Henri de Lesquen* (recueil des données, écriture, statistiques), Ilies Bouabdallah (recueil des données), Diane Mège (Statistiques), Charles-Henri David (recueil des données), Joséphine Chenesseau (recherche bibliographique), Lucile Gust (relecture), Geoffrey Brioude (relecture), Delphine Trousse (relecture), Xavier Benoît D’journo (relecture), Christophe Doddoli (opérateur, relecture), Pascal Alexandre Thomas (directeur, opérateur, relecture)
Service de chirurgie thoracique, maladies de l’œsophage et transplantation pulmonaire. APHM
* Correspondance : henridelesquen@gmail.fr
DOI : 10.24399/JCTCV21-4-DEL
Citation : De Lesquen H, Bouabdallah I, Mège D, David CH, Chenesseau J, Gust L, Brioude G, Trousse D, D’Journo XB, Doddoli C, Thomas PA. Lancement d’un programme de chirurgie thoracique robot-assistée : étude de la sécurité des soins et de la qualité dans le cadre de la courbe d’apprentissage. Journal de chirurgie thoracique et cardio-vasculaire 2017;21(4). doi: 10.24399/JCTCV21-4-DEL
Résumé
Objectif : comparer l’expérience initiale de chirurgie robotique (RATS) avec celle d’un programme de chirurgie vidéo-assistée (VATS) établi.
Méthodes : les résultats précoces de 76 patients opérés d’une lobectomie pour cancer selon une technique VATS par le chirurgien le plus expérimenté ont été comparés aux résultats de 87 patients opérés avec une technique RATS par un seul chirurgien pendant 24 mois.
Résultats : le temps opératoire était plus long dans le groupe RATS (moyennes : 134,5 ± 37,7 min vs 154,2 ± 47,3 min ; p = 0,004). La morbidité globale était similaire (43,4 % vs 39,1 %, p = 0,57). Cinq patients dans le groupe VATS ont nécessité des transfusions sanguines et 1 dans le groupe RATS (p = 0,12). Les taux de réadmission à 90 jours étaient similaires (3,9 % vs 6,9 % ; p = 0,38). Les taux de mortalité à 90 jours étaient de 2,6 % et 0 % (p = 0,12). Un plus grand nombre de ganglions N2 étaient prélevés dans le groupe VATS (moyennes : 9,92 ± 5,41 vs 6,24 ± 5,584 ; p < 0,0001). La proportion d’une réévaluation à la hausse du stade ganglionnaire était similaire dans les deux groupes (16 % vs 13 % ; p = 0,65).
Conclusion : la technique RATS dès ses débuts semble être aussi sûre et efficace que la technique VATS pour la période postopératoire de 90 jours.
Abstract
Launching a successful robotic thoracic surgery program: a focus on safety and quality in a learning curve setting
Introduction: The purpose of this study was to compare our initial experience with RATS pulmonary lobectomy with that of our well-established VATS program.
Methods: We compared the early outcomes of those 81 patients having had a 3-port full thoracoscopic lobectomy performed by the most experienced VATS surgeon with those 91 patients having had a 3-arm RATS lobectomy performed by a single surgeon during a 24-month period.
Results: Operative time was longer in the RATS group (mean: 134.5 ± 154.2 minutes vs. 37.7 ± 47.3 minutes; p = 0.004). Overall morbidity was similar (43.4% vs. 39.1%; p = 0.57). Five patients in the VATS group required blood transfusions and only one in the RATS group (p = 0.12). Readmission rates at 90 days were similar (3.9% vs. 6.9%; p = 0.38). The 90-day mortality rates were 2.6% and 0% (p = 0.12). More N2 nodes were removed in the VATS group (mean: 9.92 ± 5.41 vs. 6.24 ± 5.584; p < 0.0001). The proportion of lymph node upstaging was similar in both groups (16% vs. 13%; p = 0.65).
Conclusions: Our early experience of pulmonary lobectomy by RATS appears to be as safe and more mature than VATS, with regards to the 90-day postoperative period.
1. Introduction
La chirurgie thoracique robot-assistée est en plein essor : aux États-Unis, entre 2008 et 2010, elle a permis la réalisation de 0,2, 1,2 % puis 3,4 % des lobectomies. En 2011, la Haute Autorité de santé recensait en France 39 centres équipés d’un robot, alors que cinq ans plus tard 99 établissements en étaient dotés.
Cette étude s’inscrit dans le cadre de l’évaluation de nos pratiques cliniques. Ainsi, il est apparu opportun d’évaluer le programme de chirurgie robotique débuté en 2013. Notre service compte quatre chirurgiens seniors certifiés, deux chirurgiens VATS (Video-Assisted Thoracic Surgery) et deux chirurgiens RATS (Robot-Assisted Thoracic Surgery), et illustre un programme de chirurgie minimalement invasive à maturation avec la réalisation de 2013 à 2015 de 459 lobectomie dont quasiment les 2/3 par voie minimalement invasive (chirurgie ouverte : n = 166, soit 36 % ; VATS : n = 179, soit 39 % ; RATS : n = 114, soit 25 %, données de la base locale EPITHOR).
L’objectif de cette étude est d’évaluer la qualité et la sécurité accordées par l’utilisation de cette technique minimalement invasive, appelée ici RATS, en comparant la cohorte de lobectomies pour cancer opérée par le premier chirurgien RATS du service dès ses débuts, aux procédures effectuées par l’opérateur VATS le plus expérimenté sur la même période.
2. Patients et méthodes
Ce protocole a été soumis au Comité d’éthique de la Société français de chirurgie thoracique et cardiovasculaire (référence : CERC-SFCTCV-2016-9-14-16-29-31-deHe).
2.1. Dessin de l’étude
Il s’agit d’une étude monocentrique, rétrospective basée sur un renseignement prospectif des données dans la base locale EPITHOR®. La période d’inclusion débute en octobre 2013, date de la première lobectomie RATS à la suite de l’installation d’un robot DaVinci Si® (Intuitive Surgical, Inc., Sunnyvale, Californie, États-Unis) au CHU Marseille-Nord et se termine en octobre 2015. Tous les patients opérés d’une lobectomie élective pour une suspicion de cancer pulmonaire par une technique minimalement invasive par les deux chirurgiens (PT et CD) ont été inclus. (PT, n = 76 ; CD, n = 87). Il s’agissait de patients porteurs de lésions secondaires ou primitives de stade cIA-B et en cas de comorbidités respiratoires de lésions de stade cIIA, voire cIIB-IIIa pour lesquels une évaluation ganglionnaire médiastinale préopératoire avait éliminé une situation N2. La technique vidéo-assistée utilisait, par une approche postérieure, 3 trocarts en triangulation axillaire de 10,5 mm, 11,5 mm postérieur et 25 mm sans écartement costal, et un optique 30°. La dissection était faite au dissecteur ultrasonique. La progression « fissure less » ou « fissure first » était choisie en fonction des constatations anatomiques peropératoires. La technique robot-assistée employait 3 bras en alignement avec une légère triangulation, un trocart « assistant » de 12 mm et un optique de 30°. Le docking s’effectuait par le haut du chariot patient. La dissection était faite à l’aide d’un ciseau monopolaire et d’une pince fenêtrée bipolaire. Une pince à préhension fenêtrée pouvait être utilisée. Par le trocart assistant, l’utilisation d’une Endo Clinch facilitait l’exposition par mobilisation des lobes et permettait l’utilisation d’agrafeuse mécanique linéaire par le chirurgien habillé. Une progression « fissure first » était toujours réalisée. Le choix de la réalisation d’un curage ou d’un échantillonnage ganglionnaire systématique était à la discrétion du chirurgien. Le curage radical médiastinal était réalisé en bloc dans les deux techniques
2.2. Population
Les données démographiques renseignées concernaient l’âge, le sexe, l’indice de masse corporel, la date de la procédure et les dates d’hospitalisation. Les comorbidités recherchées étaient pour chaque patient : les antécédents de broncho-pneumopathie chronique obstructive, d’hypertension artérielle, d’artérite oblitérante des membres inférieurs, de coronaropathie, de diabète, d’insuffisance cardiaque congestive, d’insuffisance rénale chronique.
Les évènements étudiés concernaient la morbidité et la mortalité intrahospitalières jusqu’à J90 et extrahospitalières jusqu’à un an de suivi. Les complications postopératoires ont été classées en complications respiratoires (pneumopathie, pleurésie, pneumothorax nécessitant un drainage thoracique, atélectasie, exacerbation de bronchite chronique), cardiovasculaires (fibrillation atriale, syndrome coronarien aigu, maladie thromboembolique veineuse), infectieuses (abcès de paroi, infection urinaire) et iatrogènes (hémothorax, fuites aériennes pulmonaires > 5J, rétention aiguë d’urine nécessitant un sondage vésical, paralysie récurrentielle identifiée par un spécialiste).
2.3. Méthodologie statistique
Il s’agit d’une étude descriptive observationnelle. Pour la saisie des données, le logiciel Filemaker Pro Advanced 12.0 v3® (Filemaker Inc., Santa Clara, Californie, États-Unis) a été utilisé afin d’extraire les données de la base EPITHOR® locale. La collection et l’analyse des données ont été réalisées au moyen du logiciel Excel : Mac 2011® (Microsoft® Corp., Remington, Washington, États-Unis). Les variables quantitatives étudiées sont l’âge, l’IMC, le tabagisme, le VEMS, le DLCO, le temps opératoire et le temps d’occupation de salle. Elles sont exprimées en moyennes et écarts types. Les variables qualitatives étudiées sont la tranche d’âge (18-55, 56-64-> 65 ans), l’histoire tabagique (jamais fumé, sevré depuis > 1 an, sevré depuis > 5 semaines, non sevré ou sevré depuis < 5 semaines), les comorbidités (HTA, AOMI, diabète, coronaropathie, insuffisance cardiaque, insuffisance rénale, BPCO), le score ASA (1 à 3), le PS (0 à 2), le stade TNM, la localisation de la tumeur, les complications (respiratoires, cardiovasculaires, infectieuses, iatrogènes), le score de Clavien-Dindo (0 à 5) associé, les taux de mortalité et les réadmissions. Elles sont exprimées en valeur binaire.
Pour la comparaison des deux groupes, le test de Chi2 ou le test de Fisher, le cas échéant, ont été utilisés pour comparer les variables qualitatives. Les analyses statistiques ont été réalisées avec la version du logiciel IBM SPSS Statistics 20.0.0. (IBM Corp. in Armonk, New York, États-Unis).
3. Résultats
Il n’est pas retrouvé de différence significative entre les deux groupes en ce qui concerne les caractéristiques de la population et des tumeurs [tableaux 1 et 2]. la sécurité du patient, la morbimortalité retrouvée est équivalente dans les deux groupes [tableau 3]. Une conversion en thoracotomie a dû être réalisée pour 9 patients (5,5 %), 6 (7,9 %) dans le groupe VATS et 3 (3,5 %) dans le groupe RATS (p = 0,22), en raison de plaies vasculaires (1 [1,3 %] vs 2 [2,3%]), de problèmes techniques (2 [2,6 %] vs 1 [1,1 %]), de symphyse (2 [2,6 %] vs 0) ou de progression oncologique (1 [1,3%] vs 0). Les pertes sanguines reportées sont statistiquement inférieures dans le groupe RATS associées à un moindre recours à l’acte transfusionnel [tableau 4]. Enfin, 6 (8,3 %) patients du groupe RATS contre 1 (1,3 %) dans le groupe VATS ont eu une lobectomie pour une lésion bénigne (p = 0,12).
Tableau 1. Caractéristiques de la population.
Tous (n=163) | VATS (n=76) | RATS (n=87) | p | ||
Âge (moyenne, écart type), an | 63,9 ± 10,9 | 64,9 ± 11,6 | 63,1 ± 10,2 | 0,309 | |
Tranche d’âge | 18-55 ans | 30 (18 %) | 10 (13 %) | 20 (23 %) | 0,249 |
56-64 ans | 57 (35 %) | 27 (36 %) | 30 (35 %) | ||
>65 ans | 76 (47 %) | 39 (51 %) | 37 (43 %) | ||
Sexe | Homme | 88 (54 %) | 38 (50 %) | 50 (58 %) | 0,376 |
Femme | 74 (45 %) | 38 (50 %) | 36 (41 %) | ||
Indice de Masse Corporelle (moyenne, écart type) kg/m2 | 25,1 ± 4,1 | 25,0 ± 4,5 | 25,2 ± 3,8 | 0,687 | |
Tabagisme (moyenne, écart type) PA | 32,0 ± 26,3 | 31,0 ± 26,2 | 33,0 ± 26,5 | 0,63 | |
Historique | Jamais fumé | 40 (32 %) | 24 (32 %) | 16 (18 %) | 0,254 |
Sevré depuis > 1 an | 60 (37 %) | 24 (32 %) | 36 (41 %) | ||
Sevré depuis > 5 semaines | 22 (14 %) | 10 (13 %) | 12 (14 %) | ||
Non sevré ou sevré < 5 semaines | 41 (256 %) | 18 (24 %) | 23 (26 %) | ||
Comorbidités | HTA | 61 (37 %) | 33 (43 %) | 28 (32 %) | 0,139 |
AOMI | 24 (15 %) | 14 (18 %) | 10 (12 %) | 0,213 | |
Diabète | 16 (10 %) | 7 (9 %) | 9 (10 %) | 0,808 | |
Coronaropathie | 15 (9 %) | 8 (11 %) | 7 (8 %) | 0,585 | |
Insuffisance cardiaque | 2 (1 %) | 1 (1 %) | 1 (1 %) | 0,923 | |
Insuffisance rénale | 19 (12 %) | 7 (9 %) | 12 (14 %) | 0,363 | |
BPCO | 37 (23 %) | 15 (20 %) | 22 (25 %) | 0,399 | |
Chimiothérapie antérieure | 28 (17 %) | 10 (13 %) | 18 (21 %) | 0,192 | |
VEMS (moyenne, écart type) % | 90,5 ± 20,3 | 88,5 ± 21,7 | 92,2 ± 19,0 | 0,246 | |
DLCO (moyenne, écart type) % | 64,55 ± 19,4 | 66,8 ± 17,1 | 62,4 ± 21,3 | 0,157 | |
ASA | 1 | 13 (8 %) | 6 (8 %) | 7 (8 %) | 0,192 |
2 | 117 (72 %) | 50 (66 %) | 67 (77 %) | ||
3 | 33 (20 %) | 20 (26 %) | 13 (15 %) | ||
PS | 0 | 144 (88 %) | 67 (88 %) | 77 (89 %) | 0,364 |
1 | 17 (10 %) | 9 (12 %) | 8 (9 %) | ||
2 | 2 (1 %) | 0 (0 %) | 2 (-2 %) |
Tableau 2. Caractéristiques des tumeurs.
tous (n = 163) | VATS (n = 76) | RATS (n = 87) | p | |||||
Stade cTNM | cT1aN0 | 87 | 53 % | 42 | 55 % | 45 | 52 % | 0,705 |
cT1bN0 | 34 | 21 % | 15 | 20 % | 19 | 22 % | ||
cT2aN0 | 24 | 15 % | 8 | 11 % | 16 | 18 % | ||
cT2bN0 | 2 | 1 % | 1 | 1 % | 1 | 1 % | ||
cT3N0 | 9 | 6 % | 5 | 7 % | 4 | 5 % | ||
cT4N0 | 1 | 1 % | 1 | 1 % | 0 | 0 % | ||
cT1aN1 | 4 | 3 % | 3 | 4 % | 1 | 1 % | ||
cT2aN1 | 2 | 1 % | 1 | 1 % | 1 | 1 % | ||
Évaluation ganglionnaire préalable | 7 | 4 % | 4 | 5 % | 3 | 4 % | 0,325 | |
Localisation | Lobe supérieur | 96 | 59 % | 45 | 59 % | 51 | 59 % | 0,721 |
Lobe inférieur | 51 | 31 % | 25 | 33 % | 26 | 30 % | ||
Lobe moyen | 16 | 10 % | 6 | 8 % | 10 | 12 % | ||
Latéralité | Droit | 105 | 64 % | 52 | 68 % | 53 | 61 % | 0,318 |
Gauche | 58 | 36 % | 24 | 32 % | 34 | 39 % |
Tableau 3. Morbimortalité intrahospitalière.
tous (n = 163) | VATS (n = 76) | RATS (n = 87) | p | |||||
Mortalité | À J30 | 0 | 0 % | 0 | 0 % | 0 | 0 % | |
À J90 | 0 | 0 % | 2 | 3 % | 0 | 0 % | 0,125 | |
Complications | Toutes | 67 | 41 % | 33 | 43 % | 34 | 39 % | 0,574 |
Complications respiratoires | Toutes | 25 | 15 % | 12 | 16 % | 13 | 15 % | 0,881 |
Atélectasie | 6 | 4 % | 4 | 5 % | 2 | 2 % | ||
Défaillance respiratoire | 1 | 1 % | 0 | 0 % | 1 | 1 % | ||
Exacerbation de BPCO | 2 | 1 % | 0 | 0 % | 2 | 2 % | ||
Fistule bronchique | 1 | 1 % | 0 | 0 % | 1 | 1 % | ||
Épanchement pleural | 3 | 2 % | 2 | 3 % | 1 | 1 % | ||
Pneumopathie | 11 | 7 % | 6 | 8 % | 5 | 6 % | ||
Pneumothorax | 1 | 1 % | 0 | 0 % | 1 | 1 % | ||
Complications cardiovasculaires | Toutes | 11 | 7 % | 4 | 5 % | 7 | 8 % | 0,48 |
Accident vasculaire cérébral | 1 | 1 % | 0 | 0 % | 1 | 1 % | ||
Embolie pulmonaire | 1 | 1 % | 0 | 0 % | 1 | 1 % | ||
Fibrillation atriale | 9 | 6 % | 4 | 5 % | 5 | 6 % | ||
Complications infectieuses | Toutes | 6 | 4 % | 3 | 4 % | 3 | 3 % | 0,866 |
Infection urinaire | 2 | 1 % | 1 | 1 % | 1 | 1 % | ||
Abcès de paroi | 4 | 2 % | 1 | 1 % | 3 | 3 % | ||
Complications iatrogènes | Toutes | 42 | 26 % | 23 | 30 % | 19 | 22 % | 0,22 |
Œdème laryngée | 1 | 1 % | 0 | 0 % | 1 | 1 % | ||
Hémothorax | 3 | 2 % | 2 | 3 % | 1 | 1 % | ||
Paralysie récurrentielle | 7 | 4 % | 3 | 4 % | 4 | 5 % | ||
Fuite aérienne prolongée | 12 | 7 % | 8 | 11 % | 10 | 11 % | ||
Rétention aiguë d’urine | 17 | 10 % | 7 | 9 % | 4 | 5 % | ||
Ulcère gastroduodénal hémorragique | 1 | 1 % | 1 | 1 % | 0 | 0 % | ||
Insuffisance rénale aiguë | 1 | 1 % | 1 | 1 % | 0 | 0 % | ||
Grade Clavien-Dindo | 0 | 91 | 56 % | 40 | 53 % | 51 | 59 % | 0,224 |
1 | 20 | 12 % | 11 | 15 % | 9 | 10 % | ||
2 | 37 | 23 % | 14 | 18 % | 23 | 26 % | ||
3 | 7 | 4 % | 5 | 7 % | 2 | 2 % | ||
4 | 6 | 4 % | 4 | 5 % | 2 | 2 % | ||
5 | 2 | 1 % | 2 | 3 % | 0 | 0 % | ||
Réadmission | J30 | 5 | 3 % | 2 | 3 % | 3 | 3 % | 0,763 |
J90 | 9 | 6 % | 3 | 4 % | 6 | 7 % | 0,381 |
Tableau 4. Conversions et pertes.
tous (n = 163) | VATS (n = 76) | RATS (n = 87) | |||||
Drainage à J1 | Quantité | 419,4 ± 222,6 | 438,3 ± 218 | 403,4 ± 227,0 | |||
Flow | 112,9 ± 335,0 | 131,1 ± 363,9 | 96,2 ± 307,3 | ||||
Conversion | Problème technique | 3 | 2 % | 2 | 3 % | 1 | 1 % |
Symphyse | 2 | 1 % | 2 | 3 % | 0 | 0 % | |
Plaie vasculaire | 3 | 2 % | 1 | 1 % | 2 | 2 % | |
Progression oncologique | 1 | 1 % | 1 | 1 % | 0 | 0 % | |
Pertes sanguines | < 200 mL | 136 | 83 % | 52 | 68 % | 84 | 97 % |
200-500 mL | 19 | 12 % | 18 | 24 % | 1 | 1 % | |
> 500 mL | 7 | 4 % | 5 | 7 % | 2 | 2 % | |
Transfusion | 6 | 4 % | 5 | 7 % | 1 | 1 % |
Concernant la qualité oncologique des exérèses, les patients ont été suivis par l’équipe chirurgicale pendant une durée moyenne de 17,1 ± 7,1 mois dans le groupe VATS contre 14,6 ± 8,6 mois dans le groupe RATS. Les résultats oncologiques sont présentés dans le tableau 5. Il est noté une tendance en faveur de la réalisation d’échantillonnage ganglionnaire dans le groupe RATS, ainsi qu’une différence significative pour le nombre de sites N2 et de ganglions N2 prélevés lors de la lymphadénectomie en faveur du groupe VATS. Tous les patients avec une suspicion d’envahissement ganglionnaire cN1 ou cN2 ont eu une évaluation ganglionnaire invasive préopératoire. Une proportion similaire de réévaluation à la hausse du stade ganglionnaire après chirurgie est retrouvée dans les deux groupes. Le taux de progression de la maladie néoplasique était identique à 1 an dans les deux groupes.
Tableau 5. Résultats oncologiques.
tous (n = 163) | VATS (n = 76) | RATS (n = 87) | p | |||||
Lésion | Tumeur primitive | 143 | 88 % | 69 | 91 % | 74 | 85 % | 0,15 |
Tumeur secondaire | 12 | 7 % | 6 | 8 % | 6 | 7 % | ||
Lésion bénigne | 8 | 5 % | 1 | 1 % | 7 | 8 % | ||
Lymphadénectomie | Nombre de site N2 (moyenne ± écart type) | 3,56 ± 1,28 | 4,25 ± 1,18 | 2,95 ± 1,03 | 0,0001 | |||
Nombre de ganglions N2 (moyenne ± écart type) | 7,94 ± 5,78 | 9,92 ± 5,41 | 6,24 ± 5,58 | 0,0001 | ||||
Nombre de ganglion N1 (moyenne ± écart type) | 6,24 ± 3,94 | 6,92 ± 4,213 | 5,66 ± 3,608 | 0,041 | ||||
Curage | Curage radical | 136 | 83 % | 68 | 89 % | 68 | 78 % | 0,054 |
Sampling | 26 | 16 % | 7 | 9 % | 19 | 22 % | ||
Aucun curage | 1 | 1 % | 1 | 1 % | 0 | 0 % | ||
Upstaging | Aucun | 140 | 86 % | 64 | 84 % | 76 | 87 % | 0,95 |
N0-> N1 | 8 | 5 % | 4 | 5 % | 4 | 5 % | ||
N0-> N2 | 11 | 7 % | 6 | 8 % | 5 | 6 % | ||
N1> N2 | 4 | 2 % | 2 | 3 % | 2 | 2 % | ||
Statut évolutif à 1 an | Non évolutif | 154 | 94 % | 70 | 92 % | 84 | 97 % | 0,215 |
Évolutif | 9 | 6 % | 6 | 8 % | 3 | 3 % |
Par ailleurs, il est montré également une augmentation significative dans le groupe RATS de la durée opératoire moyenne (134,5 ± 37,7 min vs 154,2 ± 47,3 min, p = 0,004) et du temps d’occupation de salle moyen (250,3 ± 47 min vs 281,6 ± 56,1 min, p < 0,0001). Il existe en revanche une tendance à une diminution de la durée moyenne de séjour dans le groupe RATS (8,2 ± 7,2 jours vs 6,7 ± 2,5 jours, p = 0,07) associée à une tendance à une réduction de la durée moyenne de drainage dans ce même groupe (4,4 ± 4,7 jours vs 3,4 ± 2,0 jours, p = 0,08).
4. Discussion
En termes de risque encouru par le patient, aucune étude de registre ni aucune méta-analyse n’a mis en évidence de différence à propos de la morbidité associée à ces deux techniques [1-4]. Certains auteurs montrent une tendance à une diminution de la mortalité, de la durée de séjour et du recours aux transfusions sanguines en cas de lobectomie RATS [5,6]. Nous avons observé une tendance similaire. D’autres rapportent au contraire une augmentation significative des saignements et des complications cardiovasculaires dans le groupe RATS [7]. Intuitivement, le phénomène de la courbe d’apprentissage peut expliquer ces différences. C’est pourquoi nous avons conduit cette étude afin d’apprécier l’impact que pouvait avoir le démarrage d’un programme robotique sur les résultats d’une équipe académique et de haut volume d’activité, faisant état d’une expérience de plus de 20 ans en chirurgie thoracique mini-invasive [12].
Nos résultats démontrent principalement que la morbidité propre à l’introduction de la RATS a été maîtrisée. Cette notion est retrouvée dans la littérature. En effet la courbe d’apprentissage de la technique RATS est plus rapide que celle de la VATS : de l’ordre de 15-20 lobectomies RATS contre 30-40 lobectomies VATS [8,9]. Cette rapidité d’apprentissage s’explique par l’existence d’une formation standardisée et pertinente en RATS (clinical observation, proctoring) alors qu’elle est centre dépendant en VATS, et également par le confort apporté par le robot : vision 3D, précision et reproduction fidèle de la technique de chirurgie ouverte. Toutefois cette courbe d’apprentissage semble varier en fonction de l’habilité et de l’expérience en chirurgie minimalement invasive du chirurgien [10,11]. Il est intéressant de noter qu’ici, le chirurgien RATS n’avait qu’une expérience personnelle limitée de la lobectomie VATS, mais a bénéficié en revanche d’une expérience d’équipe conséquente.
En effet, ce programme s’inscrit dans un cadre historique de la chirurgie oncologique mini-invasive [12]. Depuis les travaux de R. Giudicelli, jusqu’à la pratique quotidienne de la lobectomie totalement VATS, 20 ans d’expérience de centre ont été mis à profit pour le développement de ce programme de chirurgie robotique. En 1993, dans cette même équipe, les durées médianes de séjour pour une lobectomie vidéo-assistée était de 8 et 12 jours contre 10 et 15 jours pour une lobectomie par thoracotomie latérale [12]. En 2013, ces chiffres ont été divisés par trois, illustrant la pratique « fast track » au quotidien [12].
D’un point de vue oncologique, le pronostic des lésions de stade localisé tient principalement au statut ganglionnaire. R. Cerfolio suggère que le curage ganglionnaire est plus aisé par technique RATS [11], ce que nos résultats ne confirment pas puisque l’évaluation ganglionnaire médiastinale semble avoir été plus approfondie par VATS que par RATS. Dans les séries reportées précédemment, malgré une évaluation ganglionnaire médiastinale dans près de 85 % des cas, il existe une sous-évaluation du stade ganglionnaire préopératoire dans près de 8 % pour les tumeurs de stade cI [5]. Avec une moyenne de ganglions prélevés comparable aux précédentes séries, les curages réalisés par VATS ou RATS ont répondu aux recommandations actuelles de 3 sites N2 et 3 ganglions N1 dans la grande majorité des cas [13]. Dans la mesure où il s’agit de 2 chirurgiens différents et non d’un panel d’opérateurs, on peut affirmer que les ganglions ont été réséqués pour l’essentiel en bloc tant en VATS qu’en RATS.
D’un point de vue chirurgical, la prévalence des lobectomies « blanches » retrouvant au final une lésion bénigne (4,9 %) est en deçà des différentes expériences rapportées dans la littérature, comprises entre 9 et 12 % [14,15]. Elle a été cependant plus élevée dans le groupe RATS sans autre explication évidente que l’absence de palpation possible et donc de décision de lobectomie d’emblée en cas de suspicion de cancer selon l’information donnée au patient. Le taux de conversion retrouvé ici est en ligne avec les données de la littérature avec un taux de 4,7 %-10 % pour la RATS et 0 %-15 % pour la VATS [15–17].
Il est cependant probable que la gestion du saignement peropératoire dépend de l’expérience du chirurgien, de la gestion de l’équipe et de la mémoire du centre en ce domaine.
En dépit de l’homogénéité des 2 groupes soumis à comparaison, il persiste un risque de biais qui reste la limite inhérente à toute étude monocentrique rétrospective, même si elle a été basée sur un recueil prospectif des données, comme c’est le cas dans la nôtre. Dans cette étude comparative non randomisée sur deux traitements, les deux groupes comparés sont équilibrés sur leurs caractéristiques initiales principales [tableaux 1 et 2]. Les indications de traitement par lobectomie VATS ou RATS ayant été identiques, le risque de biais semblait suffisamment contrôlé pour éviter une méthode statistique d’appariement. À l’homogénéité des populations de patients comparés s’est ajoutée l’homogénéité des techniques chirurgicales : un seul chirurgien, approche postérieure et 3 trocarts dans le groupe VATS, un seul chirurgien et technique 3 bras dans le groupe RATS. L’analyse de la littérature est en effet bien difficile en raison de la multitude de variantes décrites tant en VATS qu’en RATS.
5. Conclusion
L’utilisation du robot dans notre spécialité est en plein essor mais demeure pour l’instant limitée à quelques centres, pour la plupart académiques et de hauts volumes d’activité. La sécurité pour le patient et la qualité oncologique associée à cette technique semblent tout à fait comparables à celles issues de la technique VATS. L’intérêt médiatique, la pression commerciale et l’attrait de l’innovation pour le chirurgien et le patient sont actuellement les moteurs principaux de la diffusion de cette technologie. Il est très probable que les évolutions technologiques en améliorent l’ergonomie et participent de la maîtrise des coûts. Le défi supplémentaire à relever est indiscutablement celui de l’enseignement et de l’apprentissage de cette chirurgie. Et dans ces domaines, la RATS dispose d’atouts majeurs, pour l’heure absents en VATS : la simulation sur modèles virtuels et la double console.
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PMid:27344281
Aucun financement n’a été obtenu pour ce travail. C. Doddoli déclare percevoir des honoraires pour des missions d’expertise et de mentorat pour Intuitive Surgery®. P. Thomas et C. Doddoli déclarent percevoir des honoraires pour des missions d’expertise et de conseil pour Medtronic® et Ethicon®.
Cet article est issu d’un mémoire de DESC.
Date de soumission : 01/10/2016. Acceptation : 02/10/2017. Prépublication : 02/10/2017.