Chirurgie thoracique · Vol. 22 Mars 2018

Hernies hiatales après œsophagectomie. Étude francophone européenne multicentrique

Lucile Gust1, Philippe Nafteux2, Pierre Allemann3, Jean-Jacques Tuech4, Issam El Nakadi5, Denis Collet6, Diane Goere7, Jean-Michel Fabre8, Bernard Meunier9, Frédéric Dumont10, Gilles Poncet11, Guillaume Passot12, Nicolas Carrere13, Muriel Mathonnet14, Gil Lebreton15, Jérémie Theraux16, Frédéric Marchal17, Jack Porcheron18, Pascal-Alexandre Thomas1, Guillaume Piessen19, Xavier-Benoît D’Journo1*   1. Service de chirurgie thoracique, maladies de l’œsophage et transplantation pulmonaire, hôpital Nord, CHU de Marseille, France. 2. Service de chirurgie thoracique et des maladies de l’œsophage, KUZ Gathuisberg, Louvain, Belgique. 3. Service de chirurgie thoracique, centre hospitalier universitaire vaudois, Lausanne, Suisse. 4. Service de chirurgie digestive, CHU de Rouen, France. 5. Service de chirurgie digestive, hôpital Érasme, Bruxelles, Belgique. 6. Service de chirurgie digestive et endocrinienne, CHU de Bordeaux, France. 7. Département de chirurgie viscérale, institut Gustave Roussy, Villejuif, France. 8. Service de chirurgie digestive et transplantation, CHU de Montpellier, France. 9. Service de chirurgie hépatobiliaire et digestive, CHU de Rennes, France. 10. Service d’oncologie chirurgicale, institut de cancérologie de l’ouest, Nantes, France. 11. Service de chirurgie digestive, hôpital Édouard Herriot, Lyon, France. 12. Service de chirurgie digestive et endocrinienne, hospices civils de Lyon-centre hospitalier Lyon-Sud, France. 13. Service de chirurgie générale et digestive, CHU Purpan, Toulouse, France. 14. Service de chirurgie digestive, générale et endocrinienne, hôpital Dupuytren, Limoges, France. 15. Service de chirurgie viscérale et digestive, unité de chirurgie colorectale, CHU de Caen, France. 16. Service de chirurgie viscérale et digestive, CHU de Brest, France. 17. Département de chirurgie, institut de cancérologie de Lorraine, Nancy, France. 18. Service de chirurgie digestive et cancérologique, CHU de Saint-Étienne, France. 19. Service de chirurgie générale et digestive, CHU de Lille, France. *Correspondance : xavier.djourno@ap-hm.fr   DOI : 10.24399/JCTCV22-1-GUS Citation : Gust C, Nafteux P, Allemann P, Tuech JJ, El Nakadi I, Collet D, Goere D, Fabre JM, Meunier B, Dumont F, Poncet G, Passot G, Carrere N, Mathonnet M, Lebreton G, Theraux J, Marchal F, Porcheron J, Thomas PA, Piessen G, D'Journo XB. Hernies hiatales après œsophagectomie. Étude francophone européenne multicentrique. Journal de chirurgie thoracique et cardio-vasculaire 2018;22(1). doi: 10.24399/JCTCV22-1-GUS   Résumé Objectif : après œsophagectomie, le tube digestif peut s’incarcérer dans le hiatus autour de la plastie, réalisant une  hernie hiatale (HH) pouvant entraîner des syndromes occlusifs avec ischémie digestive. Méthodes : étude rétrospective multicentrique européenne francophone sur les HH après œsophagectomie : diagnostic, prise en charge chirurgicale et suites opératoires. Résultats : de 2000 à 2016, 19 centres ont réalisé 6608 œsophagectomies. Dans le suivi, 78 HH (1,2 %) ont été opérées. Elles apparaissaient  plus fréquemment après abord abdominal laparoscopique qu’après laparotomie (1,4 % vs 0,7 % ; p = 0,03). Elles sont survenues précocement (≤ 90 jours) pour 17 patients (21,5 %), la première année  pour 21 patients (26,6 %) et au-delà pour 41 (51,9 %),  (respectivement 13, 13 et 17 opérés en urgence). La voie d’abord de réparation était : la laparotomie (n = 35 ; 45 %), notamment en cas de résection digestive, la laparoscopie (n = 19 ; 24 %), un abord thoracique (n = 13 ; 17 %) ou une thoracophrénolaparotomie (n = 11 ; 14 %). Trente-six patients ont présenté des complications, dont un décès et 13 reprises chirurgicales. Huit patients ont présenté des récidives de HH (délai 6 jours-26 mois). Conclusion : les HH après œsophagectomie ont des présentations variables. Elles peuvent entraîner des complications thoraciques ou digestives, relevant d’une prise en charge spécialisée.   Abstract Hiatal hernia after esophagectomy: a survey of French-speaking European countries Introduction: After esophagectomy, part of the viscera can migrate through the hiatus to surround the gastric tube, creating hiatal hernias (HH) which eventually lead to abdominal occlusion and bowel ischemia. Methods: This retrospective multicenter study investigated the diagnosis, surgical management and follow-up of HH after esophagectomy in French-speaking European departments. Results: From 2000 to 2016, 19 departments performed 6608 esophagectomies. During follow-up, 78 cases of HH (1.2%) required surgery. These were more frequent after the laparoscopic approach than after laparotomy (1.4% vs. 0.7%; p = 0.03). The appearance of HH occurred during early follow-up (≤90 days) for 17 patients (21.5%), 21 underwent surgery during the first year (26.6%) and 41 after the first year (51.9%), with 13, 13 and 17 urgent surgeries, respectively. The surgical approaches included laparotomy (n = 35, 45%), especially when bowel resection was needed, laparoscopy (n = 19, 24%), a thoracic approach (n = 13, 17%) or a thoracophrenolaparotomy (n = 11, 14%). Complications arose in 36 patients, with one death and 13 secondary surgeries (three for secondary HH). Eight patients presented with recurrent HH (between 6 days and 26 months). Conclusion: Development of HH after esophagectomy can have a wide range of presentations, and can lead to thoracic or abdominal complications requiring specialized management.   1. Introduction L’œsophagectomie avec rétablissement de la continuité digestive à partir d’un substitut digestif autologue (gastrique, colique ou jéjunal) reste le traitement de référence des cancers de l’œsophage de stade précoce ou localement avancé dans le cadre d’une prise en charge multimodale [1,2]. Il s’agit d’une chirurgie à haut risque  s’accompagnant d’une forte morbidité respiratoire ou chirurgicale notamment anastomotique [3,4]. Parmi les complications chirurgicales, les hernies digestives au travers de l’orifice hiatal ont été rapportées. Ces hernies correspondent à la migration dans le thorax de tout ou partie du contenu abdominal au travers du hiatus diaphragmatique dans lequel se situe le passage du transplant digestif nécessaire à la reconstruction de l’œsophage. Les conséquences cliniques sont potentiellement graves pouvant aller de l’occlusion à la strangulation avec perforation. Longtemps asymptomatiques, ces hernies peuvent se révéler dans un contexte brutal à distance de la première chirurgie rendant leur prise en charge parfois difficile [5-7]. Il s’agit de complications relativement rares, souvent méconnues et donc sous-estimées, pouvant aboutir à de véritables urgences chirurgicales intéressant à la fois le chirurgien digestif mais aussi thoracique. L’amélioration de la survie des patients opérés d’un cancer de l’œsophage explique vraisemblablement l’augmentation de l’incidence de ces complications [5-8]. Par ailleurs, l’augmentation des approches minimalement invasives, connues pour créer moins d’adhérences postopératoires, a été évoquée comme un élément favorisant ce type de complications [9-11]. Nous rapportons l’expérience de plusieurs centres européens francophones concernant cette pathologie, du mode de diagnostic à la prise en charge et au suivi des hernies hiatales après œsophagectomie.   2. Patients et méthodes Il s’agit d’une étude rétrospective, multicentrique, réalisée auprès de 19 centres européens, participant au réseau FREGAT pour les centres français (base de données française des cancers œsogastriques) : un centre suisse (Lausanne), 2 centres belges (KUZ Louvain et Érasme à Bruxelles) et 16 centres français (Lille, Marseille, Bordeaux, Rouen, Villejuif, Montpellier, Rennes, Nantes, Lyon Édouard Herriot et Lyon-Sud, Toulouse, Limoges, Caen, Brest, Nancy et Saint-Étienne). Seuls trois services de chirurgie thoracique ont participé (Lausanne, Louvain et Marseille), alors que les autres sont des services de chirurgie viscérale. Le recueil des données a porté sur les patients opérés d’une hernie hiatale après œsophagectomie, quelle que soit l’indication, de manière rétrospective, à partir des dossiers médicaux des patients. Les données de l’œsophagectomie initiale (données démographiques, stade oncologique et données opératoires) ont été analysées, ainsi que le délai et le mode de diagnostic des HH, et enfin la prise en charge et les suites opératoires du traitement chirurgical de ces dernières. Le test de Chi2 a été utilisé pour la comparaison des variables qualitatives.     3. Résultats De 2000 à 2016, les 19 centres participants ont réalisé 6 608 œsophagectomies. Soixante-dix-neuf patients ont été identifiés comme ayant une hernie hiatale durant cette période, 78 opérés et un patient pour lequel une chirurgie était programmée au moment de la fin du recueil des données, soit une incidence de 1,2 %.   3.1. Œsophagectomie initiale [tableau 1] Les œsophagectomies initiales étaient le plus souvent réalisées par voie transthoracique, selon la technique de Lewis-Santy (52 patients soit 67 %). Neuf patients ont été opérés par œsophagectomie trois voies selon la technique de McKeown et 5 par voie transhiatale. Douze patients ont bénéficié d’une œsophagectomie par thoracophrénolaparotomie gauche, dont 11 dans le même centre.   Tableau 1. Données pré et postopératoires de l’œsophagectomie initiale. Œsophagectomie initiale Sexe 58 hommes 21 femmes Âge 57,7 ans ASA I 21 II 43 III 11 Tumeur Adénocarcinome 56 CE 13 DM 3 Reflux 6 Traitement néoadjuvant Aucun 23 Chimiothérapie 12 Radiochimiothérapie 32 Technique chirurgicale Technique Lewis-Santy 52 McKeown 9 TH 5 TPL gauche 12 Abord abdominal Cœlioscopie 49 (63 %) Laparotomie 29 (37 %) Plastie Gastrique 70 (89 %) Jéjunale 9 (11 %) Geste sur la plastie/le diaphragme Aucun 37 (47 %) Fermeture hiatus seule 3 (3,8 %) Fixation diaphragme 7 (8,9 %) Section pilier droit 9 (11,4 %)   Section pilier gauche 4 (5,1 %)   Section des deux piliers 10 (12,7 %)   Association de plusieurs gestes 2 (2,5 %)   Données manquantes 7 (8,9 %)   CE : carcinome épidermoïde ; DM : données manquantes ; TH : transhiatal ; TPL : thoracophrénolaparotomie.   La plupart des procédures réalisées étaient des procédures hybrides ou par voie totalement mini-invasives (MI) : 39 Lewis-Santy sur 52 (dont 2 MI), 8 McKeown sur 9 (dont 7 MI) et 2 œsophagectomies transhiatales. Au total 49 œsophagectomies sur 79, soit 62 % des patients, ont bénéficié d’une cœlioscopie éventuellement associée à une thoracoscopie lors de la chirurgie initiale. Une plastie gastrique a été réalisée dans plus de 88 % des cas (70 patients), dont 54 anastomoses intrathoraciques et 16 cervicales. Les autres patients ont bénéficié d’une plastie jéjunale avec réalisation d’une roux-en-y et anastomose intrathoracique. Des gestes additionnels sur la plastie, de type fermeture du hiatus, fixation au diaphragme, section d’un ou des deux piliers, n’ont été réalisés que pour moins de 50 % des patients.   3.2. Diagnostic de la hernie hiatale Les délais d’apparition des hernies digestives étaient très variables selon les patients. Ainsi, 17 hernies ont été diagnostiquées durant les 3 premiers mois du suivi (soit 21,5 %), dont 12 dans les 15 premiers jours. Durant la première année de suivi, 21 patients supplémentaires ont présenté une hernie hiatale (26,6 %). Enfin, plus de 50 % des patients ont été opérés de leur HH au-delà de la première année de suivi (41/79) [figure 1].   [caption id="attachment_3999" align="aligncenter" width="300"] Figure 1. Délai d’apparition des hernies hiatales par rapport à l’œsophagectomie initiale.[/caption]   Onze patients étaient asymptomatiques lors de la prise en charge mais présentaient de volumineuses HH contenant généralement des organes digestifs (grêle ou colon). La plupart des autres patients présentaient une association de symptômes aigus dont les plus fréquents étaient les syndromes occlusifs (n = 31) et les douleurs épigastriques (n = 26). D’autres symptômes étaient moins souvent retrouvés comme les douleurs thoraciques, la dysphagie ou la dyspnée  (respectivement 10, 11 et 8 patients) [figure 2].   [caption id="attachment_4000" align="aligncenter" width="300"] Figure 2. Symptômes aigus et chroniques lors du diagnostic de hernie hiatale.[/caption]   Dix-neuf patients présentaient des symptômes chroniques, associant essentiellement douleur épigastrique et dysphagie. Et 3 patients ont été pris en charge dans un contexte d’acutisation de symptômes chroniques, associant syndrome subocclusif et douleurs épigastriques.   3.3. Prise en charge de la hernie hiatale [figure 3] Dans près de 50 % des cas, les patients ont été opérés de leur hernie hiatale dans un contexte d’urgence (43/79). Plus le délai d’apparition entre œsophagectomie et hernie hiatale était court, plus le risque de réopération dans un contexte d’urgence était grand. Treize patients sur 17 ayant présenté une hernie digestive dans les 90 jours suivant l’œsophagectomie ont été opérés dans un contexte d’urgence (76,5 %), 13 sur 20 pour celles apparues entre 90 et 365 jours (65 %), et 17 sur 41 au-delà de la première année (41,5 %) [figure 4].   [caption id="attachment_4001" align="aligncenter" width="141"] Figure 3. Vues opératoires de la cure de hernie hiatale par thoracotomie gauche. A : présence de grêle dans la cavité thoracique gauche ; B : mise en place de points séparés pour la réparation du hiatus ; C : vue du hiatus en fin de réparation.[/caption]   [caption id="attachment_4002" align="aligncenter" width="300"] Figure 4. Proportion de chirurgies urgentes ou programmées en fonction du délai d’apparition de la hernie hiatale par rapport à l’œsophagectomie initiale.[/caption]   La voie d’abord de la chirurgie initiale et les circonstances de diagnostic influençaient le choix de la voie d’abord de la seconde chirurgie. Ainsi une cœlioscopie a été réalisée uniquement si le patient avait auparavant bénéficié d’un temps abdominal par voie cœlioscopique. Les patients opérés par laparotomie ont été repris dans 12 cas par laparotomie, 4 cas par thoracotomie gauche et une fois par vidéothoracoscopie (donnée manquante pour un patient). Enfin, 11 des 12 patients initialement pris en charge par thoracophrénolaparotomie gauche ont été réopérés par cette même voie. Au total 35 laparotomies, 19 cœlioscopies, 11 thoracophrénolaparotomies gauches, 11 thoracotomies, dont 10 à gauche et un à droite, et 2 thoracoscopies ont été réalisées. Trois cœlioscopies ont été converties en laparotomie, et 3 thoracotomies ont été élargies soit en phrénotomie (n = 1), soit en laparotomie (n = 2) [tableau 2].   Tableau 2. Données peropératoires de la prise en charge chirurgicale de la hernie hiatale. Chirurgie de la hernie hiatale Voie d'abord HH Voie d’abord      Temps initial Cœlioscopie Laparotomie TPL Laparotomie 23 12 0 Cœlioscopie 17 0 1 Thoracotomie gauche 6 4 Thoracotomie droite 1 0 VTC 1 1 TPL NA NA 11 Données manquantes 1 HH : hernie hiatale ; VTC : vidéothoracoscopie ; TPL : thoracophrénolaparotomie.   La voie d’abord privilégiée dans les situations d’urgence était la laparotomie, d’autant plus si une résection digestive était réalisée [figure 5]. Quatre résections de grêle ont été nécessaires, ainsi que 4 résections de colon, une résection partielle d’estomac et 2 réfections d’anastomose. L’ensemble des résections digestives ont été réalisées par laparotomie. Le hiatus quant à lui a été réparé par suture directe, éventuellement renforcée de patchs de Téflon pour 63 patients. Seuls 12 patients ont bénéficié de la mise en place d’une plaque.   [caption id="attachment_4003" align="aligncenter" width="300"] Figure 5. Voie d’abord de la cure de hernie hiatale en fonction de l’urgence de la prise en charge.[/caption]   La proportion d’œsophagectomie avec temps abdominal par laparotomie ou cœlioscopique était disponible pour 4 772 patients de notre cohorte, correspondant à 48 hernies digestives après œsophagectomie (incidence de 1 %). Dans cette population, une chirurgie ouverte avait été réalisée pour 3 010 patients (63,1 %) et une chirurgie par voie hybride ou totalement mini-invasive, c’est-à-dire un abord cœlioscopique pour 1 761 patients. Après laparotomie, 23 patients ont présenté une hernie soit une incidence de 0,73 % contre 25 après cœlioscopique, soit une incidence de 1,4 % (p = 0,03).   3.4. Suites opératoires [tableau 3] Un patient est décédé d’une défaillance multiviscérale, soit un taux de mortalité de 1,3 %. Trente-six patients ont présenté des complications (46 %), essentiellement d’ordre médical, et largement dominées par les complications pulmonaires. Treize reprises chirurgicales ont été nécessaires, dont trois pour récidive précoce de hernie hiatale. À long terme, 5 récidives supplémentaires ont été diagnostiquées. Soit un total de 8 récidives apparues dans un délai de 6 jours à 26 mois, avec un taux de 10,25 % dans notre série.   Tableau 3. Morbidité de la chirurgie de hernie hiatale. Complications chirurgicales Récidive précoce 3 2nd look 3 Éventration/Éviscération 2 Drainage simple 1 Hémopéritoine 1 Sténose ischémique du colon 1 Décortication 1 Multiples reprises pour VAC 1 Total 13 Complications médicales Pulmonaires 17 Sepsis 4 Cardiaque 4 Neurologiques 2 Digestives 3 Rétention aiguë d’urines 3   4. Discussion Notre série est la plus large publiée à ce jour s’intéressant aux hernies digestives après œsophagectomie. Elle retrouve une incidence de hernies opérées de 1,2 %, ce qui est semblable aux données de la littérature [11]. Cette pathologie se présente sous des aspects variables, à la fois du fait des symptômes très différents qui peuvent être rencontrés, mais aussi du fait des circonstances de diagnostic et du délai d’apparition.  Dans notre série les hernies digestives pouvaient apparaître soit très précocement dans les premiers jours suivant l’œsophagectomie initiale, soit plusieurs années après celle-ci. Les circonstances de diagnostic allant de hernies complètement asymptomatiques à des syndromes occlusifs nécessitant une prise en charge en urgence. Ces données expliquent l’incidence variable de cette complication dans la littérature, ainsi que leur prise en charge non standardisée. Ainsi, plusieurs points rendent la prise en charge des hernies hiatales complexe. D’une part, il s’agit d’une complication peu commune des œsophagectomies. Van Sandick et al. rapportaient que 18 cas avaient été décrits dans la littérature anglophone entre 1979 et 1997 [5]. Les grandes séries de hernies hiatales sont rares et ont été publiées par des équipes expertes, sur de longues périodes d’étude, ou proviennent de revue de la littérature parfois exposée aux biais de la sélection [7,11-13]. Selon le mode de détection des hernies digestives, soit diagnostiquées de manière systématique sur les scanners de suivi, soit uniquement les hernies symptomatiques et opérées, la littérature anglo-saxonne retrouve une incidence allant de 0,8 % à près de 20 % [tableau 4] [5-6,12-19]. Différents facteurs prédisposant ont été évoqués. Le plus important est sans doute la diffusion et l’utilisation croissante des techniques chirurgicales laparoscopiques et /ou vidéothoracoscopiques avec les œsophagectomies hybrides ou totalement mini-invasives [3,9-10]. La diminution des adhérences postopératoires associées aux techniques minimalement invasives, et notamment à la cœlioscopie pour l’abord abdominal, est l’un des facteurs le plus souvent évoqué dans la littérature pour expliquer l’incidence croissante de hernie hiatale [11,12,14,18,19].   Tableau 4. Revue de la littérature. Auteur Année Nombre patients Incidence Ouvert Hybride/MI Délai d'apparition (médiane) Chirurgie Récidive Van Sandick 1999 218 9 (4,1 %) NA NA 12 M [2 J-44 M] 6/9 (66 %) NA Kent 2008 1075 20 (1,9 %) 4 externes 4 (0,8 %) 16 (2,8 %) 32 M [46 J-7 A] 22/24 18 % urgence 6 (29 %) Price 2011 2182 15 (0,69 %) NA NA 21 M [3 J-2 A] 15/15 87 % urgence 2 (13 %) Sutherland 2011 36 TH robots 7 (19,5 %) NA NA [30 J-1 A] 100 % 2 (28,6 %) Willer 2012 39 5/39 (12,8 %) 0 5 (26 %) 18 M [3 M-20 M] 3/5 NA Ganeshan 2013 440 (suivi > 1 an) 67 (15 %) NA NA 24 M [47 J-9 A] 9/67 (13 %) NA Bronson 2014 114 9 (8 %) NA NA 14 M [2 J-97 M] 100 % 1 Benjamin 2015 120 (MI) 7 (5,8 %) NA NA 3,4M [1 M-45 M] 5/7 (71,4 %) 4 urgences 2 (23,3 %) Narayanan 2015 199 TH ouvert 9 (4,5 %) NA NA 29 M [4 M-8 A] 100 % 3 urgences 0 Matthews 2016 506 31 (6,1 %) 4 (1,8 %) 27 (9,5 %) [7 J-7 A] 30/31 7 (23,3 %) Crespin 2016 192 TH cœlio 22 (11,5 %) NA NA 7,5 M [2 J-97 M] 7/22 NA Brenkman 2017 657 45 (7 %) 19 (9 %) 21 (4,9 %) 20 M [0 J-101 M] 23/45 (51 %) 16 urgences 4 (15 %) Gust 2017 6608 79 (1,2 %) 23/3010 (0,7 %) 25/1761 (1,4 %) 13,6 M [1 J-16 A] 100 % 8 (10,25 %) MI : minimalement invasif ; NA : non applicable ; M : mois ; J : jour ; A : année : TH : transhiatal.   Dans notre série, l’incidence de hernie digestive après œsophagectomie semble être plus importante pour les patients ayant bénéficié d’un abord cœlioscopique. La proportion de chirurgie hybride ou totalement mini-invasive n’était malheureusement pas disponible pour l’ensemble de notre cohorte. Cependant, pour les 4 772 patients pour lesquels la voie d’abord initiale était disponible, on observait une différence statistiquement significative entre l’incidence de hernie digestive après abord laparoscopique : 1,4 % contre 0,7 % après laparotomie. L’élargissement du hiatus diaphragmatique semble être un autre facteur favorisant, d’autant plus qu’il est associé à des techniques mini-invasives [11,14,16,18]. Ainsi, une incidence augmentée de hernie hiatale après œsophagectomie transhiatale a été rapportée par plusieurs études. La plus parlante est celle de Sutherland rapportant leur expérience initiale d’œsophagectomies transhiatales robot-assistées. Dans cette étude, 7 patients sur 36, soit 19,5 %, ont été réopérés pour cure chirurgicale de hernie hiatale dans la première année suivant la chirurgie initiale. Il est aussi intéressant de noter qu’après modification de leur technique opératoire (fixation systématique de la plastie au hiatus et fermeture de celui-ci), les auteurs n’ont plus observé de hernie. D’autres facteurs prédisposant, non retrouvé dans notre étude, comme l’influence du BMI, restent controversés car les résultats sont contradictoires dans la littérature [6,15]. Certaines études, comme celle de Ganeshan et al, se sont intéressées au taux réel de hernie hiatale après œsophagectomie. Contrairement à la population, où seules les hernies opérées étaient prises en compte, Ganeshan et al. ont évalué de manière rétrospective l’incidence de hernie digestive après œsophagectomie [15]. Il retrouve un taux relativement plus élevé de 15 % que celui habituellement observé dans la littérature. Cependant, plus de la moitié des hernies digestives n’avaient pas été diagnostiquées initialement par le radiologue et n’ont été visualisées qu’à la relecture des images pour l’étude en question. L’étude de Ganeshan et al. met donc en évidence un double problème dans la prise en charge de ces hernies. D’une part la difficulté d’en faire le diagnostic de manière prospective, les scanners de réévaluation se focalisant sur les signes d’une éventuelle récidive de la maladie et peuvant ignorer ce problème. Et donc l’incidence probablement très sous-estimée de cette complication. D’autre part, la prise en charge à instaurer en cas de découverte fortuite de ces HH. Dans notre série, près de 50 % des patients ont été opérés en urgence, avec 9 cas de résections digestives, et un décès postopératoire. De plus parmi les prises en charge électives, certains patients étaient en fait des urgences différées devant la résolution des symptômes occlusifs, mais nécessitant une prise en charge chirurgicale à court terme. Quelle est la conduite à tenir pour les hernies hiatales de découverte fortuite, asymptomatiques, devant leur potentiel évolutif vers des situations d’urgence ? Cette prise en charge n’est pas codifiée. Du fait de la rareté de cette situation, les auteurs décrivent des prises en charge au cas par cas en fonction de l’espérance de vie des patients, de la maladie sous-jacente et de leurs souhaits. Au fur et à mesure que le délai entre hernie et œsophagectomie augmente, il semblerait que les circonstances de diagnostic se modifient. Ainsi, dans notre série, la majorité des opérations en urgence se faisaient lorsque le délai était court. Un cinquième des patients ont été réopérés dans un délai inférieur aux 90 premiers jours, dans des tableaux d’urgence le plus souvent. A contrario, environ 50 % de notre population étaient pris en charge avec un délai supérieur à 1 an, avec des tableaux plus chroniques. Nous émettons l’hypothèse qu’il s’agit en fait de deux populations différentes de patients : des hernies hiatales précoces en rapport avec un défaut technique ou une complication chirurgicale de l’intervention initiale. Hypothèse qui peut être soutenue par les résultats de l’étude de Sutherland, où la modification du geste chirurgical a permis une disparition de la complication à court terme. Ou une évolution naturelle de la plastie après œsophagectomie, dont l’incidence et le diagnostic augmentent du fait de l’augmentation de survie des patients atteints de cancer de l’œsophage. Ainsi la plastie et le contenu abdominal migrent progressivement vers le thorax, créant hernie digestive et redondance. Les résultats présentés dans cette série doivent cependant être analysés avec circonspection, devant les biais potentiels de l’étude. En effet, il s’agit d’une étude rétrospective, multicentrique, concernant des centres de référence des maladies de l’œsophage, recensant les cas déclaratifs et s’intéressant aux hernies opérées. Les hernies hiatales prises en charge dans des hôpitaux périphériques ne peuvent pas être prises en compte. Ceci peut minimiser à la fois l’incidence globale de cette complication, ainsi que la proportion de hernies prises en charge dans un contexte d’urgence.   5. Conclusion  Les hernies digestives après œsophagectomie sont des complications peu fréquentes mais non négligeables. Elles peuvent se présenter soit de manière précoce, souvent dans un contexte d’urgence, soit à plus long terme, évoluant à bas bruit. Ces complications peuvent nécessiter une approche thoracique ou abdominale pour leur réparation. Leur incidence semble en augmentation après chirurgie cœlioscopique et elles doivent être détectées dans le suivi à long terme. Compte tenu de l’essor des approches minimalement invasives, une fermeture systématique du diaphragme paraît recommandée pour les prévenir.   Références Shapiro J, Lanschot JJ, Hulshof M, van Hagen P, van Berge Henegouwen M, Wijnhoven B et al. Neoadjuvant chemoradiotherapy plus surgery versus surgery alone for oesophageal or junctional cancer (CROSS): long-term results of a randomised controlled trial. The Lancet Oncology 2015 Sep;16(9):1090-1098. https://doi.org/10.1016/S1470-2045(15)00040-6 D'Journo XB, Thomas PA. Current management of esophageal cancer. J Thorac Dis 2014 May;6(Suppl 2): S253-S264. Biere SS, van Berge Henegouwen MI, Maas KW et al. Minimally invasive versus open oesophagectomy for patients with oesophageal cancer: a multicentre, open-label, randomised controlled trial. Lancet 2012 May 19;379(9829):1887-1892. doi: 10.1016/S0140-6736(12)60516-9 https://doi.org/10.1016/S0140-6736(12)60516-9 Briez N, Piessen G, Torres F, Lebuffe G, Triboulet JP, Mariette C. Effects of hybrid minimally invasive oesophagectomy on major postoperative pulmonary complications. Br J Surg 2012 Nov;99(11):1547-1553. doi: 10.1002/bjs.8931. https://doi.org/10.1002/bjs.8931 Van Sandick J.W, Knegjens J.L, van Lanschot J.J.B, Obertop H. Diaphragmatic herniation following oesophagectomy. Br J Surg 1999;86:109-112. https://doi.org/10.1046/j.1365-2168.1999.00979.x Benjamin G., Ashfaq A., Chang Y-H., Harold K, Jaroszewski D. Diaphragmatic hernia post-minimally invasive esophagectomy: a discussion and review of the literature ? Hernia 2015;19:635-643. https://doi.org/10.1007/s10029-015-1363-8 Brenkman H, Parry K, Noble F, van Hillegersberg R, Sharland D, Goense L et al. Hiatal Hernia After Esophagectomy for Cancer. Ann Thorac Surg 2017 Apr;103(4):1055-1062. https://doi.org/10.1016/j.athoracsur.2017.01.026 Njei B, McCarty T.R, Birk J.W. Trends in Esophageal Cancer Survival in United States Adults from 1973 to 2009: A SEER Database Analysis. J Gastroenterol Hepatol 2016 Jun;31(6):1141-1146. https://doi.org/10.1111/jgh.13289 Haverkamp L, Seesing M, Ruurda JP, Boone J, v. Hillegersberg R. Worldwide trends in surgical techniques in the treatment of esophageal and gastroesophageal junction cancer. 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Ann Surg Oncol 2015 Oct;22(11):3681-3686. https://doi.org/10.1245/s10434-015-4366-x Crespin OM, Farjah F, Cuevas C, Armstrong A, Kim BT, Martin AV et al. Hiatal Herniation After Transhiatal Esophagectomy: an Underreported Complication. J Gastrointest Surg 2016 Feb;20(2):231-236. https://doi.org/10.1007/s11605-015-3033-7 Matthews J, Bhanderi S, Mitchell H, Whiting J, Vohra R, Hodson J et al. Diaphragmatic herniation following esophagogastric resectional surgery: an increasing problem with minimally invasive techniques?: Post-operative diaphragmatic hernias. Surg Endosc 2016 Dec;30(12):5419-5427. https://doi.org/10.1007/s00464-016-4899-5   Conflit d’intérêt : aucun. / Conflict of interest statement: none declared. Cet article est issu d'un mémoire de DESC. Date de soumission : 07/09/2017. Acceptation : 04/12/2017. Pré-publication : 15/12/2017.     
mai 18, 2018
Chirurgie thoracique · Vol. 21 Abstracts 2017

T-17 – Évaluation prospective des complications de l’œsophagectomie à partir des recommandations internationales de l’ECCG

Xavier-Benoît D’Journo, Lucile Gust, Ilies Bouabdallah, Joséphine Chenesseau, Hicham Masmoudi, Henri de Lesquen, Geoffrey Brioude, Delphine Trousse, Christophe Doddoli, Pascal-Alexandre Thomas Service de chirurgie thoracique, AP-HM, hôpital Nord, Marseille ; université d’Aix-Marseille   Objectif : Évaluation prospective des complications postopératoires à partir des recommandations internationales de l’Esophagectomy Complication Consensus Group (ECCG) sur les critères de qualité à respecter dans la description des complications de l’œsophagectomie. Méthode : Tous les patients opérés d’une œsophagectomie pour lésion bénigne ou maligne ont été inclus prospectivement de janvier 2015 à décembre 2016 dans cette étude. Chaque complication a été renseignée sur le site esodata.org en accord avec les critères de qualité et les définitions proposées par l’ECCG. La mortalité, le taux de réadmission et la sévérité de chaque complication (classification de Clavien-Dindo) ont été évalués. Résultat : Sur une période de 24 mois, 75 patients (61 H, 14 F) ont été opérés. L’âge moyen était de 60 ± 10 ans. L’œsophagectomie était réalisée pour cancer pour 70 patients (chirurgie d’emblée n = 26, après traitement d’induction n = 37, en situation de rattrapage n = 7), pour tumeur bénigne (n = 3) ou pour perforation (n = 2). Une chirurgie minimalement invasive avait été réalisée pour 44 patients (58 %). Cinquante patients (67 %) ont présenté au moins une complication. Parmi les principales : pneumonie (n = 14, 18,6 %) ; fistule du tube gastrique de type I (n = 3 ; 3 %) ou de type II (n = 12 ; 16 %) ; nécrose du conduit digestif type 2 (n = 1 ; 1,3 %) ou type 3 (n = 4 ; 5,3 %) ; paralysie récurrentielle de type 1a (n = 5; 6 %) ou de type 2 (n = 2 ; 2 %). Vingt-quatre patients (32 %) ont nécessité une réadmission en réanimation et 33 patients (44 %) au moins une transfusion sanguine. La gravité des complications (classification de Clavien) était de grade I : n = 5, II : n = 13, IIIa : n = 4, IIIb : n = 16, IVa : n = 5, V : n = 7). La mortalité à 30 jours était de 8 % (n = 6) et à 90 jours de 9,3 % (n = 7). La sortie pour le domicile concernait 52 patients (69,3 %) et 16 patients (21,3 %) sont sortis vers un centre de soins de suite. Le taux de réadmission à 30 jours était de 17 % (n = 12). Conclusion : Les critères de qualité et les recommandations de l’ECCG permettent une excellente description et une standardisation des complications après œsophagectomie. Son utilisation large pour rapporter ces complications devrait être systématique.     Prospective evaluation of post-esophagectomy complications based on the ECCG recommendations   Objectives: Prospective and unicentric evaluation of post-esophagectomy complications based on the Esophagectomy Complications Consensus Group (ECCG) recommandations quality/outcome measures recording. Methods: all the patients operated for an esophagectomy for benign or malignant disease were prospectively included from January 2015 and December 2016. All complications were recorded on esodata.org website based on ECCG definition. Postoperative mortality, severity grade according to Clavien-Dindo classification, readmission rate were assessed. Results: Over a 24-month period, 75 patients (61 M, 14 W) were operated on. Mean age was 60 ± 10 yeras. Esophagectomy were indicated for cancer in 70 patients (surgery alone n=26, after induction therapy n=37, or salvage n=7), for benign lesion (n=3) or for perforation (n=2). Minimally invasive surgery was performed in 44 patients (58%). Fifty patients (67%) developed complications. Among them : pneumonia (n=14, 18.6%) ; esophagogastric leak type I (n=3; 3 %) or type II (n=12 ; 16%) ; conduit necrosis type 2 (n=1 ; 1.3%) or type 3 (n=4 ; 5.3%); recurrent laryngeal nerve injury type 1a (n=5; 6%) or de type 2 (n=2; 2%). Twenty-four patients (32%) required a change in postoperative level of care and 33 patients (44%) required at least one blood product utilization. Severity of complications was as follow: grade I : n=5, II : n=13, IIIa : n=4, IIIb : n=16, IVa : n=5, V : n=7. Thirty-day and 90-day mortality rates was 8 % (n=6) and 9.3% (n=7). Fifty-two patients (69.3%) discharged to home whereas 16 patients (21.3%) discharged to other medical facility (rehab center). Readmission rate within 30 days of discharge was 17% (n=12). Conclusion: ECCG recommendations for quality/outcome measures recording provides an excellent descriptor of post-esophagectomy complications and allows standardization in reporting such complications. Worldwide utilization of these definitions is mandatory.   Séance : Communications libres thoracique - vendredi 9 juin - 8:00-10:00
mai 24, 2017
Chirurgie thoracique · Vol. 20 Abstract 2016

T-23 – Résultats à long terme des œsophagectomies (Lewis-Santy) par voie conventionnelle par rapport à la laparoscopie : analyse par score de propension

Xavier-Benoît D’Journo, Philippe Rinieri, Moussa Ouattara, Geoffrey Brioude, Anderson Loundou, Henri de Lesquen, Delphine Trousse, Christophe Doddoli, Pascal-Alexandre Thomas Service de chirurgie thoracique et des maladies de l’œsophage, hôpital Nord, université Aix-Marseille  Objectif L’œsophagectomie selon la technique de Lewis-Santy (LS) reste associée à une forte morbidité postopératoire justifiant le recours à des techniques mini-invasives. Néanmoins, les résultats oncologiques à long terme de la laparoscopie par rapport à la laparotomie ont été peu évalués.  Méthode Tous les patients qui ont eu une œsophagectomie de type LS pour cancer entre 2002 et 2014 ont été sélectionnés à partir d’une base de données prospective. Les patients ont été appariés un pour un (laparotomie versus laparoscopie), sur la base du score de propension calculé à partir d’une régression logistique incluant 8 variables. L’objectif primaire était l’évaluation de la survie globale et sans récidive à 5 ans. Les objectifs secondaires étaient l’évaluation de la qualité de la chirurgie (résection complète, nombre de ganglions réséqués) et les modalités de récidive dans les 2 groupes.  Résultat Sur une période de 12 ans, 379 œsophagectomies pour cancer ont été réalisées, dont 272 selon la technique de LS. Cent quarante patients ont été appariés en deux groupes homogènes (laparotomie et laparoscopie) à partir du score de propension. La médiane de suivi des patients vivants sans récidive était de 32 mois (1-104). La survie globale à 5 ans des groupes laparotomie et laparoscopie était respectivement de 65 % et de 73 % (p = 0,891). La survie sans récidive à 5 ans était de 48 % dans le groupe laparotomie et de 51 % dans le groupe laparoscopie (p = 0,912). Le taux de résection R0 des groupes laparotomie et laparoscopie était respectivement de 93 % et de 97 % (p = 0,441). Le nombre total de ganglions réséqués était de 22 ± 11 dans le groupe laparotomie et de 22 ± 10 dans le groupe laparoscopie (p = 0,902). Les modalités de récidive étaient similaires dans les deux groupes.  Conclusion La laparoscopie ne compromet pas les résultats oncologiques à long terme par rapport à une approche conventionnelle. La qualité de la chirurgie semble comparable dans les deux techniques, à l’exception des ganglions réséqués au niveau du tronc cœliaque. Des essais contrôlés randomisés restent nécessaires pour confirmer ces résultats.     Long-term outcome of open versus hybrid minimally invasive Ivor Lewis esophagectomy- a propensity match score study   Objectives Laparoscopic Ivor Lewis (IL) esophagectomy has been suggested to reduce postoperative morbidity and mortality. However, long-term outcomes of this hybrid minimally invasive procedure have been poorly reported.  Methods All the patients who had an IL esophagectomy for cancer were extracted from a prospective database. Patients were matched one-to-one according to the surgical approach (laparoscopy versus laparotomy) and on the basis of a propensity score including 8 variables: age, gender, FEV1, neoadjuvant treatment, salvage surgery, histology, location and p stage. The first end-point was the assessment of the 5-year survival and disease-free survival (DFS) rates. The secondary end-points were: 1) the quality of the surgery (R0 resection rate, number resected lymph nodes (LN); 2) the patterns of recurrence.  Results Over a 12-year period, 379 esophagectomies were performed among whom 272 were done using IL technique. 140 patients were matched in 2 homogeneous groups: laparotomy (n=70) and laparoscopy (n=70). The median follow-up for those alive and without recurrence at study end was 32 months (range, 1-104). The 5-year overall and DFS survival rates were 65% and 48 % in laparotomy group and 73% and 51 % in the laparoscopy group (p=0.891; p=0.912). R0 resection rates were respectively 93% versus 97% (p=0.441). The number and distribution of resected LN are presented in Table 1. At the time of review, 32 patients (23%) had developed a recurrence, and 33 patients (24%) had died. According to the surgical approach, the patterns of recurrence were similar in both groups.  Conclusion Laparoscopic IL esophagectomy does not compromise the long-term oncologic outcome compared to open IL. The quality of surgery seems similar in both techniques excepted for the number of resecetd LN at the level of the celiac trunk. Further randomized controlled trials are necessary to confirm these results.
juin 10, 2016
Chirurgie thoracique · Vol. 20 Abstract 2016

T-20 – Analyse des événements indésirables associés à l’utilisation de la vidéo en chirurgie thoracique : retour d’expérience de la base nationale REX

Xavier-Benoît D’Journo, Jean Bellamy, Marcel Dahan, Jean-Pierre Valverde, Thierry Caus, Michel David, Jean-Louis de Brux, Gérard Fournial, Jean-Pierre Frieh, Charles de Riberolles, Jean-Marc Frapier, Alain Rind, pour le groupe d’experts de l’organisme d’accréditation de la SFCTCV Hôpital Nord, université Aix-Marseille – Groupe d’experts de OA, SFCTCV  Objectif Le but de cette étude était de rapporter l’analyse des événements indésirables associés à l’utilisation de la vidéo en chirurgie thoracique (EIAVCT) à partir de la base de données nationale REX. La base REX est une plateforme Internet sous la supervision de la HAS permettant l’enregistrement prospectif des événements indésirables associés aux soins. L’enregistrement de 2 événements indésirables par an et par professionnel est nécessaire pour la démarche d’accréditation.  Méthode Toutes les déclarations volontaires d’EIAVCT (janvier 2013 - septembre 2015) ont été analysées rétrospectivement depuis la base REX.  Résultat Sur une période de 20 mois, 30 011 événements indésirables ont été déclarés sur la base REX, parmi lesquels 1 407 (4,6 %) étaient déclarés dans la spécialité de chirurgie thoracique et cardiovasculaire. Parmi eux, 68 (4,8 %) incluaient des EIAVCT. Les procédures vidéo incluaient : lobectomie (53 %), résection atypique (31 %), médiastin (7 %), péricarde (4 %), œsophage (2 %). Les EIAVCT étaient : plaie vasculaire (28 %), défection de la pince agrafeuse (15 %), identification des structures anatomiques (11 %), instrumentation de la vidéo (9 %), symphyse pleurale (6 %), trocart vidéo (5 %), chirurgie robotique (5 %). Les EIAVCT survenaient essentiellement en période peropératoire (86 %). 36 % des chirurgiens déclaraient avoir déjà vécu un EIAVCT similaire. La principale barrière d’atténuation ou de récupération était représentée par la thoracotomie de conversion (56 %). L’EIAVCT était considéré comme sévère dans 31 % des cas : majeur (18 %), critique (9 %) ou catastrophique (4 %). Les conséquences pour le patient étaient : conversion (25 %), aucune (19 %), prolongation de la durée de chirurgie (19 %), décès (5 %), infection (5 %).  Conclusion La majorité des EIAVCT déclarés concernait les lobectomies vidéo. Ils étaient majoritairement peropératoires, concernaient des plaies vasculaires, des défections de matériel ou d’identification des structures anatomiques. La thoracotomie représentait la barrière d’atténuation essentielle. Les conséquences des EIAVCT pouvaient être dramatiques et conduire au décès. Une déclaration systématique de ces EIAVCT devrait être la règle pour permettre l’édition de recommandations.     Analysis of VATS-related adverse events- feedback from the French national event reporting system in cardiothoracic surgery   Objectives The purpose of this study was to analyze the video-assisted thoracic surgery (VATS)-related adverse events (AE) among the French national event reporting system in cardiothoracic surgery.  Methods All voluntary report forms of AE related to planed VATS procedures from January 2013 to September 2015 were retrospectively extracted from the REX database. REX database is a national event reporting system under the supervision of the French national authority for health. Prospective reporting of AE is made through a dedicated online platform. Healthcare professionals are kept anonymous. Reporting of 2 AE/year/professional is nowadays required to be certified in thoracic surgery by the French health system authorities. Descriptive analysis of all VATS-related AE was conducted.  Results Over a 20-month period, 30 011 AE were declared to the REX database among which 1407 (4.6%) AE in cardiothoracic surgery. Among them, 68 (4.8%) involved VATS procedures. VATS procedures included: lobectomy (53%), wedge resection (31%), mediastinum (7%), pericardium (4%), oesophagus (2%). AE were: vascular injury (28%), failure of stapler device (15%), problems with specific VATS instrumentation (9%), pleural adherences (6%), error identification error of anatomical structures (6%), identification of parenchymal lesion (5%), problems with VATS-port (5%), specific AE with robotic surgery (5%). Majority of AE occurred during perioperative period (86%). Among surgeons, 36% declared to have experienced previously similar events. AE were corrected with conversion to open thoracotomy in 56% and under VATS in 9 %. AE were considered as severe in 31% (major in 18%, critical in 9% and catastrophic in 4%). AE consequences for the patient were: open conversion (25%), delayed operative time (19%), death (5%), infection (5%). AE had no consequence in 19%.  Conclusion Majority of VATS-related AE occurred after lobectomy. VATS procedures have specific AE. Majority of them are due to vascular injury, stapler device malfunction of VATS-instrumentation. Majority of AE required open conversion to be corrected. In some circumstances, VATS-related AE can be worrisome or catastrophic. Systematic declaration of AE should be the rule for guideline purposes.
juin 10, 2016
Chirurgie thoracique · Vol. 20 Juin 2016

Résultats à long terme des œsophagectomies selon la technique de Lewis Santy par voie conventionnelle par rapport à la laparoscopie : analyse par score de propension

Philippe Rinieri, Moussa Ouattara, Geoffrey Brioude, Anderson Loundou, Henri de Lesquen, Delphine Trousse, Christophe Doddoli, Pascal-Alexandre Thomas, Xavier Benoît D’Journo Service de chirurgie thoracique et des maladies de l’œsophage, hôpital Nord, CHU d’Aix-Marseille, Marseille Correspondance : xavier.djourno@ap-hm.fr   Résumé Introduction : L’œsophagectomie selon la technique de Lewis Santy (LS) est le traitement de référence des cancers du tiers inférieur de l’œsophage ou de la jonction œsogastrique (Siewert I and II), le plus souvent dans le cadre d’une approche multimodale. Cette chirurgie est associée à une forte morbidité postopératoire justifiant le recours à des techniques mini-invasives, essentiellement par laparoscopie pour en réduire le traumatisme. Néanmoins, les résultats oncologiques à long terme de la laparoscopie par rapport à la laparotomie ont été peu évalués. Méthodes : Tous les patients qui ont eu une œsophagectomie de type LS pour cancer entre 2002 et 2014 ont été sélectionnés à partir d’une base de données prospective. Les œsophagectomies totalement mini-invasives ont été exclues de l’étude. Les patients ont été appariés un pour un (laparotomie versus laparoscopie), sur la base du score de propension calculé à partir de la régression logistique incluant les variables dépendantes suivantes : âge, sexe, VEMS, traitement néoadjuvant, chirurgie de rattrapage, type histologique, localisation, stade pathologique. L’objectif primaire était l’évaluation de la survie globale et sans récidive à 5 ans selon la méthode de Kaplan-Meier. Les objectifs secondaires étaient l’évaluation de la qualité de la chirurgie (taux de résection complète, nombre et localisation des ganglions réséqués) et des modalités de récidive (locorégionale ou générale) dans les 2 groupes. Résultats : Sur une période de 12 ans, 379 œsophagectomies pour cancer ont été réalisées, dont 272 selon la technique de LS. Cent quarante patients ont été appariés en deux groupes homogènes (groupes laparotomie et laparoscopie) à partir du score de propension. La médiane de suivi des patients vivants sans récidive était de 32 mois (1-104). La survie globale à 5 ans des groupes laparotomie et laparoscopie était respectivement de 65 % et de 73 % (p = 0,891). La survie sans récidive à 5 ans était de 48 % dans le groupe laparotomie et de 51 % dans le groupe laparoscopie (p = 0,912). Le taux de résection R0 des groupes laparotomie et laparoscopie étaient respectivement de 93 % et de 97 % (p = 0,441). Le nombre total de ganglions réséqués était de 22 ± 11 (9 ± 6 ganglions abdominaux et 13 ± 8 ganglions médiastinaux) dans le groupe laparotomie et de 22 ± 10 (8 ± 5 ganglions abdominaux et 14 ± 8 ganglions médiastinaux) dans le groupe laparoscopie (p = 0,902). Au terme du suivi, 33 patients (24 %) étaient décédés. Trente-deux patients (23 %) ont eu une récidive tumorale : 24 récidives métastatiques et 8 récidives locorégionales isolées. Les modalités de récidive étaient similaires dans les deux groupes. Conclusion : La laparoscopie ne compromet pas les résultats oncologiques à long terme des œsophagectomies selon la technique de LS, par rapport à une approche conventionnelle. La qualité de la chirurgie semble comparable dans les deux techniques, à l’exception des ganglions réséqués au niveau du tronc cœliaque. Des essais contrôlés randomisés restent nécessaires pour confirmer ces résultats.   Abstract Long-term outcome of open versus hybrid minimally invasive Ivor Lewis esophagectomy: a propensity match score study  Introduction: Ivor Lewis (IL) esophagectomy is considered an effective procedure for the treatment of esophageal cancer and gastroesophageal junction, alone or after neoadjuvant treatment. Because of the high postoperative morbidity of the open procedure, hybrid minimally invasive techniques including a laparoscopic approach have been developed in order to reduce the surgical trauma. However, long-term outcomes of laparoscopy compared to laparotomy have been poorly reported. Methods: All the patients who had an IL esophagectomy for cancer between 2002 and 2014 were extracted from a prospective database. Patients operated on with total minimally invasive esophagectomy were excluded. The patients were matched one-to-one according to the surgical approach (laparoscopy versus laparotomy) on the basis of the propensity score calculated from the logistic regression including the following dependent variables: age, gender, FEV1, neoadjuvant treatment, salvage surgery, histology, location and pathological stage. The first end-point of the study was the assessment of the five-year survival and disease-free survival (DFS) rates (Kaplan-Meier method). The secondary end-points were: 1) the assessment of the quality of the surgery based on R0 resection rate, the number and distribution of resected lymph nodes (LN); 2) and the patterns of recurrence (locoregional or distant) in both groups. Results: Over a 12-year period, 379 esophagectomies were performed, among whom 272 were done using the IL technique. One hundred and forty patients were matched from the propensity score in two homogeneous groups: laparotomy (n=70) and laparoscopy (n=70). The median follow-up for those alive and without recurrence at study end was 32 months (range, 1-104). The five-year overall survival rate was 65% in the laparotomy group and 73% in the laparoscopy group (p=0.891). The five-year disease-free survival rate was 48% in the laparotomy group and of 51% in the laparoscopy group (p=0.912). The R0 resection rate was respectively 93% versus 97% between the laparotomy and laparoscopy groups (p=0.441). The number of resected LN was 22±11 (9±6 in the abdomen, 13±8 in the chest) in the laparotomy group and 22±10 (8±5 in the abdomen, 14±8 in the chest) in the laparoscopy group (p=0.902). At the time of review, 32 patients (23%) had developed a recurrence, and 33 patients (24%) had died. Of the 32 patients with evidence of recurrence, 24 had a distant recurrence and 8 had a locoregional recurrence. According to the surgical approach, the patterns of recurrence were similar in both groups. Conclusions: A laparoscopic approach to IL esophagectomy does not compromise the long-term oncologic outcome compared to the open approach. The quality of surgery seems similar in both techniques, except for the number of LN resected at the level of the celiac trunk in laparoscopy. Further randomized controlled trials are necessary to confirm these results.   1. INTRODUCTION L’œsophagectomie transthoracique selon la technique de Lewis Santy (LS) est le traitement de référence des cancers du tiers inférieur de l’œsophage ou de la jonction œsogastrique, le plus souvent dans le cadre d’une approche multimodale. [1,2]. La morbimortalité des œsophagectomies transthoraciques reste élevée malgré les progrès dans la prise en charge périopératoire [3]. Après ce type de chirurgie, la morbidité est de 30 à 50 % et la mortalité de 2 à 10 % [1]. Les complications les plus fréquentes sont respiratoires [4]. Compte tenu du nombre élevé d’événements respiratoires postopératoires et de la mortalité qui leur est liée, plusieurs techniques de chirurgies mini-invasives se sont développées pour en réduire le traumatisme particulièrement important dans ce type de chirurgie nécessitant des abords chirurgicaux multiples. Le principal intérêt clinique de la chirurgie mini-invasive est de réduire le stress chirurgical, de permettre une rééducation respiratoire efficace et d’autoriser une mobilisation précoce. La laparoscopie apparaît comme une alternative à la laparotomie. Ainsi, l’intervention de LS avec un premier temps par laparoscopie, tout en conservant le temps thoracique par une approche conventionnelle, a été introduite depuis une dizaine d’années avec des résultats prometteurs. D’après l’étude de Briez et al., un abord par laparoscopie diminuerait le risque de complications pulmonaires majeures et réduirait même la mortalité postopératoire tout en permettant de conserver la qualité de la résection chirurgicale si l’on tient compte de critères oncologiques traditionnels comme le nombre de ganglions réséqués ou le taux de résections complètes [5]. De nombreuses études ont essayé d’évaluer les résultats oncologiques des œsophagectomies mini-invasives, mais l’interprétation des résultats reste limitée compte tenu de l’hétérogénéité des techniques, des indications et des populations étudiées [4,6]. L’étude randomisée multicentrique française en cours (étude MIRO : œsophagectoMIe pour cancer paR voie conventionnelle ou cœliO-assistée) compare les interventions de LS avec thoracotomie, par laparotomie et par laparoscopie [7]. L’un des objectifs secondaires est l’évaluation à long terme des résultats oncologiques de ces deux techniques chirurgicales, mais les résultats ne sont pas encore connus. L’objectif principal de notre étude était d’évaluer à partir d’un appariement, les résultats à long terme des œsophagectomies selon la technique de LS avec le temps abdominal par laparoscopie par rapport à une approche conventionnelle.   2. MÉTHODES   2.1. Patients et méthodes Il s’agit d’une étude rétrospective monocentrique, à partir d’une base de données prospective. Cette étude en intention de traiter a reçu l’avis favorable du Comité d’éthique de recherche clinique de la Société Française de Chirurgie Thoracique et Cardio-Vasculaire (CERC-SFCTCV-2015-3-31-17-46-5-RiPh). Toutes les œsophagectomies pour cancer réalisées entre août 2002 et décembre 2014 ont été revues. Les patients qui ont eu une intervention de LS par laparotomie ou laparoscopie ont été inclus. Le choix de la voie d’abord dépendait de l’opérateur. Les œsophagectomies subtotales par voie gauche ou par trois voies (interventions de Mac Keown et d’Akiyama), les œsophagectomies totalement mini-invasives (vidéothoracoscopie et laparoscopie ou chirurgie robotique), les approches transhiatales et les œsopharyngolaryngectomies totales ont été exclues. Les patients ont été appariés sur la base d’un score de propension calculé à partir de la régression logistique incluant la variable dépendante (laparotomie ou laparoscopie) et les variables indépendantes (âge, sexe, score ASA, VEMS, traitement néoadjuvant, chirurgie de rattrapage, type histologique, localisation, stade pathologique). Les résultats des œsophagectomies selon la technique de LS, conventionnelles (groupe laparotomie) et mini-­invasives hybrides (groupe laparoscopie) ont été comparés. Le traitement néoadjuvant consistait en une chimiothérapie seule ou associée à une radiothérapie (45 grays). En cas de chirurgie de rattrapage, les patients étaient opérés après radiochimiothérapie exclusive, comprenant entre 50-60 grays. Les stades pathologiques étaient évalués selon la 7e édition de la classification TNM, publiée en 2009 par l’Union internationale contre le cancer. Les patients ont été revus en consultation à un mois postopératoire, puis tous les 6 mois avec une endoscopie œsogastrique et un scanner thoracoabdominal. En cas de suspicion de récidive, une confirmation histologique était systématiquement recherchée. Les survies étaient obtenues à partir des dates opératoires, de décès, de récidives et des dernières nouvelles (septembre 2015).   2.2. Critères de jugement L’objectif principal était l’évaluation de la survie globale et sans récidive à 5 ans selon la méthode de Kaplan-Meier. Les objectifs secondaires étaient l’évaluation de la qualité de la chirurgie (taux de résection chirurgicale complète, localisation et nombre des ganglions réséqués et envahis) et les modalités de récidive (locorégionale ou métastatique).   2.3. Description de la chirurgie Le temps abdominal comprenait l’exploration, la dissection du ligament gastrocolique en conservant l’arcade gastroépiploïque, le curage ganglionnaire, l’amorce de la tubulisation gastrique par une agrafeuse. En cas de laparoscopie, 5 à 6 trocarts étaient nécessaires et l’insufflation de CO2 était de 11 mmHg. En cas de laparotomie, une pyloroplastie ou pyloroclasie était systématique. Le temps thoracique était systématiquement réalisé par thoracotomie postérolatérale droite. Il comprenait la ligature du canal thoracique, l’œsogastrectomie polaire supérieure avec médiastinotomie postérieure monobloc, le curage ganglionnaire, la tubulisation gastrique, l’anastomose mécanique œsogastrique terminolatérale au sommet du thorax. Nos techniques chirurgicales répondaient aux critères de qualité en oncologie digestive (Thésaurus national de cancérologie digestive, Cancer de l’œsophage 01/03/2013). Tous les patients ont eu un curage ganglionnaire 2 champs étendu : abdominal (petite courbure, gastrique gauche, cœliaque, paracardial) et médiastinal (stations 2D, 4D, 7, 8 et 9). La préparation macroscopique de la pièce opératoire était systématiquement réalisée par le chirurgien avant envoi en anatomopathologie définitif en prenant soin d’identifier chaque groupe ganglionnaire, ainsi que les recoupes digestives.   2.4. Analyse statistique L’analyse statistique a été réalisée par un biostatisticien de notre institution avec le logiciel IBM SPSS Statistics version 20. Le score de propension a été réalisé sur les variables détaillées précédemment. Le test du log-rank a permis de comparer les courbes de survie établies par la méthode de Kaplan-Meier. Les résultats portant sur des variables continues sont exprimés sous forme de moyenne ± écart type ou par la médiane et l’écart interquartile. Les variables continues ont été comparées par un test de Student ou un test de Mann-Whitney. Les variables qualitatives ont été comparées par un test de Pearson Chi-square ou par un test exact de Fischer. Une valeur p inférieure à 0,05 était considérée comme statistiquement significative. Une analyse multivariée avec régression logistique selon un modèle de Cox avait pour objectif d’identifier des facteurs de risque de survenue d’un décès ou d’une récidive. Le choix des variables candidates à l’analyse multivariée s’est fait sur le critère de la valeur < 5 % en analyse univariée et sur les variables qui ont une relevance clinique (âge, ASA, pN+/pN-, rupture capsulaire, R0/R1).   3. RÉSULTATS   3.1. Description de la population Sur une période de 12 ans, 379 œsophagectomies pour cancer ont été réalisées dans le service, dont 272 œsophagectomies selon la technique de LS (179 techniques conventionnelles et 93 techniques mini-invasives hybrides). Deux groupes homogènes de 70 patients (groupe laparotomie et groupe laparoscopie) ont été obtenus à partir d’un score de propension incluant les 9 variables indépendantes. Les données démographiques, cliniques et histologiques des deux groupes sont résumées dans le tableau 1. De 2002 à 2008, les groupes laparotomie et laparoscopie comprenaient respectivement 39 et 38 patients. De 2009 à 2014, les groupes laparotomie et laparoscopie comprenaient respectivement 31 et 32 patients. Deux patients du groupe laparoscopie ont été convertis en laparotomie pour saignement. La mortalité à 30 jours postopératoires était de 5 % (4 patients dans le groupe laparoscopie et 3 patients dans le groupe laparotomie). La mortalité à 90 jours postopératoires était de 8,6% (6 patients dans chaque groupe). La médiane de suivi des patients vivants sans récidive était de 32 mois (1-104). Au terme du suivi, 33 patients (24 %) étaient décédés.   Tableau 1: Données démographiques, cliniques et histologiques (variables du score de propension) Total (n = 140) Laparotomie (n = 70) Laparoscopie (n = 70) Valeur p Âge (années) 61,1 ± 9 61 ± 9 61,1 ± 9 0,951 Sexe – Homme – Femme   113 27   54 16   59 11 0,284 Score ASA (1/2/3) – 1 – 2 – 3   23 88 29   14 40 16   9 48 13 0,346 VEMS (%) 90,4 ± 17,6 90,9 ± 17,4 89,8 ± 17,9 0,724 Chirurgie – Chirurgie d’emblée – Après traitement néoadjuvant – Chirurgie de rattrapage   68 63 9   36 30 4   9 48 13 0,798 Type histologique – Adénocarcinome – Carcinome épidermoïde   105 35   55 15   50 20 0,329 Localisation de la tumeur – Tiers inférieur – Tiers moyen   123 17   63 7   60 10 0,438 Stade pathologique – 0 – IA – IB – IIA – IIB – IIIA – IIIB – IIIC – IV   30 34 11 17 9 21 9 7 2   15 18 5 7 4 11 5 4 1   15 16 6 10 5 10 4 3 1 0,997   3.2. Survie globale et survie sans récidive à 5 ans La survie globale à 5 ans des 140 patients était de 69 %. La survie globale à 5 ans des groupes laparotomie et laparoscopie étaient respectivement de 65 % et de 73 % (p = 0,891) [figure 1]. La médiane de survie n’était pas atteinte dans les deux groupes.   [caption id="attachment_733" align="alignnone" width="300"] Figure 1 : Survie globale à 5 ans des 2 groupes[/caption]   La survie sans récidive à 5 ans des patients était de 49 %. La survie sans récidive à 5 ans des groupes laparotomie et laparoscopie était respectivement de 48 % et de 51 % (p = 0,912) [figure 2].   [caption id="attachment_734" align="alignnone" width="300"] Figure 2 : Survie sans récidive à 5 ans des 2 groupes[/caption]   3.3. Qualité de résection chirurgicale Le curage ganglionnaire est détaillé dans le tableau 2. Le nombre total de ganglions réséqués était de 22 ± 11 (9 ± 6 ganglions abdominaux et 13 ± 8 ganglions médiastinaux) dans le groupe laparotomie et de 22 ± 10 (8 ± 5 ganglions abdominaux et 14 ± 8 ganglions médiastinaux) dans le groupe laparoscopie (p = 0,902). Le taux de résection chirurgicale complète par laparotomie et par laparoscopie étaient respectivement de 93 % et de 97 % (p = 0,441). Aucun patient n’a eu de résection R2. Cinq patients du groupe laparotomie ont eu une résection R1 : infiltration tumorale du tissu adipeux périganglionnaire gastrique gauche (n = 2) et médiastinal (n = 1) et envahissement tumoral de la collerette œsophagienne (n = 2). Deux patients du groupe laparoscopie ont eu une résection R1 : envahissement tumoral de la collerette œsophagienne (n = 2).   Tableau 2: Curage ganglionnaire Total (n = 140) Laparotomie (n = 70) Laparoscopie (n = 70) Valeur p Nombre total de ganglions réséqués 22,2 ± 11 22,3 ± 11 22 ± 10 0,902 Nombre de ganglions médiastinaux réséqués – paratrachéal – souscarinaire – para-œsophagien supérieur et moyen – para-œsophagien inférieur 13,8 ± 8 4,6 ± 5 3,9 ± 3 2,4 ± 2 2,9 ± 3 13,2 ± 8 4,3 ± 5 3,6 ± 3 2,1 ± 2 3,1 ± 3 14,4 ± 8 5 ± 5 4,1 ± 3 2,6 ± 2 2,7 ± 2 0,357 0,371 0,315 0,232 0,332 Nombre de ganglions abdominaux réséqués – cœliaque – gastrique gauche – petite courbure – cardia 8,4 ± 5 1,3 ± 3 3,7 ± 3 1,8 ± 3 1,8 ± 2 9,2 ± 6 2,2 ± 3 3,3 ± 3 1,9 ± 2 1,8 ± 2 7,7 ± 5 0,5 ± 1 4 ± 4 1,4 ± 1 1,7 ± 3 0,105 < 0,001* 0,248 0,282 0,914 Nombre de ganglions envahis – médiastin – abdomen 1,2 ± 3 0,8 ± 1 0,7 ± 2 1,2 ± 2,71 0,6 ± 1,42 0,6 ± 1,67 1,1 ± 2 0,3 ± 1 0,8 ± 2 0,770 0,217 0,643 Ganglions prélevés et envahis, test de Soudent sauf * test de Mann-Whitney.   3.4. Récidives tumorales (locorégionales et/ou métastatiques) Trente-deux patients ont eu une récidive tumorale au cours du suivi [tableau 3]. Huit patients (6 %) ont eu une récidive locorégionale isolée [tableau 4] : anastomose œsogastrique (n = 2) et adénopathies médiastinales ou abdominales (n = 6). Le taux de récidive locorégionale des groupes laparotomie et laparoscopie était de 7 % et de 4 % (p = 0,719). Vingt-quatre patients ont eu une récidive métastatique : métastases hépatiques, pulmonaires, pleurales, péritonéales, cérébrales, osseuses et cutanées. Le taux de récidive métastatique des groupes laparotomie et laparoscopie étaient de 16 % et de 19 % (p = 0,826).   Tableau 3: Récidive tumorale. Total (n = 140) Laparotomie (n = 70) Laparoscopie (n = 70) Valeur p Récidive locorégionale isolée (%) – périanastomotique – ganglions médiastinaux – ganglions abdominaux 8 (6) 2 4 2 5 (7) 2 1 2 3 (4) 0 3 0 0,719 Récidive métastatique (%) 24 (17) 11 (16) 13 (19) 0,826   Tableau 4 : Caractéristiques des patients qui ont une récidive locorégionale isolée (non métastatique) Patient Sexe Âge Chirurgie Temps abdominal Histologie p stade pN Résection Récidive Délai de récidive 1 H 64 Néo laparotomie Epi IIA N- R0 ANAST 44 mois 2 H 60 Néo laparotomie ADK IIA N- R0 GG THO 28 mois 3 H 43 C laparoscopie Epi IA N- R0 GG THO 11 mois 4 H 55 Rattrap laparoscopie ADK IIIA N+ R0 GG THO 9 mois 5 F 56 C laparotomie Epi IA N- R0 ANAST 48 mois 6 H 67 Neo laparoscopie Epi 0 N- R0 GG THO 8 mois 7 H 67 C laparotomie ADK IIIC N+ R1 GG ABDO 1 mois 8 H 56 Néo laparotomie ADK IIIA N+ R0 GG ABDO 16 mois H : homme, F : femme, C: chirurgie première d’emblée, Néo : traitement néo adjuvant, Rattrap : chirurgie de rattrapage, Epi : carcinome épidermoïde, ADK : adénocarcinome, ANAST : anastomose œsogastrique, GG :ganglions   3.5. Analyses multivariées des facteurs affectant la survie et la survie sans récidive Aucun facteur significatif ne semblait affectait la survie [tableau 5]. Le seul facteur de risque affectant la survie sans récidive était la rupture capsulaire [tableau 6].   Tableau 5: Analyse multivariée des facteurs affectant la survie Ords ratio IC 95 % Valeur p Âge 1,035 0,996-1,075 0,076 ASA 1,102 0,628-1,931 0,735 pN+ 0,773 0,291-2,053 0,606 Rupture capsulaire 2,437 0,682-8,709 0,170 Résection R1 0,944 0,192-4,637 0,943 Tableau 6 : analyse multi variée des facteurs affectant la survie sans récidive   Ords ratio IC 95% Valeur p Âge 1,009 1,389-7,254 0,516 ASA 1,178 0,768-1,803 0,454 pN+ 1,299 0,661-2,552 0,448 Rupture capsulaire 3,174 1,389-7,254 0,006 Résection R1 1,138 0,401-3,229 0,808   4. DISCUSSION L’intérêt des voies mini-invasives par rapport aux voies conventionnelles dites « ouvertes » a été suggéré récemment pour différents types d’interventions chirurgicales majeures oncologiques. L’intérêt de ces voies d’abord est en cours d’évaluation pour le cancer du poumon (chirurgie thoracique vidéo-assistée (VATS) ou robot-assistée (RATS) [8]. L’intérêt postopératoire des voies mini-invasives en chirurgie de l’œsophage a été récemment rapporté par deux essais randomisés, l’un dédié à la chirurgie totalement vidéo-assistée [9], l’autre consacré à une technique hybride comportant une laparoscopie (essai MIRO en cours de publication) [7]. Il ressort de la littérature actuelle que l’utilisation de la laparoscopie permettrait une réduction significative de la morbimortalité respiratoire des œsophagectomies. Les pneumopathies postopératoires et le syndrome de détresse respiratoire aiguë (SDRA) sont les complications les plus fréquentes et graves après œsophagectomie (première cause mortalité à 90 jours) [2]. De plus, il existe une corrélation entre les complications postopératoires et la survenue d’une récidive tumorale [10]. Si le bénéfice postopératoire de ces voies mini-invasives ne fait plus de doute, les résultats oncologiques à long terme de ces techniques sont en revanche bien moins connus. Les principales cohortes chirurgicales d’œsophagectomies mini-invasives publiées à ce jour sont hétérogènes quant aux techniques utilisées [4,6]. En attendant les résultats de l’essai randomisé MIRO [7] sur la survie à long terme de la voie laparoscopique, notre étude suggère que la laparoscopie ne compromettrait pas les résultats oncologiques par rapport à la voie conventionnelle « ouverte ». La survie sans récidive à 5 ans de notre série (49 %) est comparable à celle de du Rieu et al. (51 %) [11]. En revanche, la survie globale à 5 ans de notre série est supérieure à celle de du Rieu et al. (69 % contre 49 %), qui est plus ancienne [11]. Les progrès récents dans la prise en charge des récidives tumorales expliquent probablement cette différence. Notre série ne retrouve pas de différence significative de survie globale à 5 ans entre les groupes laparotomie et laparoscopie. La méta-analyse de Dantoc et al. ne montrait également pas de différence significative de survie globale à 5 ans entre les œsophagectomies conventionnelles et mini-invasives, mais le groupe mini-invasif était techniquement très hétérogène [12]. Dans notre étude, le taux de résection chirurgicale complète des groupes laparotomie et laparoscopie était comparable. Le taux de résection R0 des groupes laparotomie et laparoscopie était également comparable dans l’étude de Briez et al. avec respectivement 87,9 % et 85,7 % de résection R0 (p = 0,483) [5]. Le nombre total de ganglions réséqués par laparotomie et par laparoscopie était similaire dans notre étude, à l’exception du nombre de ganglions cœliaques qui est inférieur en laparoscopie. Cette différence peut s’expliquer par le fait que par laparoscopie, l’artère gastrique gauche est agrafée au ras du tronc cœliaque avec un curage du tronc cœliaque, de la faux de l’artère hépatique et de l’origine de l’artère splénique relativement plus complexe qu’en laparotomie. A contrario, la méta-analyse de Dantoc et al. retrouve un nombre de ganglions réséqués par voie d’abord mini-invasive plus élevé que par technique conventionnelle [12]. Ces centres, experts en chirurgie mini-invasive, réalisent des curages ganglionnaires radicaux par voie d’abord mini-invasive. De plus, la préparation de la pièce opératoire « sur table » permet d’augmenter le nombre de ganglions analysés par les anatomopathologistes. Le taux de récidives tumorales (locorégionale et/ou métastatique) de notre série (23 %) semble inférieure à celle de du Rieu et al. (44 %) et de Lou et al. (38 %) [11,13]. Cette différence du taux de récidive tumorale peut s’expliquer par une durée de suivi plus courte dans notre étude. Les œsophagectomies totalement mini-invasives (laparoscopie et vidéothoracoscopie) ont été exclues de l’étude, car elles représentent la déclinaison ultime du concept de chirurgie mini-­invasive [14]. Le premier essai contrôlé randomisé comparant œsophagectomies conventionnelles et totalement mini-invasives, par laparoscopie et vidéothoracoscopie (étude TIME), a montré une diminution de la morbidité opératoire sans compromettre la qualité de la résection chirurgicale (nombre de ganglions et taux de résection R0) [9,15]. Une méta-analyse récente, comparant les œsophagectomies conventionnelles et totalement mini-invasives, a retrouvé un nombre de ganglions réséqués et une survie globale à 5 ans comparables pour les deux techniques chirurgicales [12]. L’étude TIME et la méta-analyse de Dantoc et al. sont hétérogènes et concernent des patients qui ont eu une œsophagectomie totalement mini-invasive, mais selon différentes techniques opératoires (œsophagectomies transhiatales ou selon la technique de LS ou de Mac Keown modifié). La chirurgie robotique se développe, mais ses résultats ne sont pas encore suffisamment matures [16,17]. Les études randomisées en cours (TIME et ROBOT) permettront d’évaluer les résultats à long terme de ces différentes techniques totalement mini-invasives [15,18].   4.1. Limites de l’étude Les patients n’étaient pas randomisés, mais ont été appariés selon un score de propension, afin de pouvoir comparer des groupes homogènes et contemporains. Nous avons choisi le pTNM comme variable du score de propension et non le cTNM, car le bilan d’extension des cancers œsophagiens a évolué au cours des dernières années, avec notamment l’utilisation systématique du Pet-scanner. De plus, l’utilisation du pN a permis l’appariement des patients en fonction du nombre de ganglions envahis.  Les cancers de la jonction œsogastrique (Siewert I ou II) n’ont pas été différenciés des cancers du tiers inférieur de l’œsophage thoracique, ce qui a pu induire un biais de sélection. Les patients ont été inclus à partir d’août 2002 (date de la première intervention de LS mini-invasive hybride), afin d’éliminer un biais de prise en charge périopératoire. Il existe néanmoins un biais lié à la courbe d’apprentissage des techniques mini-invasives. Les deux patients convertis en laparotomie font partie du groupe laparoscopie, car l’étude était en intention de traiter. La morbidité opératoire et les scores de qualité de vie n’ont pas été étudiés, car l’objectif de l’étude était de comparer les résultats oncologiques à long terme des interventions de LS réalisées par laparotomie et par laparoscopie.   5. CONCLUSION La laparoscopie ne compromet pas les résultats oncologiques à long terme des œsophagectomies selon la technique de LS, par rapport à une approche conventionnelle. La survie globale et sans récidive à 5 ans des interventions de LS conventionnelles et mini-invasives hybrides sont comparables. La qualité de la chirurgie semble également comparable dans les deux techniques. Le taux de résection R0 et le nombre total de ganglions réséqués par laparotomie et par laparoscopie étaient similaires dans notre étude, à l’exception du nombre de ganglions cœliaques qui est inférieur en laparoscopie. Des essais contrôlés randomisés sont néanmoins nécessaires pour évaluer les résultats à long terme des œsophagectomies conventionnelles et mini-invasives.   RÉFÉRENCES Mariette C, Piessen G, Triboulet J-P. Therapeutic strategies in oesophageal carcinoma: role of surgery and other modalities. Lancet Oncol 2007;8:545-53. D’Journo XB, Thomas PA. Current management of esophageal cancer. 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juin 3, 2016