de 3,62/10 et au second tour de 4,86/10, l’écart entre les deux notes est significatif (p<0,01). L’analyse séquentielle des réponses, question par question, indique que trois messages relatifs aux fonctions de la plèvre, aux indications du drainage et la gestion du système en siphonage ont été particulièrement bien assimilés par les participants [figure 2].   [caption id="attachment_4220" align="aligncenter" width="300"] Figure 2. Nombre de réponses justes au questionnaire, analyse par question.[/caption] Le groupe infirmiers et manipulateurs en radiologie et le groupe des médecins seniors réalisent une progression significative des résultats après l’intervention (p <0,05). Globalement, peu de services réalisent une progression significative des résultats après l’intervention, excepté le service de réanimation chirurgicale (p<0,05). Le service de radiologie réalise également une progression remarquable, d’autant que la note globale au premier tour était faible (<2/10). Le service de chirurgie thoracique obtient la note maximale au second tour (>6/10), mais la progression n’est pas significative au vu de l’effectif des répondants. La satisfaction des participants aux ateliers a été évaluée. Parmi les 50 répondants ciblés, aucun n’a jugé la qualité de la formation insatisfaisante. Trois personnes l’ont jugée peu satisfaisante (6%), 30 satisfaisante (60%) et 17 tout à fait satisfaisante (34%). Sur une échelle de 1 à 10, sa qualité a été estimée à 7,32 en moyenne. Les 50 personnes ayant participé aux formations et répondu aux deux tours des questionnaires ont pu valider un DPC.   3.3. Actions entreprises 3.3.1. Protocole institutionnel de drainage thoracique Le protocole de drainage thoracique a été construit sous forme de diagrammes d’aide à la décision pour la prise en charge du patient dans les situations cliniques courantes. Six algorithmes décrivent ainsi la conduite à tenir pour le drainage en fonction du type d’épanchement (pneumothorax spontané, pleurésie purulente, pleurésie maligne et hémothorax), pour décider de l’ablation du drain et pour la bonne gestion du transport des patients drainés. Une check-list de surveillance a également été formalisée. Les protocoles ont été validés par la communauté médicale et la COMEDIMS des hôpitaux universitaires de Strasbourg [Annexe 1].   3.3.2. Harmonisation des formulaires de surveillance Nous avons comparé les items proposés par les différents formulaires de surveillance existants et une réflexion de pertinence et de simplification a été menée. Le formulaire a été refondu afin de mettre les items en commun [Annexe 2]. À l’avenir, un volet permettra la traçabilité de la mise en place (date de pose, type de drain et calibre, type de système de drainage, vérifications effectuées, date de réfection du pansement, etc.) et un second volet permettra de relever les paramètres de surveillance proprement dit (quantité recueillie, aspect, valeur de la dépression, bullage, traite ou clampage du drain, changement de système de recueil, etc.).   3.3.3. Harmonisation des systèmes de drainage Lors de l’audit de pratiques, les services ont unanimement accepté de tendre à harmoniser les systèmes de drainage dans l’établissement. Nous avons proposé de déployer un système de drainage commun répondant aux contraintes exprimées par les utilisateurs. Ainsi, nous avons recherché un système pouvant se transformer en système de drainage autonome (adjonction d’une pompe autonome) pour le transport du patient, besoin exprimé par la majorité des services. Nous avons également voulu sélectionner un système stable, simple d’utilisation et doté d’une grande capacité de recueil. Par ailleurs, nous avons voulu proposer un système déjà utilisé et connu dans l’un des services pour bénéficier de leur expérience, pour améliorer l’adhésion des professionnels et accompagner le changement de pratique. Le système compact Simple 3® double chambre avec connecteur/déconnecteur pour pompe Mobile et PalmEvo® (référence 10125, ADHESIA) a été retenu après une phase de test dans le service de chirurgie thoracique. Il est désormais positionné comme système de drainage de première intention. D’autres systèmes de drainage sont conservés dans des indications de niche : l’un dispose d’un manomètre intégré permettant de réguler finement la dépression appliquée pour les services de pédiatrie, et l’autre permet l’application d’une dépression de l’ordre de 400cmH2O pour le drainage postopératoire de chirurgie cardiaque. Enfin, dans les suites de lobectomie mini-invasive, les chirurgiens thoraciques souhaitent conserver un dispositif de drainage autonome sophistiqué permettant le monitorage précis du débit des fuites aériennes et du volume des sécrétions recueillies, en vue de raccourcir la durée du drainage et de permettre en parallèle la remobilisation rapide des patients après la chirurgie.   4. Discussion 4.1. Rationnel de l’étude Le ressenti d’un manque de connaissances des acteurs en matière de drainage thoracique a conduit quelques chirurgiens thoraciques à proposer ce travail. Ce constat est partagé par d’autres communautés médicales et a été décrit dans la littérature [8-10]. Il apparaît un manque de consensus, y compris dans les principes de surveillance des indications habituelles. Deux études [8,9] ont proposé des questionnaires ciblés sur la prise en charge des patients drainés. Les résultats ont montré le déficit des connaissances des soignants, soulignant la nécessité de formation des acteurs. Parallèlement, la déclaration de plusieurs cas de matériovigilance sur des DM de drainage thoracique au niveau local a objectivé des risques potentiels lors de leur utilisation et a confirmé le besoin de réaliser une campagne de formation, afin de sécuriser la prise en charge du patient. En effet, le manque de formation peut conduire à des accidents au moment de la mise en place du drain. D’autres complications peuvent également survenir au décours d’une gestion inadéquate du système de drainage (pneumothorax suffocant, emphysème sous-cutané, pleurésie purulente, œdème a vacuo, etc.) Une gestion appropriée du drainage thoracique demande la maîtrise du bon usage des dispositifs médicaux impliqués. L’objectif pédagogique et la complémentarité technique et clinique des pilotes du projet (binôme pharmacien/chirurgien) ont légitimé notre offre de formation à destination des acteurs du drainage. Le choix de formations communes aux équipes médicales et infirmières s’inscrit dans cet esprit recherché d’échanges pluriprofessionnels concernant des actes médicaux et paramédicaux étroitement liés.   4.2. Analyse des écarts et mesures correctives L’analyse des écarts de l’enquête de pratique a identifié des faiblesses dans la qualité et la sécurité des soins liés au drainage thoracique et a été force de propositions. L’absence de protocole de drainage dans 13 UF sur 15 a motivé la rédaction de documents qualité sous forme d’algorithmes décisionnels. Les documents en vigueur [Annexe 1] sont mis à disposition à titre informatif, ils peuvent être une base de travail pour d’autres équipes qui souhaiteraient s’engager dans la standardisation des pratiques. Le travail récent mené par l’équipe du Dr Seguin s’inscrit également dans cette démarche, en formulant des réponses à des questions pratiques relatives à la gestion du drainage après lobectomie [11]. Cet article confirme la volonté des experts d’échanger sur leurs pratiques et de les standardiser. D’autres actions ont été menées, notamment pour sécuriser et simplifier les transferts de patients : harmonisation des formulaires de surveillance et choix effectif d’un système de drainage commun. Dans un traité sur la prévention de l’erreur médicale [12], des qualiticiens experts prennent l’exemple du manque d’harmonisation des systèmes de drainage thoracique au sein d’un hôpital pour illustrer le concept d’erreur médicale latente, et le qualifient d’évènement porteur de risque. L’harmonisation du système de drainage était donc une priorité dans la prévention du risque d’erreur. Le gain à l’harmonisation est également économique, car les surcoûts entraînés par le changement complet de système de drainage lors des transferts entre les services de l’établissement sont réduits par la standardisation du système de drainage dans l’ensemble de l’établissement (hors indications de niche). Les essais menés sur le système de drainage retenu ont mis en évidence une tendance de la tubulure à « plicaturer » : des améliorations ont pu être apportées par l’industriel sur le produit afin qu’il soit fiabilisé.   4.3. Impact du programme de formation sur les connaissances Les 14 séances d’ateliers organisées ont permis de regrouper 129 professionnels de santé. Cette importante participation des médecins et des infirmiers témoigne d’une attente des acteurs du drainage thoracique. L’état des lieux des connaissances des soignants avant leur participation à l’atelier a objectivé les lacunes ressenties par les experts. L’analyse des résultats de l’évaluation avant/après montre une progression significative des connaissances des participants, même si les notes restent plus basses qu’attendues. L’analyse des notes question par question nous permet d’identifier des points critiques de connaissances non acquis. Ainsi, nous pourrons améliorer le support de notre présentation, notamment en clarifiant les messages relatifs à la conduite à tenir lorsqu’un drain présente des fuites aériennes et au transport d’un patient drainé. L’analyse en sous-groupes de l’impact de la formation, par service d’appartenance ou par catégorie professionnelle, rend non significative la progression des connaissances. Ce phénomène peut s’expliquer par les faibles effectifs de certaines catégories professionnelles. Nous noterons aussi qu’il est difficile d’atteindre un niveau de connaissances et de compétences homogène dans la gestion du drainage. En effet, le drainage thoracique est un acte technique, influencé par la dextérité, le ressenti et le vécu des soignants. Ces résultats néanmoins très encourageants nous poussent à améliorer et à pérenniser ce programme de formation.   4.4. Limites de l’étude Les services cibles de l’intervention ont été identifiés par leur consommation en systèmes de drainage. Une prochaine campagne de sensibilisation pourra proposer ce programme aux services d’urgences et de chirurgie adulte et pédiatrique, au SAMU et aux autres services d’imagerie. Une autre approche de sélection aurait été de pouvoir identifier les patients drainés, et de remonter au service les ayant pris en charge. Cependant, quoique la classification commune des actes médicaux (CCAM) décrive plusieurs actes relatifs au drainage thoracique (chapitre 6.3.6 : Évacuation de collection pleurale), ceux-ci ne font pas partie des actes classant dans un groupe homogène de malades (GHM), et leur codage est facultatif car sans impact financier. Comme ces actes ne sont pas valorisés, la réalisation d’une requête informatique identifiant les patients drainés n’a pas été possible. Le créneau horaire choisi pour la formation des équipes infirmières intervenait juste après le passage des consignes entre les équipes du matin et celles de l’après-midi, vers 14 heures. Seuls les infirmiers quittant leur poste du matin ont pu participer aux ateliers, l’équipe de l’après-midi devant assurer la continuité du service. Autant que cela a été possible, nous avons organisé au moins deux séances afin de toucher le plus large échantillon des pools infirmiers.   4.5. Perspectives L’accueil de l’atelier de formation par les participants a été enthousiaste. Nous avons bénéficié du label DPC pour proposer notre offre de formation, ce qui a pu motiver les participants. Si l’atelier a globalement été jugé utile par les participants, il ne figurait toutefois pas dans les priorités de formation que les cadres de santé proposent à leurs équipes. Nous avons été sollicités par plusieurs professionnels de santé pour étudier la faisabilité de pérennisation du programme. Pour le rendre accessible au plus grand nombre, un module de formation est hébergé sur la plateforme de e-learning de l’Observatoire des médicaments, des dispositifs médicaux et de l’innovation thérapeutique (OMEDIT) de la région Centre-Val de Loire. L’objectif est d’intégrer ce dernier dans les programmes de formation d’accueil des nouveaux agents, notamment des infirmiers et des internes.   5. Conclusion Le drainage thoracique est un acte technique, et son déroulement doit faire l’objet d’une surveillance attentive. Un programme de formation pédagogique a permis de réunir tous les acteurs du drainage et ainsi d’encadrer leurs pratiques, de rassurer les professionnels de santé qui n’en sont pas toujours familiers et de sécuriser la prise en charge du patient. Les liens qui se sont établis au cours des différentes étapes du programme, entre les différentes disciplines du corps médical, sont également à considérer comme des ouvertures vers de futurs projets à bâtir ensemble. La validation institutionnelle permet de formaliser le protocole de drainage thoracique et d’amorcer la standardisation des pratiques. L’un des intérêts de cette étude est aussi de montrer qu’une amélioration significative de la prise en charge du patient drainé demeure compatible avec le souci de la maîtrise des coûts impliqués. En effet, l’harmonisation des pratiques et le choix de dispositifs validé par les professionnels de santé ont permis d’optimiser les achats et l’offre de dispositifs médicaux de qualité.   Références Galvaing G, Riquet M, Dahan M. Principes du drainage thoracique. EMC-Tech Chir-Thorax 2013;8(4):1-11[42-200]. Havelock T, Teoh R, Laws D, Gleeson F. Pleural procedures and thoracic ultrasound: British Thoracic Society pleural disease guideline 2010. Thorax 2010;65:61-76. https://doi.org/10.1136/thx.2010.137026 PMid:20696688 MacDuff A, Arnold A, Harvey J. Management of spontaneous pneumothorax: British Thoracic Society pleural disease guideline 2010. Thorax 2010;65:18-31. https://doi.org/10.1136/thx.2010.136986 PMid:20696690 Roberts ME, Neville E, Berrisford RG, Antunes G, Ali NJ. Management of a malignant pleural effusion: British Thoracic Society pleural disease guideline 2010. Thorax 2010;65:32-40. https://doi.org/10.1136/thx.2010.136994 PMid:20696691 Davies HE, Davies RJO, Davies CWH. Management of pleural infection in adults: British Thoracic Society pleural disease guideline 2010. Thorax 2010;65:41-53. https://doi.org/10.1136/thx.2010.137000 PMid:20696693 Maskell NA, Davies CWH, Nunn AJ, Hedley EL, Gleeson FV, Miller R, et al. U.K. Controlled Trial of Intrapleural Streptokinase for Pleural Infection. N Engl J Med 2005;352:865-874. https://doi.org/10.1056/NEJMoa042473 PMid:15745977 Tschopp JM, Bintcliffe O, Astoul P, et al. ERS task force statement: diagnosis and treatment of primary spontaneous pneumothorax. Eur Respir J 2015;46:321-35. https://doi.org/10.1183/09031936.00219214 PMid:26113675 Lehwaldt D, Timmins F. The need for nurses to have in service education to provide the best care for clients with chest drains. J Nurs Manag 2007;15:142-148. https://doi.org/10.1111/j.1365-2834.2007.00643.x PMid:17352696 Magner C, Houghton C, Craig M, Cowman S, Nurses' knowledge of chest drain management in an Irish Children's Hospital. J Clin Nurs 2013;22:2912-2922. https://doi.org/10.1111/jocn.12299 PMid:23829520 Durai R, Hoque H, Davies TW. Managing a Chest Tube and Drainage System. AORN J 2010;91:275-283. https://doi.org/10.1016/j.aorn.2009.09.026 PMid:20152201 Bouassida I, Seguin-Givelet A, Brian E, Grigoroiu M, Gossot D. Évolutions actuelles du drainage thoracique après lobectomie : vers une approche standardisée. J Chir Thorac Cardiovasc 2017;21(2). Rodziewicz TL, Hipskind JE. Medical Error Prevention. StatPearls 2018;Mar30.   Conflit d’intérêt : aucun. / Conflict of interest statement: none declared.  Ces résultats ont été présentés lors des Journées d’automne de la SFCTCV de décembre 2015, Paris.  Date de soumission : 12/07/2018. Acceptation : 15/10/2018.  
décembre 3, 2018
Chirurgie thoracique · Vol. 22 Décembre 2018

Indications et suites opératoires des pneumonectomies au Centre hospitalier universitaire national (CHUN) de Fann à Dakar

Assane Ndiaye1, David Douglas Banga Nkomo1,3*, Souleymane Diatta1, Papa Salmane Ba1, Magaye Gaye1, Pape Adama Dieng1, Yacine Dia2, Amadou Gabriel Ciss1, Mouhamadou Ndiaye1 Service de chirurgie thoracique et cardiovasculaire, CHUN de Fann, Dakar, Sénégal. Service de pneumologie, CHNU de Fann, Dakar, Sénégal. Centre des urgences de Yaoundé, Yaoundé, Cameroun. *Auteur correspondant : dbangankomo@yahoo.fr   DOI : 10.24399/JCTCV22-4-NDI Citation : Ndiaye A, Banga Nkomo DD, Diatta S, Ba PS, Gaye M, Dieng PA, Dia Y, Ciss AG, Ndiaye M. Indications et suites opératoires des pneumonectomies au Centre hospitalier universitaire national (CHUN) de Fann à Dakar. Journal de chirurgie thoracique et cardio-vasculaire 2018;22(4). doi: 10.24399/JCTCV22-4-NDI   Résumé Objectif : notre étude avait pour but de présenter les indications et le devenir des patients ayant bénéficié d’une pneumonectomie dans notre pratique quotidienne. Matériel et méthode : nous avons mené une étude descriptive rétrospective de janvier 2004 à décembre 2015, dans laquelle nous avons inclus 106 patients ayant bénéficié d’une pneumonectomie. Résultats : les principales indications étaient la dilatation des bronches (n=65) ; l’aspergillome pulmonaire (n=30), et le cancer bronchopulmonaire primitif (n=5). Le taux de morbidité était de 34,91% (n=37). Les taux de mortalité peropératoire et postopératoire étaient respectivement de 1,88% (n=2) et de 2,83% (n=3). Les principales complications étaient l’infection pariétale (n=12 ; 11,32%), l’empyème post-pneumonectomie (n=11 ; 10,38%) et l’hémothorax post-pneumonectomie (n=8 ; 7,55%). Conclusion : les principales complications dans notre pratique quotidienne sont infectieuses (infection pariétale et empyème post-pneumonectomie). Les résultats sont satisfaisants car les taux de morbidité et de mortalité sont superposables à ceux retrouvés dans la littérature.   Abstract Indications and outcome of pneumonectomy: a retrospective study of 106 patients Aim: To report the indications and outcomes of pneumonectomy. Materials and methods: We retrospectively reviewed 106 patients who underwent pneumonectomy between January 2004 and December 2015. Results: The main indications for pneumonectomy were bronchiectasis (n=65), pulmonary aspergilloma (n=30) and primary lung cancer (n=5). The morbidity rate was 34.91% (n=37). Intraoperative mortality was 1.88% (n=2) and 30-day mortality was 2.83% (n=3). The main postoperative complications were wound infection (n=12, 11.32%), post-pneumonectomy empyema (n=11, 10.38%) and post-pneumonectomy bleeding (n=8, 7.55%). Conclusion: Wound infection and post-pneumonectomy empyema were the main postoperative complications. Nevertheless, the results of pneumonectomy were found to be satisfactory.   1. Introduction Dans les régions de forte endémie tuberculeuse, la pneumonectomie est généralement réalisée pour le traitement des séquelles de tuberculose [1-3]. Tandis qu’ailleurs elle est très souvent réalisée pour la prise en charge des cancers bronchopulmonaires [4-6]. Quelle que soit l’indication et quel que soit le contexte, la morbidité et la mortalité après une pneumonectomie restent élevées [5]. En Afrique subsaharienne, les séries portant sur les pneumonectomies sont peu fréquentes. Aussi, en plus de présenter les indications et le devenir des patients ayant bénéficié d’une pneumonectomie dans notre service, notre étude a également pour objectif de contribuer à l’accroissement des données de la littérature sur la question dans notre contexte.   2. Matériel et méthode Nous avons mené une étude rétrospective descriptive dans le service de chirurgie thoracique et cardiovasculaire du Centre hospitalier national universitaire de Fann, de janvier 2004 à décembre 2015. Dans cette étude, nous avons inclus tous les patients ayant bénéficié d’une pneumonectomie. Pour chaque patient inclus les données colligées étaient les suivantes : L’âge, le sexe du patient et les comorbidités si elles existaient. Les signes fonctionnels ayant amené le patient à consulter et le délai moyen de ladite consultation. Les lésions radiologiques observées. Les résultats de l’évaluation de la fonction respiratoire et de l’état nutritionnel. La technique chirurgicale, à savoir la voie d’abord utilisée, le côté de la pneumonectomie, la technique du traitement du moignon bronchique, la technique du traitement du pédicule vasculaire et le curage ganglionnaire lorsqu’il était réalisé. L’indication de la pneumonectomie. La durée moyenne du drainage thoracique. La durée moyenne du séjour postopératoire. La (ou les) complication(s) per et/ou postopératoire(s)observée(s). La durée moyenne du suivi postopératoire. La cause du décès. Les données répertoriées ont été saisies rétrospectivement et leur analyse s'est faite grâce au logiciel Epi info version 7.0. 3. Résultats Durant la période d’étude, 106 patients ont bénéficié d'une pneumonectomie dans notre service. Soixante-sept de ces patients (63,2%) étaient de sexe masculin, soit un sexe ratio de 1,7. Leur âge moyen était de 36 ans, avec des extrêmes de 3 mois et de 70 ans. La principale comorbidité majeure retrouvée était le diabète (n=5). Chez les patients qui présentaient des lésions de destruction pulmonaire, les facteurs étiologiques retrouvés étaient la tuberculose pulmonaire (n=79), une pathologie infectieuse non mycobactérienne dans l’enfance (n=2) et un corps étranger inhalé (n=4). Les signes fonctionnels, souvent associés, ayant amené les patients à consulter étaient l’hémoptysie (n=73), la bronchorrhée (n=45), la toux (n=45), la douleur thoracique à type de point de côté (n=45) et la dyspnée d’effort (n=28). Le délai moyen de cette consultation était de 35 mois. Les lésions radiologiques élémentaires mises en évidence par le scanner et la radiographie du thorax étaient les bronchectasies (n=65), une pachypleurite (n=63), des cavités résiduelles (n=53), un syndrome de condensation rétractile (n=27), une image en grelot évocatrice d’un aspergillome pulmonaire (n=26), une masse ou un nodule pulmonaire isolé (n=6) et une bulle d'emphysème géante, compressive (n=4). En outre, 90 patients présentaient une hypertrophie compensatrice du poumon controlatéral au poumon lésé. La figure 1 montre l’aspect tomodensitométrique de dilatation des bronches pulmonaires gauches associées à une hypertrophie du poumon controlatéral.   [caption id="attachment_4209" align="aligncenter" width="300"] Figure 1. Dilatation des bronches pulmonaires gauches associées à une hypertrophie du poumon controlatéral.[/caption]   Le VEMS moyen préopératoire était de 1,85 l/s (extrêmes de 0,6 l/s et 3,25 l/s). Trente-neuf patients (36,8%) avaient un VEMS préopératoire inférieur à 60% de la valeur théorique. L’évaluation de l’état nutritionnel, basée sur l’estimation de l’IMC, avait révélé que nos patients avaient un IMC moyen de 18,7 [12,1-42,86]. Près de la moitié de nos patients, c’est-à-dire 50,94% (n=54), avaient réalisé une sérologie du virus de l’immunodéficience humaine (VIH) qui était revenue négative. La pneumonectomie était réalisée pour une lésion bénigne dans 101 cas et pour une lésion maligne dans 5 cas. Le tableau 1 résume les indications des pneumonectomies.   Tableau 1. Indications des pneumonectomies.   Indications Fréquence Lésion bénigne 101 (95,28%) Dilatation des bronches 65 Aspergillome pulmonaire 30 Bulle d’emphysème géante et compressive 3 Pleurésie enkystée post-tuberculeuse 2 Emphysème lobaire géant 1 Empyème post-lobectomie 1 Plaie de l’artère pulmonaire gauche chez un patient devant bénéficier d’une lobectomie supérieure 1 Tumeur endobronchique 1 Tumeur pulmonaire bénigne 1 Cancer bronchopulmonaire primitif 5 (4,72%)   La voie d’abord était toujours une thoracotomie postérolatérale. Une résection costale y a été associée chez 12 patients. Le nombre maximal de côtes reséquées étaient de 2. Ceci a été le cas chez 3 patients. La pneumonectomie a été réalisée à gauche dans 70 cas (66%). Le geste principal a consisté en une pneumonectomie extrapéricardique (n=76), en une pleuropneumonectomie (n=28) et en une pneumonectomie de totalisation (n=2). La suture bronchique a été manuelle, selon la technique de Sweet dans 100 cas (94,33%) et mécanique dans les autres cas. Le moignon bronchique suturé a ensuite été enfoui dans 81 cas. Le tissu utilisé pour l’enfouissement de ce moignon était la graisse péricardique (n=2), le muscle intercostal (n=7) et la plèvre médiastinale (n=72). La figure 2 représente une vue peropératoire d’un moignon bronchique recouvert par un lambeau de muscle intercostal. [caption id="attachment_4207" align="aligncenter" width="161"] Figure 2.A : Vue peropératoire du lambeau musculaire intercostal après prélèvement.[/caption] [caption id="attachment_4208" align="aligncenter" width="139"] Figure 2.B : Vue peropératoire d’un lambeau de muscle intercostal recouvrant un moignon bronchique.[/caption] Le curage ganglionnaire médiastinal était le seul geste associé (5 cas). Dix incidents peropératoires ont été notés. Il s’agissait de brèches diaphragmatiques (n=3), de plaies vasculaires (n=2) et de troubles du rythme cardiaque (n=5). Les plaies vasculaires étaient une plaie de l’artère pulmonaire et une plaie de l’artère sous-clavière, tandis que les troubles du rythme étaient à type de tachycardie ventriculaire et de bradycardie. La mortalité peropératoire était de 1,88% (n=2). Les décès peropératoires étaient dus à une plaie de l’artère pulmonaire n’ayant pu être réparée et à une tachycardie ventriculaire à l’origine d’une fibrillation ventriculaire n’ayant pu être corrigée. La durée moyenne du drainage thoracique était de 7 jours (extrêmes de 1 jour et de 90 jours). Chez 31 patients (29,24%), elle a été supérieure ou égale à 7 jours. La durée moyenne de séjour postopératoire était de 13 jours (extrêmes de 5 et de 59 jours). Le taux de morbidité de notre série était 34,91% (n=37). Les principales complications étaient l’infection de la paroi (n=12 ; 11,32%), l’empyème post-pneumonectomie (n=11 ; 10,38%) et l’hémothorax post-pneumonectomie (n=8 ; 7,55%). Les différentes complications retrouvées sont présentées dans le tableau 2. Le taux de mortalité postopératoire était de 2,83% (n=3). Les décès postopératoires, au nombre de 3, étaient dus à une insuffisance respiratoire secondaire à un empyème post-pneumonectomie associé à une fistule bronchopleurale (n=2) et à une défaillance multiviscérale par coagulation intravasculaire disséminée à la suite d’un hémothorax post-pneumonectomie (n=1). Le suivi postopératoire avait concerné 89 patients (83,96%). La durée moyenne du suivi postopératoire était de 28 mois (extrêmes de 1 mois et de 11 ans). Durant ce suivi, 7 patients avaient été réadmis (taux de réadmission de 6,6%). L’empyème post-pneumonectomie était le seul motif de réadmission.    Tableau 2. Complications après pneumonectomie. Type de morbidité Fréquence Infection de la paroi 12 (11,32%) Empyème post-pneumonectomie 11 (10,38%) Hémothorax post-pneumonectomie 8 (7,55%) Fistule bronchopleurale 4 (3,77%) Pneumonie sur poumon unique 3 (2,83%) Sepsis 3 (2,83%) Hématome de la paroi 2 (1,89%) Chylothorax 1 (0,94%) Décompensation diabétique 1 (0,94%) Paralysie récurentielle 1 (0,94%)   4. Discussion Les pneumonectomies dans notre étude sont réalisées pour des pathologies pulmonaires malignes et bénignes. Il est vrai que ces dernières sont les plus fréquentes. Dans la plupart des séries traitant des pneumonectomies réalisées dans un contexte comme le nôtre, les bronchectasies ou dilatation des bronches post-tuberculose constituent la principale indication des pneumonectomies [1,2,7]. Dans ces séries, les patients sont jeunes avec un âge moyen généralement inférieur à 50 ans, sont issus d’un milieu socio-économique défavorisé de pays sous-développés ou en développement et ont très peu ou pas du tout de comorbidité. De plus, comme dans notre série, ils sont très souvent dénutris et ne sont pas immunodéprimés par le VIH. Dans les pays développés par contre, les pneumonectomies intéressent des populations plus âgées et le cancer bronchopulmonaire primitif constitue la principale pathologie amenant à réaliser une pneumonectomie. Les pneumonectomies pour des lésions inflammatoires dans ces pays sont réalisées chez des patients immigrés ou ayant un terrain particulier tel qu’une immunodépression [4,5]. Hormis en cas de lésion maligne, les auteurs s’accordent sur le fait que seuls les patients symptomatiques doivent être opérés [1,2,5,7]. Le délai moyen de consultation de notre étude est inférieur à celui retrouvé par d’autres auteurs [3,8,9]. Dans notre contexte d’endémie tuberculeuse, l’hémoptysie d’abondance variable, la toux persistante, la bronchorrhée amène plus souvent à consulter que la dyspnée [3,9], car les patients ont très souvent une hypertrophie du poumon controlatéral, qui compense la perte fonctionnelle du poumon détruit. Les séquelles des maladies inflammatoires ou des maladies infectieuses sont caractérisées par une modification permanente de la structure de l’arbre trachéobronchique et du parenchyme pulmonaire. Ces modifications permanentes expliquent les altérations de la fonction respiratoire observées chez ces patients. Le VEMS moyen de notre série est néanmoins supérieur à celui des séries de Kim et al. [3] ou de Li et al. [9] dont les sujets ont tous bénéficié d’une pneumonectomie pour une destruction pulmonaire post-tuberculeuse. La thoracotomie postérolatérale passant par le 4e espace ou le 5e espace intercostal constitue notre seule voie d’abord. Cette voie d’abord nous semble la plus judicieuse dans les pneumonectomies indiquées pour des lésions bénignes inflammatoires, du fait de la fréquence élevée de patients ayant une pachypleurite, une symphyse apicale ou diaphragmatique. La vidéothoracoscopie n’est jusque-là recommandée que dans le cadre d’essai thérapeutique [10]. Une résection costale est souvent associée à la thoracotomie postérolatérale [6,9,11]. En effet, lorsqu’il existe une pachypleurite étendue, elle permet d’amorcer le décollement extrapleural et de pénétrer dans le thorax. Le nombre de côtes à reséquer, fonction du degré du pincement intercostal, est rarement supérieur à 2 [8]. La pneumonectomie gauche est la plus fréquente dans la plupart des séries [1,2,5-7,9]. Contrairement à d’autres auteurs tel que Li et al. [9], nous n’avons pas réalisé de pneumonectomie intrapéricardique. Les pneumonectomies de totalisation ne sont pas exceptionnelles en chirurgie thoracique. Sur une série de 525 pneumonectomies réalisées sur une période de 10 ans, Jungraithmayra et al. [12] retrouvent qu’elles représentent 16,4% de toutes les pneumonectomies. Dans notre série elles représentent moins de 2% des pneumonectomies. Les indications des pneumonectomies de totalisation sont une récidive d’une tumeur maligne, ou plus fréquemment une récidive ou une progression d’une pathologie bénigne comme dans notre série [12]. Ainsi, en cas d’empyème faisant suite à une lobectomie une pneumonectomie peut être réalisée lorsque le poumon résiduel ne peut se réexpandre comme cela a été le cas chez l’un de nos patients [11]. Les pleuropneumonectomies sont plus fréquentes que les pneumonectomies de totalisation [5,6,13]. La pleuropneumonectomie augmente certes la difficulté de la technique opératoire, mais elle permet d’éviter, lorsqu’elle est réalisée avec succès, l’ouverture des poches pulmonaires et donc la contamination peropératoire de la cavité de pneumonectomie. Aucune étude n’ayant démontré la supériorité de la suture mécanique sur la suture manuelle dans la prévention des fistules bronchopleurales post-résection pulmonaires [14,15], l’attitude de notre équipe pour le traitement du moignon bronchique est d’effectuer une suture manuelle selon la technique de Sweet. Nous mettons plutôt l’accent, comme la plupart des auteurs, sur le renforcement de la suture bronchique [2,3,6,8,9,16]. Des incidents opératoires ont été rapportés par des auteurs tels que Massard et al. [11], ou Owen et al. [6]. Il s’agit souvent comme dans notre série de lésions diaphragmatiques, de lésions vasculaires ou de troubles du rythme cardiaque. Les difficultés de pneumolyse au niveau des apex pulmonaires, du diaphragme et du médiastin dues aux symphyses pleurales souvent présentes dans ces zones expliquent les plaies vasculaires peropératoires [2,11]. Lorsque l’hémorragie résultant de ces lésions vasculaires n’est pas jugulée à temps, ces plaies peuvent conduire aux décès de patients [6]. L’une des pneumonectomies de notre série a justement été réalisée dans le cadre du contrôle d’un saignement secondaire à une plaie importante et proximale de l’artère pulmonaire gauche. Le drainage de la cavité de pneumonectomie peut permettre de mettre en évidence un empyème, un hémothorax ou un chylothorax. Pour certains auteurs, le faible taux de complications suscitées révélées par le drainage de la cavité de pneumonectomie ne justifie pas la pose d’un drain en cas de pneumonectomie [17]. Aussi la gestion du drainage post-pneumonectomie n’est pas consensuelle [18]. Pour Morcos et al. [18], il convient à chaque équipe de déterminer et d’établir des protocoles pour cette gestion. Notre attitude est le drainage systématique de la cavité de pneumonectomie, la pneumonectomie dans notre contexte étant une chirurgie très hémorragique. Toutefois notre durée moyenne de drainage reste supérieure à celle de la plupart des auteurs [3,5,6,9]. Notre taux de complication se situe dans l’intervalle des taux retrouvés dans la littérature qui varient entre 12% et 40% [1,2,6,7]. Les complications rencontrées dans notre série sont fréquemment retrouvées dans la littérature, quelle que soit la pathologie sous-jacente, avec des fréquences variables [1,2-5,7,11]. Toutefois, des auteurs, tels que Owen et al. [6], retrouvent des complications cardiovasculaires chez des patients ayant bénéficié d’une pneumonectomie pour une tumeur maligne. Dans notre série, les infections pariétales constituent la principale complication, en termes de fréquence. Leur taux est quasiment le double par rapport aux taux observés dans la littérature qui sont de l’ordre de 5 à 6% [3,6,11]. Aucun élément lié au patient ou lié à l’acte opératoire ne nous a permis d’expliquer ce résultat. Néanmoins des mesures ont été prises pour contribuer à la réduction des infections postopératoires. Ainsi, les patients en préopératoire font des séances de kinésithérapie en vue d’améliorer le drainage bronchique, bénéficient d’une antibiothérapie adaptée à un antibiogramme obtenu lors d’un examen cytobactériologique des crachats. En peropératoire, outre la protection des bordures de la thoracotomie avec des compresses abdominales imprégnées de bétadine jaune, nous procédons systématiquement au lavage de la cavité de pneumonectomie avec un mélange de solution iodée et de sérum salé isotonique. L’incidence de l’empyème post-pneumonectomie varie entre 2 et 32% [1,3,6,11]. Le taux d’empyème post-pneumonectomie de notre série reste donc dans l’intervalle des données de la littérature. La fistule bronchopleurale peut survenir isolément après une pneumonectomie. Son incidence varie de 4 à 20% et son taux de mortalité varie de 20 à 70% [19,20]. Nous avons enregistré un seul cas de fistule bronchopleurale. Celle-ci, survenue précocement (4 jours après la pneumonectomie) La mortalité per-opératoire est exceptionnelle en cas de pneumonectomie pour une tumeur maligne [6]. Par contre, en cas pneumonectomie pour une lésion bénigne en général et pour une lésion inflammatoire en particulier, il est fréquent d’avoir des décès peropératoires. Ces décès sont essentiellement dus à des troubles du rythme cardiaque ou à des plaies des gros vaisseaux, des plaies du cœur qui surviennent lors de la dissection. Notre taux de mortalité peropératoire qui est de 1,89% (2 cas) se situe dans les limites inférieures des taux retrouvés dans la littérature qui oscillent entre 1,1% et 6,8% [2,3,11]. Quant au taux de mortalité postopératoire, il est superposable à ceux des auteurs dont les patients ont bénéficié d’une pneumonectomie pour la prise en charge de lésions bénignes telles que les séquelles de la tuberculose.   5. Conclusion La pneumonectomie dans notre contexte est réalisée chez des patients relativement jeunes, très souvent de sexe masculin, pour la prise en charge de pathologies généralement bénignes. Ses résultats sont satisfaisants car les taux de morbidité et de mortalité sont superposables à ceux retrouvés dans la littérature. Par ailleurs, notre étude, outre le fait qu’elle constitue un apport pour la pratique de la pneumonectomie dans notre contexte, nous aura également permis de prendre des mesures pour la réduction des complications infectieuses (infection pariétale et empyème post-pneumonectomie), principales complications dans notre pratique quotidienne.   Références Bouchikh M, Smahi M, Ouadnouni Y, Achir A, Msougar Y, Lakranbi M, Herrak L, El Aziz S, El Malki HO et Benosman A. La pneumonectomie pour les formes actives et séquellaires de la tuberculose. Rev Mal Respir 2009;26:505-13. 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Epub 2014 Dec 8 https://doi.org/10.1093/icvts/ivu417 Rivera C, Riquet M, Arame A, Mangiameli G, Abdennadher M, Pricopi C, Badia A, Dahan M, Le Pimpec-Barthes F. Pneumonectomy for benign disease: indications and postoperative outcomes, a nationwide study. Eur J Cardiothorac Surg 2015;48:435–40. DOI: 10.1093/ejcts/ezu439 https://doi.org/10.1093/ejcts/ezu439 Owen RM, Force SD, Pickens A, Mansour KA, Miller DL, Fernandez FG. Pneumonectomy for benign disease: analysis of the early and late outcomes. Eur J Cardiothorac Surg 2013;43:312–7. DOI: 10.1093/ejcts/ezs284 https://doi.org/10.1093/ejcts/ezs284 Kendja F, Demine B, Ouede R, Kouame J, Yangni-AngateKh, Tanauh Y. Les poumons et lobes détruits d'origine tuberculeuse : indications et résultats chirurgicaux. Ann Afr Chir Thor Cardiovasc 2010;5:39-43. Halezeroglu S, Keles M, Uysal A, Celik M, Senol C, Haciibrahimoglu G, Arman B. Factors Affecting Postoperative Morbidity and Mortality in Destroyed Lung. 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décembre 3, 2018
Chirurgie thoracique · Vol. 22 Décembre 2018

La chirurgie pulmonaire vidéo-assistée a-t-elle un impact sur les complications postopératoires chez les patients avec un antécédent de cancer des voies aérodigestives supérieures ?

Tchala Kassegne*, David Boulate, Myriam Ammi, Olaf Mercier, Elie Fadel Hôpital Marie-Lannelongue, Le Plessis-Robinson * Correspondance : kasstchala@hotmail.fr DOI : 10.24399/JCTCV22-4-KAS Citation : Kassegne T, Boulate D, Ammi M, Mercier O, Fadel E. La chirurgie pulmonaire vidéo-assistée a-t-elle un impact sur les complications postopératoires chez les patients avec un antécédent de cancer des voies aérodigestives supérieures ?. Journal de chirurgie thoracique et cardio-vasculaire 2018;22(4). doi: 10.24399/JCTCV22-4-KAS   Résumé Les tumeurs des voies aérodigestives supérieures (VADS) et les tumeurs pulmonaires ont en commun les mêmes facteurs de risques. Leur association, synchrone ou métachrone, est fréquemment décrite. L’objectif de notre étude était d’établir le taux de complications postopératoires chez les patients avec un antécédent de tumeur des VADS et de déterminer si la chirurgie vidéo-assistée (VATS) diminue le risque de complications postopératoires chez ces patients. Nous avons également cherché à savoir si une prise en charge chirurgicale première de la tumeur pulmonaire avant celle de la tumeur des VADS, dans les présentations synchrones, diminuait significativement les complications postopératoires. Cette étude rétrospective monocentrique a été menée à l’hôpital Marie Lannelongue. Elle incluait les patients avec un antécédent de tumeur des VADS, opérés d’une tumeur pulmonaire entre 2010 et 2017. Nous avons établi deux groupes : un groupe de patients opérés par thoracotomie et un groupe de patients opérés par VATS. Nous avons comparé le taux de complications postopératoires des deux groupes. Il s’agissait de 121 patients (77% d’hommes), dont l’âge moyen était de 64,7±8,1 ans. 61% des patients (n=74) ont bénéficié d’une résection pulmonaire par thoracotomie et 39% (n=47) par VATS. Le taux global de complications postopératoires était de 57% (n=69), dont 3,3% de mortalité intrahospitalière (n=4). La VATS réduisait significativement le taux de pneumopathie infectieuse (43,2% vs 17%, p=0,003), ainsi que le taux de détresse respiratoire (21,6% vs 2,1%, p=0,003) comparé à la thoracotomie. Les troubles de la déglutition constituaient le facteur de risque de complication post-résection pulmonaire dans cette étude (OR=3,3 [1,1-10,7]). La prise en charge première de la tumeur pulmonaire n’a pas démontré de réduction significative des complications postopératoires. Le taux de complication post-résection pulmonaire des patients présentant un antécédent de tumeur des voies aérodigestives supérieures est important. La résection pulmonaire vidéo-assistée diminue le taux de pneumopathie postopératoire. La présence préopératoire de troubles de la déglutition est un facteur de risque de complication. Ceci doit être pris en compte dans la stratégie thérapeutique de ces patients.   Abstract Does video-assisted pulmonary surgery have an impact on postoperative complications in patients with previous head and neck cancer? Head and neck cancers (HNC) and lung tumors share the same risk factors, and their association, synchronous or metachronous, is frequently described. The aim of our study was to determine the postoperative complication rate in patients with a previous history of HNC, and to determine whether video-assisted thoracic surgery (VATS) decreases the risk of postoperative complications in these patients. We also investigated whether surgical management of the lung tumor before the HNC reduced the incidence of postoperative complications in synchronous presentations. This retrospective, single-center study was conducted at Marie Lannelongue Hospital. It included patients with a history of HNC who underwent a pulmonary resection between 2010 and 2017. We established two groups of patients, those operated by thoracotomy and those operated by VATS, and compared the postoperative complication rate between the two groups. There were 121 patients (77% men) with an average age of 64.7 ± 8.1 years. Of these patients, 61% (n = 74) underwent thoracotomy lung resection and 39% (n = 47) had VATS. The overall postoperative complication rate was 57% (n = 69), with 3.3% intrahospital mortality (n = 4). Use of VATS significantly reduced the rate of pneumonia (43.2% vs. 17%, p = 0.003) and respiratory distress syndrome (21.6% vs. 2.1%, p = 0.003) compared to thoracotomy. Swallowing disorders represented a risk factor for complications after pulmonary resection in this study (OR = 3.3 [1.1, 10.7]). Initial management of the pulmonary tumor did not significantly reduce the rate of postoperative complications. The complication rate after pulmonary resection in patients with a history of HNC is high. Video-assisted pulmonary resection reduces the rate of postoperative pneumonia. Swallowing disorders represent a risk factor for complications, and this must be taken into account in the management of these patients.   1. Introduction Les tumeurs des VADS (voies aérodigestives supérieures) et les tumeurs pulmonaires ont en commun la même population à risque. Le tabac est le principal facteur de risque commun à ces deux pathologies. Les tumeurs des VADS sont les tumeurs les plus fréquemment associées au cancer du poumon [1,2]. La prévalence d’un deuxième cancer pulmonaire chez les patients avec des antécédents de tumeur des VADS est de 6,9% [3]. En France, le type histologique le plus fréquent des cancers de VADS est le carcinome épidermoïde [4]. Les autres types histologiques sont représentés par les adénocarcinomes et les carcinomes non indifférenciés. Le larynx, la cavité buccale, le pharynx sont très fréquemment touchés. De plus les poumons représentent un site métastatique dans les cancers de VADS. La prise en charge des tumeurs des VADS peut porter atteinte aux fonctions respiratoires et de déglutition [5-9]. Lorsqu’une tumeur pulmonaire non à petites cellules survient chez un patient avec un antécédent de tumeur des VADS, la prise en charge de cette seconde tumeur peut être chirurgicale selon l’extension de la pathologie. La lobectomie reste une option thérapeutique majeure pour ces patients. Globalement on peut noter dans la littérature un taux de complication post-lobectomie autour de 16% pour les lobectomies par VATS (Video-assisted Thoracoscopic Surgery) et autour de 30% pour les lobectomies par thoracotomie [10]. Les facteurs de risque de complications postopératoires de résection pulmonaire décrits dans la littérature sont : l’âge, le tabac, la fonction respiratoire préopératoire, la durée d’intervention, le saignement peropératoire, le type de résection pulmonaire, les pathologies cardiovasculaires, la chimiothérapie préopératoire [11-18]. L’antécédent de tumeur de VADS est également un facteur de risque de complications postopératoires [19]. L’objectif de notre étude était d’établir le taux de complications postopératoires chez les patients avec un antécédent de tumeur des VADS et de déterminer si la VATS diminue le risque de complications postopératoires chez ces patients. Nous avons également cherché à savoir si une prise en charge première de la tumeur pulmonaire avant la tumeur ORL (dans les présentations synchrones) diminuait significativement les complications postopératoires. 2. Matériels et méthodes Cette étude rétrospective monocentrique a été menée entre janvier 2010 et décembre 2017 à l’hôpital Marie Lannelongue (HML). 2.1. Population Nous avons inclus tous les patients opérés d’une résection pulmonaire entre 2010 et 2017 et qui présentaient un antécédent de tumeur des VADS. Nous avons également inclus les patients ayant un diagnostic concomitant d’une tumeur pulmonaire et d’une tumeur des VADS et considéré que ces patients présentaient des tumeurs synchrones. Pour ces patients, la stratégie était celle de la prise en charge première de la tumeur pulmonaire afin de diminuer les risques d’infection pulmonaire liés aux troubles de déglutition que peut provoquer le traitement premier des tumeurs des VADS. En cas de critères d’intubation difficile, celle-ci était faite sous fibroscopie. Une trachéotomie était également réalisée en cas de difficulté d’intubation. Tous les dossiers des patients étaient présentés en réunion de concertation pluridisciplinaire et les indications chirurgicales étaient validées de façon collégiale. Une trachéotomie préventive était systématiquement réalisée en cas de troubles de déglutition pour protéger les poumons du risque d’inhalation. Elle est donc réalisée dans le même temps chirurgical que la résection pulmonaire. Il s’agit d’une trachéotomie temporaire. Nous avons défini deux populations de patients. Un groupe de patient dont la résection pulmonaire était faite par thoracotomie postérolatérale (TPL) et un second groupe par VATS. Les patients qui ne présentaient pas de tumeur des VADS et les patients qui ont présenté une tumeur des VADS après la chirurgie pulmonaire ont été exclus de l’étude. 2.2. Recueil de données Les données ont été recueillies à partir des dossiers papiers et informatisés des patients dans un tableur Excel. Les données démographiques regroupaient : l’âge, le sexe, les antécédents notables des patients, le stade de la tumeur pulmonaire. Nous avons également recueilli des données sur le bilan fonctionnel préopératoire, le traitement effectué pour la tumeur des VADS. La voie d’abord et le type de résection pulmonaire effectué pour le traitement du cancer du poumon non à petites cellules étaient recueillis. Nous avons relevé les différentes complications survenues au cours de l’hospitalisation et ainsi que les évènements jusqu’à la consultation postopératoire. 2.3. Analyse statistique Les analyses statistiques ont été réalisées à l’aide du logiciel SPSS (SPSSTM Inc, Chicago, Illinois, États-Unis) version 15.0. Les variables continues sont décrites sous la forme de moyenne ± écart type, les variables qualitatives le sont par la fréquence de chaque classe. Les tests d’indépendance entre deux variables qualitatives ont été effectués par des tests du Chi2 et entre deux variables quantitatives par un test t de Student. La significativité statistique était déterminée par une valeur de p<0,05.   2.4. Avis du comité d’éthique Cette étude a été soumise au comité d’éthique de HML et a obtenu un avis favorable. Elle a été menée dans le respect des règles d’éthique et de la protection du secret médical. 3. Résultats   3.1. Population Deux mille cinq cent six résections pulmonaires ont été effectuées au HML pour cancer bronchopulmonaire entre 2010 et 2017. Nous avons donc recherché dans cette population les patients avec un antécédent de tumeur des VADS synchrone ou métachrone. Notre population d’étude comporte au final 121 patients. Quarante-sept patients (38,8%) dans le groupe VATS et 74 patients (61,2%) dans le groupe TPL. Le choix entre VATS et TPL était lié à l’expérience du chirurgien, aux facteurs anatomiques de la tumeur et à la période de chirurgie, sachant que la chirurgie vidéo-assistée s’est progressivement accrue au cours de l’étude, du fait de l’amélioration du matériel. On note 17 patients avec des tumeurs synchrones et 104 tumeurs métachrones. Le diagramme de flux est représenté par la figure 1.   [caption id="attachment_4181" align="aligncenter" width="300"] Figure 1. Diagramme de flux de la population de l’étude.[/caption]   Les caractéristiques démographiques sont résumées dans le tableau 1. On ne peut pas conclure à une différence significative entre les deux populations, sauf dans la sous-population des lobectomies. On a significativement plus de lobectomies dans le groupe TPL.   Tableau 1. Les caractéristiques démographiques.  Variables Données manquantes Patients VADS n=121 (%) Patients TPL n=74 (%) Patients VATS  n=47 (%) p Âge 0 64,7±8,1 64,6±8,6 64,8±7,4 0,92 Sexe 0 0,348   Hommes 0 93 (76,9) 59 (79,7) 34 (72,3)   Femmes 0 28 (23,1) 15 (20,3) 13 (27,7) IMC 1 23,5±4,8 23,3±3,9 23,7±6 0,67 Tabac actif 1 29 (24,2) 16 (21,6) 13 (28,3) 0,4 Tabac sevré 1 86 (71,7) 57 (77) 29 (63) 0,09 VEMS (%) 3 85±18 86±15 84±22 0,55 Stade cancer poumon 11 0,22    I 69 (62,7) 40 (58) 29 (69)    II 23 (20,9) 13 (19,1) 10 (23,8)    III 17 (15,5) 14 (20,6) 3 (7,1)    IV 1 (0,9) 1 (1,5) 0 (0) Type de résection pulmonaire   Wedge 0 16 (13,2) 7 (9,5) 9 (19,1) 0,12   Segmentectomie 0 3 (2,5) 1 (1,4) 2 (4,3) 0,32   Lobectomie 0 104 (86) 68 (91,9) 36 (76,6) 0,018   Bilobectomie 0 1 (0,8) 1 (1,4) 0 (0) 0,42   Pneumonectomie 0 3 (2,5) 2 (2,7) 1 (2,1) 0,84     3.2. VATS versus TPL Le taux de complication post-résection pulmonaire chez les patients avec un antécédent de tumeur des VADS est de 57%. Le taux de mortalité est de 3,3%. Nous n’avons pas trouvé d’association statistiquement significative entre la voie d’abord (TPL ou VATS) et les complications postopératoires au global (p=0,15). De manière significative, on observe plus de pneumopathie et détresse respiratoire (nécessitant une admission en réanimation) dans le groupe TPL. La durée de séjour hospitalier est également significativement augmentée dans le groupe TPL. Huit patients au total ont nécessité une ventilation prolongée avec une trachéotomie postopératoire. Il n’y a pas de différence significative concernant ce résultat dans les deux groupes. Le tableau 2 résume les différentes complications dans les deux groupes.   Tableau 2. Complications postopératoires en fonction de la voie d’abord. Complications Données manquantes Patients VADS n=121 (%) Patients TPL n=74 (%) Patients VATS  n=47 (%) p Décès 0 4 (3,3) 3 (4,1) 1 (2,1) 0,56 Complications 0 69 (57) 46 (62,2) 23 (48,9) 0,15 Pneumopathie 0 40 (33,1) 32 (43,2) 8 (17) 0,003 Détresse respiratoire 0 17 (14) 16 (21,6) 1 (2,1) 0,003 Ventilation non invasive 0 2 (1,7) 0 (0) 2 (4,3) 0,07 Encombrement bronchique 0 24 (19,8) 18 (24,3) 6 (12,8) 0,12 Fistule bronchopleurale 0 5 (4,1) 3 (4,1) 2 (4,3) 0,95 Bullage prolongé 0 8 (6,6) 4 (5,4) 4 (8,5) 0,5 Reprise chirurgicale 0 11 (9,1) 6 (8,1) 5 (10,6) 0,63 Embolie pulmonaire 0 1 (0,8) 1 (1,4) 0 (0) 0,8 ACFA 0 8 (6,6) 4 (5,4) 4 (8,5) 0,5 IDM 0 1 (0,8) 0 (0) 1 (2,1) 0,2 Hémothorax 0 2(1,7) 0(0) 2(4.3) 0.07 AVC 0 1(0,8) 1(1,4) 0(0) 0,42 Ventilation prolongée 0 8(6,6) 5(6,8) 3(6,4) 0.93 Séjour hospitalier (j) 0 15±19 18±19 11±17 0,04     3.3. Prise en charge chirurgicale première de la tumeur pulmonaire dans les tumeurs synchrones Nous n’avons pas relevé d’impact significatif de la prise en charge en première position de la tumeur pulmonaire sur les complications postopératoires. Le taux de bullage prolongé est proportionnellement plus élevé dans les tumeurs synchrones. Cette stratégie n’a pas d’influence sur le taux de pneumopathie ou de détresse respiratoire. Ces résultats sont présentés dans le tableau 3.   Tableau 3. Complications postopératoires des tumeurs synchrones. Complications Données manquantes Patients VADS n=121 (%) Tumeurs synchrones n=17 (%) Tumeurs métachrones  n=104 (%) p Décès 0 4 (3,3) 0 (0) 4 (3,8) 0,41 Complications 0 69 (57) 10 (58,8) 59 (56,7) 0,87 Pneumopathie 0 40 (33,1) 4 (23,5) 36 (34,6) 0,36 Détresse respiratoire 0 17 (14) 2 (11,8) 15 (14,4) 0,77 Ventilation non invasive 0 2 (1,7) 0 (0) 2 (1,9) 0,56 Encombrement bronchique 0 24 (19,8) 3 (17,6) 21 (20,2) 0,8 Fistule bronchopleurale 0 5 (4,1) 1 (5,9) 4 (3,8) 0,69 Bullage prolongé 0 8 (6,6) 3 (17,6) 5 (4,8) 0,04 Reprise chirurgicale 0 11 (9,1) 1 (5,9) 10 (9,6) 0,62 Embolie pulmonaire 0 1 (0,8) 0 (0) 1 (1) 0,68 ACFA 0 8 (6,6) 1 (5,9) 7 (6,7) 0,89 IDM 0 1 (0,8) 0 (0) 1 (1) 0,68 Hémothorax 0 2 (1,7) 0 (0) 2 (1,9) 0,56 AVC 0 1 (0,8) 0 (0) 1 (1) 0,68   3.4. Facteur de risque de complication postopératoire Lorsqu’on étudie les facteurs pouvant influencer le taux de complications postopératoires, seule la présence d’un trouble de la déglutition préopératoire augmente significativement le taux de complication  (OR=3,3 [1,1-10.7]). L’âge, le sexe, le tabac, le type de résection et le type de traitement ORL n’impactent pas significativement les complications postopératoires. Ces résultats sont présentés dans le tableau 4.   Tableau 4. Analyses univariées et multivariées des facteurs de risques. Analyse univariée  Analyse multivariée Variables Données manquantes Complications postopératoires n=69 (%) Pas de Complication n=52 (%) p OR [IC 95%] p Troubles de déglutition préopératoire 0 15 (21,7) 4 (7,7) 0,036 3,3 [1,1-10,7] <0,001 Trachéotomie préventive 0 8 (11,6) 2 (3,8) 0,12 0,002 Âge 0 65±8 63±7 0,12 0,911 IMC 1 23±4.5 24±5.2 0,34 Hommes 0 55 (79,7) 38 (73,1) 0,39 Tabac actif 1 17 (25) 12 (23,1) 0,8 VEMS (%) 3 83±15 87±21 0,27 Antécédent de trachéostomie 0 7 (10,1) 6 (11,5) 0,8 Type de résection pulmonaire   Wedge 0 7 (10,1) 9 (17,3) 0,25   Segmentectomie 0 2 (2,9) 1 (1,9) 0,72   Lobectomie 0 61 (88,4) 43 (82,7) 0,37       Bilobectomie 0 1 (1,4) 0 (0) 0,38   Pneumonectomie 0 1 (1,4) 2 (3,8) 0,4 Type de traitement de tumeur des VADS   Chirurgie 2 36 (53,7) 32 (61,5) 0,39   Radiothérapie 2 52 (77,6) 39 (75) 0,73   Chimiothérapie 3 40 (60) 28 (53) 0,46   4. Discussion Cette étude rapporte un taux de complications post-résection pulmonaire élevé chez les patients avec un antécédent de tumeur des VADS. Cet antécédent était bien identifié dans la littérature comme un facteur de risque de complications. Mais les taux de complications étaient peu étudiés. Une étude récente rétrospective de Briend et al. [19] rapportait un taux de complications de 42,4% et une mortalité de 8,5%. Notre taux de complications est plus élevé mais reste concordant lorsqu’on observe par exemple la complication la plus importante qui est la pneumopathie (33% dans notre étude et 32,1% dans l’étude de Briend et al.). La différence de taux de mortalité peut s’expliquer par une proportion de pneumonectomie plus élevée dans l’étude de Briend et al. (12% contre 2,5% dans notre étude). Ces résultats sont concordants avec la littérature [20,21]. Ces taux de complications élevés incitent à une prudence particulière dans la prise en charge des patients avec un antécédent de tumeur des VADS. 4.1. VATS versus TPL Nous n’avons pas établi que la VATS réduisait le risque global de complications post-résection pulmonaire dans notre population, et ceci malgré notre effectif important. Nous pouvons néanmoins conclure qu’il y a moins de pneumopathie et de détresse respiratoire dans le groupe VATS. La pneumopathie constitue la complication la plus fréquente dans notre population et les détresses respiratoires peuvent mettre en jeu le pronostic vital du patient. Ce résultat est donc cliniquement pertinent. La durée d’hospitalisation est également diminuée chez les patients opérés par VATS. Nous n’avons pas trouvé d’études comparant la VATS à la thoracotomie dans cette population. Les données que nous avons trouvées dans la littérature sur les lobectomies VATS versus thoracotomie dans la population générale vont dans le sens d’une diminution globale des complications postopératoires et de la durée de séjour hospitalier [10,22]. La réduction du risque de pneumopathie postopératoire n’a pas été rapportée dans ces études. 4.2. Prise en charge chirurgicale première de la tumeur pulmonaire dans les tumeurs synchrones Notre étude ne démontre pas que le fait de prendre en charge d’abord chirurgicalement la tumeur pulmonaire avant la tumeur des VADS réduit le risque de complication post-résection pulmonaire. Ceci peut s’expliquer par le manque de puissance avec un effectif faible de cette sous-population. Une autre explication peut se trouver dans le fait que 4 patients sur 17 avaient reçu une chimiothérapie néo-adjuvante pour la tumeur des VADS en attendant la chirurgie pulmonaire, or il a été démontré dans la littérature que la chimiothérapie augmentait le risque de complications postopératoires [14]. Une étude randomisée avec un effectif suffisamment important serait nécessaire pour démontrer cette hypothèse. 4.3. Facteur de risque significatif de complications postopératoires Le seul facteur de risque de complications que nous retrouvons est la présence de troubles de la déglutition préopératoire. Ce résultat va dans le sens des conclusions des études de Briend [19] et Herrera [21]. Même si certains facteurs comme le sexe masculin, le tabagisme actif, l’âge, le type de résection pulmonaire ont été identifiés dans la littérature comme facteurs de risque de complications, ceux-ci n’influencent pas le taux de complications dans notre étude [19,23]. La trachéotomie préventive pour réduire le risque d’inhalation et donc de pneumopathie postopératoire n’est pas une attitude clairement validée. Nos résultats suggèrent que cette attitude peut être adoptée chez les patients avec des troubles de la déglutition préopératoire. Nous justifions ceci par le fait que les troubles de la déglutition augmentent le risque de complications, or la trachéotomie préventive, qui n’est pas significative en analyse univariée, devient significative en analyse multivariée lorsqu’il est testé avec les troubles de la déglutition. La trachéotomie préventive peut constituer un facteur de confusion. Elle est significativement liée aux troubles de la déglutition. Ceci est la traduction du fait que dans notre centre la trachéotomie préventive est pratiquée préférentiellement chez les patients présentant des troubles de la déglutition. La trachéotomie préventive seule ne suffit pas à prévenir les pneumopathies postopératoires. 4.4. Limites Notre étude présente la principale limite d’être une étude rétrospective avec les biais qu’elle peut comporter avec des données manquantes. Nous n’avons pas fait de comparaison par score de propension parce que nous ne pensions pas que dans notre étude la différence du nombre de lobectomie entre les deux groupes (VATS et TPL) pouvait constituer un facteur de confusion. L’analyse univariée ne présentait pas la lobectomie comme facteur significativement associé aux complications post-résection pulmonaire. Notre étude apporte néanmoins de nouveaux renseignements sur la résection pulmonaire chez les patients avec un antécédent de tumeur des VADS. Une étude multicentrique randomisée serait nécessaire pour répondre définitivement à certaines questions, comme celle de l’indication de la trachéotomie préventive chez ces patients ou celle de la prise en charge première de la tumeur pulmonaire dans les tumeurs synchrones. 5. Conclusion La prise en charge des patients présentant une tumeur pulmonaire avec un antécédent de tumeur des VADS reste complexe et non consensuelle. Cette étude retrouve un taux de pneumopathie et de détresse respiratoire réduit avec la VATS. Elle établit également que la présence de troubles de la déglutition préopératoire est un facteur prédictif de complications postopératoires. La stratégie de prise en charge chirurgicale première du cancer bronchopulmonaire dans les tumeurs synchrones n’a pas montré de réduction des complications post-résection pulmonaire dans notre étude. Ces patients doivent être opérés par VATS si possible, et il faut rechercher et prendre en charge les troubles de la déglutition pour réduire les complications post-résection pulmonaire dans cette population.   Références Herranz González-Botas J, Varela Vázquez P, Vázquez, Barro C. Second primary tumours in head and neck cancer. Acta Otorrinolaringol Esp 2016;67:123-9. https://doi.org/10.1016/j.otorri.2015.04.001 PMid:26386656 Vogt A, Schmid S, Heinimann K et al. Multiple primary tumours: challenges and approaches, a review. ESMO Open 2017;2:e000172. https://doi.org/10.1136/esmoopen-2017-000172 PMid:28761745 PMCid:PMC5519797 Deleyiannis FW, Thomas DB. Risk of Lung Cancer Among Patients with Head and Neck Cancer. Otolaryngol Head Neck Surg 1997 Jun;116(6):630-636. https://doi.org/10.1016/S0194-5998(97)70239-0 Aupérin A, Hill C. Epidemiology of head and neck carcinomas. Cancer Radiother 2005 Fev;9(1):1-7. https://doi.org/10.1016/j.canrad.2004.11.004 PMid:15804614 Van Monsjou HS, Schaapveld M et al. Cause-specific excess mortality in patients treated for cancer of the oral cavity and oropharynx: A population-based study. Oral Oncol 2016 Jan;52:37-44. https://doi.org/10.1016/j.oraloncology.2015.10.013 PMid:26553390 Salama JK, Stenson KM, List MA et al. 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décembre 3, 2018
Chirurgie thoracique · Vol. 22 Septembre 2018

Oxygénation extracorporelle (veinoveineuse) par membrane dans le syndrome de détresse respiratoire aiguë après résection pulmonaire

Arnaud Pforr1*, Jeremie Reeb2, Pierre-Emmanuel Falcoz2, Joseph Seitlinger2, Alain Bernard1, Pierre-Benoît Pagès1   1. CHU de Dijon, hôpital François Mitterrand, Dijon, France. 2. CHU de Strasbourg, hôpital civil, Strasbourg, France. * Correspondance : arnaud.pforr@chu-dijon.fr DOI : 10.24399/JCTCV22-3-PFO Citation : Pforr A, Reeb J, Falcoz PE, Seitlinger J, Bernards A, Pagès PB. Oxygénation extracorporelle (veinoveineuse) par membrane dans le syndrome de détresse respiratoire aiguë après résection pulmonaire. Journal de chirurgie thoracique et cardio-vasculaire 2018;22(3). doi: 10.24399/JCTCV22-3-PFO   Résumé Objectifs : le syndrome de détresse respiratoire aiguë (SDRA) reste une complication mortelle après résection pulmonaire (RP). Le but de cette étude était d’évaluer l’efficacité de l’oxygénation extracorporelle veinoveineuse par membrane (ECMO-VV) dans les SDRA modérés réfractaires et sévères après RP. Méthodes : nous avons revu rétrospectivement tous les patients traités par ECMO-VV pour SDRA après RP entre janvier 2010 et février 2016 au centre hospitalier universitaire de Dijon, ainsi qu’entre janvier 2009 et décembre 2015 au centre hospitalier universitaire de Strasbourg. Nous avons calculé le score SOFA (évaluation séquentielle des défaillances d’organes) avant insertion de l’ECMO et collecté les paramètres de ventilation mécanique. Le critère d’évaluation principal était la survie hospitalière. Les critères secondaires étaient la survie à 3 mois et à 6 mois, la possibilité de mettre en place une ventilation protectrice autorisant la récupération pulmonaire. Résultats : l’ECMO-VV a été indiquée chez 20 patients ayant une hypoxémie réfractaire. La pression partielle moyenne d’oxygène du sang artériel/fraction d’oxygène inspirée était de 81 mmHg (intervalle de 39 à 235 mmHg). Le score SOFA moyen avant ECMO était de 13,8 (intervalle de 12 à 17), permettant d’estimer un taux de mortalité de 60%. Le volume courant, la fraction d’oxygène inspirée et la pression expiratoire positive ont pu être diminués durant l’ECMO. L’ECMO a pu être sevrée chez 13 patients (65%). La survie hospitalière était de 45%. Tous ces patients étaient encore en vie à 3 mois. La survie à six mois était de 40%. Conclusion : la survie hospitalière était meilleure que celle prédite avant l’insertion de l’ECMO. Même chez des patients moins sévères, présentant des SDRA réfractaires après RP, l’ECMO-VV permet la récupération pulmonaire et permettrait d’améliorer la survie.     Abréviations SDRA : syndrome de détresse respiratoire aiguë. ASA : société américaine d’anesthésiologie. DLCO : capacité de diffusion pulmonaire du monoxyde de carbone. ECMO : oxygénation extracorporelle par membrane. VEMS : volume expiratoire maximum par seconde. PFC : plasma frais congelé. FIO2 : fraction inspirée en oxygène. CBNPC : cancer bronchique non à petites cellules. PaCO2 : pression partielle artérielle en dioxyde de carbone. PaO2 : pression partielle artérielle en oxygène. PEP: pression expiratoire positive. RP : résection pulmonaire. CGR : concentrés de globules rouges. IGS II : indice de gravité simplifié. SOFA : score d’évaluation séquentielle des défaillances d’organes. VC : volume courant. VV : veinoveineuse.   1. Introduction Malgré les progrès en réanimation, le syndrome de détresse respiratoire aiguë (SDRA) reste une complication mortelle après résection pulmonaire (RP). Le taux de mortalité hospitalière de SDRA après RP reste élevé, allant de 40% à 60% dans les différentes cohortes [1-8]. L’oxygénation extracorporelle veinoveineuse par membrane (ECMO-VV) serait une stratégie intéressante afin de prendre en charge la défaillance respiratoire dans le SDRA sévère. La ventilation mécanique induit un barotraumatisme, un volotraumatisme et un traumatisme biologique au lieu de favoriser la récupération pulmonaire en mettant les poumons au repos [9-10]. La circulation extracorporelle peut contribuer à introduire une ventilation protectrice en utilisant un faible volume courant (VC) de 3 à 4 ml/kg, une pression expiratoire positive (PEP) allant de 5 à 10 cmH20 et une pression de plateau de moins de 30 cmH20. Cette stratégie réduit l’étirement du poumon et la libération de médiateurs de l’inflammation [11]. Certains rapports de cas ont décrit le succès de l’ECMO-VV dans les SDRA après RP associés à une fistule bronchopleurale [12-13]. Plus récemment, l’intérêt de l’ECMO-VV dans les SDRA post-pneumonectomie a été observé chez 8 patients, avec une survie hospitalière de 50%, alors que le taux de mortalité prédit était supérieur à 80% [14]. Fort de cela, nous voulions élargir la question à l’ensemble des RP. Une autre étude a évalué la possibilité de mettre en place une membrane extracorporelle sans pompe (NovalungÒ) associée à une ventilation mécanique statique pour des SDRA après RP [15]. NovalungÒ est une oxygénation extracorporelle artérioveineuse par membrane (ECMO-AV). En plus du risque de saignement, commun à tous les types d’ECMO [16], l’utilisation d’un accès vasculaire artériel peut provoquer un risque d’embolies et d’ischémie [17]. Voilà pourquoi nous pensons que l’ECMO-VV serait une procédure intéressante chez ces patients présentant un SDRA après RP réfractaire à la ventilation mécanique, et aussi un état hémodynamique stable. Au meilleur de notre connaissance, aucune étude n’a été menée afin évaluer l’intérêt de l’ECMO-VV dans les SDRA après RP. Le but de cette étude était d’évaluer l’efficacité et la sécurité d’utilisation de l’ECMO-VV pour les SDRA après RP réfractaires à la ventilation mécanique.   2. Matériels et méthodes 2.1. Conception de l’étude Nous avons revu rétrospectivement tous les patients traités par une ECMO-VV pour un SDRA après RP réfractaire à la ventilation mécanique, entre janvier 2010 et février 2016 au département de chirurgie thoracique de l’hôpital universitaire de Dijon, ainsi qu’entre janvier 2009 et décembre 2015 au département de chirurgie thoracique de l’hôpital universitaire de Strasbourg. Tous les patients ayant été exposés à un SDRA réfractaire à la ventilation mécanique ont reçu un traitement conventionnel optimal, sous sédation, curarisation et ventilés au maximum des capacités lors de la décision d’implantation du dispositif.   2.2. Gestion avant l’ECMO Toutes les RP ont été prévues avec un projet curatif pour cancer du poumon non à petites cellules ou une tumeur maligne de la plèvre. Les patients ont été évalués en préopératoire selon les recommandations de la société britannique de chirurgie thoracique [18]. Le protocole de gestion de l’anesthésie a été basé sur du sufentanil, du propofol ou de l’étomidate et du curare. Les paramètres de ventilation avant l’intervention chirurgicale étaient une PEP de 8 cmH2O, un VC de 5 à 6 ml/kg, un rapport respiratoire en fonction du CO2 expiré (cible 1/4 30 à 55 mmHg), et une FIO2  suffisante pour assurer une saturation en oxygène de 90% ou plus. Tous les patients atteints de SDRA avaient reçu une gestion conventionnelle optimale lorsque la décision a été prise d’introduire l’ECMO, et ce, à l’issue d’une discussion pluridisciplinaire.   2.3. Initiation de l’ECMO Les critères de SDRA sont établis par la définition de Berlin, qui proposait trois catégories selon le degré d’hypoxémie : faible (PaO2/FiO2 <200 à 300 mmHg), modéré (PaO2/FiO2 <100 à 200 mmHg) et sévère (PaO2/FIO2 100 mmHg). Les patients étaient admissibles à une ECMO en cas de SDRA réfractaire au traitement médical optimal. Celui-ci est défini par un SDRA sévère ou modéré à condition d’être insensible à un traitement médical optimal (ventilation mécanique avec une FiO2 à 100%, curarisation optimale, utilisation de monoxyde d’azote inhalé, réalisation de cures de décubitus ventral systématiques) et d’être hémodynamiquement stable (pression artérielle moyenne> 60 mmHg ; fonctions cardiaques normales) avec un soutien vasopresseur minimal. L’état général et la prédiction de la mortalité avant l’insertion de l’ECMO ont été estimés à l’aide du score d’évaluation séquentielle des défaillances d’organes (SOFA), qui quantifie la gravité de la maladie selon le degré d’hypoxémie, le taux de plaquettes, la fonction hépatique (bilirubine), l’état cardiovasculaire (pression artérielle moyenne et la nécessité d’utiliser des vasopresseurs), la fonction rénale (taux de créatinine et du débit urinaire), et l’échelle de coma de Glasgow [19]. Un score SOFA de 15 est en corrélation avec les taux de mortalité de plus de 80% [20].   2.4 Insertion de l’ECMO-VV L’ECMO-VV a été implantée dans les services de réanimation en utilisant la technique de Seldinger ou une approche chirurgicale ouverte. La taille des canules dépendait du site de canulation. Pour une canulation double site, les canules de sortie allaient du 21F au 25F, et les canules d’entrée allaient du 18F au 24F. Dans ce contexte, le site de drainage était la veine fémorale droite ou gauche, et le site d’injection était de préférence la veine jugulaire interne droite. Nous avons également réalisé des canulations fémorofémorales, dans cette situation les canules de sortie allaient du 18F au 24F et les canules d’entrée du 20F au 26F. Le positionnement précis des 2 canules était évalué cliniquement et par radiographie thoracique ou échographie-doppler transthoracique ou transœsophagienne. Les canulations monosite ont été réalisées avec du 27F ou un cathéter à double lumière Elite Avalon 31F (Maquet GmbH, Rastatt, Allemagne) implanté dans la veine jugulaire interne droite. Le contrôle de ces canulations monosite a été réalisé par échographie-doppler transthoracique ou transœsophagienne afin de déterminer le positionnement précis de l’extrémité distale dans la veine cave inférieure et l’orientation dirigée du flux à travers la valve tricuspide. Nous avons administré un bolus d’héparine de 5000 UI avant la canulation, nous avons ciblé un temps de céphaline activée (TCA) de 2,5 fois à 3 fois la normale. Les pompes centrifuges utilisées étaient des pompes à révolution (groupe Sorin, Milan, Italie) ou des pompes BioMedicus (Medtronic Inc, Minneapolis, États-Unis). Nous avons utilisé exclusivement des oxygénateurs Eurosets (Eurosets, Medolla, Italie).   2.5. Réglages de ventilation mécanique pendant l’ECMO Une fois l’ECMO débutée, nous sommes passés en ventilation protectrice [21]. Les réglages initiaux du respirateur étaient en mode pression contrôlée (VC maximal de 3 à 4 ml/kg ; une PEP, de 5 à 10 cmH2O et une pression de plateau ≤30 cmH2O). Les patients ont été mis sous sédation et curarisés initialement. Nous avons arrêté les curares et diminué les niveaux de sédation par palier lorsque les patients ont été stabilisés sur l’ECMO-VV et quand la réponse inflammatoire systémique était devenue contrôlée. Nous sommes passés en ventilation de soutien une fois la compliance pulmonaire augmentée, avec une PEP ≤5 cmH2O et une pression plateau ≤30 cmH2O. Une trachéotomie était réalisée après le retrait de l’ECMO au décours d’un premier échec de tentative de sevrage de la ventilation mécanique.   2.6. Gestion globale des patients durant l’ECMO Le débit de l’ECMO était ajusté aux valeurs de PaO2. La fraction d’oxygène délivrée variait de 50% à 100%. L’objectif était d’obtenir une PaO2 de 60 mmHg ou plus. Le balayage était adapté à la pression partielle du dioxyde de carbone artériel (PaCO2). La cible de PaCO2 variait de 35 à 60 mmHg, avec un pH normal. La surveillance continue des patients et de l’ECMO était réalisée par les réanimateurs, les chirurgiens thoraciques, les perfusionnistes, les infirmières et les kinésithérapeutes. La surveillance de la thrombose de l’oxygénateur était effectuée plusieurs fois par jour par les perfusionnistes. Tous les patients ont été héparinés sous ECMO avec un objectif de TCA de 2,0 fois à 2,5 fois la normale. En cas de saignement, la cible était réduite de 1,5 à 2,0 fois la normale. Le taux de plaquettes et de fibrinogène était surveillé quotidiennement. La pression artérielle moyenne était contrôlée en permanence avec un objectif de 65 mmHg ou plus. L’utilisation de vasoconstricteurs a été évaluée par le débit de norépinéphrine avant le début de l’ECMO. L’épuration extrarénale a été réalisée en cas d’insuffisance rénale ou une surcharge liquidienne avec oligurie, ou l’association des deux. Les patients traités par ECMO ont été éligibles pour le sevrage lorsque leur compliance pulmonaire avait augmenté et que leur état clinique s’était amélioré (ventilation mécanique avec FiO2 <50%, PEP <5 cmH2O, pression de plateau <30 cmH2O, avec VC> 4 ml/kg). Le balayage a été progressivement diminué puis éteint en présence d’un débit d’ECMO constant. Si les gaz du sang artériels étaient restés satisfaisants pendant 4 heures, l’ECMO était sevrée. Les radiographies thoraciques ont été réalisées à la demande, fondée sur des arguments cliniques ou biologiques.   2.7. Critères d’évaluation de l’étude Le critère d’évaluation principal était la survie hospitalière. Les critères secondaires étaient la survie à 3 mois et à 6 mois, l’évaluation des complications, la capacité à effectuer une ventilation protectrice durant l’ECMO, permettant la récupération pulmonaire.   2.8. Collecte des données Les données recueillies étaient des données démographiques (âge, sexe, indice de masse corporelle, le score ASA, antécédent de bronchite chronique et de maladies cardiovasculaires, le tabagisme), le bilan d’opérabilité avant RP (VEMS, DLCO), les caractéristiques oncologiques (sous-type anatomopathologique et stade, utilisation de chimiothérapie néo-adjuvante), le type et le côté de la résection, les caractéristiques avant l’ECMO-VV (valeurs gazométriques, PaO2/FiO2, la pression artérielle moyenne, le soutien vasopresseur, l’intervalle avec la chirurgie, la nature du SDRA, le score SOFA, le score IGS-II (calculé à l’admission en réanimation), les caractéristiques de l’ECMO-VV (les paramètres de l’ECMO, les thérapies associées, et en particulier les variables de la ventilation mécanique) et les résultats (la survie hospitalière, la survie à 3 mois puis à 6 mois, les complications, le sevrage de l’ECMO, le sevrage de la ventilation mécanique).   2.9. Analyses statistiques Les données quantitatives sont exprimées en tant que moyennes avec leurs intervalles et les données qualitatives sont représentées en valeurs absolues et en pourcentages. Les variables continues ont été comparées en utilisant le test Wilcoxon apparié. Les variables qualitatives ont été comparées à l’aide du test de Chi2. La significativité statistique a été fixée pour des valeurs p inférieures à 0,05. Toutes les analyses ont été réalisées avec Stata 14 logiciel statistique (StataCorp, College Station, Texas, États-Unis).   3. Résultats 3.1. Patients Les caractéristiques des patients, de l’anatomopathologie et de la chirurgie sont incluses dans le tableau 1. Dans notre population, le sexe masculin était le plus fréquent (95%). Il y avait 55% de carcinomes épidermoïdes et 35% d’adénocarcinomes. Peu de traitement d’induction était nécessaire, il y a eu 4 chimiothérapies néoadjuvantes (20%) et pas de radiothérapie. Les chirurgies les plus fréquentes étaient la lobectomie (35%) et la pneumonectomie (35%). Les informations de l’ECMO sont détaillées dans le tableau 2. Le délai moyen entre la chirurgie et la mise en place de l’ECMO était de 9,6 jours (intervalle de 0 à 40 jours). Dans notre cohorte de 20 patients présentant un SDRA après RP, l’étiologie était infectieuse pour l’ensemble des patients. Tous les patients étaient hémodynamiquement stables avant l’implantation de l’ECMO. Il n’a jamais été nécessaire de changer le circuit ou la configuration de l’ECMO.   Tableau 1. Caractéristiques des patients, de l’anatomopathologie et de la chirurgie. Variables Moyenne (intervalle) ou N° (%) (N=20) Caractéristiques des patients Âge 63 (45-84) Sexe masculin 19 (95%) Indice de masse corporelle (kg/m2) 24,1 (17,3-40) Score ASA 3 (2-4) Antécédents de bronchite chronique 5 (25%) Antécédents de maladies cardiovasculaires 7 (35%) Tabagisme (paquets/année) 38 (0-80) Sevrage tabagique <6 mois 7 (38,9%) VEMS (%) 80 (50-100) DLCO (%) 79,2 (57-94) Score SOFA 13,8 (12-17) Score IGS-II 43,8 (13-87) Anatomopathologie CBNPC Adénocarcinomes 7 (35%) Carcinomes épidermoïdes 11 (55%) Tumeur carcinoïde typique 1 (5%) Mésothéliome pleural malin 1 (5%) Stade pTNM (2009) IA 6 (30%) IB 2 (10%) IIA 3 (15%) IIB 1 (5%) IIIA 6 (30%) IIIB 2 (10%) Gestion péri-opératoire Traitement d’induction Chimiothérapie 4 (20%) Radiothérapie 0 (0%) Côté de la chirurgie Droite 9 (45%) Gauche 11 (55%) Type de chirurgie Lobectomie supérieure 3 (15%) Lobectomie moyenne 0 (0%) Lobectomie inférieure 4 (20%) Lobectomie avec bronchoplastie 1 (5%) Bilobectomie 1 (5%) Pneumonectomie 7 (35%) Pneumonectomie avec résection de carène 2 (10%) Pneumonectomie de totalisation 1 (5%) Pleuropneumonectomie 1 (5%)   Tableau 2. Information de l’ECMO et résultats cliniques. Variables Moyenne (intervalle) ou N° (%) Délai chirurgie-ECMO (jours) 9,6 (0-40) Délai intubation-ECMO (jours) 2,4 (0-7) Avant implantation de l’ECMO Pression artérielle moyenne (mmHg) 68 (44-94) Norépinephrine (mg/kg/min)   1,7 (0-6,5) Durant l’ECMO Pression artérielle moyenne (mmHg) 80 (71-92) TCA (secondes) 1,8 (1,1-2,3) Débit de l’ECMO (l/min) 3,4 (2,4-4,8) Balayage (l/min) 4,5 (1,1-7,2) CGR transfusés (unités) 16 (0-51) Concentrés plaquettaires (unités) 2 (0-11) PFC transfusés (unités) 6 (0-34) Épuration extrarénale 8 (40%) Chirurgie pour complication hémorragique 4 (20%) Sevrage de l’ECMO 13 (65%) Durée de l’ECMO Pour tous les patients (jours) 11 (1-29) Pour les patients sevrés (jours) 9 (4-19)   3.2. Les résultats cliniques des patients Nous avons observé un taux de survie hospitalière de 45%, 11 patients (55%) sont morts au cours de leur hospitalisation. Les patients qui ont survécu après l’ECMO-VV étaient significativement plus jeunes (57 vs 68 ans, p=0,0375) [tableau 3] et nécessitaient un balayage sensiblement plus faible pendant l’ECMO (3,8 vs 5,1 l/min, p=0,0368) [tableau 4]. Les patients qui ont survécu avaient une durée plus courte d’ECMO (7 vs 14 jours, p=0,017). Les patients nécessitant une épuration extrarénale étaient nettement plus nombreux dans le groupe des non-survivants (p=0,017) [tableau 4]. Ces 9 patients survivants étaient encore en vie 3 mois après leur hospitalisation. La survie à 6 mois n’a été observée que pour 8 patients (40%). Le patient décédé dans l’intervalle est mort d’une récidive de son cancer. Nous avons observé une durée médiane de séjour de 59 jours (intervalle de 25 à 121 jours). Treize des 20 patients (65%) ont été sevrés de l’ECMO, avec une durée moyenne de 9 jours (intervalle de 4 à 19 jours). Aucun de nos patients n’a été sevré de la ventilation mécanique avant l’ablation de l’ECMO. Dix patients (50%) ont été extubés et 4 (20%) ont été trachéotomisés. Les patients trachéotomisés sont plus nombreux dans le groupe des survivants (p=0,013) [tableau 3]. Un seul patient extubé n’a pas pu sortir de l’hôpital en vie.   Tableau 3. Caractéristiques des patients en fonction de la survie hospitalière. Variables Total (N=20) Survivants (N=9) Non survivants (N=11) p Âge 63 (45-84) 57 (45-65) 68 (60-84) 0,0375 Indice de masse corporelle (kg/m2) 24,1 (17,3-40) 24,3 (17,3-30) 23,9 (22,3-40) 0,8849 ASA score 2 3 4 6 (30%) 13 (65%) 1 (5%) 3 (33%) 6 (66%) 0 3 (27%) 7 (63%) 1 (9%) 0,642 Antécédents de bronchite chronique 5 (25%) 1 (11%) 4 (36%) 0,194 Antécédents de maladies cardiovasculaires 7 (35%) 2 (22%) 5 (45%) 0,279 Sevrage tabagique <6 mois 7 (38,9%) 2 (25%) 5 (50%) 0,28 VEMS (%) 80 (50-100) 85 (75-100) 75 (50-85) 0,1398 Score SOFA 13,8 (12-17) 13,8 (12-15) 13,7 (12-17) 0,8365 Fistule bronchopleurale 5 (25%) 2 (22%) 3 (27%) 0,795 Les résultats sont rapportés avec la moyenne et son intervalle, ou avec les effectifs et leurs pourcentages.   Tableau 4. Caractéristiques avant l’ECMO, pendant l’ECMO et après l’ablation de l’ECMO en fonction de la survie hospitalière. Variables Total (N=20) Survivants (N=9) Non-Survivants (N=11) p Avant implantation de l’ECMO Délai chirurgie-ECMO (jours) 9,6 (0-40) 8,7 (0-17) 10,2 (3-40) 0,7673 Délai intubation-ECMO (jours) 2,4 (0-7) 1,88 (0-7) 2,8 (1-5) 0,5078 PaO2 (mmHg) 71,1 (43-120) 62,4 (43-74,7) 78,1 (67,2-120) 0,0437 PaCO2 (mmHg) 58,4 (29-136) 64,6 (41,9-136) 53,2 (29-60,3) 0,2477 PaO2/FiO2 (mmHg) 81,1 (39-235) 65,5 (39-81) 93,9 (60-235) 0,1288 Pression artérielle moyenne (mmHg) 68 (44-94) 69,6 (57,2-94) 67,1 (44-75,9) 0,7085 Norépinephrine (mg/kg/min) 1,7 (0-6,5) 1,6 (0-6,5) 1,7 (0,2-3,1) 0,9383 FiO2 (%) 95 (70-100) 96 (90-100) 94 (70-100) 0,6491 VC (ml) 418 (220-550) 397 (220-469) 435 (396-550) 0,2821 PEP (cmH2O)   7 (3-12) 6 (3-8) 7 (5-12) 0,625 Durant l’ECMO Pression artérielle moyenne (mmHg) 80 (71-92) 81 (76,3-92) 78 (71-83,5) 0,4371 TCA (seconde) 1,8 (1,1-2,3) 1,8 (1,1-2,3) 1,8 (1,6-1,9) 0,9447 Débit de l’ECMO (l/min) 3,4 (2,4-4,8) 3,3 (2,4-3,8) 3,5 (2,9-4,8) 0,617 Balayage (l/min) 4,5 (1,1-7,2) 3,8 (1,1-4,8) 5,1 (4,3-7,2) 0,0368 CGR transfusés (unités) 16 (0-51) 10 (0-18) 21 (11-51) 0,0764 Concentrés plaquettaires (unités) 2 (0-11) 0,7 (0-2) 2,7 (0-11) 0,1448 PFC transfusé (unités) 6 (0-34) 3,1 (0-8) 8,5 (0-34) 0,2462 Épuration extrarénale 8 (40%) 1 (11%) 7 (63%) 0,017 PaO2 (mmHg) 102 (73-136) 104 (91-136) 100 (73-113) 0,6709 PaCO2 (mmHg) 42 (32-50) 42,8 (38-50) 40,9 (32-43) 0,3528 FiO2 (%) 53 (38-91) 47 (38-51) 58 (48-91) 0,0485 VC (ml) 329 (122-503) 316 (122-391) 340 (282-503) 0,5753 PEP (cmH2O) 5 (0,3-10) 5,5 (0,3-10) 4,9 (3,5-6,2) 0,5729 Chirurgie pour complication hémorragique   4 (20%) 2 (22%) 2 (18%) 0,822 Après ablation de l’ECMO Sevrage de l’ECMO 13 (65%) 9 (100%) 4 (36%) 0,003 Durée de l’ECMO 11 (1-29) 7 (1-14) 14 (8-29) 0,017 Extubation 10 (50%) 9 (100%) 1 (9%) 0,0001 Trachéotomie 4 (20%) 4 (44%) 0 (0%) 0,013 PaO2/FiO2 (mmHg) 263 (102-514) 266 (192-340) 255 (102-514) 0,8925 PaCO2 (mmHg)   45 (36-75) 42 (37-47) 51 (36-75) 0,2035 Les résultats sont rapportés avec la moyenne et son intervalle, ou avec les effectifs et leurs pourcentages.   3.3. Complications Aucune complication n’a été observée au cours de l’implantation de l’ECMO. Quatre patients (20%) ont nécessité une intervention chirurgicale pour des complications hémorragiques, 2 de ces patients sont décédés. L’un d’une coagulation intravasculaire disséminée en raison de saignements majeurs incontrôlables, malgré plusieurs reprises chirurgicales (sur site opératoire ainsi que sur le site de prélèvement du lambeau musculaire de grand dorsal), et l’autre d’une défaillance multi-organes compliquant un empyème pleural sur une volumineuse fistule bronchopleurale imposant une suture de la fistule associée à un lambeau musculaire de grand dentelé. Des complications hémorragiques identiques ont été observées dans la cavité pleurale et dans le site de prélèvement du lambeau musculaire. Les 2 autres patients étaient encore en vie 6 mois après leur sortie de l’hôpital. Pour ces 4 patients les complications sont survenues quelques jours après l’initiation de l’ECMO. Dans ces cas-là, une adaptation de l’anticoagulation était faite, soit par diminution de la cible du TCA de 1,5 à 2,0 fois la normale, soit en stoppant toute anticoagulation pendant 24 heures environ. Il n’a pas été observé d’autres complications, comme des accidents vasculaires cérébraux ou des embolies vasculaires. Les éventuelles phlébites en amont des canules n’étaient pas dépistées systématiquement. La recherche de thromboses veineuses ne se faisait que sur signes d’appel. Aucune phlébite ou embolie pulmonaire n’a été découverte dans les suites.   3.4. Récupération pulmonaire Avant l’insertion de l’ECMO, la PaO2/FIO2 moyenne était de 81 (intervalle de 39 à 235) mmHg et la PaCO2 moyenne était de 58 (intervalle de 29 à 136) mmHg, les patients étaient la plupart du temps en acidose respiratoire avec un pH moyen de 7,26 (intervalle de 6,95 à 7,49). Les patients qui ont survécu avaient une PaO2 significativement plus faible avant l’ECMO (62,4 vs 78,1 mmHg, p=0,0437) [tableau 4]. Les informations sur l’ECMO pendant le support sont détaillées dans le tableau 2. L’hypoxémie et l’hypercapnie ont toutes deux été corrigées après l’implantation de l’ECMO (PaO2 moyenne pendant l’ECMO : 102 mmHg vs avant l’ECMO : 71 mmHg, p=0,0003 ; PaCO2 moyenne pendant l’ECMO : 42 mmHg vs avant l’ECMO : 58 mmHg, p=0,0006). À l’ablation de l’ECMO, les fonctions pulmonaires avaient récupéré, la PaO2/FIO2 moyenne était de 263 (intervalle de 102 à 514) mmHg, nettement améliorées par rapport à avant la mise en place de l’ECMO (p=0,0001), et la PaCO2 moyenne était de 45 (intervalle de 36 à 75) mmHg, mais la différence n’était pas statistiquement significative comparée à avant l’introduction de l’ECMO [figures 1 et 2]. Avant l’insertion de l’ECMO, la FIO2 moyenne était de 95% (intervalle de 70 à 100%). Le VC moyen était de 418 ml (intervalle de 220 à 550 ml). La PEP moyenne était de 7 cmH2O (intervalle de 3 à 12 cmH2O). La pression de plateau moyenne n’a pas pu être évaluée en raison d’un nombre trop important de données manquantes. Dès la mise en place de l’ECMO, la FIO2 a pu être diminuée (FIO2 moyenne pendant l’ECMO : 53% vs avant l’ECMO : 95%, p=0,00015). Les patients qui ont survécu avaient une FiO2 significativement plus faible durant l’ECMO (47% vs 58%, p=0,0485) [tableau 4]. Les patients ont été ventilés avec une PEP moyenne sous ECMO de 5 cmH20 (intervalle de 0,3 à 10 cmH2O), avec également une diminution significative (p=0,0242). Il a également été observé une diminution significative du VC (VC avant l’ECMO de 418 ml vs VC durant l’ECMO de 329 ml, p=0,000707) [figure 3].   [caption id="attachment_4128" align="aligncenter" width="300"] Figure 1. Dynamique de l’échange d’oxygène : rapport de la pression partielle de l’oxygène dans le sang de l’artère radiale à la fraction d’oxygène inspiré (PaO2/FIO2).[/caption]   [caption id="attachment_4129" align="aligncenter" width="300"] Figure 2. Dynamique de la pression partielle du dioxyde de carbone dans le sang de l’artère radiale (PaCO2).[/caption]   [caption id="attachment_4130" align="aligncenter" width="212"] Figure 3. Comparaison des paramètres de ventilation mécanique avant insertion de l’ECMO avec ceux pendant l’ECMO pour mettre en place la ventilation protectrice.(A) : fraction d’oxygène inspiré (FIO2) ; (B) : volume courant (VC) ; (C) : pression expiratoire positive (PEP).[/caption]   4. Discussion Le SDRA survient dans moins de 3% des cas après RP [3]. Mais malheureusement sa mortalité reste élevée. Dans notre étude, la mortalité attendue a été estimée à partir du score SOFA [20]. Avec un score moyen de 13,8, le taux de mortalité corrélé est de 60%. La mortalité observée était de 55%, ce qui laisse suggérer une légère amélioration de la mortalité. À notre connaissance, il n’y a pas d’autre étude de cohorte axée sur les SDRA après RP traités par ECMO-VV. Le groupe de travail de Berlin a reconnu que la gravité du pronostic du SDRA est étroitement liée à la gravité de l’hypoxémie. Il a été défini un groupe de patients à haut risque, ayant une PaO2/FIO2 inférieure à 100 mmHg (classés comme SDRA sévère), pour lesquels le taux de mortalité moyen était de 45% [22]. L’un des premiers rapports concernant la mortalité des lésions pulmonaires aiguës (PaO2/FiO2 <300 mmHg) et des SDRA (PaO2/FiO2 <200 mmHg) postopératoires concernait des patients pris en charge entre 1991 et 1997. Les SDRA sont survenus chez 36 patients (3,1%) et leur taux de mortalité était de 72,2% (7 résections étendues, 10 pneumonectomies, 17 lobectomies et 2 résections mineures) [1]. Une étude a évalué la mortalité des SDRA après RP entre 2000 et 2005, avec une définition du SDRA comme ayant une PaO2/FiO2 inférieure à 200 mmHg. Les auteurs ont identifié 22 patients, avec un taux de mortalité de 45% (10 pneumonectomies, 6 lobectomies et 6 résections mineures). Trois patients ont été traités sans intubation, ce qui suggère que le critère d’une PaO2/FiO2 à 200 pourrait être trop permissif. Trois patients ont été pris en charge avec une ECMO veino-arterielle, avec un décès [7]. Une autre étude (de 2002 à 2004) mettant en commun les lésions pulmonaires aiguës et les SDRA a décrit un taux de mortalité de 40% pour des SDRA après RP [3]. Plus récemment (de 2005 à 2006), une étude a porté sur 7 patients présentant des SDRA sévères après RP, traités avec un système d’oxygénation par membrane extracorporelle sans pompe de type artérioveineuse (Novalung®) [15]. Le taux de mortalité était de 14% (n=1). Le patient est décédé avec le dispositif d’une défaillance multiviscérale. L’un des patients sevrés a nécessité une embolectomie artérielle ainsi qu’une plastie avec patch de l’artère fémorale commune canulée. Ce dispositif permet une amélioration significative des fonctions respiratoires (rapport PaO2/FIO2 et PaCO2), et aussi une diminution significative du VC, de la pression de plateau et de la PEP, permettant ainsi la récupération pulmonaire. Une diminution de FiO2 a été observée, mais la différence n’était pas significative. Dans cette étude, il y avait une majorité de pneumonectomies (n=5) avec seulement 2 lobectomies. La pneumonectomie est connue pour sa morbidité et sa mortalité. Selon la base de données nationale française (EPITHOR), la mortalité opératoire de la pneumonectomie pour le cancer du poumon est de 7,8% [23]. Récemment, Reeb et al. ont évalué l’intérêt de l’ECMO-VV dans les SDRA sévères post-pneumonectomie [14]. Au total, 8 patients (entre 2009 et 2015) avaient présenté un SDRA, avec une PaO2/FIO2 moyenne de 68 mmHg et un score SOFA moyen de 15. Le taux de mortalité prédit était supérieur à 80%. La mortalité observée était de 50%. Ce résultat souligne le probable intérêt de l’ECMO-VV chez ces patients gravement malades. Dans notre étude, le taux de mortalité est comparable à cette série. Avec une PaO2/FiO2 moyenne de 81 mmHg et un score SOFA moyen 13,8, notre population semble moins grave. Dans notre cohorte, un patient avec une PaO2/FIO2 de 235 mmHg a bénéficié de la mise en place d’une ECMO-VV après réunion de concertation pluridisciplinaire dans un contexte de SDRA compliquant un empyème sur une volumineuse fistule bronchopleurale. Le patient a dû être réopéré à plusieurs reprises pour des complications hémorragiques intrapleurales et site de prélèvement du lambeau musculaire. Malgré une hémodynamique stable, le patient est décédé d’une défaillance multi-organes dans les suites de l’opéartion. En dépit de ces observations, l’ECMO-VV dans ces indications offrirait une amélioration de la mortalité observée par rapport à la mortalité prédite. Le score SOFA est un outil validé dans l’estimation de la mortalité prédite. Mais cette mortalité prédite dépend du moment de la prise en charge où le score est calculé [24]. Dans cette étude, un score SOFA en début de prise en charge dépassant 11 prédit un taux de mortalité de 95%. Tandis que la plus grande valeur du score SOFA calculé pendant tout le séjour en réanimation, de 13 par exemple, prédit un taux de mortalité de 80%. Dans notre étude, le score SOFA moyen a été calculé juste avant l’insertion de l’ECMO, et de ce fait le taux de mortalité peut être sous-évalué. En outre, dans une autre étude qui a suivi prospectivement 85 patients atteints de SDRA pris en charge par ECMO, le score SOFA moyen calculé avant l’ECMO des 48 patients (56%) décédés à l’hôpital était de 10 (intervalle de 7 à 12). Tous les patients ayant un score SOFA dépassant 12 sont morts à l’hôpital [25]. Cette même étude a décrit 2 facteurs prédictifs de la mortalité concordant aux données de notre étude : l’âge et la nécessité d’une épuration extrarénale pendant l’ECMO. Le score IGS-II fournit une estimation intéressante du risque de décès sans avoir à spécifier un diagnostic primaire [26]. Ce score permet d’évaluer le taux de mortalité pour tous les patients admis en réanimation, et son calcul est effectué à l’admission. Avec un score IGS-II de 43,8, le taux de mortalité estimé est de 33%. Ce score est sans doute inapproprié car il sous-estime le taux de mortalité. Cela est probablement dû à un calcul du score à l’admission en réanimation, moment où les patients sont, pour la plupart, dans un état moins critique que durant les quelques heures précédant l’introduction de l’ECMO. Comme le montrent les études précédentes [14-15], l’ECMO-VV est pensée pour mettre le poumon endommagé au repos. Nos résultats corroborent ces données, mais nous déplorons un manque d’information concernant la pression de plateau, ce qui nous empêche d’interpréter ces données importantes. En effet, dans un de nos centres, la mesure de la pression de plateau n’était pas faite systématiquement. Depuis, les pratiques ont évoluées. Le résultat surprenant concernant les patients ayant une faible PaO2 avant introduction de l’ECMO et leur plus grande probabilité de survie pourrait être expliqué par le fait qu’ils puissent bénéficier davantage de l’ECMO. Par ailleurs l’analyse isolée de la PaO2 (sans la FiO2) ne peut être un facteur pertinent. Nos résultats concernant la survie à 6 mois suggèrent qu’une fois le SDRA traité, le pronostic des patients dépendrait d’avantage du stade TNM. Notre étude est limitée par la petite taille de la cohorte, et les différences globales de gestion des patients entre nos 2 réanimations différentes. Il semble évident qu’un centre effectuant en routine de la transplantation pulmonaire soit plus habitué à gérer une ECMO. Notre étude doit se poursuivre par une étude prospective et multicentrique afin de pouvoir conclure sur l’efficacité de cette thérapeutique.   5. Conclusion Cette étude a observé un taux de mortalité de 55% alors que le taux de mortalité prédit, estimé par le score SOFA, était de 60%. L’ECMO-VV garantit en toute sécurité des échanges gazeux satisfaisants, et permet la récupération pulmonaire en plaçant les poumons au repos. Et cela avec un taux de complication acceptable. Ces résultats ne permettent pas de conclure de l’efficacité de cette technique, et doivent se poursuivre par une étude prospective et multicentrique.   Références Kutlu CA, Williams EA, Evans TW, Pastorino U, Goldstraw P. Acute lung injury and acute respiratory distress syndrome after pulmonary resection. 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septembre 5, 2018